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2 7 7
LA COMMERCIALISATION DU I’OISSON EN CASAMANCE
Christian CHABOUD (1)
Moustapha KE:BE (2)
(ii Chercheur de I'ORSTOM, en poste au CRODT.(ISRA) BP. 2241 - Dakar (Sénégal).
(21 Chercheur au CRODT (~SRI) ~p. 22.4:1 - Dakar (Sénégal).

-_
2 7 8
R E S U M E
La commercialisation du poisson débarqu6 pas la pê-
che artisanale
en Casamance se fait sous deux formes : en
frais et en transformé, La commercialisation en Erais,dés-
tinée essentiellement au marché régional,, est
limitée par
des contraintes
telles que l’enclavement, ke manque de
glace, l’absence d’infrastructures de stockage. Ces con-
traintes expliquent
9. ‘absence d’un véritable mareyage en-
tre la Casamance et le reste du Sénégal, La transformation
artisanale, par
contre, absorbe les trois quarts des dé-
barquements et approvisionne des circuits longs vers les
autres régions du Sénégal. et même
vers les autres pays a-
fricains. Bien que subissant moins
de contraintes que la
commercialisation en frais,
l a distri’bution d u p o i s s o n
transformé connaît des difficultés
liées à la qualité des
produits. En 1ӎtat
actuel des circuits de commercialisa-
tion, il est à craindre que les différents projets de dé-
veloppement des pêches prévus en Casamance auront des dif-
ficultés à atteindre oeurs objectifs
si les contraintes
qui. pèsent sur la di.str<bution ne sont. pas levées.
A H S T R A C ‘1
The marketing of small scale lishery landings in the
.casamance
region of Senegal
is made through two ways :
fresh and processed fish
trade, Fresh fish commercializa-
tion is oriented to the regional market and is
limited by
heavy constraints such as bad geographic
communications,
lack of cold storage capacities and ice. These constraints
explain the absence
of a real trade system for fresh fish
between Casamance and trie other .garts of the countrg.&the
othar side, traditionnnl nrocessinP industry absorbs 75 2.
of total l,%ndipgs. It furnishes dried
f i s h to ,long a n d
complex marketing channels
oriented to national màrkets
and african export markets.
Although less depending from
physical constraints than
fresh fish marketing, processed
f ish trade
encounters difficulties due to poor products
quality. IFJith the current situation of fish marketing, the
fishery development projects supposed to be implemented in
Casamance have little chance to achieve their goals,

2 7 9
I N T R O D U C T I O N
La commercialisation des débarquements de la pêche artisanale en Casa-
mance se réalise sous deux formes : le mareyage en frais destiné essentiel-
lement aux marchés locaux et la commercialisation en poisson transformé qui
alimente des circuits plus longs. Dans la présentation qui va suivre nous
n'aborderons pas les problèmes relatifs à la commercialisation de la crevet-
te, essentiellement tournée vers des marchés extérieurs.
Les informations
utilisées, en ce qui concerne le poisson frais, ont pour origine une enquête
ponctuelle réalisée en 1984 (CHABOUD, KEBE,
1984). Pour le poisson transfor-
mé, nous avons largement puisé dans les résultats des travaux de Marie-Chris-
tine CORMIER (1985). On ne prétend pas ici faire une description et une ana-
'
lyse exhaustives et détaillées de la commercialisation mais plutôt faire res-
sortir les éléments les plus significatifs.
Dans une première partie, nous ferons le point sur l'état des connaissan-
ces sur la commercialisation des débarquements de la pêche artisanale. On ex-
posera ensuite les principaux problèmes et contraintes qui pè.sent sur le dé-
veloppement de ces activités.

1, L ' E T A T
D E S
C O N N A I S S A N C E S
1.1, LE ROLE DU POISSON DANS LA NUTRITION EN CASAMANCE.
La plus grande partie des débarquements en Casamance est destinée à la
satisfaction des besoins alimentaires locaux.
Une enquête réalisée par I'O-
RANA en 1979 indique une consommation moyenne quotidienne par tête égale à
66 g de poisson dont 62 de poisson frais. Les produits d'origine halieutique
représentent 15 % du total des protéines consommées et 67 % des protéines
d'origine animale, On observe une importante variabilité de la consommation
selon la situation ggographique. Ainsi la consommation s'élève à 132 g en zo'-
ne maritime pour chuter à 31 g dans Les zones éloignées des points de débar-
quements.
1.2. LA COMMMERCIALISATION DU POISSON FRAIS
1.2.1, Les circuits et les marchés (fig. 1)
On peut distinguer circuits courts et circuits longs. Les premiers s'ins-
crivent essentiellement dans l'espace économique régional casamançais,
voire
sous-régional
: approvisionnement des hôtels par les pêcheurs ou des commer-
çants spécialisés, des petits marchés (Oussouye, Bignona) par des commerçants
utilisant un équipement très réduit. Les seconds sont le fait d'agents plus
spécialisés qui disposent de moyens techniques plus élaborés (véhicules, piro-
gues glacières). Ils approvisionnent les marchés de Ziguinchor et de Moyenne
et Haute Casamance (Kolda, Vélingara) ainsi que des marchés d'autres régions
(Kaolack, Dakar) OU ils écoulent des produits de haute valeur commerciale
(brochets, capitaines). Les circuits longs peuvent faire appel à une organisa-
tion complexe combinant transport par voie fluviale ou maritime et par voie
terrestre (exemple des pêcheurs nyominka de Saloulou qui expédient en pirogue
glacière les brochets jusqu'à Ndangane Sambou au Sine Saloum puis jusqu'à Da-
kar par la route).

R E P U B L I Q U E R E
GUINiE
BISSALi
FIG. l.- Principaux Etarchés au poisson de Çasamance,

2 8 1
1.2.2. Les moyens techniques de la commercialisation
Pour les circuits courts, les moyens techniques utilises sont souvent très
réduits, le poisson
est mîs en panier puis transporté :i vklo ou en trans-
port en commun. En raison des faibles distances parcourues, le glaçage est
inexistant. Sur les circuits longs, le transport se fait en camionnettes
bâchées parfois équipées de caissons isothermes “artisanaux”. La majorité
des mareyeurs travaillant sur des circuits longs disposent de leur propres
véhicules. Le poisson est conditionné en vrac ou en panier. Il est mélangé
à de la glace concassée quî vient le plus souvent de l’usine SEFCAde Ziguin-
char, ce qui pose des problèmes de rupture de stock lors des pics d’activi-
té de la pêcherîe crevettière. Enfin certains mareyeurs disposent de caisses
isothermes sur les plages de Kafountîne et Dîembering afin d’y stocker la
glace et le poisson entre deux passages de leurs véhicules.
1.2.3. Les acteurs de la commercialisation en frais
a) Les mareyeurs : en 1984, 14 mareyeurs exerçaient leur activité dans
les départements d’0ussouye et de Bignona. Ce sont des commerçants spéciali-
sés qui disposent le plus souvent de leur propre véhicule et ‘opèrent sur des
circuits longs. Parmi eux, on notait la présence d’un seul Jola
--’ Les autres
mareyeurs étant originaires de la région du Fleuve (Walo-Walo, Tukulor), ou du
Sine Saloum (Nyominka). La faible implication des populations locales dans le
mareyage est peut-être en relation avec l’intégration récente des iola dans
les activités de pêche commerciale ainsi qu’à leur maintien en dehoxes cir-
cuits commerciaux jusqu’à une époque récente.
b) Les “bana-bana” : à Ziguinchor, au nombre de 7, ce sont des semi-gros-
-:-
sistes qui travaillent pour le compte des mareyeurs sur les points de débarque-
ment; Ils collectent le poisson auprès des piroguiers avec lesquels existent
souvent un système “d’abonnement”. Tout comme les mareyeurs, ils sont. le plus
souvent originaires d’autres régions (Sine Saloum, Fleuve). Bien que souvent
déjà anciens dans la profession, ils ne disposent pas d’assez de capital pour
devenir de véritables mareyeurs. Dans les autres localités les “bana-bana” réa-
lisent un micro mareyage en se déplaçant à bicyclette ou en transport en com-
mun pour alimenter les marchés secondaires. Leur volume d’ ach,at quotidien est
réduit : de 50 à 80 kg.
c) Les détaillantes : présentes sur les marchés, elles aissurent la vente
auprès des ménagères. A l’exception de la halle du marché Saint-Maur de Zi-
guincher où elles disposent d’étals en dur, elles travaillent le plus souvent
à même le sol, le poisson étant disposé sur des toiles de sac.
1.2.4. La formation des prix du poisson frais
a) Sur les plages, à l’exception des soles et des langoustes vendues au
kg, la vente aux mareyeurs se fait généralement à l’estime : le poisson est
proposé à la pièce OU en tas. Par contre l’approvisionnement des hôtels fait
l’objet d’accords annuels passés avec les pêcheurs dans lesquels sont
stipu-
lés des prix fixes par catégories d’espèces.
Pour le mois de juin 1984, les prix moyens au débarquement sont présen-
tés au tableau 1. Trois groupes d’espèces peuvent être distingués en fonction
de leur prix de vente :
- les espèces de “luxe” destinées essentiellement aux usines ou. au mar-
ché hôtelier : soles (300 f/kg) et langoustes (2500 f/kg) V

2 8 2
- les espèces communes, les plus importantes en quantité, destinées en
priorité au marché casamançais pour la consommation locale et la transforma-
tion artisanale : mulets, tilapies, ethmaloses, requins, raies, silures ; les
prix sont inférieurs 3 70 f/kg.
- enfin des espèces nobles de grande taille qui peuvent faire l'objet
d'expéditions vers d'autres régions o brochets, courbines, capitaines (prix
supérieurs a 150 f/kg).
En Casamance deux facteurs peuvent être 3 l'origine d'un niveau rela-
tivement faible des prix :
- la dispersion et l'isolement des .points de débarquement limitent le
nombre d'intermédiaires présents sur les plages 'et donc. la concurrence à
l'achat.
- l'existence d'une forte concentration verticale entre commercialisa-
tion et pêche : la majorité des mareyeurs sont d'anciens pêcheurs qui possè-
dent encore des unités de pêche. Ils participent sous forme de prêts à l'é-
quipement des pêcheurs et reçoivent en retour une priorité pour l'achat du
poisson. Il faut neanmoins se garder d'émettre un jugement trop négatif sur
ce système de crédit informel qui pallie en partie les carences du système
de crédit officiel a la pêche.
b) Sur les marchés : la vente en gros s'effectue par paniers pour les
petites espèces, 3 la pièce pour les individus de grande taille. La vente de
détail est réalisée par tas (Ziguinchor, Oussouye) ou bien ?i la pesée (Sé-
dhiou, Kolda, Bignona). Très souvent les commerçants sont réticents pour ven-
dre le poisson à la pesée car cela va de pair avec un contrôle des prix et
l:iinstauration de prix rigides alors que le marché du poisson est avant tout
caractérisé par de fortes fluctuations quotidiennes de l'offre.
1.3. LA TRANSFORMATION ARTISANALE ET LA COMMERCIALISATION DU POISSON SEC
Si pour l'ensemble du Sénégal, la transformation absorbe près de 40 X
des débarquements de.la pêche artisanale, il semble que ce pourcentage soit
beaucoup plus important en Casamance,
de l'ordre de 75 X (CORMIER, 1985).
C'est une activité présente dans tous les points de débarquement de Basse
Casamance.
1.3.1. Les centres de transformation (fig. 2.)
Dans les grands centres de débarquement sur la façade maritime et dans
l'estuaire, la transformation artisanale est une activité économique spécia-
lisée, 03 sont impliq,ués de nombreux transformateurs étrangers à la région
(serer, nyominka, wolof, guinéens, lebu). Par contre dans les villages jola
-
-
pratiquant la pêche, la transformat=est une activité domestique plusdiffu-
se et donc difficile B quantifier.
1.3.2. Les techniques de transformation
Elles ont connu une évolution récente en raison des influences allochtones
consécutives à l'implantation de pêcheurs étrangers à la région.
Traditionnellement les jola pratiquent la conservation du poisson dans
le sel et le citron, le fumage-séchage des mulets, des tilapies et des huîtres.
A l'exception des huîtres, ces produits sont essentiellement destinés 3 l'au-
toconsommation ou il. une vente locale.
L'arrivée de commerçants et pêcheurs "nordistes", la création de réseaux
commerciaux vers d'autres régions ont introduit des techniques répondant mieux
à la demande des consommateurs sénégalais des autres régions, peu portés sur
le poisson fumé :

2 8 3
M
3 0
lo
’ C L A I E S
FIG. 2,,-..Centres de transformation artisanale du
poisson en Casamance (février 19851.
(source M.C. CORMIER 1985)

Lt-34
- le guedj, ou fermente-Seché est devcn’; I.a principale production ca-
samançaise. Produit a partir de kons (Arius? Y ?,eur (courbiner ( fete (capi-
tainej , il est très: apprécié Sur-G marché dakarois OU. le I.abel”(dasamance’”
est synonyme de qualité.
- Le tambadiang, est obtenu avec du mü1e.t Ecaillé, lavé à l’eau de mer
puis séché au soleil même ‘le sol, C’est une specialite des pêcheurs nyomin-
ka qui pêchent le mulet à la serine de plage. 11 est surtout consommé eh mi-
lieu rural (Sénéga’l oriental 9 Fleuve, Casamance) ~
Enfin, certaines techniques se sont développées pour satisfaire la de-
mande d’autres pays africains.:
- le sali (salé-séché) 9 preparé à part:1 deS raies et des requins.
- le &rah (fumé), prépare à partir deS raies, des requins, des Arius,
-
-
est obtenu après avoir exposé à l.a fumée pendant trois jours les morceaux
de poisson découpéc; et nettoyés, C’est une spécialité des transformateurs
guinéens qui viennent en campagne en Çasaman.ce et réexpédi.ent le produit
dans leur pays d’origine,
- les ailerons de requins sont destinés au marche d’Extrême-Ori.ent par
1 ‘intermédiaire dc commerçants établi S en Gambie.
1.3.3. Les agents de la filière du poisson transforme
.--
. . ~
-3.
Différents types d’agentS peuvent être disti.ngues :;eJ.on leur degrè de
spécialisation et d’intégration de la filière du poisson transformé.
- transformateurs : 16 Z-
- commerçants : 22 %
- transformateurs et commerçants : 48 Y!
- pêcheurs, transformateurs : 5 %
- pêcheurs y transformateurs, commerçants : 9 Z
Le degré d’intégration maximum se situe donc entre transformation et
commercialisation. Ceci peut s’expliquer par Ie fait que 1;:~ commercialisa-
ti.on est l’act ivitC la mieux rémunérée dans la filière du poisson transformé.
Dans les grands centres, le nombre de transformateurs a pu être estimé
à 950, auxquels ii faut ajouter la main-d’cellvre supplémentaire, surtout fé-
min ine , recrutée dans les villages,
La division sexuelle du travail est tres nette au stade de la transfor-
mat ion où les femme.s représentent. 69 % des emplois. Pour l’ensemble de la
filière,
la, réparti.tcon est plus équilibrée, candis que le commerce spéciali-
se est plutôt prati.qué par les hommes,
1.3.4. Prix et circuits de commercialisation
-
-
-
-
-
Différents ePéments interviennent dans La formation des prix : la tail-
le du poisson, 1 c. 1 ieu de vente, les mod.alites de vente (entier, par morceau).
Les prix au producteur et de gros en Casamance et de détail à Dakar
pour les principaux produits transformés, sont les suivants :

2 8 5
-
,fi
Saint. 1 oui s
Tambacoundr
:
0
G
H
A
N
A
MACI
C O T E O’iVOIR E
N I G E R I A
ZAïRE

\\
G U I N É E
I
.
0
0
100 km
Principaux
marchés
L
1
0
Marchis
Casa mince
Oestinatson 1 g r o s s e u r drs flàches proportionnella
a u x v o l u m e s ecOul~S j
FIG. 3.- Destination du poisson transformé de la Casamance.
(Source M.C. CORMIER 1985)

2 8 6
-_ .--- --_-e
prix
prix
prix
Type de produit
Producteur
gros
Détail
Casamance
Casamance
Dakar
-.
Guedj beur
400-600 F
500-700 F
1000-1300 F
Guedj kong
300-500 F
Tambadiang
70-200 F
200-250 F
300- 500 F
I,.
Sali requin
500-600 F
Métorah
50 F
70 F
Ailerons de requin
1500-5000 F
(n.b, : 1 F CFA : 0.02 F Français)
A la différence du poisson frais, essentiellement destiné au marché local,
la transformation a,rtisanale génere des flux commerciaux nlus lointains (fig. 3).
Au Sénégal,:les produits transformés de Casamance sont présents sur tous les
marchés urbains et largement diffusés en milieu rural. Le Guedj -heur de Casa-
mance est particulièrement prisé sur les marchés urbains où il est vendu à un
prix élevé: Le tambadiang est destiné 3 la fois aux marchés urbains et ruraux.
C'est un produit particulièrement apprécié dans la région du Fleuve où il peut
être employé comme substitut au poisson frais.
Les marchés extérieurs sont les
principaux débouchés pour le métorah (Guinée, Xali), le sali (Ghana, Zaïre,
Côte diIvoire, Nigéria), les ailerons de requins (Extrême-Orient via la Gambie)
2 *
C O N T R A I N T E S E T
P R O B L E M E S
D E
D E V E L O P P E M E N T
2.1. LE POISSON FRAIS
2.1.1. L'enclavement
Un.des principaux problèmes limitant à I"henre actuelle le développement
de la commercialisation du poisson frais et donc indirectement celui de la pê-
che artisanale réside dans les difficultés de communication :
internes à la rGgion : de nombreux points de débarquement ne sont pas ac-
cessibles par voie terrestre ou ne le sont que difficilement. Diogué, Pointe-
Saint-Georges, Saloulou expédient leurs prises par pirogue. Kafountine, prin-
cipal point de débarquement régional n'est pas accessible par une route gou-
dronnée, de même qu'Elinkine,
ce qui limite leur accès en saison des pluies.
inter-régionales : les communications avec les autres régions du Sénégal
sont handicapées par les difficultés de passage au bac de Gambie qui découra-
gent les mareyeurs en rais'on du temps d'attente parfois très long et des ris-
ques que c'ela présente pour leur chargement. Ces difficultés de communication
avec le reste du pays sont un handicap sérieux pour le développement des pê-
ches en Casamance. La capacité d'nbsorptionsupplémentaire dumarch? casamançais
étant limitée à court terme, l'accès a des marchés extérieurs 2 la région est
une condition nécessaire à toute augmentation importante des prises. Or le
sur-coût qui pèse ,sur le poisson frais de Casamance pour l'accès aux autres

2 8 7
marchés régionaux limite sa compétitivité par rapport aux productions des au-
tres régions 3 vocation halieutique (Grande-Côte, Cap-Vert, Petite-Côte).
2.1.2. L’absence d’aménagement des sites de débarquement :
Les commerçants ne disposent pas ‘d’aires adaptées au stationnement de
leurs véhicules et au conditionnement de leurs produits. Les conditions ac-
tuelles de manutention du poisson sur les plages et lors du chargement des
véhicules sont souvent à l’origine de la mauvaise qualité des produits offerts
au consommateur ,
2.1.3. Des véhicules peu adaptés :
Les véhicules utilisés par les mareyeurs,3 l’exception de quelques-uns
équipés de caisses isothermes, ne sont pas adaptés au transport du poisson
par une température ambiante élevée, Ceci entraîne des coûts de glaçage éle-
vés sur les trajets à longue distance. ‘L’équipement des mareyeurs en véhicules
adaptés est une composante indispensable à tout programme global de dévelop-
pement des pêches dans la région.
2.1.4. Les difficultés de financement pour le renouvellement et l’achat
de nouveaux équipements
Les intermédiaires sont confrontés à un manque chronique de moyens de
financement pour s’équiper. Or les conditions de garantie requises par le
système bancaire pour obtenir des prêts sont très rigoureuses et très diffici-
les 8 remplir par les mareyeurs. Il conviendrait d’envisager la mise sur pied
de systèmes de crédit adaptés.
2.1.5. La chaîne du froid :
La situation de la chaîne du froid en Casamance est relativement sembla-
ble à celle qui prévaut dans les autres régions. Tout d’abord un constat sur
l’insuffisance de la disponibilité de‘glace et de moyens de stockage sous
froid. En Casamance, à notre connaissance, seule l’usine SEFCA fournit de la
glace aux mareyeurs , ces derniers se plaignant d’être confrontés à des ruptu-
res de stock lorsque la pêche creaettière est en pleine activité. Le second
problème tient aux difficultés de gestion qu’ont connues les diverses infras-
tructures de froid mises en place dans le cadre de projets publics, difficul-
tés qui ont conduit le plus souvent à leur fermeture. Il semble que trop sou-
vent l’implantation de ces investissements a été choisie sans études préala-
bles et que les modalités de gestion pas assez rigoureuses ne leur ont jamais
permis d’atteindre le seuil de rentabilité. Les responsables du nouveau com-
plexe de Ziguinchor, vital pour la mise en place de nouveaux projets de déve-
loppement des pêches, devront tirer profit des expériences passées pour évi-
ter les difficultés de gestion qu’ont connues des projets similaires,
2.2. LE POISSON TRANSFORME
En raison de son caractère moins périssable, le poisson transformé de Ca-
samance ne connait pas les mêmes contraintes d’écoulement que le poisson
f r a i s : il concurrence sans difficulté les produits des autres régions sur
les marchés dakarois. On est en droit de se demander si, à court terme du
moins, la transformation ne doit pas être le débouché prioritaire des débarque-
ments supplémentaires occasionnés par les projets actuellement mis en place.
Certaines difficultés doivent néanmoins être soulignées.

2.2.1. Le faible contrôle des agents économiques nationaux sur les
---A
circuits d'exportation --
Comme nous l'avons vu précédemment, les circuits a l'exportation sont
souvent contrôlés par des commerçants étrangers qui interviennent au stade
le plus lucratif de la filière, Les commerçants sénégalais manquent d'infor-
mations sur les marchés étrangers africains et sur les réglementat&ns (sa-
nitaires en particulier) qui régissent les importations dans ces pays.
2.2.2. Le problème de la qualité
L'emploi de produits insecticides toxiques pour limiter l'infestation
par les larves d'insectes, bien qu'interdit, est couramment pratiqué. Il con-
viendrait peut-être d'entreprendre des recherches pour identifier un produit
de substitution moins toxique (comme cela a déja été fait lors du projet
MOPTI au Mali (FAO, 1984).
2.2.3. Le problème du transport vers Dakar
Sans être aussi difficile que pour le poisson frais, l'accès au marché
dakarois est coûtew depuis que l'immobilisation du navire qui assure la liai-
son hebdomadaire Dakar-Ziguinchor oblige les commerçants à utiliser des trans-
ports en cormnun routiers.
CONCLUSION
La présentation qui vient d'être faite sur la commercialisation du pois-
son en Casamance et ses problèmes a été volontairement limitée aux faits les
plus saillants sans trop aborder les aspects quantitatifs. En effet nos con-
naissances dans ce domaine sont encore limitées dans la mesure où-les études
de sciences humaines réalisées dans le cadre du programme Casamance n'ont pas
abordé de façon explicite les problèmes de commercialisation (surtout pour
le poisson frais), IJne étude comparable à celle déjà entreprise dans les autres
régions du Sénégal (suivi des prix et des flux dans un échantillon de lieux de
débarquement et de marchés) serait précieuse pour affiner notre connaissance
en ce domaine et fournir des éléments utiles .!? I.a prise de décision.
B I B L I O G R A P H I E
CORMIES (M.C.), 1985,- Quelques éléments sur la filière du poisson transformé
de Casamance. In CRODT "Approche globale du système pêche dans les ré-
gions du Sine Saloum et de la Casamance", Août 1985, pub. restr. Cent.
Rech. océanogr._ Dakar-Thiaroye D 509-539.
-
FAO, 1984.- Prévention des pertes de poisson, FAO Dot. tech. Pêches, 219,84
pages.
KEBE (M.), CHABOUD (C.), 1984.- Le poisson dans les régions d'OUSSOUYE et
BIGNONA. Evalualtion du projet. de développement intégré des pêches en
Basse Casamance. Dot. int. Cent. Rech. Océanogr. Dakar-Thiaroye, 93 pages.
---

Tableau l.- Prix au débarquement pour les principales espèces en Casamance
entre juin 1984 et février 1985 (F CFA/KG).
ESPECES
Ethmalose
Mulet
Tilapie
Drépane
Langouste
Sole
Maquereau-bonite
l
-
l
-
Requin
18
Raie
13,7
Courbine
)
-
228,25
Silure
/
-
._
50
I
-
Carpe blanche
I
175,7
1
-
(sompat)
Otolithe
l
-
i
215,5
/
_i
1
r

2 9 0
1s 1 s c u s s 1: 0 N
BABOU.- Au sujet du crédit informel, si on se rapporte à ce qui se passe pour
le commerce du charbon de bois, les rapports producteurs-mareyeurs sont
probablement moinsidylliques qu'il n'y paraît dans le texte et il y a
des raisons de suspecter les mareyeurs pour trois raisons : ils perçoi-
vent des intérêts, ils bénéficient d'une obligation de vente et ils dé-
terminent quasi unilatéralement les prix, Le résultat, c'est que les
prix sont trop élevés sur les marchés.
Ne faudrait-il pas organiser un
circuit plus officiel qui remplaçerait cesintermédiaires?
CHABOUD.- Cette idée est fort répandue. Les intermédiaires sont vus comme des
exploiteurs prélevant des marges trop importantes au détriment à la fois
des producteurs et des consommateurs. En fait, quand on analyse le pro-
jet CAPAS conçu pour résoudre ces problèmes d'intermédiaires et de cré-
dit informel, on se rend compte qu'un circuit très coûteux a été mis en
place (chaîne du froid) .et qu'en définitive les résultats ont été déce-
vants ; il n'arrive pas à commercialiser la totalité des poissons et il
n'offre, pas de meilleurs prix que le systè.me traditionnel ni au producteur,
ni au consommateur. D'ailleurs le système traditionnel a très bien résis-
té à la concurrence du système officiel,
SAMB.- 75 % du poisson serait transformé. Ce chiffre n'est-il pas exagéré ?
NDAW.- La transformation est effectivement très importante. Dans certains sec-
teurs de la Casamance, au sud-ouest notamment, le pourcentage atteint
même 80 %. Cela est dû à lsenclavement des lieux de débarquement.
En ce qui concerne l'organisation de la pêche on a seulement créé jus-
qu'a présent des coopératives d'avitaillement mais on n'a pas encore
trouvé de système efficace pour la commercialisation.