5 3 SOCIOLOGIE CONTEMPORAINE DE LA PECHE ET ...
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SOCIOLOGIE CONTEMPORAINE DE LA PECHE ET
RAPPORTS
PÊCHE-AGRICULTURE EN
CASAMANCE
Maritew Chimère DIAW (1)
-
(1) Sociologue de l'ISRA, affecté au Centre de Recherches Océanographi-
ques de Dakar-Thiaroye, BP. 2241 - Dakar (Sénégal).

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R E S U ,,M E
Il y a près de 4360 unités de pêche en Ca.samance, em-
ployant à., peu près 9460 pêcheurs à temps partie 1 ou
à
temps plein.
Bien que devenus largement majoritaires d.ans
le sec-
teur (85 % des unités recensées) les pêcheurs autochtones
mandingue, ;joo La, halant,
baynunk, pZZ, manjuk
- sont
avant tout, des paysans-pêcheurs dont les activit.és ha-
lieutiques sont dominées par des stratégies agricoles e.t
“terriennes” en général. Par contre, la minorité allogène
- la plus visible - est constituée, pour l’essenti.el, de
pêcheurs spécialisés (S&eer-siin, ikbu ,
Get-ndariens ,
Nyominka, MzaZo-lxalo, T’ukulé’r), impliqués dans des types
de pêcheàrentabilité élevée et concentrés dans des zones
bio-écologiques à haut rendement.
L’ensemble de ces groupes coexistent, de façon inéga-
le, dans cinq types de centres de pêche :
1) les campements maritimes saisonniers
; exclusive-
ment orientizs ve’rs la pêche et domines par
les
migrants
Zebu, séreer, et get-ndariens.
2) Les centres ambivalents; donnant sur la mer, l’es-
tuaire ou les bolons ; de caractère saisonni.er ou séden-
taire et dominés par les pêcheurs n+w:nkcz (40 Z) et jooia
(30
X).
3) Les villages autochtones CO-dominants
dans les-
quels la pêche est étroitement liée à l’agriculture et où,
en l’absence de migrants, celle-ci est dominée par les
pêcheurs joola et mandingue en Basse et Moyenne Casamance
respectivement.
4) Les centres estuariens mixtes ;les plus importants
de l’estuaire et dans lesquels une pêche de caractère ex-
clusif dominée par les pêcheurs tuku72r et
Idaa i 3 -wza 2.0
jouxte une pêche
CO-dominante pratiquée Surt:out par des
pêcheurs autochtones.
5) Les villages d’agriculteurs-pêcheurs occasionnels,
les plus nombreux en Casamance et dans lesquels la pêche
est pratiquée par des paysans autochtones, de façon oc.ca-
sionnelle ou en très petit nombre.

1 5 5
A B S T R A C T
In Casamance, almost 4360 fishing units
are
manned
by approximately 9460 fishermen on a full or part tinn basis
Now, largely the majority (8.5 % of the units censored)
autochtonous mandinka, joola, halant, baynunk, pëZ,manjak
fishermen remain still peasant fishermen whose
f ishing
activities are dominated by agricultural
and land-based
strategies. In contradiction, the highly visible minority
of migrant fishermen is characterized by its
specializa-
tion in high-profitability fishing types and its
concen-
tration around high productivity bio-ecological zones.
Al1 these groups are unevenl:y distibuted
in
f i v e
types of fishing centers :
1) Seasonal maritime camps, exclusively oriented to-
ward fishing and dominated by Zebu, sereer, and
get-ndar
migrant f ishermen.

2) Seasonal or sedentary ambivalent centers opened to
the sea, the estuary and to the “belons” and domknated by
Nyominka (40 X) and joo’kz (30 X) units.
3) CO-dominant autochtonous villages, where in
3 the
absence of migrant fishermen, fishing-highly linked to
agriculture- is dominated by joo’la and mandinka fishermen
of the lower and middle Casamance, respectively.
4) Mixed estuarine centers, the largest in the estua-
ry, and characterized
by the simultaneous existence of
an exclusive fishing economy dominated by tukuZër
and
waaZo-zxaZo migrants and a co-dominant fishing
subsector
animated by local fishermen.
5) Villages of agriculturalists and occasional fisher-
men, the most numerous in Casamance and in which fishing
is practiced only occasionally by local fishermen,

1 5 6
1 N T R 0 D IJ C T 1 (3 N
L’étude des pêcheries, du milieu et de son expérience .- en un mot, l’é-
tude de la pêche “en elle-même” - doit être menée de front avec l’étude des
conditions environneaentales et des choix productifs plus larges ,B partir
desquels elle est réalisée.
Un des buts du orésent article qui se fonde sur des travaux entrepris
dans la région depuis 1984 (cf D DIAX, 1985) est de donner un instantané de
la situation ethno-dgmographique de la pêche casamançaise en 1985 et dl-en ti-
rer de premières leçons. Son objectif essentiel toutefois, est de décrire la
dynamique de fonctionnement du système-pêche, dans ses rapports avec les stra-
tégies paysannes et terriennes qui en définissent les formes en ce qui concer-
ne les communautés ethniques et villageoises de la région.
Pour être opératoire, une telle description s’appuiera sur une typologie
(celle des centres et villages de pêche), c’est-à-dire sur un instrument dont
la fonction est d’unir,de spécifie2d-e différencier et dont l’élaboration né-
- - .
cessite Dar conséquent un “effort de compréhension du processus réel d’unité/
différenciation” (31,4W, 1985, 101).
1 .
L A
R E P A R ‘1’ I T I 0 N
E T H N I Q U E
D E S
‘LJ N 1 T E S
DE
PENCHE : LE
C A D 9 E
G E N E ri A L.
Après près d’un siècle de mutations, la physionomie sociologique de la
pêche casamançaise, 7blus héterogène que j amai 8, n’a plus rien de commun avec
ce qu’elle était au début du 20e siècle.
Jusqu’3 cette époque, la pêche était une activité relativement sous-dé-
veloppée inexistante en mer et uniquement pratiquée en Basse Casamance estua.-
rienne par les pêcheurs jnoL7. Dans le cours du siècle, une succession de
changements dont les pêcheurs migrants venus du Nord et de l’Est ont ét.é le
moteur, ont permis 13. modification de l’ensemble de ces conditions (DIPM,
1986).Ainsi, la pêche est aujourd’hui pratiquée sur la côte et sur plus de 200
km à. l’intérieur de l’estuaire et dans les h<l;!,jqs. 4359 unités de pêche y
sont orésentes en 1935 et constituent le cadre de travail de près de 9460 pê-
cheurs. 9u point de ‘vue des origines ethniques, onze groupes (mn~df~zgw, joo-
la, halant, !Y;zi?7~!?lt, Y,+‘. I*;I ;, .klk, ~3anïr,-2<‘û0?0? MiulëY>,, 1,chtl.j s o n t i m p l i q u é s
dans l’activité et contrôlent ensemble la quasi totalité des unités de pêche.
Yieux. les rauports ethno-démogranhiques ainsi que la structure meme des spé -
cialisations techniques sont aujourd’hui inversés (1). Le fait nouveau, fonda-
mental
rsside neut-ètre dans cette réalité. (le sont en effet
les pêcheurs
autochtones
~&:iLn:l:it? (36 % des Ilnités de peche), ji?::!Ia (30 X) qui contrôlent
la majorité des unitZs recensées en 1985 (tab?. 1) . Lorsque 1 ‘on prend en comp-
te les pêcheurs %z?n~s+ (14 ?) , ,n,: ‘, f; 1y~72nk et -.f:r:,i,?k (5 2) , c e c i n o r t e l e
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(1) Sase : Recensement de 175 cr,ntres de ;~I$~:;~I.~ de Basse et Moyenne Casamance
e n 1985. Unit6 d e coll~~cte : (:h(lf ci’uni:,;.
Nombre total de chefs d’unitGs
recensés
: 4 3 5 9 . Equipt, : %)c!ian, Diat t:~. !liaw. ‘Traitement informatique :
Laloe, niaw.

1 5 7
total des unités contrôlées par les pêcheurs “autochtones” à 85 % de L’en-
semble des unités fonctionnant dans le cadre de la pêche casamançaise.
Dans un type de pêche comme celui de la crevette par exemple, il est
frappant que contrairement à l’assimilati’on générale de ce type de pêche à la
communauté -h&uZër, les unités “mand~riuey’
représentent 41 % des unités cre-
vettières et les unités “autochtones en général 70 % ! Ce rapport est sensi-
blement le même dans le cadre des unités mixtes crevette-poisson. Ce n’est que
dans la mixité filet à crevettelfilet dormant (10 % seulement des unités uti-
lisées partiellement ou totalement pour 1.a pêche à la crevette) que les uni-
tés “non migrantes” se limitent à 12 % du total. Des phénomènes similaires
se retrouvent dans pratiquement tous les types de pêche à l’exception de la
pêche maritime (filet dormant). Même dans la pêche à la senne, qui reste mar-
quée par la dominante des pêcheurs migrants nyominka et wauZo-waaZo, la pré-
sence des pêcheurs autochtones s’élève aujourd’hui à 40 % des unités en ques-
tion. Il n’y a toutefois pas de synonymie absolue entre ces faits statistiques
et l’importance réelle des diverses communautés ethniques dans la pêche. Tou-
tes les unités de pêche, en effet, n’ont pas “le même poids”. Les pêcheurs
migrants professionnels qui ont préservé leurs spécialisations fondamentales
dans des types techniques précis (senne de plage, filet dormant en mer, pêche
4 la crevette) maintiennent, dans les loc,alités où ils concentrent leurs ac-
tivités un poids économique sans commune mesure avec leur importance démogra-
phique. Ce sont eux qui ont les équipages de senne les plus impressionnants
(57 b 90 pêcheurs par exemple) . . Les pêcheurs waaZo-waaZo, qui ne représentent
que 1 % des unités de pêche emploient 580 personnes, soit 6 % de la force de
travail. Les pêcheurs Zébu et get-ndariens représentent quant à eux près de
10 % de la force de travail contre 2,9 % des unités de pêche et les Nyor?tinku,
8 % de la force de travail contre 3 % des unités. Ce sont encore les pêcheurs
migrants qui lient la pêche au mareyage (waalo-waalo) ou 3 l’usage des piroy
gues - glacières ; ce sont eux qui restent hégémoniques en mer. L’ensemble de
ces faits, par leur caractère contradictoire même, rendent indisnensable l e
développement d’une approche qualitative susceptible de permettre l’appréhen-
sion de la dynamique générale du systéme
et ses rapports avec les stratégies
plus larges qui lui donnent “son sens”.
2. LA
T Y P O L O G I E
D E S
VILLAQ-ES
E
T
C E N T R E S
‘DE
P E C H E E T
L E S
R A P P O R T S
E N T R E L A
P E C Y E E T
L E S
A U T !T E S
A C T I V I T E S
Il y a plus de 175 centres A partir desquels.la pêche est aujourd’hui
pratiquée en Casamance. En se fondant sur leurs rapports avec l’espace écolo-
gique (position géographique, ressources halieutiques et agricoles accessi’
b l e s . . . ) , social (origines ethniques et géographiques,degré de spécialisa-
tion) et économique (position par rapport aux’marchés, aux infrastructures),
il est possible de distinguer cinq grands types de centres de pêche en Casa--
mance. Les caractéristiques de ces centres ont été largement décrites ailleurs
(DIAW, 1995 : 101-127) et peuvent donc être résumées ici (voir carte).

2.1. LES CAVPEMENTS ‘aARITI.cIES SAISONNIERS :
Ne représentant que 3 % des centres de pêche de la région, ces campements,
constituent les noints d’implantation quasi-exclusifs des pècheurs “profession-
nels” l&bu et S&eer de la Petite Côte (Yeen, ‘Jgaparu, Pointe Sareen. . .) et
des wolof de Get-Ndar et du Ganjool. Construits autour des campagnes de pêche
de ces communautés aux traditions migratoires anciennes, l’exploitation sai-
sonnière de la mer est la “raison d’être” exclusive de ces campements. Dans
leur arrière plan, on trouve les villages de cultivateurs ji?nZa dont lIéloi.-
gnement par rapport 3. la plage symbolise le retrait: par rapport à la peche
maritime. Ce n’est en réalité qu’î; Kafuntin - le plus grand centre de pêche
que l’on trouve des o’auinages autochtones (s:>;~$ et joc3 J~J venus
à la pêche
sous la tutelle des pêcheurs ~C;&A et Guet- Ndarien ou gràce au soutien d.es pro-
jets de déveloopement paraétatiques comme c’est le cas du groupe GOPEC de Ka-
funtin.
Les pêcheurs saisonniers des campements du littoral casamansais ne sont
pas tous des pêcheurs exclusifs. Parmi eux, on trouve une fraction signif ica-
tive de pêcheurs - agriculteurs CO-dominants dont l’implication dans la pêche
maritime n’est exclusive que par rapport à l’économie casamançaise. Sur un
échantillon de 24 chefs d’unités de production basés sur le littoral en mars
1984, 45 4: étaient des pêcheurs co-dominants, izombinant la pêche avec les cul-
tures sèches de rente (mil, arachide) et, plus rarement, avec le maraîchage,
la riziculture ou la culture du maïs et du manioc. Parmi ceux-ci, la gT.ande
majorité (72 X) est constituée de Zébu (surtout), de Sareer et, occasionnelle-
ment de IZroZojc,
tous venant de la Petite Côte. .-I l’opposé, les pêc.heurs exclu-
s i f s - la majorité - viennent pour la plupart de Get-Ndar et du Ganjool. (69 X).
Les migrations de ces pêcheurs en direction des centres cotiers casaman-
çais sont déterminées par des nécessités techniques étroitement combinées à
la disponibilité des marchés et aux conditions sociales propres à une vie de
campagne. T>es pêcheurs originaires de la Petite Côte sont tous des pêcheurs
de langouste et de sole dont la présence en Casamance est avant tout justifiée
par la nécessité technique de suivre ces esneces. En Casamance meme, leurs mou-
vements le long de la côte à la suite des modifications du milieu interviennent
en cours de saison s&zhe. L’existence d’un marché lucratif pour la langouste,
qui date de l’époque où “les Grands Viviers de Dakar” préfinançaient cette pê-
che et assuraient la remorque des pirogues non-motorisées jusqu’auxliéux de
campagne, est, en réalité, indissociable des nGcessités techniques per--se.Ce
marché est entretenu aujourd’hui par la demandes
importante provenant des hô-
tels et les prix rémunérateurs proposés (KFBE, CHABOUD, 1984 : 421, tandis
qu’un aareyage important destiné 3 Dakar maintient i ‘intérêt porté à la pêche
à la sole.
Les Dêcheurs Get-Ndariens et Ganjool-Canjool par contre, sont avant tout
des pêcheurs de gros poissons (capitaines, otholithes, arius, brochets.. .> et
de squales, pratiquant également (plus rarement) la pêche à la sole. Malp,rS
le mareyage en frais qui est actif à Kafuntin, une partie importante des pri-
ses en poisson des filets dormants est destinee à la transformation artisanale
A Bukot, spécialise dans la production du ,: : ‘-:-,?8a/s,” obtcr~u ‘1 partir du re ..
,yu ;.n , !a r>roducti.on est transformèenar les femmes Ganjool-ganjool qui viennent
également en campao;ne. Une partie importante de Sali est achetée par une usi-
ne de Dakar (la COWdF-Pêche) pour être t?nsuitc~ exportée (KEBE-CHABOVD, 1984 :
47). A Yafuntin, ce sont également les femrwc. des pêcheurs saisonniers qui
avec les femmes ,?fP)fl/ 7 réalisent 1 ‘esscnti.t)l
dt, la transformation artisanale
en ,;ej;i (fermenté-seché), en ::* ‘i,
; / e : : ((:sf~bi.um) . Une production d e ,72-t; ,-
rhtr fumé est effect:lSe par des transforma! ~VII~:.
,r,hanCens venant t?n début de
saison (Thid : 48) .

1 6 1
2.2. LES CENTRES AMBIVALENTS MARITIMES ET ESTUARIENS
Ces centres (6 % des centres de pêches) se sont constitués selon des ter-
mes qui - les villages Nyominka de la Pointe Saint-Georges mis à part- diffé-
rent profondément de la constitution des campements saisonniers du littoral.
11 s’agit avant tout en effet de villages sédentaires permanents constitués
au niveau de l’embouchure (Elinkin, Joge, Karabaan) ou dans le creux de pro-
montoires ou d’échancrures leur permettant à la fois l’accès à la mer et l’ac-
cès aux bolons intérieurs (Bujejet, Salulu, Bun, Kayelo...). Seuls les campe-
ments LVyominka de.Ponta-Bassul et de Ponta-Jogaan ont été conçus selon des
modalités similaires à celles qui ont conduit à la création des campements
saisonniers de la côte. Par leur nosition cependant, par la nature des milieux
exploités et des populations réalisant cette exploitation, ces trois campements
relèvent du même type que les villages sédentaires ambivalents.
Caractérisés par la possibilité qu’ils offrent d’exploiter à la fois
1’ embouchure, les bolons intérieurs et la mer à partir d’une position qui per-
met l’accès à ces trois types de milieu, ces centres dans leur ensemble, sont
le domaine de prédilection des saisonniers nyominka, les plus nombreux (près
de 40 %) en Casamance “maritime”. Le milieu ambivalent marin et estuarien des
centres précités est en effet
très proche de celui des îles du Salum et ex-
plique la concentration des pêcheurs nyominka dans ces zones tandis que leur
présence sur le littoral est insignifiante (4 % de l’échantillon) (1).
A côté des Nyominka, les populations de pêcheurs qui fréquentent les zo-
nes ambivalentes sont d’origines diverses et comprennent des Get-Ndarien (à
Salulu uniquement) , des mndingue, des PëZ et des Séreer-siin qui ensemble
représentent près de 18,5 % des effectifs. L’importance de la présence Joola
(près de 30 X) y est frappante et reflète le caractère transitoire et ambiva-
lent de leurs rapports avec le milieu halieutique. L’analyse du mode de cons-
titution des communautés de pêche de cette zone, devrait aider à la compréhen-
sion de leurs caractéristiques spécifiques,
Les campements Nyominka saisonniers :
Ponta Basul et Ponta Jogaan sont avant tout des bases de pêche entière-
ment construites autour du caractère saisonnier des migrations des pêcheurs
Nyominka. Malgrè l’ancienneté de ces dernières qui durent depuis plus de 30
ans aucun processus de sédentarisation ne s’y est fait jour et chaque année,
entre la fin du mois de juin et le mois de septembre, les campements Nyominka
sont désertés et tous rentrent dans leurs villages d’origine à Jogaan et à
Basul (2).
. .
(1) Il est bon de rappeler que notre échantillon, qui compte 54 chefs d’unité
de la zone “marine” interrogés en mars et 18 chefs interrogés plus tard
(juillet-août) dans cette zone et dans l’estuaire, est un échantillon ac-
cidentel non-aléatoire et que les valeurs issues du traitement des don-
nées recueillies doivent être cansidérées,jusqu’à nouvel ordre, comme ap-
proximatives.
(2) Exception faite de certains chefs de lignage qui restent à Ziguinchor où
ils entretiennent une base permanente. Ceci ne doit pas surprendre.

1 6 2
Dans leur quasi totalité (près de 90 W) les pêcheurs de senne et de “yo-
lai” de Basul et de Jogaan sont restés, à la différence de ce qui se passe
ailleurs, des paysans pêcheurs co-dominants qui continuent pendant la saison
humide à entretenir leurs rizières(l) des îlea du Salum et, occasionnellement,
à cultives.du mars et de l’arachide. VAN CHI (li977) a longuement décrit le
fonctionnement .de 1'4Conomie m.arit:ipxe ét rurale des îles du Salum. 11 ne fait
pas de doute que c’.est c&&Z,a~ant tout, q ui rggule le rythme migratoire des
pêcheurs Nyominka de Jogaan. et BamLt-tilgré la co-dominante de .lq. pêche et de
l’agriculture ‘et de la @ersis&ti& :dq phéndmène de !‘retour” dans :Jes-&les en
fin de saison ‘sèche, la pêx3-k cànstktue chez la majorité des szI'iso~vi.ers de
Basul interrogés, le choix productif prioritaire.
I
Leur installation à ïa Pointe Saint-Georges, ne s’est pas faite sans la
-
résistance des communautés JooZa propriétairesdu terroir. Aujourd’hui, toute-
fois, la quasi totalité de la main-d’oeuvre utilisée pour renforcer les no-
yaux lignaws formant la base des équipages de senne est constituée de JooZa
venant des villages environnants (32 % des équipages de ‘Ponta-Basul). De même,
certaines unités jooZa de la région viennent isolément effectuer des campa-
gnes de pêche dans les campements nyominka.
Les centres sédentaires des zones ambivalentes, se sont constitués diffé-
remment des campements saisonniers. Créés par les populations autochtones, ces
villages sont avant tout des villages de rizicultivateurs où l’agriculture a
largement précédé la pêche, Encore aujourd’hui, la culture du riz, la palme-
raie, l’élevage domestique et quelquefois la production du sel, constituent
la toile de fond sur laquelle sè sont greffées des activités halieutiques en
expansion, Dans des villages comme Jogé, et Elinkin la pêche maritime a d’a-
bord été développée par des populations d’origine séwer, totalement “joolal-
sées” aujourd’hui.Les migrants Nyotinka pêchan,t au filet dormant (Joge) ou à
la senne de plage (Elinkin) ont suivi, précédant de quelques années l’arrivée
d’autres pêcheurs saisonniers dont l’importance démographique est cependant né-
gligeable. Le développement de Bujejet comme C$entre d.e piêche maritime et es-
tuarienne a été par contre sensiblement différfent. Bujejet, en réalité, a été
créé par les premiers migrants Nyominka qui en ont fait, non un campement sai-
sonnier, mais un village de pêche permanent. A cheval sur la frontière séné-
galaise et bissau-guinéenne et situé à l’entrée du bolon d’Esukujak donnant
sur la mer, sa position en a fait une étape privilégiée dans le mouvement de
va-et-vient ininterrompu entre les eaux sénégalaises et guinéennes. Pendant
toute 1’ année, Bujejet reçoit un influx de populations diverses JooZa, Pël, Mm-
ding, Fanti du Ghana) parmi lesquelles l’élément Nyominka domine très nette-
ment. Durant l’hivernage les pêcheurs Nyominka de Bujejet - à la différence
de ceux de la Pointe Saint-Georges - restent sur place et continuent à pêcher
au filet dormant, au YoZaZ ou à la senne de plage. En septembre 1984, ils cons-
tituaient 63 % des chefs d’unités de pêche du village.
Bien qu’adossé aux rizières des paysans de Kabrus, :Bujejet est pratique-
ment un centre de pêche exclusif, Malgré leur ancienneté dans le village, les
pêcheurs Nyominka n’ont pas, en effet, réussi ,Zï se créer une assise foncière
susceptible d’accueillir des faro (rizières) qui leurs seraient propres. Ain-
si, la cueillette et la transformation des huîtres et des coquillages (pUUn)
ainsi que l’élevage domestique, constituent (à part la pêche et ses activités
annexes) les seules activités propres aux résidents Perm<anents du village,
(1) Il est bon de noter que depuis près de 5 ans, la riziculture a pratique-
ment disparu des îles du Salum en raison de la sécheresse.

1 6 3
Salulu, Joge et Elinkin sont comme Bujejet des centres mixtes ou coexis-
tent pêcheurs sédentaires et migrants saisonniers. Ils diffèrent cependant
de ce dernier par le fait que dans les trois villages, il existe des pêcheurs
autochtones ou assimilés possédant une assise foncière propre permettant la
réalisation co-dominante de la pêche et de l'agriculture dans le village même.
Dans les trois villages la culture du riz est, dans la pure tradition Joola,
l'activité agricole dominante des pêcheurs autochtones. A Elinkin, certains
s'adonnent à la fabricatgon d'huile de palme tandis que leurs femmes récol-
tent les coquillage (puan)-et assurent une production de sel importante. A
Salulu, celles-ci font du maraîchage en plus d'un travail important de
cueillette d'huîtres et autres coquillages,
tout comme à Jogé où cette der-
nière activité (février-avril) précéde la pleine saison de pêche et suit la
récolte de vin de palme (à partir de décembre) et celle du riz (décembre.
janvier).
Parmi les pêcheurs migrants certains sont également des pêcheurs codomi-
nants. C'est le cas notamment des pêcheurs Nyominka de Basul et Nojoor prati-
quant la pêche au filet dormant à Salulu.
Comme il en est de tous les paysans-
pêcheurs allogènes, leurs activitésagricoles échappent à l'économie casaman-
çaise.Les pêcheurs migrants des villages sédentaires mixtessont toutefois
dans leur grande majorité des pêcheurs exclusifs qui représentent près de
85 %O de notre échantillon. C'est là une donnée frappante, qui montre exacte-
ment l'inverse de la situation des campements saisonniers
nyorrirrka s C ' est
également un indice significatif de la différence de dynamique qui caractérise
les deux types de migrations. A la différence dés mouvements massifs et régulés
des pêcheurs de Basul et de Jogaan,
les déplacements des pêcheurs nyominka
(originaires des villages sédentaires autochtones, se sont en général
effec-
tués sur de très longues périodes à la poursuite du poisson. Une unité rencon-
trée à Bujejet par exemple estoonstituée par des pêcheurs nyominka présents
en Casamance (Bodé, puis Sancaba-Manjack..) depuis 3 à 4 générations, tandis
que d'autres, venus plus récemment à Elinkin, n'ont pas quitté ce village de-
puis 13 ans sauf, à quelques rares occasions , pour voir des parents au village
ou pour faire face à certaines obligations sociales (condoléances etc...).
Cette tendance à la sédentarisation en Casamance est également perceptible à
travers le fait qu'au moment des fêtes de la tabaski, en septembre 84, la
majorité des unités nyominka de Bujejet n'ont pas jugé bon d'aller passer les
fêtes dans leurs villages d'origine.
L'économie de la pêche qui constitue l'artère vitale des centres ambiva-
lents sédentaires est alimentée par deux grandes activités commerciales : la
vente en frais et la transformation. La position de ces deux termes n'est
cependant pas la I@V dans les deux types de centres qui ont été décrits.
Hormis sa position privilégiée par rapport à la 'route' maritime liant
le Sénégal à la Guinée Bissau, l'attrait qu'exerce le centre de Bujejet sur
les pêcheurs migrants s'explique aussi par la proximité des hôtels (Emitai,
Socetour . ..) qui constituent un marché important et stable pour le poisson
frais (Brochet, capitaine . ..) et dont le rythme saisonnier des activités
influence même les dates d'arrivées de certains migrants, Bujejet est égale-
ment le premier centre de production de requin fumé (métorah) de Basse
Casamance. La commercialisation du métorah est réalisée par les tranformateurs
eux-mêmes ou par des commerçants qui expédient le produit vers la Gambie et
la Guinée. Ces pays servent également de point de transit dans l'alimentation
de pays tels que le Ghana (KEBE et CHABOUD, 1984 : 47).

1 6 4
La production de gejj et surtout d’ailerons de requins séchés est égale-
ment importante. Le commerce des ailerons séchés, qui fait l’objet de contrats
de prêts/livraisons entre certaines unités de pêche et des commerçants basés à
Banjul, est une activité particulièrement lucrative dont les marchés d’Extrê-
me
Orient constituent la destination finale (Ibid : 47).
A la différence de Bujejet et d’Elinkin (qui dispose d’une voie d’accès
au marché d’Usuy) les activités halieutiques sont dominées dans les Il~es Blis-
Karon enclavées (Salulu, Jogé) par les activités de transformation. A Jogé un
centre de production de métorah 5 destination de la Guinée est animé en saison
sèche par des transformateurs mandingue venant de Gudomp, tandis que le gejj
y est activement produit. A Salulu, les pêcheurs avec l’aide des femmes trans-
forment eux-mêmes le poisson en gejj pour le stocker et le vendre ensu.ite aux
bana-banu. L’accès de ces derniers à ce centre enclavé n’étant pas régulier,
les pêcheurs sont souvent obligés, en fin de saison, de transporter par sacs
entiers le poisson séché jusqu’à Ziguinchor, K.aolack et Dak.ar où ils effec-
tuent eux-mêmes la commercialisation. La transformation à Elinkin est egalement
effectuée par les pêcheurs eux-mêmes qui en livrent le produit aux revendeurs
ou qui vont à Usuy ou à Dakar (en utilisant le bateau’tasamance-Expresg) pour
y vendre leurs produits.
La commercialisation en frais est réalisée essentïellement en direction
de Ziguinchor. Souvent les pêcheurs s’organisent pour transporter leurs prises
dans une même pirogue, après que celles-ci aient été marquées. L’introduction
des pirogues glacières, autant à Salulu et Jogé qu’à Ponta, est une donnée
nouvelle dont les effets se font déjà sentir dans l’approvisionnement de
Ziguinchor en poisson frais, à partir de ces points de pêche(l).
2.3. LES VILLAGES AUTOCHTONES CO-DOMINANTS
Ce sont des villages de paysans-pêcheurs qui partagent, de surcroît, la
caractéristique de ne pas être des centres d’immigration saisonnière de pêcheurs
non autochtones. La pêche y est une activité étroitement liée à l’agriculture,
dans un rapport qui varie cependant suivant les endroits. L’importance de la
pêche est marquée par le fait que tous les villages considérés disposent d’une
flottille de pêche dont la taille se situe entre 30 et 72 unités de pêche.
Il existe tout un éventail de villages autochtones CO-dominants (31 %
des centres de pêche) qui se différencient par les spécifités.de leurs systèmes
productifs, par leur position, par les caractères ethniques des populations de
pêcheurs, de même que par les formes que revêt la pêche dans ces villages.
Nous distinguerons très schématiquement les villages joo;la du complexe côtier
de Basse Casamance et les villages mandingue, baZant de Moyenne Casamance.
2.3.1. Les villages du complexe côtier Bas-Casamançais
Il s’agit de villages situés à l’intérieur du vaste complexe de marigots
parallèles ou perpendiculaires à la côte et où le développement de la pêche
a abouti à la co-dominante de celle-ci avec la riziculture et les autres
“lignes” d’activité économique, Les exemples fondant la description suivante
sont de la Casamance, dont les similitudes et les différences sont de nature
à révaler l’essence des processus sur lesquels se fonde la co-dominante de la
pêche et de l’agriculture dans les systèmes productifs ,du complexe côtier.
(1) La commercialisation en frais se fait même maintenant jusqu’a Dakar. En 1983,
des pêcheurs Nyominka de Salulu commercialisaient des brochets, transportés
c
en pirogue glaciisre jusqu'à Ndangaan-Sambc. puis en camion jusqu'au marche
de la Gueule TapiSe à Dakar (CHABOUD, Comm. pers.).

1 6 5
L’histoire de la Basse Casamance est marquée par le primat de la rizicul-
ture sur l’ensemble des systèmes productifs. Ceci est une réalité encore per-
ceptible aujourd’hui.
Dans le Buluf toutefois, la primauté de la riziculture est contre-balancée
par le développement d’autres activités, parmi lesquelles la pêche. Malgré une
intégration toujours plus poussée dans l’économie de marché dominante, il est
remarquable que les cultures d’hivernage dans les villages de paysans-pêcheurs
semblent être, avant tout, destinées à l’autoconsommation. A côté du riz, le mil
est la culture la plus pratiquée, suivie du maïs qui commence à être exploité.
L’arachide, culture de rente par excellence, semble n’être que peu cultivée.
Le développement rapide du maraîchage (oignons, tomates, choux; pommes de
terre . ..) et de bananeraies,à partir du début des années 1980, doit être com-
pris dans ce contexte. Créées autour de groupements collectifs encadrés par
les organismes agricoles (PIDAC),
ces cultures de saison sèche constituent
avec les plantations fruitière familiales (oranges, mangues), la fabrication
et la vente de l’huile de palme ainsi que la cueillette des fruits sauvages
(matk& &C~C, néré, tuba), une source de numéraire extrêmement importante
des villages comme Cobon, Conk-Essyl, Tenduk, Mlomp ou Bodé. Cependant, ces
activités, auxquelles s’ajoutent l’élevage des bovins et d’autres animaux
domestiques (chèvres, mouton) ainsi que la cueillette des huîtres, la cons-
.
truction et l’artisanat (travail du bois, vannerie, poterie), ne concurren-
cent pas réellement les cultures d’hivernage mais les complètent plutôt comme
le montre le calendrier des activités de production (tabl. 1).
On voit que seule la pêchetqui continue, en hivernage, à être pratiquée
sur un rayon de 5 à 10 km autour des villages, concurrence sérieusement les
cultures d’hivernage dont le riz. Source de revenus monétaires importants, la
pêche est de plus en plus ‘prioritaire’ pour certains jeunes qui, corrélati-
vement , négligent les travaux des champs. A Conk-Esil, certaines unit& sont
désormais composées de pêcheurs exclusifs ayant totalement abandonné l’agri-
culture. De même, bien que la majorité des unités de pêche soient composées
de pêcheurs CO-dominants,
la plupart manifestent une nette tendance à privi-
légier la pêche au détriment de l’agriculture.
Dans notre échantillon, comportant des unités venant de trois villages
du Buluf, (Tenduk, Bodé et Conk-Esil), cinq chefs d’unité sur sept soit 71 %
citent la pêche comme leur activité la plus importante contre seulement un
(14 X) estimant que l’agriculture (riz, maïs) lui était plus utile. Un dernier
chef d’unité plaçait les deux activités sur le même plan.
Parmi ces chefs d’unité pratiquant tous la pêche d’hivernage, la pratique
simultanée de la pêche et de l’agriculture résulte d’un compromis difficile
entre les calendriers et les temps de travaux propres à chaque activité.
Pratiquée de nuit, la pêche au filet dérivant (yoZa2 et féZé-féZ&) ou au
filet dormant est en effet une activité épuisante, qui dure de 12 à 24 heures
(sorties : 16 h - 18 h ; débarquements : 5 h - 6 h), T)ans le courant du mois
de septembre, les hommes.dans le Buluf vont aux champs dès 8 heures le matin
pour ne revenir qu’en début d’après-midi, vers15 ou 17 heures. Pratiquer les
deux activités quotidiennement, dans ces conditions, est une prouesse que peu
tentent de réaliser. Le plus souvent donc, ces deux activités sont pratiquées
alternativement ; trois jours dans la semaine étant, en général, consacrés à
l’agriculture contre quatre à la pêche, à la vente et à l’avitaillement à
Ziguinchor.
Source de revenus monétaires importants, la pêche joue un rôle de plus
en plus important dans le maintien de la jeunesse masculine au village tandis
que le développement de divers projets agricoles (maraîchage en particulier)
joue un rôle similaire en direction des femmes.

1 6 0
En outre, l’adoption de la pêche par une par tic de la jeunesIse a comme
corrolaire le developpement de comport:ements
3.i.gra to i.r es qw l’on ne trouvait
auparavant que parmi. les sai.sonn.iers venant du Nord, I,es pêcheurs de Conk-Esil
qui, dans les année 1’340, limitaient leurs migrations aux eaux intérieures des
bolons, et éventuellement à l’estuaire, suivent aujourd’hui le poisson dans
plusieurs points de :La Casamance et: jusqu’en Guinée-Bissau. L’adoption de ce
type de comportement date du début des années 1970, après le passage de la
première génération d’Esiliens au centre de pZc*he Emile Badiane de Gudomp en
1464-65. Ceux-ci sont les premiers à pratiquer la pêche aux gros poissons
(au yolaz surtout) à Conk-Esyl ; ils sont également les premiers à aller
en Guinée-Bissau.
Il y a ainsi t:rois moments distincts dan5 i-es migrations de pêche des
unités esiliennes :
- les migrations d ‘hivernage à 1’ intérieLI1
des hclons du Buluf et des
environs. Nous avons déjà abordé les caractéristiques majeures de ces
dernières.
- les migrations vers la Guinde-Bissau sonç les premiers mouvements de
saison sèche et commencent dès le mois d’octobre, c’est-à.-dire avant la fi.n
des récoltes et la campagne de commercialisation des produits deite.
Les pêcheurs de Conk-Esil se dirigent al..cjrs vers le Rio Cacheu où selon
eux, il y aurait plus de poissons (capitaines en particulierj 2 cette epoque.
- En avril, les unités esiliennes reviennent dans les eaux casamançaises
où la pêche est surtout bonne à,partir de cette période. Certaines unités
transitent à Bujejet où elles restent quelques semaines. D’autres vont vers
d’autres lieux de pêc:he (Joge.. a .) .
En mai, les unités migrantes se retrouvent toutes à l’embouchure, dans
les environs de 1’ île de Karabaan,. A partir de 1980, ce rendez-vous s’est
fait dans le campement provisoire de Bajankasan avec également des unités
originaires de Kabylin dans le Foni. En 1984, ‘des conflits ont opposé les
saisonniers esiliens aux autochtones de
Bajankasan(1) .Les premiers vont,
depuis lors, camper 2 Joge.
Pendant la saison sèche donc, les pêcheurs de Conk-EsiZ sont engagés
dans des mouvements migratoires actifs et élaborés, dont les formes révèlent
le processus de spéci.alisation halieutique en Tours au niveau d’une fraction
du village. Ce dernier garde cependant une éco:nomie à caractère multiforme
et intégré comme le montre l’i.ntensité de la vie economique qui, à la même
époque que les migrations de pêche, tourne autour des bananeraies, des jardins
maraîchers et de la cueillette des huîtres qui > elle aussi., engendre d’autres
types de migration (CORMIER-SALEM, 1986).
Les villages CO-dominants du Banjal sont,pour l’essentiel, des villages
de mangrove (Banjal, Elubaliir, Satingeer, Etama, Sel egi) dont le fonctionne-
ment est différent de celui des villages forestiers du “royaume d’Enampore”
(Esil, Bajat, Enampoor, Kamobël).
Du point de vue de la disponibilité des ressources, et par conséquent
de l’articulation des choix productifs, ceux-ci présentent un contraste frap-
pant vis-à-vis des villages du Buluf qui, situi3s sur le continental terminal,
bénéficient à la fois du plateau, de La fori;t. iat ,de la mangrove. Dans 1.a plu-
(I)CORMlER (1984) relate ce conflit ainsi que c,cilu< qui opi>l-)scA les. pêcheurs
de Conk au vil.lage de Niomun.

part des villages CO-dominants du Banjal, par contre, les rizières profondes
constituent la source exclusive de production agricole. Nulle part on ne
trouve la riche combinaison de la riziculture avec les cultures sèches de
plateau, le maraîchage ou les plantations fruitières. Seuls quelques villages,
comme Batingeer avec ses champs de patates, ont la chance de cultiver autre
chose que le riz qui, du reste, est entièrement destiné à l’autoconsommation.
La grande importance de la production du sel réalisée de mars B juin par les
femmes et destinée autant à la vente qu’à la consommation domestique, a un
autre versant : la salinité très élevée des sols et la tragique rareté de
l’eau douce. Ces facteurs expliquent la très grande importance de l’élevage
domestique (boeufs, porcs, moutons, chèvres, volaille) et occasionnellement,
de l’artisanat. Ils expliquent également l’importance de la cueillette des
huîtres de mangrove et la co-dominante ancienne de la pêche et de l’agricul-
ture. Le caractère particulier des rapports entre l’action anthropique et
l’éco-système mangrove particulier de ces villages, explique finalement le
niveau d’intégration rarement égalé ailleurs de ces deux activités, comme
en témoigne l’aménagement des bassins à poisson dans le cadre du processus
de drainage et de dessalement progressif des terres conquises sur la mangrove.
Dans le champ de cette économie dont les conditions naturelles expliquent
la très forte spécialisation, les paysans-pêcheurs banjal ont très tôt déve-
loppé des migrations de pêche étroitement soumises au calendrier agricole.
Les pêcheurs de Elubaliir, par exemple, situent très nettement la riziculture
au sommet de leur axe de priorités productives - la pêche suivant de près -
malgré des migrations de pêche ‘qui durent globalement du mois d’octobre au
mois de juillet. En réalité, ces déplacements qui s’effectuent en direction
des zones estuariennes en amont de Ziguinchor et sur le Soungrougrou (Niagis,
Bemme-Jatakunda, Jafar-duma) pour la pêche au japang (ou kaya),sont eux-mêmes
déterminés par la séquence de la vie au village et des travaux rizicoles en
cours d’année. Les pêcheurs-riziculteurs de Elubaliir observent en effet
trois moments migratoires distincts à l’intérieur de la saison sèche. Ils se
déplacent vers Bemmé ou Niagis, d’abord entre octobre et décembre pour revenir
passer les fêtes de fin d’année au village ; ils repartent en février pour. revenir
au mois d’avril retourner les sols et préparer leurs rizières en vue de
l’hivernage ; ils font enfin un dernier départ en juin pour revenir le mois
suivant au début des pluies, pour entamer les travaux de culture et la saison
agricole proprement dite.
Pendant ce temps, dans les villages, les activités tournent autour de
la cueillette des huîtres, de la production de sel et de la fabrication de
fumure 3 partir de cendres de déchets brûlés (etun). Les productions féminines
sont occasionnellement renforcées par l’artisanat(tissages, vannerie) auquel
les hommes participent activement, surtout les plus âgés. En hivernage, la
subordination de la pêche à l’agriculture est encore plus marquée et certains
cessent de pêcher, particulièrement pendant les périodes les plus intenses
d’activité agricole.
L’approvisionnement des villages en poisson est cependant assuré en
cette période par le maintien de certaines formes de pêche (fungaam) dont les
contraintes en termes de temps de travaux et de calendrier ne sont pas exces-
sives (1 heure à 2 heures tous les deux ou trois jours), En certains endroits,
une production artisanale de gejj est réalisée et souvent un surplus est
dégagé qui permet la vente et la réalisation d’un revenu monétaire au-delà de
l’autoconsommation.

2.3.2. Les villages autochtones ast da::iens co-dominant s
-.-
_....A-a-__ _____ I ___-_. ~ - --._-_--,
Ceux-ci sont dominés par le peupi-ement 3.4 rzJi kg mais sc;~nt en réa 1 i té
multi-ethniques. On y trouve ,en effet des ha<.c./~~t, des F?I:, des Joc)Zcl, Ides
Bayqmk, des Manjak ainsi que d’autres minorités ethniques “Ces villages ont
une double caractéristique : celle d’abrit.er ces activitcs de pêche qwlque-
fois plus importantes qu’en Basse Casamance (ri.0 5 9C unités, de pP,che par
village) qui sont, de surcro?t.,
1-e. fait exclus if de pGcheurs autochton,es
non-migrants.
Les villages autochtones co-dominants soi:.~ nombreux. en Moyenne-Casamance
et dans la zone estuarienne à l’Est de Ziguinchor (Tambakumba, Kunjunju). Dans
le Yasin, Jafaar-duma, Jibabuya, Bemme-jatakunda, de même que la ville de
Marsasum en sont les principaux exemples. Il en est de même en ce qui ,-oncerne
la ville de Seju dans le Buje, qui de par ‘le fonctionnement de son éco:nomie
halieutique, se rattache à cette catégorie. Dans le !lalanta.kunda, Hamdalay,
Sina et Ségafula en sont les exemples les plus marquants.
Le poids démographique des divers groupes ethniques dans la structure
des villages et des unités de pêche varie en fonction de la. région historique
considérée (Basse Casamance orientale, Balantekunda, Kuje-Yasin) ; cependant
l’élément fondamental à retenir, par rapport ;i. la pêche, reste le poids crois-
sant de l’élément mnlzdinguc dans la répartition ethnique du secteur (t.abl. 2).
Dans ces villages, la production halieutique est axtic.ulée autour d’une
stratégie paysanne répondant au double impératif pos6 par l’exigence df2 sécu-
rité alimentaire et une insertion croissante d;ins les circuits de la p’ztite
production marchande.
Dans le Balantakunda, les cultures d’hivernage -- pa.rmi lesquelles la
production du riz, celles du mil, du manioc et du mals excl.usivement destinées
à la consommation domestique ~- répondent pour !.‘essent:iel. à; la premièr,e exigence.
L’arachide, culture marchande par excellence, ainsi que les, productions de
patates et de haricots à partir du mois d’août, sont par contre orientées
vers la vente et l’obtention des revenus monétaires nacessaires aussi bien
au fonctionnement de l’économie domestique (!l\\.::ile, sucre, C:afé. -. .) qu’à
l’ensemble des échanges générés par une éc.onomie de marche dont I’hégémonie
est désormais incontestée.
Le Balantakunda bénéficie en général
de c:onditi.on.s naturelles favorables
marquées par la disponibilité de zones inondabies propices à la riziculture
de bas-fond, mais aussi par l’existence de versants où se réalise la culture
du riz pluvial, de palmeraies et de zones de 1,ylateau favorables aux cultures
sèches. 11 en résulte une économie de caractZrc multiforme fondée sur l’ex-
ploitation simultanée de l’ensemble des possibilités offert.es par le milieu.
Ainsi, outre 1e.s cultures d’hivernage - cü le mil plutôt que la rizi-
culture tient le rôle principal ‘- tout un complexe d’activités complémentaires
aux cultures vivrières est déyeloppé en saisor. sèche par les populations
féminine et masculine des villages du Balanta.k.~lnda.. A Ha.mdalay et à Sina,
la production d’huile de palme, la cueillette (les fruits sauvages et les plan-
tations domestiques ;lovinent 1 es t~~ll turcs de ,.~,.,ntre-gaison,,~c
concert avec 1 “élevage
domestique, la production de sel, de miel et 1 ‘artisanat. A ces activités,
s’ajoute à Segafula une pratique active du maraîchage (tomate, piment, oignon ,
chou . . .) organisée sur la base d’associationc de quartiers, qui exploitent
également la bananer,aie.

Mise B part une portion négligeable attribuée à la consommation domes-
tique, toutes ces productions sont finalisées à l’intérieur des circuits
marchands dominants et jouent le même rôle que l’arachide, la patate ou le
haricot.
Comme partout ailleurs dans le monde dit “mandinguisé”, la division
sexuelle du travail est fondée, pour l’essentiel, sur la répartition des
tâches par type de produits et non par opérations culturales comme parmi
les riziculteurs du Banjal. Cette caractéristique n’est cependant pas absolue.
Si la riziculture de bas-fond et de versant est exclusivement une activité
féminine à Segafula et Hamdalay, on retrouve par contre dans la culture du
riz à Sina, une division sexuelle du travail par opération culturale (les
hommes labourent et les femmes repiquent et récoltent) , ce qui est un fait
marquant pour une communauté à dominante manding-baZant.
La culture du mil,
organisée à l’échelle du segment de lignage, implique également les éléments
masculin (labour, semis) et féminin (récolte) de l’unité de travail domestique
dans l’ensemble des trois villages considérés. En général, les productions
de maïs, d’arachide, de patate et de haricot sont assumées par les hommes.
Il faut remarquer que la plupart sont des activités de saison humide, tandis
que des productions féminines telles que le maraîchage, la bananeraie, ainsi
que le traitement et la vente des produits fruitiers offrent aux femmes un
support productif décisif en saison sèche.
La pêche, dans l’ensemble de ces villages, s’est développée dans ce
contexte. Les pêcheurs des vill,ages CO-dominants sont avant tout des paysans-
agriculteurs qui, à la différence des unités joola que nous avons décrites,
n’effectuent pas de campagnes de pêche lointaines. Leur pêche est, dans son
essence même, une pêche sédentaire, active surtout en saison sèche. En hiver-
nage celle-ci continue à être pratiquée pour satisfaire à la fois les besoins
nutritionnels de la communauté (ndawa2) et les exigences de l’économie moné-
taire. On retrouve donc le même rapport que celui établi dans l’agriculture
entre cultures vivrières et cultures de rente. Cette réalité est parfaitement
décrite par les pêcheurs de Segafula qui nous disaient en septembre 1984 :
“la pêche ne gêne nullement les travaux des champs. Nous sommes tous
proches de “notre mer” ; nous pouvons donc rapidement aller prendre notre
t!L&md(l),
vendre ensuite aux bana-bans(2) et aller aux champs dans la même
journée”.
En hivernage, le calendrier de pêche est donc conçu de manière à permet-
tre la réalisation simultanée de la pêche et de l’agriculture à la différence
notamment des villages du Buluf où cette réalisation est alternée. Ici, comme
là-bas, la pêche se fait surtout de nuit pendant cette période, mais dans des
conditions moins contraignantes . Parties après le dîner, les unités de filets
dérivants sont de retour dès les environs de 24 heures (au lieu de 6 heures
dans le Buluf). La fraction destinée à l’autoconsommation une fois prélevée,
les prises sont laissées dans la pirogue jusqu’au lendemain où elles sont
. .
alors vendues aux banu-bana.
Tandis que Hamdalay est situé au bord de la Nationale 6- la “Raute du
Sud” - Sina et Ségafula sont des villages relativement enclavés situés à
plusieurs kilomètres de la route. Dans tous ces villages le commerce du
(1) dund : dans le sens de nourriture ; besoins alimentaires.
(2) terme Wolof désignant les personnes s’adonnant au petit commerce.

1 ? 0
poisson est en réalité. un micro-,mareyage dont les agent c* sont des &yU-
bam originaires de ces vil.lages ou des environs et travazllent ii vélo. Les
produits sont destinés à d’autres villages du Balantakunùa (Samin, Jibanar,
Safan, Farba...) et même de Guinée-Bissau. Les prises de crevettes par contre
sont commercialisées selon le même mode qu’ailleurs dans 1 “estuaire et sont
destinées aux usines de Ziguinchor.
La production du t;umbatljang et du gejj 2 partir de mulets, d’ethmaloses
et de capitaines, domine la transformation artisanale dans les trois villages
considérés. Le poisson transformé est commercialisé à l’intérieur des mêmes
circuits que le poisson frais bien que sa plus grande aptitude à la conserva-
tion permettent sa distribution jusque dans des vi.llages très éloignés
par
les banu-bana. A Sina et à Ségafula, la transiormation est le fait exclusif
des femmes tandis qu’à Hamdalay où existent de.3 claies de séchage fabriquées
localement,
les hommes participent aussi à cette activité.
Comme c’est le cas pour la grande majoril. des centres de piiiche de
Casamance, les villa,ges co-dominants du Balantakunda souffrent de l’absence
d’infrastructures locales et vont tous chercher glace,, essence et: pièces
détachées dans des villages comme Jatakunda et surtout: Gudomp qu:i. abritent
également les seuls #ateliers de réparation disponibles.
Les villages co-dominants de Moyenne et de Basse Casamance sont, en
résumé, les lieux principaux d’implication des pêcheurs autochtones dans la
pêche artisanale. Ceci reflète à la fois l’essor de cette activité da,ns un
milieu humain OU des formes “modernes” sont apparues t.ardivement ainsi que
son étroite dépendance par rapport aux stratég,ies “terriennes”, élaborties
avant tout en référence aux systèmes de production agricole. La co-dominante
de la pêche et de l’agriculture est cependant une réalité dynamique au sein
de laquelle les deux termes se situent et Evoluent en fonction d’un ensemble
de contraintes et de déterminations parmi lesquelles les conditions naturelles
et l’environnement socio-économique jouent un rôle décisif. Il ne, fait pas de
doute que l’évolution de ces deux facteurs entracnera dans l’avenir de nou-
velles modifications qui pourraient se manifester différemment da.ns des com-
munautés qui, malgré tout, restent diverses et gardent leurs spécificités.
2.4. LES CENTRES ESTUARIENS MIXTES
Ce sont les centres de pêche les plus importants et les plus actifs de
l’estuaire et, peut iitre, de toute la Casamance. Situés pratiquement tous
en Basse Casamance orientale (Est de Ziguinchor) et dans le Balantakunda, ces
centres sont des zones cosmopolit.es où se rencontrent des populations extrême-
ment diverses par leurs origines géographiques et techniques, par leur mode
d’exploitation du milieu halieutique, par leur organisation sociale et par
leur degré de spécialisation dans l’économie de la pêche. Baganga, Gudomp
Anak, Adéan et Jatakunda apparaissent comme I.es plus importants parmi ces
villages de pêcheurs migrants et autochtones inégalement impliqués dans le
secteur de la pêche- Par la nature et les caractéristiques de sa population
de pêcheurs, Ziguinchor pourrait être rat:tachi! ri ce type de communauté,V
Etirée, d’Ouest en Est, 1.e long de l’estuaire et entre celui.-ci et la
route du Sud, la position des villages mixtes t-eflete à la fois leur implica-
tion dans la production halieutique et le rôle joué par la route dans leur
insertion active au sein des circllits commerciaux et monétaires qui. sont
devenus les régulateurs fondamentaux de leur iiconomie. Cette position parti-
culière n’est pas propre aux centres mixt.es et: est partagée par les villages
CO-dominants autochtones appartenant à la même aire géographique. L’essence
de la différence existant entre ces deux typtT$ de villages rCside en realité

1 7 1
dans le rôle historique joué par les populations migrantes de la vallée du
Fleuve dans la transformation des petits villages d’agriculteurs où ils se
sont fixés à la fin des années 1940, en centres où la pêche joue aujourd’hui
un rôle déterminant.
Deux types de faits justifient le caractère mixte de ces centres de
pêche :
- la nature duale de leur économie qui en fait en réalité des villages
CO-dominants où l’agriculture joue un rôle important similaire à celui des
autres villages du Balantakunda.
- le double caractère de leur population composée de communautés de
pêcheurs exclusifs majoritaires dans la pêche et d’une population de pêcheurs
autochtones CO-dominants impliquée dans les deux types d’économie.
Les pêcheurs tukuZër migrants, les plus nombreux, sont dans leur grande
masse des “Subalbe” (pêcheurs de caste} mais comprennent également des élé-
ments “torod&“, de la noblesse ancienne non castée, et “macube”, de l’ordre
servile pré-colonial. Vivaces au Futa, les survivances idéologiques des
anciennes hiérarchies d’ordres et de castes se sont nettement estompées dans
les centres de pêche casamançais, comme l’indique l’hétérogénéité sociale
des communautés tukulër qui s’y sont transplantées.
Les pêcheurs ‘%.aal pulaareen”
(tukz~lër) des centres de pêche mixtes
de la Casamance estuarienne sont des pêcheurs exclusifs. Au Futa pourtant,
les subaZbe combinaient la pêche à la culture du mil ou à d’autres activités.
Leur déplacement a donc suscité.une modification de leurs choix productifs
dans le sens du passage d’une spécialisation “dominante’ à une spécialisation
exclusive dans la pêche. Ce phénomène est aisément explicable au regard des
problèmes rencontrés par la communauté i;ukuZër pour acquérir une assise fon-
cière propre et dè la spécialisation de cette communauté dans la pêche cre-
vettière qui représente une supériorité nette sur l’agriculture, en termes
de revenus monétaires.
De surcroît, les pêcheurs subalbe ne sont pas des saisonniers car le
mode de fonctionnement de l’économie crevettière - et estuarienne en général
n’est pas strictement saisonnier. Les retours au Futa ne se font que tous
les 2, 3 ou 4 ans pour des raisons essentiellement familiales, même si par
ailleurs, des déplacements fréquents mais irréguliers sont effectués par
les migrants tukulër à i’intérieur de la Casamance et entre celle-ci et
d’autres régions (Gambie, Guinée-Bissau, Cap-Vert . . .). Une nette tendance à
la sédentarisation constitue une caractéristique supplémentaire des pêcheurs
tukuZër de Casamance.
Sur un échantillon de 50 pêcheurs recueilli entre mars et octobre 1982
à Adéan, Baganga et Gudomp par CISSE-MALE (1984 : 30-32), on trouve notamment
que 68 % des gens interrogés résidaient dans un de ces villages depuis plus
de dix ans et que 52 % de l’échantillon avaient fait en Casamance un séjour
de plus de 18 ans, Enfin, 14 % des personnes interrogées ntétaient pas retour-
nées au Futa depuis au moins 15 ans’.
En outre, les “vieux” (pl us de 50 ans) les plus anciens dans les villages
mixtes y payent l’impôt depuis un certain nombre d’années (6 - 7 ans) et
sont même redevenus CO-dominants en se dotant de champs de mil en sus d’une
maison (CISSE-MALE, Ibid : 57 - 58 et 32).
Les pêcheurs migrants waaZo-mah constituent la seconde communauté de
pêcheurs des centres estuariens mixtes, par leur importance et leur rlôle dans
le développement de ces centres. Bien que CO-existants dans certains .villages
(Gudomp, Jatakunda), 1 es pêcheurs waalo-malo et tukutër occupent des aires
géographiques différentes, du fait de l’incompatibilité des types de pêche
(serine de plage, filets à crevettes) dans lesquels ils se sont respectivement

1 7 2
spécialisés. Cependant, la nature de leur presence cians les centres estuariens
de Casamance, est la même dans ses grandes lignes I Le5 pêcheurs de senne 3aalo
wa1o, présents surtout à Gudomp, Jatakunda, Simbandi-brasu et sur la rive
Est du Soungrougrou sont, comme les pêcheurs *~&uZ&, des pêcheurs exclusifs
dont la tendance à 1.a sédentarisation en Casamance est nette. Comme les pre-
miers ils ont construit des maisons en dur dans les centres où il.s sont
implantés aujourd’hui même si, quelquefois, i. 1s maintiennent des résidences
secondaires ailleurs dans la région ou dans leur région d’origine. La plupart
sont installés dans leur résidence actuelle depuis 10, 15 à 20 ans et ne re-
tournent au Uaalo qu’à l’occasion d’événements familiaux. Des familles en-
tières se sont ainsi reconstituées en milieu casamançais tandis que dans
certains cas, des unions matrimoniales entre î~<~~Io-~~~aït3 et autochtones ont
abouti à 1 ‘émergence de
noyaux familiaux ayant des attaches locales.
La seconde composante des centres mixtes est constituée par les pêcheurs
autochtones co-dominants qui, dans leur pratique de la pêche ne se distinguent
pas des‘pêcheurs des villages CO-dominants dont nous avons déjà discutii.
Beaucoup moins nombreux, ceux-ci n’en constituent pas, moins des minorités
significatives.
A Gudomp, par exemple, les pêcheurs mandi;?yw constituent la première
minorité ethnique parmi les pêcheurs; représentant 15,7 % des chefs d’unités
recensés en septembre, ils se situent loin derrière les pêcheurs t;ulcuZ&‘r
(68 X) comme c’est le cas dans la majeure partie des villages mixtes estua-
riens. La faiblesse de ce pourcentage contraste avec la proportion globale
des pêcheurs mandingw (plus de.30 % dans la zone estuarienne) et constitue
un indice supplémentaire confirmant leur plus grande concentration dans les
villages autochtones co-dominants. Toutes les autres minorités de pêcheurs
réunies ne représentent que 16,7 ::l des effectifs de septembre. Parmi elles,
l e s waalo-rdaalo (5,6 X), l e s PëZ (4,6 90) e t l e s &21aFzf; (3,7 /o) r e s t e n t
suffisamment représentés t:andis que les chefs d’unités jonIa et pape2 ont,
ensemble, un poids presque négligeable (2,8 Z>,
Les pêcheurs P~‘Z et rrgornirkz de Gudomp sont, comme les tukz~Ur et les
uaalo-uaah, des pêcheurs exclusifs ne pratiquant pas l’agriculture. Les
Tuiculër mis à part, tous sont pour l’essentiel des pêcheurs de poisson uti-
lisant l’épervier ou le f&I&-féZi?*
Les sennes de pfage idatx7.c WaaZc sont. les
seules à effectuer des migrations régulières vers d’autres points de pêche
et sont en général absentes de Gudomp où elles ne pêchent qu’occasionnelle-
ment à cause de l’abondance des obstacles poses par la pêche crevettière
sans barigo t . Le poids démographique des pêcheurs ~Q~Q;!o-I~I(zLL~~ est, par
ailleurs,
sans commune mesure avec: leur importance économique.
Les pêcheurs mcndingue, jooL et balavzt de Gudomp sont aussi, pour
l’essentiel,des pêcheurs de poisson disposant de moyens divers. Tous sont des
pêcheurs - paysans pratiquant la culture du mil, du mals, du riz, de l’ara-
chide tandis que leurs femmes et les autres éléments de leurs segments de
lignage sont impliqués dans le type d’activités intégrees que l’on trouve
dans les villages CO-dominants du Balantakunda, A Gudomp, le maraîchage,
les plantations de i?anane et: d’ananas, l’artisanat, 1 ‘elevage domestique et
le commerce sont même pI.us import,;nts que dans ces villages à cause de sa
position privilégiék: dans les réseaux marchands, liant 1.a Moyenne Casamance
à Ziguinchor, puis :au reste du pays.
Ainsi, la dynamique de 1’économi.e de la peche à la crevette ou à la
senne de plage, assurée par des populations migrantes qui représentent plus
des deux tiers de 1:~ population de pêcheurs, ,s’ est greffée à des structures
qui, en dernière analyse, ne sont: pas fondament-al.ement différentes de la
pêche CO-dominante telle qu’e1l.e $?st pratiquce 2 iiina, Segafula ou Hamdalay.

1 7 3
La coexistance des formes “avancées” de l’économie halieutique avec ses
formes “paysannes”, se reflète également dans la dualité du mode de commer-
cialisation des produits. A côté du mareyage “en gros”, particulièrement
lucratif, et orienté vers la distribution des prises des types de pêche les
plus rentables (pêche à la crevette, 3 la senne de plage), le micro-mareyage
occupe l’espace’économique constitué autour des captures des unités “secon-
daires” (épervier,f&lé-féZé).
Ce dernier est, en fait, l’activité qui occupe
le plus grand nombre d’intermédiaires dans le secteur. Plus de cinquante re-
vendeurs , pour la plupart des
PëZ-JaZonke, ne disposant que de bicyclettes
et de paniers en osier pour transporter le poisson, acheminent le poisson
débarqué par ces unités vers les villages de l’intérieur et même la Guinée-
Bissau et Ziguinchor. Une partie importante des débarquements est cependant
vendue sur place aux consommateurs du village ainsi qu’aux banu-bana spécia-
lisés dans la transformation artisanale qui reste un sous-secteur décisif de
l’économie de la pêche à Gudomp.
Gudomp, qui est aussi un centre d’avitaillement en essence et de répara-
tion, dispose en effet
des infrastructures de transformation les plus impor-
tantes du Balantakunda. Il y existe une aire (un hangar) de séchage du pois-
son (Gejj) , ainsi que neuf bâtiments construits avec une subvention du Fond
EuropEen de Développement (FED). Ces bâtiments sont répartis en 41 cellules
munies de 123 fours à métorah servant à la production du poisson fumé.
L’économie du métorah, qui rappelle le commerce guinéen des années 50,
est contrôlée par des PëZ-JaZonke travaillant individuellement dans le cadre
d’un circuit bien structuré qui’mérite d’être mieux étudié. Le poisson trans-
formé est acheminé vers Kolda et les marchés traditionnels du métorah, la
Guinée et la Guinée-Bissau.
Parmi les centres estuariens mixtes, Ziguinchor, enfin, mérite une
attention particulière, car il constitue le centre de toute la pêche casa-
mançaise. Premier marché de la région, seul centre d’avitaillement en pièces
détachées,
en moteurs, en filets, en glace pour la conservation, il est égale-
ment le plus grand centre de construction de pirogues-et abrite le coeur du
tissu industriel crevettier dont dépendent organiquement des centaines d’uni-
tés opérant dans la région. Il est un lieu de débarquement et de rencontre
des unités opérant sur toute la longueur de l’estuaire et même en mer et
enregistre les mouvements de flux et de reflux quotidiens les plus importants
de toute la Basse et Moyenne Casamance. Les pêcheurs CO-dominants banja2, pa-
peZ, same, esiliens,mandingue fréquentent en permanence ses deux débarcadères
de même que les pêcheurs maritimes et les pêcheurs exclusifs de l’estuaire.
Il est le plus gros centre de mareyage de la zone et est un point de chûte
pour les intermédiaires waalo-waaZo, nyominka et tukuZ& de même que pour cer-
tains micro-mareyeurs et même une femme jooZa impliquée dans le mareyage. Un
groupe particulier de femmes “ajoola” originaires de Kabrus y jouent également
un rôle original dans les débarquements, le transport et la commercialisation
des prises parallèlement aux mareyeurs et aux bana-bana et assurent en partie
le nettoyage des pirogues.
Lieu de résidence permanente de nombreux lignages tukulër, nyominka,
?fixzalo-l&xzZo dont les activités transcendent même aujourd’hui le domaine exclu-
sif de la pêche, les quartiers de Ziguinchor abritent également une forte
proportion de pêcheurs autochtones exclusifs et CO-dominants dont les attaches
terriennes sont maintenues tant bien que mal par le caractère ambivalent urbain
et rural de cette ville.Il ne fait pas de doute que la prise en compte de l’en--
semble de ces inter-connections, leur analyse et leur insertion dans l’étude
d’ensemble de la pêche casamançaise et des systèmes de production qui lui sont
liés, nécessitent un travail spécifique et systématique à caractère monographi-
que. C’est là une voie de recherche qui reste largement ouverte.

1 7 4
2.5. LES VILLAGES D’AGRICULTEURS--PECHEURS OCi:!\\.SI.C>NNELS
Ce dernier type, qui. est très répandu et qui représente près de la
moitié (45 W,) des centres de pêche en Casarnance,
concerne Les communautGs
dans lesquelles la pêche existe, mais de façrtn totalement subordonnée Zi
d’autres activités dont l’agriculture. Dans ioutes les zones Cont:inentales
évoquées dans cette typologie, il existe des villages où la pêche n’est pra-
tiquée que de façon occasionnelle ou par une infime minorite de pêcheurs
spécialisés dans la satisfaction des besoins communautaires en especes desti-
nées prioritairement à la consommation domestique. Dans certains cas, cette
production occasionnelle donne lieu à un micro,-mareyage rudimentaire qui se
réalise même quelquefois à pied à défaut de bi.:yçlette.
Ainsi, la plupart des vil.lages du Kaluna- (Fincok, Kub.;inaw, Kubalang)
sont des villages où la pêche est pratiquée de façon occasionnelle. Dans le
complexe côtier et les environs de l’embouchrir,?, ces villages comme Jana,
Nomun, Itu, Bajat, Brin apparaissent également comme des villages de piicheurs
occasionnels. Dans tous ces villages, la culture du riz, le maraîchage ainsi
que d’autres activités, dont quelquefois la cusillette des huîtres, prennent
systématiquement le pas sur des formes de pêche pratiquées par une minorité
disposant de faibles moyens matériels et impl iquée surtout 4ans le cadre
d’autres activités.
Il en est de même dans le Yasîn pour des ~illi~ges CO~~IT~ Frankunda,
Sibikuroto, Marakisa, Kuninding, Joye, Jongepr, Sonkokunda, dans le Foni
oriental des environs de Rona (Inor, Manora, Hnyor) ainsi que dans le Eiuje
(Jende, Kunayan, Bakum, Bajari, Buno . . .) . Cependant dans ces dernières zones,
la place de la pêche n’est pas exactement la mi?me dans tous les villages.
Certains comme Frankunda, ne comportent pas plus de 6 unités pêchant toutes
à l’épervier tandis qu’un village comme Buno compte 29 détenteurs d’unités.
Pour des systèmes agricoles qui ne different pas fondamentalement de
ceux en cours dans les villages co-dominants ei: mixtes, la pêc.he dans ces
.
villages de paysans-pêcheurs occasionnels se caractérise PiJir un certain
nombre de faits.
Dans les villages où on trouve le plus gritnd nombre d’unités (une qua-
rantaine) pratiquant la pêche (Kunayan, Bajari et 13uno), le phénomène le plus
frappant est le nombre impressionnant d’unité:; individuelles où le proprié-
taire de l’engin pratique la pêche seul et sans embarcation. Parmi les 35
unités de Bajari, 89 % des pêcheurs travaillent ainsi :seuls et sans pirogue.
Il en est de même à Kunayan (73 X) et à Buno (83 :X>I. A Kunayan, tous les
pêcheurs sont mandingue et à cette homogénéitc ethnique correspond l’exclusi-
vité de la pêche à I’épervier.
L’hégémonie mandinsgue sur la pêche est percep-
tible également à Bajari où
ceux-ci constituent 85 :% des pêcheurs et à
Buno (64 X) ; les autres groupes de pêcheurs représentés dans ces villages
sont des JooZa, des Balnnt et quelques rares Xr~jtz21: et PGl.
Paradoxalement, les villages où l’on trouve le moins d’unités de pêche
(7 à 15) sont ceux où l’on trouve la plus grande proportion d’unités munies
d’embarcations ou la plus grande diversité technologique (/cii~~‘-fcsî&, filet à
crevette, filet dormant, épervier:). Dans ces ‘CI~, c’est la íaiblesse .eutrême
-
du nombre des individus pratiquant. la pêche qui indique la priorité absolue
donnée à l’agriculture dans les S:ystèmes de production locla~lx, au détriment
de la pêche qui est l’affaire d’une minorité chargée en pari-i.culier d’assurer
la subsistance de la communauté. La fraction .1(> la producti!:ln cvacuée à travers
les circuits commerciaux est minime dans l’ensenh le de ces vi. 1 lnges, comme le
montre la physionomie même du micro-mareyage :lui #est le fai. 1 dcxs pêcheurs eux-
mêmes. Souvent
ceux-ci ne disposent pas de vi;; ‘\\ I?t: font q~~~~lcl~!el’ois des tra-
jets de plusieurs kilomètres à pi I?d.

! 75
Le caractère généralisé, la large distribution spatiale des formes de
pêche occasionnelles en Casamance, les spécifités de ces formes dans ‘l’espace,
suggérent l’intérêt de leur étude pour une compréhension du fonctionnement
des systèmes de production dans le secteur de la pêche en Basse et Moyenne
Casamance. Ces formes,en effet, “disent quelque chose’ sur la pêche et à ce
titre méritent d’être plus systématiquement décrites et analysées dans le
cadre de recherches ultérieures. Pour le moment, leur identification en tant
que type théorique et “réel” distinct offre une base appréciable pour la
réalisation d’un tel travail.
La faiblesse de l’importance accordée à l’arachide par rapport aux
autres cultures dans les villages étudiés peut faire penser à une sous-estima-
tion du poids réel de cette culture dans les systèmes productifs en question.
Cette donnée contraste en particulier avec les résultats obtenus dans huit
villages de Basse Casamance où l’arachide est la culture principale avec 49 %
des surface cultivées (SALL et al., 1983 : 15-16). Dans les villages de pay-
sans-pêcheurs que nous avons étudiés, les paramètres sociologiques (temps de
travail, destination des produits et importance stratégique...) ont prévalu
dans l’identification de la place respective de chaque produit dans les sys-
tèmes de production. L’évaluation des surfaces cultivées ajouterait sans nul
doute un élément précieux de précision et de “contrôle’ des informations
obtenues. Nous doutons cependant qu’un tel travail puisse remettre en cause
les rapports entre produits tels qu’ils ont été perçus. Il est bon de noter,
à cet égard, que dans l’échantillon utilisé par SALL et al., le seul village
de paysans-pêcheurs est celui les cultures de plateau sont les moins impor-
tantes tandis que l’arachide n’y est pas dominante (Ibid : 15 - 16).
C O N C L U S I O N
Le tableau de la pêche casamançaise à l’époque actuelle montre clairement
l’importance désormais acquise par celle-ci, Par rapport aux statistiques dis-
ponibles concernant la pêche au Sénégal (27000 pêcheurs environ)(l), celles
obtenues en Casamance étonnent par leur ampleur (9000 pêcheurs). Les rapports
ethno-démographiques dans le secteur seraient actuellement inversés en faveur
des pêcheurs autochtones, largement majoritaires aujourd’hui, alors que jus-
qu’à présent ceux-ci étaient considérés comme des non-pêcheurs, à la ‘remorque
des groupes migrants professionnels.
Cependant, si ces données nouvelles ne peuvent manquer d’apporter des
éléments décisifs pour comprendre les tendances actuelles du secteur, elles
méritent toutefois d’être examinées avec prudence, à la lumière des informations
qualitatiyes dont nous disposons en ce qui concerne la pêche en Casamance.
Ce n’est pas un hasard, en effet, que près de la moitié des centres de
pêche de la région, soit constituée de villages où la pêche n’est pra,tiquée
que de façon occasionnelle, à temps partiel et avec des moyens de faible
envergure, Ce n’est pas un hasard non plus que 1589 unités (soit 36 %) tra-
vaillent sans embarcation leur appartenant en propre. De surcroît, la majeure
partie de ces unités fonctionnent dans les villages CO-dominants où nous savons
être concentrée la majorité des unités autochtones.
(1) Compte non-tenu de la plupart des unités estuariennes de Casamance, généra-
lement absentes des recensements précédents.

1 7 b
De l’ensemble de ces faits, il ressort ~.a ncccssité de ne pas dissocier
Les informations quantitatives brutes (dont WI ne -eut que souligner l’im-
portante pour les politiques de developpement act’rtel les) de la dynamique
qualitative donnée par l’anal.yse typologique :3c la pêche dans ses rapports
avec les systèmes de production.
Ainsi seulement devient-il possible d’articuler le général au particu-
lier, de situer les tendances locales dans la mouvante globale ou de relati-
viser les tendances générales par les variations à l’échelle d’une région
historique, d’un terroir.
L’analyse confirme à ce titre, le caractere déterminant des contraintes
écologiques et des stratégies “terriennes” et agricoles dans le développement
de la pêche parmi les communautés casamançaises.
El, 1 e montre également comment
la dynamique engendrée par ce développement modifie 2 SOR tour, la position
des termes constitutifs de ces stratégies.
Tandis que les pêcheurs migrants saisonniers, ou sédentarisés ont fait
des choix - à la base même de leur présence dans la région - qui leur ont
permis de se concentrer dans les zones écologi.ques à haut rendement (zone
maritime, embouchure, amont de l’estuaire pour la pêche au usas-t:ilapia.. .>
et dans les types de pêche à rentabilité optimale, la situation des communautés
autochtones présente une nette ambivalence. Celle-C:i reflète la tendance
générale de celles-là à réaliser l’exploitation optimale des possibilités of-
fertes par les différents milieux auquels elï.es ont accés : elle exprime aussi
le compromis régissant les impératifs de l’économie marchande et les exigences
de sécurité alimentaire qui son.k omniprésentes da.ns les c.alculs de ces commu-
nautés. Compte tenu de l’ampleur et du nombre des initiatives de développement
entreprises dans la région, de telles réalités méritent d’être pleinement
prises en compte.
B 1 Y L L 0 G R A P il 1 E
CISSE-MALE (S.), 1984.- L’immigration toucouleur en Casamançe. Exemple de
trois villages du Balantacounda. IfZmoire de maîtrise .- Université de
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déplacements en Casamance. Anthropologie mari time CETMA-CNRS, cahier
n”2, pp 135 - 142.
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104.
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- -
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! 7 ‘7
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Dakar.
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les migrations de Nyominka (îles du Bas-Saloum sénégalais), Bull. IFAN,
T39, série B (4) : 837-889.

1 7 s
TABLEAU .1. - Le calendrier des principales activitds de production (exemple de Mlomp)
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SAISON
ACTIVITES
PRODUCTEURS
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I
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1 Novembre a Juillet
,--) Récolte de vin de palme
--) Hommes
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I
l
i Décembre à fin mai
--) Cueillette des huîtres
--) Femmes
/
I
I
1 Janvier - février
--) Début du maraîchage
--) Femmes
l
I
I
1 Janvier à avril-mai
--) Campagne de construction des mai-
--) Hommes
I
l
sons
I
I
I
1 Janvier à juillet
--) Préparation de l'huile de palme
--) Hommes et femmes
I
I
I
I Avril à mai
--) Défrichage des champs pour les
I
I
cultures d‘hivernages (riz =
--) Hommes
l
l
semis direct)
I
/
I
1 Mai
--) Cueillette du néré
--) Femmes
I
I
I
1 Mai - juin
--) Coupe de bois de chauffe
--) Femmes
I
Juin - juillet
--) Culture du riz en semi-direct
I
I
du mil, du maïs, pépinières pour
--) Hommes
I
I
le repiquage
I
l
I
1 Juillet à septembre
--) Culture de l'arachide
--) Homnes et femmes
I
I
Culture et repiquage du riz de
--) Homne (cultures)
I
I
bas-fond
et femmes (repiquage) 1
Septembre a décembre --) Récoltes
--) Hommes et femmes
i
I
I Décembre à août

--) Migrations de travail vers les
--) Hommes et fetmnes
I
grandes villes
(jeunes
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I
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,Toutes saisons
--) Pêche
--) Hoamies
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SAMBA : Au regard des effectifs importants de pêcheurs et d”unités de pêche
avancfs
pour la Casamance, ne serait-il pas uti1.e de préciser s’il
s’agit de pêcheurs occasionnels ou pernaments ? D’autre part,ne serait-
il pas plus pertinent, d’un point de vue historique, de raisonner dans
le cadre sénégalo-guinéen (Bissau) en raison des échanges de pêcheurs
entre ces deux pays ?
C. DIAW : Effectivement, toutes les unités n’ont pas ie même poids et il. y a
une forte variabilité dans le temps de travail investi. Une étude sera
entamée prochainement à 1’ échelle sénégalo-guinéenne w
TOURE : Les critères utilisés pour la typologie des villages et C:ampements
de pêche ne sont pas en relation avec ceux retenus par les biologistes
pour le choix de leurs points d’enquête. Il serait très utile d’homogé-
néiser le choix des critères entre différentes disciplines.
FO NTANA : En raison de l’intégration observée entre pêche et agriculture,
quelle est la place de l’agriculture par rapport à 1-a pêche et quelle
est l’évolution des rapports entre les deux secteurs ?
C. DIAW : Le sondage actuellement en cours permettra de répondre à ces ques-
tions.