LE PHENOMENE D'UPWELLING LE LONG DES COTES DU...
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LE PHENOMENE D'UPWELLING LE LONG DES COTES DU SENEGAL
CARACTERISTIQUES PHYSIQUES ET MODELISATION.
par C. TEISSON
RESU?IE
L'upwelling sénégalais présente les caractéristiques habituelles
des régions d'upwelling.
La circulation longitudinale se compose d'un courant de surface
équatorial et d'un contre-courant en profondeur dirigé vers les
pôles. La circulation transversale est constituée d'un écoulement
vers le large en surface et d'un écoulement de compensation vers
la côte située sous la pycnocline. Les structures hydrologiques
observées dépendent de la topographie du fond. Sur la côte nord,
où le plateau continental estétroitet abrupt, l'upwelling se pro-
duit uniquement à la côte. Sur la côte sud, où le plateau est large
et en pente douce, l'upwelling est maximum sur le rebord du plateau
continental et une deuxième cellule de circulation apparaît sur le
milieu du plateau.
Les eaux d'upwelling sont bordées vers le large par un front en
surface, associé à un intense "jet"équatoria1. Ce front migre
transversalement suivant l'activité de l'upwelling. L'upwelling
présente des phases d'intensification et de relaxation liées au
régime des vents. Le temps de réponse à une phase de vents favo-
rables est plus long en début de saison froide (forte stratifica-
tion), qu'en milieu de saison. Les eaux situées au-dessus du re-
bord du plateau répondent plus rapidement que les eaux côtières.
L'upwelling entre la Presqu'île du Cap Vert et Kayar est très ins-
table à cause de la mauvaise orientation de la côte aux vents
dominants : cette région joue le rôle de barrière hydrologique
entre la côte nord et la côte sud.
+ Ingénieur-océanologue, allocataire de recherche ORSTOM

ABSTRACT
Upwelling of Senegal exhibits rommon features of upwelling areas.
The alongshore circulation consists of an equatorward surface
current and a poleward undercurrent. The cross circulation is
constitued by a surface seaward flow and a shoreward compensation
‘bayer just below the pycnocline. The observed hydrological features
depend on bot.tom topography. Along, the north toast, where the con-
tinental she1.f is steep and narrow, upwelling only occurs inshore.
On the south toast, where the shelf is broad with gentle slope,
main upwelling occurs at the shelf break and a second circulation
ce11 appears on the innershelf.
Upwelling water masses are bounded
seaward by a surface front associated with an intense equatorward
jet. This front migrates transversely according to upwelling ac-
tivity. Upwelling presents intensification and relaxation periods
related to wind fluctuations. The time response to a favourable
wind phase is greater at the beginning of the cold season (strong
stratification) that in mid season. Water above the shelf break
answers faster than inshore water. Upwelling between Cap Vert
Peninsula and Kayar is very unsteatdy because of the bad orienta-
tion of the toast to prevailing wi.nds : this area acts as an hy-
drological barrier between north and south toast.

SOMMAIRE
INTRODUCTION
1. DESCRIPTION DE L'UPWELLING SENEGALAIS - CARACTERISTIQUES
PHYSIQUES MOYENNES
1.1. Limite géographique et présence au cours de l'année de
l'upwelling
1.2. Distribution de la température, salinité, oxygène. Strati-
fication
1.3. Distribution des sels nutritifs
1.4. Largeur de la zone d'upwelling
1.5. Courantologie.Ecoulement parallèle et perpendiculaire à la
côte
1.5.1. Circulation au nord de la Presqu'île du Cap Vert
1.5.2. Circulation au sud de la presqu'île du Cap Vert
1.5.3. Comparaison avec des schémas simules de circulation
1.6. Origine des masses d'eaux"upwelléeS! Vitesse verticale ca-
ractéristique. Temps de résidence des eaux riches dans la
zone euphotique
1.7. Existence et position des fronts. "Jet frontal".
2. MODELISATION DE L'UPWELLING - FORMATION ET EVOLUTION
2.1. Schéma de développement d'un upwelling saisonnier
2.1.1. Le Modèle Hagen
2.1.2. Evolution saisonnière de l'upwelling sénégalais
2.2. Modèle d'upwelling dépendant du temps sur le milieu du
plateau continental et sur le talus
?.2.1. Formulation
?.2.2. Discussion
?.2.3. Application du modèle ? la radiale du Cap Vert
CONCLUSION

i
5
Fig.1 .- Le littoral sénégalais.

INTRODUCTION
Le phénomene d’upwelling est sans aucun doute l’aspect principal de
l’hydroclimat des cotes sénégalaises. Responsable des richesses
halieutiques des eaux marines cotières,
son impact sur la pêche n’est
pas à démontrer. Pour en comprendre le mécanisme physique, il est né-
cessaire de décrire tout d’abord ses variations spatio-temporelles,
puis tenter d’isoler, grâce aux modèles, les paramètres susceptibles
d’influer sur le phénomène.
Qu’est ce qu’un upwelling ?
L’upwelling cotier est un processus océan-atmosphère à moyenne échelle
qui apparait le long des côtes ouest de la plupart des continents à
basse et moyenne latitude. Dans un upwelling, les eaux à une profondeur
de quelques centaines de mètres, ou moins, sont amenées sous l’action
du vent dans la zone euphotique au voisinage de la côte ; on y observe
un mouvement ascendant des eaux profondes, riches en sels nutritifs, vers
la surface. Ces sels nutritifs, amenés dans les couches superficielles’
où règnent une photosynthèse importante due à l’insolation, favorisent
le développement du phytoplancton, premier élément du réseau trophique :
approximativement 50% de la production mondiale de poisson provient de
zones d’upwelling.
La connaissance “physique” d’un upwelling se ramène sommairement à
l‘étude de la vitesse verticale des masses d’eaux et à la répartition
spatiale et temporelle des sels nutritifs, liée à la circulation.
La figure 2 propose deux représentations de l’écosystème d’upwelling,
sous forme de diagramme et de schéma. L’aspect biologique - distribution
du phytoplancton, du zooplancton, broutage, processus hétérotrophiques-
ne sera pas abordé ici. L’analyse des processus physiques peut être
approchée en deux étapes :
- dans un premier temps, l’étude à moyenne échelle de la circulation
avec une attention particulière aux régions situées près de la surface,
au champ de vitesse verticale, à la structure température-salinité.
- dans un deuxième temps, l’examen des phénomènes à petite échelle
(comme la turbulence, les processus de mélange, les cellules de
Langmuir ou les ondes internes) et à grande échelle (interaction
océan-atmosphère,
courant de type permanent...).
L’état actuel des connaissances sur le milieu sénégalais - le type de
données dont nous disposons - limite notre étude à la premizre étape. Elle

Ecocessus
controlant
I
Ionnées du système
I
,
le système
1 LI
I
, C
I
I
Météorologie
I
8
c
;
:- 1
Y
l _
1
Dynamique
4
des couches
I
a
I
superficielles
I
de l'océan
1
I
i
Vitesse I
verticale'
Fig. 2 a .- Diagramme de l'écosystème d'upwelling
(d'après BARBER 1977‘)
w
Tension du vent
=e
Transport d'Ekman
IJpwelling
Fig. 2 b.-
Schéma d'upwelling (d'après BAKUN i977)

peut être structurée autour de trois thèmes, en se référant au programme
duCUEA*:
- Circulation à moyenne échelle et hydrographie.
Elles fournissent la description de base de l’environnement physique,
le champ de l’écoulement, la distribution de densité, la variabilité
spatiale et temporelle.
- Dynamique des couches supérieures de l’océan.
Elle met l’accent sur les détails du transport de masses d’eaux de
la côte vers le large, dû au vent : nature de l’écoulement et réponse
aux contraintes dues àun vent variable
- Océanographie physique théorique.
L’étude théorique de l’upwelling côtier relève de la mécanique d’un
fluide stratifié en rotation, sur un plateau continental de profondeur
variable, le long d’une frontière côtière irrégulière. C’est un sujet
complexe, dépendant d’un grand nombre de paramètres. L’étude s’effectue
au moyen de “modèles conceptuels”, modèles très incomplets, ignorant
délibérément certains paramètresJet dont le but est de mettre en évidence
les traits principaux du phénomène.
L’étude à moyenne échelle doit aboutir à la détermination concrète des
caractéristiques physiques de l’environnement :
- largeur et position de la zone d’upwelling.
- champ de température - stratification - distribution des facteurs
abiotiques du milieu.
- écoulement parallèle et perpendiculaire à la côte.
- profondeur d’origine des eaux d’upwelling.
- vitesse verticale caractéristique.
- existence et position des fronts.
- temps de résidence des eaux riches dans la zone euphotique.
Cette entrée en matière avait pour but de définir l’écosystème “upwelling”,
de situer la part des processus physiques et la démarche utilisée pour
appréhender le phénomène. Plus modestement, à partir d’une synthèse des
observations effectuées, cet article tracera, dans une première partie,
les grandes lignes descriptives de l’upwelling sénégalais. La deuxième
partie s’intéréssera .3 l’évolution de l’upwelling dans le temps et à ses
variations liées au régime de vent.
* C U E A:Coastal Upwelling Ecosystem Analysis, composante de I’IDOE
(International Decade of Ocean Exploration), publie CUEA Newsletter, Duke
University Marine Laboratories Reaufort,(North Carolina)28516 U.S.A.

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6
1. DESCRIPTION DE L'UPWELLING SENEGALAIS,CARACTERISTIQUES
PHYSIQUES
MOYENNES.
1.1. LIMITE GEOGRAPHIQUE ET PRESENCE AU COURS DE L'ANNEE DE L'UPWELLING.
L'upwelling le long des côtes sénégalaises fait partie de l'upwelling
du Nord-Ouest de 1'Afrique)qui s'étend suivant les mois de l'année
de 10°N à 33"N. Il est directement lié à la présence des alizés sur
l.es régions considérises qui influent sur la durée moyenne de la saison
d'upwelling.
Tableau 1 : Durée moyenne des saisons d'upwelling le long de la côte nord
ouest africaine (d'après SCHEMA1ND.A et NEHRI.NG 1975, WOOSTER et a1 1976)
Cap Juby
Baie de Corée
Toute l'année
12 mois
Cap Blanc
12 mois
Nouakchott
Octobre à juin
9 mois
Cap Vert
Fin novembre à
5.5 mois
Fin décembre à
Cap Roxo
2.5 mois
Cap Verga
1 mois
L'étude de l'upwelling nord ouest africain s'estdéveloppée à partir
de 1970 avec les campagnes CINECA"(navire "Alexander von Humboldt" 1970-
1973) puis les campagnes JOINT-l du groupe CUEA à partir de 1974.
--
---
* CINECA : Cooperative Investigation of North East Central Atlantic

L'attention s'est surtout portée sur les régions situées au voisinage
du Cap Blanc et du Cap Corveiro,et les campagnes de grande envergure
descendaient rarement en dessous de Dakar. Plus au sud, BERRIT (1977)
a décrit de manière très complète le milieu marin de la Guinée Bissau.
Au niveau du Sénégal, les données qui permettent de préciser l'hydro-
logie locale en période d'upwelling sont nombreuses et disparates :
- 7 radiales couvrant le plateau continental, de la côte jusqu'aux
fonds de 500 m, de Saint-Louis à la Casamance, effectuées par le
"Gérard Tréca" en novembre 1960, février et mars 1961 (publié en
février 1962) ; mesures de températu,re et salinité.
- la radiale du Cap Vert, de la côte aux fonds de 100 m visitée
chaque semaine par ROSSIGNOL de juillet 1962 à septembre 1963 -mesures
de température et salinité.
- les campagnes "Laurent Amaro" de 1967 à 1970 - 9 radiales effectuées
tous les deux mois couvrant l'ensemble du littoral sénégalais jusqu'aux
fonds de 1 500 m - forment la meilleure couverture hydrologiquede la
zone réalisée à ce jour. Mesures de température salinité, oxygène dissous.
- à partir de 1974, l'action de recherche a porté sur la courantologie
(REBERT 1974, 1977 non publié).
- depuis cet année (1982), le suivi hebdomadaire de la température sur
la radiale du Cap Vert a repris, à bord du "Cauri".
- les travaux de D. TOURE (1982) sur l'upwelling en baie de Gorée apportent
de précieux renseignements à une échelle plus fine sur les remontées
d'eaux profondes à la côte et leur répartition au cours de l'année.
- les mesures journalières des températures et salinités à six stations
côtières réparties le long du littoral (Saint-Louis, Kayar, Yoff, Thiaroye,
Mbour et Cap Skirring) viennent compléter les données recueillies au large.
D'une région à l'autre, l'upwelling côtier présente une grande variété
d'aspects dus aux conditions spécifiques locales (vent, configuration
de la côte, topographie du fond). Nous verrons plus loin que le littoral
sénégalais peut être divisé en trois grandes régions aux caractéristiques
hydrologiques distinctes en période d'upwelling. Il serait cependant
illusoire de vouloir isoler l'upwelling sénégalais de l'upwelling nord-
ouest africain et les campagnes de grande envergure (réalisées par
"1'Alexander von Humboldt" en février 1973 et le "Capricorne" en janvier
1974 et février 1976) fournissent une vue d'ensemble indispensable du
phénomène : ceci explique que notre étude débordera parfois des strictes
frontières géographiques du Sénégal. Enfin, depuis 1977, les mesures de
la température de la mer obtenues par télédétection grâce à Météosat au
voisinage des côtes de Mauritanie et du Sénégal apportent une nouvelle

, 1 1 1
- ~ . ~ - -
,lO
dimension dans l'étude de l'upwelling en permettant de suivre, pratiquement
en temps réel, l'évolution des structures hydrologiques sur de vastes
régions.
1.2. DISTRIBUTION DE LA TEMPERATlJQE, SALINIT'E, OXYGENE.STRATIFICATION.
D'après SCHEMAINDA et al. (ta'bleau I) l'upwelling du Sénégal dure de
-m-
novembre à mai. Afin d'len étudier les caractéristiques moyennes, nous
nous placerons en févrkr, période où l'upwelling peut être considéré
comme pleinement développé et permanent (nous reviendrons sur la notion
de stationnarité de l'u,pwelling dans la deuxième partie et étudierons
plus en détail la formation et l'évolution du phénomène).
La campagne Alexander von Humboldt de février 1973 nous permet d'avoir
une vue d'ensemble de la situation en période d'upwelling développé le
long des côtes sénégalaises (fig. 3) :
- en surface sur la Grande Côte,
les eaux les plus froides (inférieures
à 17') sont observées au voisinage immédiat du rivage ; ces eaux
d'upwelling sont limitées vers le large par un front qui se traduit en
surface par un resserrement des isothermes 17-18-19°C. Ces isothermes
sont grossièrement parallèles à la côte, sauf entre la Presqu'île du
Cap-Vert et Kayar où ils ont tendance à s'en rapprocher ;
les remontées d'eaux froides semblent moins int'enses à ce niveau
(cf "Remarques" en 1.4. )
- au sud du Cap-Vert!, on observe une structure d'upwelling en forme de
langue qui s'étend méridionalement sur plus de 300 km. Les eaux froides
n'apparaissent plus ii la côte (sauf en baie de Garée), mais sur le
milieu du plateau continental. Une rapide ca'lcul en fonction du bilan
thermique nous montre que la structure en forme de langue ne peut simple-
ment être due à l'advection des eaux froid!es apparues sous la Presqu'île
et à leur réchauffement progressif lors de leur descente vers le Sud :
d'après l'atlas de HASTENRATH et LAMB (1977), le gain net de l'océan à
la latitude du Sénégal en février serait dle 12 = 300cal/cm2/jour. En
négligeant les phénomènes de mélange latéral et en supposant que la
couche de surface est homogèneisée sur une épaisseur h d'une dizaine de
mètres, on obtient un rikhauffement de :
a0 = Q /J C h c 0.3oC/jour
avec C : capacité calorifique de l'eau de mer.

. . - _

_ . . _ “ . “ _ .

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Tig.3 :
Isothermes de
surface du 26 février au
7 mars 1973
(Campagne Alexander
von Kumboldt)
*+***+x
‘1.
-
x
++++++t+*
.
s
çA
*-
v
*+t+ttitt+c+t
.3
i
2

Nous verrons au paragraphe 1.5
que 1I.e courant de surface sur le
plateau au sud du Cap Vert porte au Sud-Sud-Ouest avec une vitesse
de l’ordre de 25 cm/s, Le gradient de température longitudinal à partir
d’une région source d”upwellingprise en baie de Gorée serait de l’ordre de 1”
pour 70 km. Lors de la campagne, les eaux observées sous la Presqu’île
du Cap-Vert avaient. une température de 16.8”C,, Si Le bilan thermique
devait seul être pris en compte)
ces eaux
en atteignant la latitude du Cap Roxo situé 300 km plus au sud, auraient
du se réchauffer de 4.2 OC, soit une température de 21’C. Les eaux
inférieures à 19” observées au niveau du Cap 1~0x0 ne peuvent être attribuées
au simple réchauffement des eaux, et proviennent donc d’une remontée
d’eaux froides à ce niveau. Ainsi, la structure en forme de langue
correspond à un upwell.ing actif sur le milieu du plateau, tout le long
du littoral sud sénégalais.
La comparaison des régions d’upwelling au nord et au sud du Cap Vert
peut être poursuivie en étudiant les coupes perpendiculaires au rivage
réalisées au niveau de Mboro (15” 12’N) et Sangomar (13” 5dN), c’est à
dire dans des régions où la côte est à peu prZs rectiligne et où lton
peut espérer s’affranchir des effets d’upwelling dynamique dus à la
courbure des lignes; de courant (effet de cap,par exemple). Ces radiales
ont été effectuées par le Laurent Amaro en février 1969 (fig.4 et 5)
- à Mboro, sur la côte nord, les eaux froides profondes remontent le
long de la côte : un E;cart de 2’C existe entre les eaux côtières et
les eaux du large. La salinité varie très peu en saison froide et
n’apporte aucun compliiiment d’information sur les remontées d’eaux
profondes ; par inférence les isopycnes suivront l’allure des isothermes.
Par contre l’oxygène dissous se révèle un très bon traceur, les eaux
profondes nouvellement remontées, pauvres en oxygène (inférieures à 3 ml/l)
apparaissant à la côte.
- à Sangomar,
sur ‘la côte sud, les eaux les plus froides en surface se
trouvent au-dessus des fonds de 25 à 50 m, au milieu du plateau (tempé-
rature inférieure 2 16’). Au voisinage immédiat de la côte, les eaux sont
plus chaudes, à 18.9”. La saliniti; varie toujours très peu, les eaux chau-
des situées sur les fonds inférieurs à 20 !m sont cependant légèrement plus
salées. Les isoplèthes d’oxygène suivent remarquablement l’allure des iso-
thermes, les eaux de teneur inférieure ?i 3 ml/1 apparaissent au-dessus des
fonds de 40 m. Sur les petits fonds, les eaux sont sursaturées en oxygène
(plus de 7 ml/l)
: c’est peut-être le signe d’une activité photosynthétique
intense.

20
10
Iy,-
-
80
I100 m150 m
. 20
- 40
- 60
. 80
- 100 m
Fig.
4
.-
Conditions de milieu sur la Grande Côte en pÉriode
d’upwelling (radiale de Mbor.) le 20 février 1969).

80 km
Température
C”c>
Salinité
S i g m a - t
(Z.3)
Fig. 5
.-
Conditions tde milieu sur le Petite (Côte en période
d’upwelling (radiale de Sangomar le 22 février 1969).

A partir des observations effectuées sur la radiale de Sangomar,
certaines hypothèses peuvent être avancées pour expliquer le
“décollement” de l’upwelling par rapport à la côte :
de 12”N à 14”40N (au sud de Dakar) le plateau continental est large
et descend en pente très douce. A 15 km au large de Sangomar, les sondes
indiquent seulement 10 m ; le record se situe au niveau du Cap Roxo
où à 80 km au large, on ne se trouve que dans les fonds de 15 m. Les
eaux froides d’upwelling pour atteindre la côte, devront parcourir une
grande distance sur des petits fonds, et subiront un réchauffement
intense : c’est ce qui explique les eaux à 18.9’ observées dans les
fonds de 10 m à Sangomar. Ces hypothèses concorderaient avec les
travaux de BRUNET (1969) pour qui la Casamance joue le rôle de bassin
de concentration en saison sèche. Le front observé sur les fonds de 20
mètres marquerait la limite entre la circulation thermohaline côtière
et la circulation d’upwelling.
Insolation
Evaporation
Front thermonalln
20 mètres
Bassin de concentration
Circulation thermohaline
Circulation
D’après Les observations, le début du décollement des eaux froides de
la côte se situerait à Mbour, là où les isobathes inférieurs à 20 m
s’éloignent de la côte (isobathe 20 m à 6 km au large devant Popenguine,
à 25 km devant Joal). De Dakar à Mbour, les isobathes 15-20 m sont proches
de la côte et les eaux froides peuvent atteindre le rivage. Notons au
passage la faible représentativité de la station côtière de Mbour, qui

située à la frontière des processus thermohalins ne pourra donner une
image fidèle des Condit:ions de milieu qui regnent sur le plateau.
D’autre part, la direction des c.ourants de surface dus au vent a une
composante orientée vers le large (cf. 1. .5 11. Les eaux d’upwelling
arrivant en surface auront tendance à s’éloigner vers le large, en
suivant d’ailleurs la direction moyenne du courant de surface d’Ekman
(TE~SSON 1982) (fig. 13 ).
La persistance de la langue d’upwelling au milieu du plateau continental
jusqu’à la latitude du Cap Verga serait caractéristique du maximum
d’extention vers le sud de l’upwelling nord-ouest africain : cette
structure a également éte observée par le Capricorne en février 1976
(fig. 6 ). Les années où les alizés sont faibles ou mal établis - en
1970 par exemple- la langue d’upwelling sous le Cap Vert n’est pas
aussi développée et on observe une deuxième langue d’eaux froides au
niveau de l’brchipel d.es Bissagos (fig. 7 ) . On peut donc penser, par
opposition, que lorsque les alizés sont forts et bien établis, l’up-
welling du Cap Vert. descend suffisamment sud pour “absorber” l’upwelling
des Bissagos et ne former qu’une structure unique comme celle mise en
évidence par le Capricorne en février 1976.
1.3. DISTRIBUTION DES SELS NUTRITIFS
Les seules données don.t nous disposonssur la distribution des sels
nutritifs au large du Sénégal sont celles recueillies par”1’ Alexander
von Humboldt” en février 1973. A partir de ces données, nous avons
réalisé deux coupes, perpendiculaires à la côte au niveau de Saint-Louis
et du Cap ROXO, censées représenter la répartition transversale
moyenne des sels nutritifs pour les régimes d’upwelling de la côte
nord et de la côte sud (fig. 8 et 9) L
A Saint-Louis, l’enrichissemenf: en phosphates et nitrates est stric-
tement côtier et se limite aux fonds inférieurs à 80 m : on y observe
des teneurs deux
a trois fois plus fortes qu’aux stations du large.
Au Cap ROXO, le plateau continental est très large, et les eaux
d’upwelling n’atteignent pas les fonds de moins de 15 m. L’enrichissement
maximal s’effectue dans les couches juste au dessus du rebord du plateau
continental. En surface, les teneurs les plus élevées sont observées au
dessus du talus continental ; elles sont cinq à dix fois plus fortes
que les teneurs des prélèvements effectués à la côte ou très au large.
Notons que sur une coupe verticale,, les teneurs en sels nutritifs augmentent
à partir du moment oii l’on rencontre l’isotherme 18”. Comme nous ne
disposons souvent que de mesures dc température 7 nous pouvons associer,
approximativement, l’isotherme 18” au début (de 1 ‘enrichissement en
sels nutritifs.

- DE DAKAR A FREETOWN -
d ‘apr&s ia carte 597F;
Fig.-G : Isothermes de surface
-
du 2 au 13 février 1976
(d’après la campagne CAP.76 02)
18
\\
-

----
-^.-. “---
‘18
Fig.- 7
: Isothermes de surface
du 21 au 25 février 1970
(d’après La campagne L.A. 70 03)

a2
m k (d u 7

200 km
15n
100
50
n
2m-J km
1.50
Inn
50
0
2no km
150
Ino
5n
n
n
n
n
in
nn
Inn
2n(
Température
Ui trates
!Jhosnhates
I
-cw
( yatg/l)
C yate/l)
Fig. 9
.- aépartition d e l a t e m p é r a t u r e e t d e s s e l s n u t r i t i f s a u C a p ROXO l e ?3 f é v r i e r 197'3.

1.4. LARGEUR DE LA ZONE D'UPWELLING
La largeur de la zone d’upwelling est un paramètre important puisqu’elle
permet de préciser l’extension vers le large de la zone enrichie. Il
est par contre malaisé d’en donner une définition précise : elle peut
être limitée par un isotherme arbitrairement choisi ; elle est plus
facile à visualiser lorsqu’un front borde la zone d’upwelling vers
le large. En fait l’influence de l’upwelling peut se faire sentir
très au large.La fie.10 d’après
WOOSTER et a1 (1976) représente l’écart
-
mensuel entre les températures au large du Cap Vert et les températures
du milieu de l’océan à la même latitude : de juin à novembre, le
gradient zona1 de température est faible, les températures de surface
varient de moins d’un degré par rapport à celles du milieu de l’océan.
Mais la saison d’upwelling est très prononcée : de janvier à mai, les
eaux sont 4.5 OC plus froides que celles du milieu de l’océan, jusqu’à
plus de 100 km du rivage. A 600 km au large, on note encore un
déficit de 2.5 “C par rapport au milieu de l’océan.
L’enrichissement du au strict upwelling côtier est beaucoup plus res-
treint dans l’espace. Un paramètre fréquemment utilisé pour caractériser
la limite entre processus côtier - tel l’upwelling - et processus du
large, est.le rayon de deformation barocline de Rossby : il représente
la distance à l’intérieur de laquelle les processus côtiers jouent un
rôle et different des processus du large. On l’obtient en étudiant la
réponse d’un océan à deux couches à un vent constant :
R = + x (gh &) 1’2
P
avec
5 : paramètre de Coriolis : 3.7 10-5 -1
s
au niveau du Sénégal
5 : accélération de la pesanteur
Q : densité de la couche supérieure
Ajp : écart de densité entre les deux couches (de part et d’autre de
la pycnocl ine)
il : épaisseur de la couche de surface au large, jusqu’à la thermocline.
En utilisant les données de la radiale du Cap Vert de février 70(fig.l1
on obtient :
s z 1025 kg/m3 ; h = 1026.2-1025
D
= 1.2. 10e3 : h = 60 mn
J
1025
R =22km

LONGTTIJDE OUEST
MOIS
MOIS
40”
-L -2.5
F
Y
b
Fig.- 10 : (d'aprtis WOOSTER et al. 1976)
a) Températures moyennes mensuelles de surface sur le bord oriental de l'Atlantique Nord
D) Ecart mensuel entre la température à la côte et la température au milieu de l'océan
c) Ecart mensuel entre la température au large du Cap Vert et la température au milieu de l'océan
La trame représente les écarts de plus de 3.5"

\\
N f; I-J
7
ic . . I

CQ 5

Au niveau. de pentes suffisamment abruptes (comme au nord du Cap-Vert),
R peut être interprété comme une distance depui.s la côte. Lorsque le
plateau est en pente très douce (comme sur la côte sud), la distance
correspondante doit être comptée à partir du voisinage du rebord du
plateau. D’après la theorie, les modifications des structures hydrolo-
giques doivent être confinées
grossièrement dans cette distance R.
L’upwelling sur la côte nord (fig. 3 et coupes au niveau de Mboro)
se développe bien à la côte,, et jusqu’à u.ne vingtaine de km au
large. Sur la côte sud, la distance de 20 km au delà du rebord du
plateau représente une bonne approximation de l’extension vers le
large de la zone d’upwelling. A 1-a côte, au sud de Mbour, sur les
fonds de moins de 20 metres, les processus thermohalins prennent le
pas sur le phénomène d’upwelling. La zone d’upwelling sur la côte
sud s’étendra donc des fonds de 20 m jusqu’à une vingtaine de
kilomètres au delà du plateau, soit une largeur d’environ 60 km :
cela correspond à la largeur et à la position de la langue d’eaux
froides sur la côte sud.
Remarque : le cas particulier de la région située entre Kayar et la
-
-
-
-
Presqu’île du Cap-Vert.
A partir du mois d’avril, les alizés, qui soufflaient jusque là du
nord, commencent à tourner vers l’ouest et la région située entre la
Presqu’île du Cap Vert et Kayar se trouve
orientée perpendiculairement
aux vents dominants, ce qui est une situation défavorable pour l’up-
welling. Ainsi, durant, le dernier tiers de la saison froide (avril-mai)
il sera fréquent d’observer des eaux plus chaudes dans cette région,
alors que l’upwelling se maintient a Saint--Louis et au sud du Cap Vert
(croisière Capricorne 77.0’5 du 5 et 6 mai 1977 ; fig. 13
) . De même,
en pleine saison froide, les alizés soufflent en général du Nord au
Nord-Nord-Est,
mais leur direction n’est. pas constante et peut virer
vers le Nord-Nord-Ouest pour quelques jours. Nous aurons alors une
situation de piling-up (convergence des eaux de surface vers la
côte) entre Kayar et la Presqu’île du Cap Vert,alors que l’upwelling
restera développé dans les autres régions. Cette zone se révèle hydro-
logiquement instable et très ouverte aux conditions du large en saison
froide (cf.DOMAIN 1979), l’upwelling pouvant se résorber à la moindre
rotation des vents vers le Nord-ouest.
Le littoral sénégalais se divise donc en trois régions aux conditions
hydrologiques distinctes en saison froide :
- la Grande Côte au niveau de Saint-Louis où l’upwelling se développe
dans une bande côtière d’une vingtaine de kilomètres de large,

12
;‘
K’
l
I
/
i
F l .
:
,
. .
i
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/-
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l
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.
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.
.*.
rr/
.
. l
/
.
. . -
z
Fig.-12 : Isothermes de surface le
5 et 6 mai 1977
(d'après la croisière CAP 77 03).
.

- la région située entre Kayar et la Presqu’île du Cap Vert, avec un
upwelling beaucoup plus instable et disparaissant: plus tôt que dans
les autres régions (,mi--avril au lieu de m.iMnnai.), dès que les vents
amorcent leur rotati.on vers le Nord-Ouest. Lorsque l’upwelling est
présent il a les mêmes caractéristiques q,u’au niveau de Saint-Louis
(strictement côtier);
- la côte sud, de Dakar à la Casamance, siège d’un upwelling très
intense généré par la oresqu’île du Cap Vert, ~qui prend la forme
d’une langue d’environ 250 km de long sur 60 km de large. Les plus
fortes remontées d’eaux profondes s’observent à la côte en baie de
Gorée : plutôt que l’orientation de la côte et l’effet de Cap,
c’est surtout l’allure des isobathes sous la Presqu’île qui génère
l’upwelling de la baie de Gorée (TEISSON,,i 982) . Ce résultat est en
accord avec les modeles plus sophistiqués de O’BRIEN et PEFFLEY (1976)
sur les côtes de 1’Qrégon.
A partir de Mbour, (où l’isobathe 20 m ~‘151 oigne de la côte, les eaux
froides n’atteignent plus la côte et la langue d’eaux froides se
détache du rivage : l’upwelling se développe au milieu du plateau.
Un front sépare les eaux d’upwelling, des eaux qui se trouvent sur les
fonds de moins de 20 m, soumises à un i-échauffement’ intense.
1.5. COLJRANTOLOGIE. ECOULEMENT PARALLELE ET PERPENDICULAIRE A LA COTE.
La dynamique des courants est largement soumise à des influences exté-
rieures au plateau. A la latitude du Sénégal, de novembre à mai, les
courants du large appartiennent au coura.nt des Canaries dont la
direction
est à peu près Nord-Sud au voisinage du continent africain. Localement,
le phénomène d’upwelling, la direction de la côte, la topographie du
plateau continental,créent d’importantes modifications à cette circu-
lation. Nous nous intéresserons aux situations moyennes et n’étudierons
pas les fluctuations à courte période liées au régime des vents. Nous
séparerons une nouvelle fois le littoral sénégalais par rapport à la
Presqu’île du Cap Vert.
1.5.1. CIRCULATION AU NORD DE LA PRESQU’ILE DU CAP VERT
Peu de renseignements sont disponibles dans cette région sur les courants
de surface en saison d’upwelling. Diverses mesures éparses font état de
courants de surface parallèles à la côte, de vitesse 20 cm/s environ.

7 -mars
8 mars
10
20
30
40
50
60
Fig. 13 .- ComposaMe Nord-Sud (cm/s> des courants devant Saint-Louis sur
les fonds de 100 m (n'après TOMCSZAK 1970)
,-

--mm.,-.-----
E?U
Cela correspondrait à un pur courant de surface d'Ekman, lié à l'orienta-
tion de la côte etgladirection des alizés (TEISSON,1982). La meilleure
série de mesures re.ste celle étudiée par TOMCZAK (1970) à partir des
donnéesdu yeteor recueillies devant Saint-Louis pendant 3 jours en mars
1933 (fig.13 ) sur les fonds de 100 m. On note un courant de surface
confiné dans les vingt premiers mètres et portant au Sud, et un contre-
courant dirigé vers le Nord occupant les couches profondes. Ce contre -
courant vers les p:les (alors que les vents soufflent vers le Sud) est
un aspect caractéristique de la circulation d'upwelling : il a été
observé dans plusieurs autres régions d'upwelling et serait lié à l'allure
du plateau continental ; limité au niveau du talus dans le cas d'un
plateau large en pente douce, il envahirait le plateau si ce dernier est
étroit et abrupt.
0 Vent
0 Vent
0
Courant @ Sud
___-------
100
200 1
Plateau étroit
Plateau large
1.5.2. CIRCULATION AU SL!D DE LA PRESQU'ILE: DU CAP VERT
Les résultats sur la Petite Côte sont plus. nombreux, avec notamment
l'étude courantvlogique sur la radiale 14"N de janvier à juillet 1977
(REBERT, PRIVE et WAGNER, non publié). La meilleure représentation
du champ des courants de surface en période d'upwelling a été effectuée

Direction des courants observés à 5 m
- - - Direction du courant de surface moyen théorique d'Ekman
Isothermes de surface.
Fig.l4.- Campagne du 20 au 31 mars 1974 (d' après REBERT et PRIVE 1974).

80 km
50
10
80 k:m
a) Composante
b) Composante
nord-sud (cm/s) .
n o r d - s u d (cm/s)
L.-E--A7
L.-\\ ------Y / c ) I’nmnosante
Est-Ouest ?t
isothermes.
i
Fig. 15 .- C o u r a n t o m é t r i e s u r l a r a d i a l e ILoN.
a ) C o m p o s a n t e n o r d - s u d e n p é r i o d e d ’ a l i z é s f o r t s (26 mars 1974)
b ) C o m p o s a n t e n o r d - s u d e n p é r i o d e d ’ a l i z é s f a i b l e s (11 f é v r i e r 1 9 7 7 ) .
c) Composante est-ouest et isothermes (12 a v r i l 1 9 7 7 ) .

en mars 1974 (REBERT,1974). Les courants et le tracé des isothermes
de surface ont été reproduits sur la fig.lG,On note, au centre de la
langue d’eaux froides, une divergence des courants qui indique la
zone de remontées d’eaux profondes et qui conduit à un espacement
des isothermes. La convergence des eaux du large avec les eaux
d’upwelling plus froides provoque un front au dessus du rebord du
plateau continental qui se traduit par un resserrement des isothermes.
La coupe verticale de la composante Nord-Sud au niveau de 14”N pendant
cette campagne fait apparaitre un “jet” de 75cm/s au niveau du front
(fig. lsa). Ce “jet” est un trait caractéristique des zones frontales
d’upwelling et il a été observé dans d’autres régions (BANG et ANDREWS,1974).
Le contre-courant profond vers le pôle n’apparait pas sur le plateau
et se limite au talus continental.
Cette campagne a
eu lieu en période d’upwelling très intense (alizés
de 7 m/s). Lorsque les vents sont plus faibles (fig.lgb) les processus
thermohalins apparaissent sur les petits fonds et sont liés à une
circulation vers le Nord. Une très légère circulation versle Nord existe
également dans la couche au dessus du fond sur le plateau, mais il suffit
que les alizés soufflent régulièrement à 5 m/s pour que les courants
portent au Sud sur l’ensemble du plateau continental et que le contre -
courant vers le Nord soit rejeté au niveau du talus.
La circulation zonale (fig.lgc) permet de visualiser les remontées d’eaux
profondes vers la côte dans les couches situées au dessus du fond, tandis
que les eaux superficielles sont chassées de la côte et convergent avec
les eaux du large en formant un front.
1.5.3. COMPARAISON AVEC DES SCHEMAS SIMPLES DE CIRCULATION
A partir des différences de structures observées dans l’hydrologie et la
courantologie au nord et au sud du Cap Vert, nous proposons un schéma simp le
de la circulation transversale en période d’upwelling développé, schéma
qui dépend de l’allure du plateau continental. Pour ce faire nous nous
sommes inspirés du modèle empirique de HAGEN (1974) - détaillé dans
TEISSON (1981),et des travaux de la commission CUEA (1975)*.
R SCOR WORKING GROUP 36 : Report of second meeting Kiel, FRG, 24-28 juin
1974 CUEA NEWSLETTERS (1975).

32
0 Vent
R = 20
front
0 Vent
front
km
- R-20km
--L .c,*
Côte
Côte
Nord
Sud
Plateau large - rupture
Plateau étroit
abrupt
de pente au niveau du talus
0
Courant porta.nt au Sud
(3
Contre-courant portant au nord
- - - Pycnoc 1 ine
R
Rayon de déformation barocline de Rossby
-
-
Front thermohalin
-
-
Côte nord :
L’upwelling se produit au dessus d’un plateau continental étroit et
abrupt. Les remontees d’eaux s’effectuent de part et d’autre de la
pycnocline.Au voisinage de la côte cette pycnocline s’élève et vient
crever la surface en formant un front ; l’upwelling principal a lieu
à la côte, Les eaux d’upwelling côtier,entrainées vers le large en
surface, plongent sous le front, L’écoulement vers la côte sous la
pycnocline est associé Ci un contre-courant dirigé vers le
pole
et à un downwelling en profondeur. Au large, au dessus de la pycno-
cline, les eaux amenées en surface proviennent de la couche mélangée
superficielle : il n’y a pas de véritable
enrichissement puisque
les sels nutritifs sont concentrés sous la pycnocline.
Côte sud :
L’upwelling se produit en présence d’un plateau continental large
avec une rupture de pente au niveau du t:alus. L’upwelling principal
se situe sur le reh’ord du plateau continent:al. Une deuxième cellule
d’upwelling apparaît au dessus du plateau. T,e contre-courant vers

33
Vent
-.
Front ,
couche de
surface
Fig. 16.- Circulation tridimensionnelle schématique dans une région d'up-
welling au-dessus du plateau et du talus (d'après SMITH 1968).

.~.. .-----.
34
le Nord et le downwelli.ng associé sont rejetés sur le talus.Au
large, la pycnocline crève la surface en formant un front. Les
processus thermohalins sur les petits fonds sont indépendants du
phénomène d’upwelling : ils ne sont présents que lorsque les fonds
descendent très lent,ement au voisinage de la c0te. De Dakar à Mbour,
où les fonds augment.ent: régulièrement depuis la côte, ces processus
n’existent pas et les eaux froides amenées par la deuxième cellule
d’upwelling bordent la côte.
La figure 16 représent:e un sché.ma tridimensionnel de l’écoulement sur
la Petite Côte au nord de Mbour.
1.6. ORIGINE DES MASSES D’EAUX UPWELLEES. VITESSE VERTICALE CARACTE-
RISTIQUE. TEMPS DE R.ESI:DENCE DES EAUX RICHES DANS LA ZONE EUPHOTIQUE
La profondeur d’origine des eaux “upwellées” et la vitesse de remon-
tées de ces eaux sont les paramètres fondamentaux pour l’estimation de
la productivité des régions côtières,, La profondeur d’origine renseigne
sur la richesse potenti.elle des eaux qui remontent - les eaux plus
Profondes étant théoriquement les plus riches
la vitesse verticale
sur le taux de renouvellement des eaux de surface.
Une estimation de la. profondeur d’origine peut être réalisée à l’aide
du diagramme Tempéra.ture - Salinité des masses d’eaux le long d’une
radiale perpendiculaire à la côte,en supposant l’upwelling bidimen-
sionnel et stationnaire.
Le diagramme T.S. des stations sur les radiales Mboro et Sangomar
(fig.
13 > montre que la profondeur d’origine des eaux amenées à la
côte serait sensiblement plus importante sur la côte sud (75-100 m)
que sur la côte nord (30-50 m) , Cette différence de profondeur semble
s’accorder avec les schémas de circulation de 1.3.3., les masses d’eaux
upwellées semblant avoir une origine plus profonde dans le cas d’un
plateau continental large bordé par un talus abrupt. L’upwelling sur la
Petite Côte serait donc potentiellement plus riche.
Vitesse verticale :
L’estimation de la vitesse verticale est extrêmement délicate : vu la
faiblesse de sa valeur vis 2 vis des courants horizontaux, il est
très difficle d’en obtenir une mesure directe. Les méthodes indi-
rectes ne fournissent q,u’un ordre de grandeur
et les résultats sont
à utiliser avec beaucoup de précaution. Par exemple l’étude des
migrations des isothermes en régime t:ransitoire montre que du 6 au 13
janvier 1982, l’isotherme 18”~ est monté de 35 m le long de la radiale
(fig.
if ) 3 On peut dont proposer une vitesse verticale de remontée

35
a)
16
S t a t i o n
S t a t i o n
cet ière
d u
l a r g e
14
1 S!!m
/
13 _
c
) s
.._ ^^
.is.uu
35.50
18
h)
S t a t i o n
cotière
16
S t a t i o n
du
15
l a r g e
s
35.m
35.50
F i g . lï’.- Diagramme T-S sur la radiale de Sangomar (a> et Mboro (b)
e n f é v r i e r 1 9 6 9 .

.---.
i36
20 km
15
10
5
i
10
2 0
‘30
40
< 18
6 j a n v i e r 1982
50 1Tl
/
20 km
1 5
10
5
0
10
20
30
40
1’3 j a n v i e r 1 9 8 2
5 0
Fig.l8-Evolution des temp6ratures s u r l a r a d i a l e d u C a p V e r t
d u 6 a u 13 j a n v i e r 1 9 8 2 .

de 35/7,sobt5 mètres par jour,qui n’est qu’une valeur moyenne : il est
probable que la remontée ne s’est pas effectuée de manière uniforme
pendant la semaine, mais s’est plutôt concentrée sur une période de
2 ou 3 jours, associée à un forcing des vents, avec des vitesses
verticales beaucoup plus conséquentes.
T,a vitesse verticale peut également être estimée à partir du transport
d’Ekman,qui représente le flux de remontée d’eaux profondes perpen-
diculaires à la cate. La valeur moyenne en période d’upwelling est de
1 000 kg/s par mètre
de côte (TEISSON, 1982) .
Le flux S de remontées est confiné dans la couche d’Ekman de fond
d’épaisseur D x;
S = PVD x =
s D w W/ Sinon = YDx W/ (ah/ax)
où ah/ ‘sx est la pente du plateau continental, soit 2.f.0V3
petite Côte. Au niveau du Sénégal, l’épaisseur de la couche d’Ekman
de fond est théoriquement de l’ordre de 40 m, nous aurons donc:
W=
S ( ah/ > x) / f D x = 510-5m/s = 4.5 m/jour,
Ce n’est encore qu’un ordre de grandeur, la vitesse verticale étant
certainement plus importante sur les petits fonds (épaisseur moindre
de D x) et sur le talus (pente plus forte) ou lors d’un forcing de
ven& (flux de remontée pouvant atteindre 2 000 kg/s par mètre de
côté). O’BRIRN (non référencé) a proposé un modèle simplifié du phénomène
d’upwelling
pour
un océan à deux couches , la couche de surface,
de faible épaisseur, étant séparée de la couche profonde par une pycnocline.
11 a étudié la réponse à un vent soufflant vers l’équateur et parallèle
à la côte,et a obtenu une vitesse de remontées de la pycnocline au niveau
de la côte de :
S
w
=-
E!!frF-
SR
S étant le transport d’Ekman, R le rayon de déformation barocline
de Rossby,
J la densité de l’eau de mer. Si la pycnocline se trouvait
au départ à une profondeur H (épaisseur de la couche mélangée de
surface),elle atteint la surface à la cate en :
H
T
=-
=9RH
W
s

Avec li - 20 km, S = 1 000 kg/d par mètre
de c13te, H = 60 m, on trouve :
W == 4,,5. m/jour
: 14 jours ~
‘F q
Notons que ces méthodes ne renseignent absolument pas sur la répartition
spatia le des vitesses verticales, Modèles et observations s’accordent
à dire que les zones de remontées intenses seraient localisées à la
tête des canyons sous-marins et sur les bords équatoriaux des caps
importants.
Temps de résidence;
Le temps de résidence ‘des eaux riches dans la zone euphotique est
un facteur limitatif de la productivité des zo’nes d’upwelling : on
sait qu’il faut un temps minimum au phytoplancton pour croître et
consommer les sels nutritifs. Si le temps de résidence est trop court,
le phytoplancton n’aura pas le temps de se développer suffisamment
avant d’être brouté par le zooplancton. Ce temps de résidence peut
être grossièrement estimé en supposant que les eaux d’upwelling
décrivent une sorte d”hélice au voisinage de la côte.
R
f r o n t c--
-- 3
Cette hélice se décompose en 4 phases : transport sur le fond
vers la côte, remontée le long de la côte, transport vers le large
en surface, plongée sous le front, La durée de chacune de ces phases
peut être estimée * En supposant une vitesse verticale de 5 à 10 m
p a r j o u r
le transport sur le fond amène des eaux situées à 75 m de
profondeur, à 25 m en 5 à 10 jours + La remontée vers la surface
s’effectue en 2 à 5 jours, La durée du transport vers le large peut
être calculée en supposant que le flux superficiel (égal au transport
d’Ekman) est confiné dans la couche d’Ekman de surface d’épaisseur
théorique D, soit 40 m au niveau du Sénégal.
u
= 2.5. 9 5 cm/s
=+
En supposant que la largeur de l’upwelling est de l’ordre du rayon

de déformation barocline de Rossby,R = 20 km, le transport en surface
durera R/U,soit 4 à 9 jours. Nous ne disposons pas de données concrètes
sur la durée de la descente le long du front, Des valeurs de 6 à 12
jours ont été avancées par certains auteurs. Nous aboutissons donc à
une estimation du cycle total de 17 à 36 jours, soit une valeur moyenne
de 25 jours, Le demi-cycle dans la zone euphotique, qui est un concept
très utilisé, serait de l’ordre de 12 jours. Le temps de génération du
phytoplancton étant de 3 à 4 jours, la biomasse phytoplanctonique pourra
être multipliée par 8 à 16 durant le demi-cycle dans la zone euphotique.
Mais le zooplancton, dont le temps de génération est de 2 à 3 semaines,
aura du mal à se développer sur un seul cycle.
Effets de l’intensité et de la durée des phases d’upwelfing sur la
productivité à moyenne échelle dans les zones d’upwelling:
Un upwelling intense, bien qu’amenant dans la zone euphotique de très
grandes quantités de sels nutritifs, peut induire des taux de produc-
tion primaire réduits à travers une multitude d’effets liés à la
diminution de l’échelle de temps et à l’augmentation de la turbulence.
Un upwelling bien développé crée en effet une circulation plus rapide et le
le temps de résidence dans la zone euphotique peut être trop court pour la
croissance du nhytoplancton et la consommation de tous les sels nutri-
tifs. D’autre part les mélanges turbulents réduisent la probabilité de
lonques périodes d’exposition à une lumière intense, nécessaire au
phytoplancton
pour croitre à un taux soutenu.
A un autre niveau, la stratification de la colonne d’eau permet au
phytoplancton d’exister en concentrations importantes, les larves de
poissons pélagiques obtenant ainsi aisément leur nourriture. Le mélange
dû à un vent fort, de la colonne d’eau peut éparpiller ces concentrations
de phytoplancton et diminuer la disponibilité en nourriture à des
degrés tels que la croissance et la survie des larves ne seraient plus
possibles (SHARP,1980). Il semble donc qu’un upwelling intermittent
conduira à des taux plus élevés de productivité qu’un upwelling installé
en permanence : l’intensification des vents amènera les sels nutritifs
en surface, la relaxation des vents, associée à une circulation moins
rapide, permettra au phytoplancton de rester plus longtemps dans la zone
éclairée, riche
en sels nutritifs.
1.7. EXISTENCE ET POSITION DES FRONTS . ‘JET’ FRONTAL. IMPORTANCE
DE LA ZONE DU REBORD DU PLATEAU CONTINENTAL
Nous avons vu (en 1.3.2. et fig.
et
) qu’au dessus du rebord du

plateau existe : une zone frontale contenant un intense jet équatorial.
La direction de ce jet e8t
à peu près parall2le aux isothermes
frontaux. En général, dans une telle structure,, les isothermes de
surface donnent une bonne indication de l’allure des isothermes et
isopycnes en profondeur, et on peut penser que le jet est ajusté de
manière géostrophique aux gradients de densité consituant le front.
Différentes théories tentent de prendre en compte l’existence de
ce jet. Selon HULBURT et THOMPSON (1973), dans le cas d’un vent
constant en longitude, il doit y avoir un transfert d’énergie du large
vers la côte, où les forces de frottement pI.us importantes doivent
&re surmontées, réduisant l’énergie disponible pour la formation d’un
jet aLI large. Au con.traire, un maximum de vent près de la côte produira
suffisamment d’énergie pour surmonter le frottement sans empiéter sur
&s ressources en quanti té de mouvement du l..arg,e (BANG et ANDREWS, 1974) .
Il pourra même générer un surplus d’énergie : initialement ce surplus
servira à élever plus d’eaux froides sur le plateau, construisant une
réserve d’énergie potentielle dans laquelle commencera à puiser le jet :
cette réserve pourra également maintenir le jet lorsque les vents ne
seront pas favorables 2 l’upwelling.
Le jet étant ajusté géostrophiquement,
ses demandes en énergie seront
faibles : pendant les périodes de vents favorables prolongées
l’énergie potentielle sera accumulée à un rythme plus rapide que la
consommation du jet e En conséquence, le jet se déplacera vers le large;
une fois atteint le rebord du pla.teau, le jet pourra se développer vers
le bas et ses besoin.s en énergie s’accroitront de même. Si la demande
en énergie dépasse les réserves, le front se repl.iera vers la terre et
on peut imaginer une situation d’équilibre tltablie quelque part au
voisinage du rebord du plateau (BANG et ANDREWS, 1974).
Les observations de BANG et ANDREWS rejoignent le diagramme proposé
par BAKUN et NELSON (1977) reliant les phénomènes de divergence-con-
vergence au rotationnel de la tension du vent (fig. 13 ) . Au niveau
du Sénégal, il n’existe pas à notre connaissance de mesures du vent au
large. Cependant les structures observées ressemblent fort à celles
décri tes par BANG et ANDREWS devant Cape Tobm.
Il serait intéressant
de vérifier si la zone frontale et le jet observés au large du Sénégal
sont bien associés à un rotationnel négatif de la tension du vent,
correspondant à un maxi.mum de vent près de la côte.
Le fait qu’une situation géostrophique se soit installée signifie que
les eaux froides ne peuvent simplement regli.sser vers leur profondeur
d’origine dès que les vents favorables cessent. T,a dissipation de

‘4-l
a
b
> T e n s i o n d u vent
.T?JYyy$+$
Transport d ’ Ekmall
Upwelling-Downwelli.ng
Fig.l+Relation
e n t r e l e r o t a t i o n n e l d e l a t e n s i o n d u v e n t PL 12
divergence ou convergence du transport d’Ekman (d’après BAKUN et NELSON).
a . R o t a t i o n n e l p o s i t i f - Divergence et upwelling à la côte, se
p r o l o n g e a n t a u l a r g e .
b . R o t a t i o n n e l n é g a t i f - Divergence et upwelling à la côte, convergence
et downwelling au large.

l'énergie d'une structure frontale est un phénomke très lent.
D'après les résultats numériques de O'BRIEN (1973) un front peut
probablement pe?I”SiStel? SOUS une forme reconnaissable un mois après
l'arrêt des vents favorables. Pendan,t cette période les caractéris-
tiques hydrologiques de la couche de surface de quelques dizaines de
mètres d'épaisseur seront modifiées, mais: la masse d'eaux froides se
maintiendra sur le plateau. Les phases consi5quentes de vents favorables
auront alors juste besoin de déplacer ce "film" superficiel pour pro-
duire des manifestations évidentes d'upwelling. Cette possibilité de
"prédisposition imminente" de l'upwelling doit être gardée à l'esprit
&and les vitesses verticales sont estimees. La destruction du film
de surface, de 30 m d'i5paisseur par exemple, en une journée ne signifie
pas forcément que l'upwelling continuera par La suite à un taux de
30 m par jour : il est très délicat d'extrapoler le résultat des
déplacements d'isothermes pour représenter 'l'évolution de l'upwelling.
2. MODELISATION DE L'Ul?mLL:[NG - FORMATION ET EVOLUTION
Plusieurs modèles numériques sont à l'heure actuelle proposés pour
tenter d'expliquer, sinon de prévoir, les, #caractéristiques physiques
et biologiques de l'écosysteme d'upwelling (modèles de HULBURT et
TJJOMPSON,1973; WROBLEWSKI,1977; PEFFLEY et O'BRIEN,1976). Les
observations effectuée:; dans les zones d'upwelling du Pérou, de
l'Oregon, du nord-ouest de l'Afrique, ont montré que les irrégularités
dans la configuration de la côte et le re!lief du fond influencent de
manière substantielle le type d'upwelling &tier, Aussi ces modèles
doivent-ils tenir grandement compte du contexte dans lequel l'upwelling
se produit :
-latitude
- topographie du plateau et de la pente
- stratification moyenne
- allure des vents saisonniers
- intensité et échelle de temps des fluctuations de vent.
Ces modèles numériques sont excessivement complexes (34 paramètres dans
le modèle de WROBLEWSK1[) et nécessitent une longue mise en place.
Nous avons,quant 2 nous, utilise des modèle::; "plus légers", souples
d'emploi,dits "modèles conceptuels'; qui ignorent délihérement certains
paramètres pour ne retenir que des aspects particuliers du phénomène.
NOUS interessant à l'évolution de 1'Ilpwelling iii; au régime des

-1 ‘echelle de’ temps saisonnière, liée à la présence des alizés, où
l’upwelling progresse longitudinalement vers le fud.*
et se développe
1
vers le large zonalement.
- l’échelle de temps de quelques jours,associée à une intensification
de l’upwelling (en anglais “upwelling event” que nous n’avons pu
traduire que par “phase d’upwelling” : période d’intensification
des vents, par opposition à période de relaxation des vents).
Le schéma le plus simple d’upwelling saisonnier est celui proposé
par HAGEN (1974) : il ne tient pas compte de la topographie du
plateau et suppose.
que les vents soufflent régulièrement de maniere
en permanente : il s’applique donc au Sénégal pour la période de
novembre à mai. L’évolution journalière de l’upwelling en réponse
à une intensification des vents sera abordée à l’aide du modèle
bidimensionnel de JANOWITZ et PIETRAFESA (1980) : l’allure du
plateau continental jouera un rôle important dans ce modèle.
2.1. SCHEMA DE DEVELOPPEMENT D’UN UPWELLING SAISONNIER.
2.1.1. MODELE DE HAGEN
Le modèle de Hagen (1974) repose sur le fait que la pente des Iso-
pycnes au voisinage d’une côte est un indicateur des mouvements ve.-ticaux
des masses d’eaux. (Ceci n’est vrai qu’en supposant une absence de m6iEange à
travers les isopycnes et l’invariance du champ de densité le long de la côte).
Plongic d’eaux superficielles
Remontée d’eaux profondes
_~~ ~-
R Remarque
au lecteur non averti :
Cette image souvent employée est impropre : elle tend à faire croire
qu’en un point donné du littoral les eaux froides viennent du
Nord alors qu’elles proviennent en réalité des couches profondes
situées au large de ce point.
Au fur et à mesure que les alizés descendent vers le Sud ils créent
des remontées d’eaux froides. L’upwelling doit être perçu comme un
ensemble de remontées d’eaux froides locales se déplaçant avec la
position des alizés, et non comme un refroidissement général dû
à l’arrivée d’eaux “en provenance du Nord “. Si ce n’est par des
remontées locales, comment expliquer l’écart de température de 2”
en moyenne entre le nord et le sud de la Presqu’île du Cap-Vert,

La situation de départ est celle observée au Sénégal durant l’hiver-
nage. Avec les faibles vents qui soufflent penda.nt cet.te période,il ee forme
par advection d’eaux guineennes une couche superficielle chaude, pauvre en
sels nutritifs, de p. tisieurs dizaines de mètres d’épai,sseu.r.
Cette couche d’eau est séparée des eaux plus profondes, riches en
sels nutritifs, froides, par de forts gradients verticaux des parametres :
la pynocline est très marquée. (On observe ensuite 4 phases bien distinctes :
1 .- Phase : Les alizes s’installent, commencent 5 souffler parallèlament à
la este. On observe des transports de masse v2rs le large, en surface at sur
12 fond. Pour des raisons de co,ntinuité,
le transport vers la côte s’effectüe
à des profondeurs intermédiaires de part et d’autre de la pycnocline. La
structure devient très barocline : la circulation supérieure, entretenue par
le vent, est beaucoup plus intense que lacirculation inférieure. La pycnocline
est toujours horizontale.
70
milles
<-.- -_- ..-. -
-
-
-
-
e
$200 m
2.- Thass : L’accumulation d’eau au large (marqu’ée par ‘une anomalie posi.tiv2
-m
32 la hauteur dynamique a) provoque un2
plongé2 de la pycnocline (convergence).
Au contraire, la pycnocline s’élève pr5s de la côte (divergence), et s’affai-
blit (instabilité due aux ondes internes). Le niveau de la mer rzpond en sens
inverse. C’est de l’eau de la Couc:he mélangée qui arrive en surface : elle
est légérem2nt plus froide, mais t:oujours très pauvre en sels nutritifs. C’est
une période de transition.

,+s
3.- Phase : L’éievation de la pycnocline pres de la cote atteint de teiles
proportions que ‘es isoyycnes cr6vent la surface de la mer dans la rCgi.on
Gtière. Il en résulte un gradient horizontal très prononce. L’inpc!rtance
de ce gradient pourra crser un courant de densité parallèle à la côte, qui
agira comme une barrière pour les composantes zonales de ce courant.
Au vcisinage
immcdiat de la côte se développe une troisiGme cellule de cir-
culation. On observe un apport d’eaux beaucoup plus froides et un enrichlsse-
ment marqué en sels nutritifs.
front
4.- Phase : Si le développement se poursuit,le gradient de densité,i-e le front
se Csplace vers le large. Son influence se fait sentir sur des couches plus
profondes.
(CI..
L’eau de la région côtière poussée vers le large est obligée de
:
! &...
plonger sous cette barrière, et provoque des faibles instabilités
sous celle-ci.
i’
De l’autre côté de la barrière, l’écoulement d’eau.vers la côte
forme un nouvel upwelling secondaire, beaucoup plus faible et sans
enrichissement en sel nutri tifs.
/
--
L’eau qui circulent sous la pycnocline vers la côte monte à la sur-
face entre la barrière et la côte, dans la zone côtière de véritable
upwelling.
La pos ition du front est très variable dans le temps et l’espace.

2.1.2..
EVOLUTION SAISONNIERE DE L’UPWELLING SENEGALAIS
La validité du modèle de &$cEN a déjà éte v6ri-fiée pour les côtes
sénégalaises (TEISSON, 1981) : le schéma d.e circulation s’accorde bien
avec les structures hydrologiques observées ponctuellement lors des
radiales du Cap Vert prolongées (O-311)0 km des c-ôtes). Nous limitant
maintenant à la radiale du Cap Vert (O-70 km des côtes), nous avons étudié
l’évolution des structures en saison froide en faisant référence au
modèle de Hagen. Nous ne nous intérfsserons qu’à la répartition de la
température en notant que, la salinité va.riant très peu en saison froide,
l’allure des isothermes et isopycnes, thermocline et pycnocline, est
pratiquement confondue.
A partir de la situation classique en période d’hivernage (fig.
)
nous distinguerons plusieurs types de masse d’eaux :
- eaux chaudes de surface, de 0 à 30 m : 25--28’“C .
- eaux plus froides de la couche mélangée (sommet de la thermocline
30-60 m) : 21-25’.
- eaux situées à la base de la thermocline (60-70 m) 18-21”.
- eaux situées sous la thermocline(eaux profond.es théoriquement riches
en sels nutritifs) : profondeur supérieure iii 70 m, température infé-
rieure à 18”.
A partir de cette situation de base, nous allons suivre 1 ‘évolution de
l’upwelling : pour ce faire, la bande des: isothermes de 18 à 21’C sera
hachurée. Cette bande marque la base de 1.a thermocline et sa position
sera comparée à la position de la pycnocl.ine du modèle de Hagen.Ce
choix n’est pas arbitraire : d’après les mesures de”l’Alexander Von
Humboldt”au large du SiZnégal, c’est à partir de la profondeur où se
situe l’isotherme 18°C que l’on note un fort accroissement de la teneur
en phosphates et nitrates. (cf. 1.3)
-
14 novembre 1968 : la bande des isothermes 18-21°C a commencé àmonter
le long de la côte : e’Lle se situe à 35-50 m contre 60-70 m pendant
l’hivernage. Les eaux chaudes supérieures à 26’C sont chassées vers le
large et on observe un refroidissement à la côte, mais ce sont toujours
les eaux situi;es au dessus de la the~rmocli~ne qui remontent : c’est le
début de la 2e
phase de HAGEN.
11 décembre 1968 : La base de la thermocline a poursuivi son ascension
et occupe le plateau continental sur les fonds de moins de 50 m. Elle
vient crever la surface à la côte. Cependant les eaux profondes inférieures
à 18’C n’ont guère progressé et se trouvent toujours sur les fonds de
50 m. Le véritable enrichissement n’a pas commencé. C’est la fin de la
2” phase.

Fig. 20 œ Evolution de la température sur la radiale
du Cap Vert (stations A-B-C-D-E) de novembre 1968 G
m a i 1969.
Les tempkatures comprises entre 18 et 21°C: ont &té
hachurées.

10 janvier 1969 : la bande 18-21” est en surface et commence à être
repoussée vers le 1,arge. Les eaux froides sous la thermocline atteignent
les fonds de 1S m. C’est le début de la :3" phase.
21 février 1969 : 1 ’ upwelling est complètement développé. La bande 18-21"
qui visualise le front est rejeté à2.S km au large, Les eaux profondes
ont envahi la zone côtière (températures inférieures à 15°C au dessus
du fond sur le plateau continental).L’enrichissement est général. Nous
sommes dans la Ii” p’hase du modèle de Hagen.
13 mars 1969 : le front est toujours au large mais s’est rapproché de
la côte. Cela correspond sans doute à un affaiblissement des vents. On
note d’ailleurs que l’upwelling est moin:s actif qu’en février puisque
les eaux infiki.eUreS à 15°C Ont disparu du plateaU. hnme l'aVait nOté
HAGEN et expliqué B.ANG etANDREVS, la position du front, une fois l’upwelling
complètement développé, est très variable dans le temps et l’espace : il
se repliera vers la côte lors des relaxations. de vent, et s’éloignera au del1
du rebord du plateau continental lors des intensifications de vent.
28 avril 1969 : le front se retrouve en surface à la côte. Les eaux
.
d’upwelling ne s’observent plus en surface, mais la structure frontale
est très lente à se dissiper ; il suffirait sans doute que les alizés
reprennent pendant quelques jours pour que les eaux d’upwelling réap-
paraissent en surface. Nous nous trouvons au début de la période de
transition saison froide - saison chaude qui correspond à la destruction
du front.
20 mai 1969 : un mois plus tard, la bande 18-21’ s’est enfoncée (30-50 m).
Le downwelling (plongée des eaux) est généralisé sur les fonds de75 -100 m.
En surface les eaux côtières sont toujours plus froides que les eaux du
large, mais le réchauffement est très lent.L’:Lsotherme 24’C,que l’on
observe au large le 2C mai, mettra encore 3, semaines avant d’atteindre la
côte (d’après les mesures journalières à la. st.ation côtière de Thiaroye :
24. , 2" le 10 juin).
Après avoir étudié la migration des isothermes sur une coupe verticale,
nous nous sommes intéressés à la répartition horizontale des températures
autour du Cap Vert afin de suivre sous un autre angle l’évolution de l’up-
welling. Treize
sorties ont été effectuées par le Laurent Amaro de septem-
bre 197p à juin 1971.
Nous nous riiférerons t:oujours aux isothermes
(
18-21” pour représenter le front et la
fi% iltLei9
limite des eaux d’upwelling.
- Les trois premières sorti.es (15-16 sept,; 3Osept.-1”oct.; 16-17 oct.)
reflètent les conditions d’hivernage avec des températures de surface
uniformes de 28 à 29’C.

POSITION DES STATIONS
15 - 16 Septembre 1970
3 0 sept. 1 octobre 1970
l
’ j 200’ m
l
?
16 ‘- !7 octobre 1970
30 - 31 octobre 1970
2 9 - 30 décembre 1970
!
21 - 22 janvier 1971
Fip,.2la.- Evolution des températures autour
de la iresqu’île du Cap-Vert (sept. 1970 à
janvier 197lJd’après CONAND(1972).

‘10 - 19 Février 1971
25 - 27 mars
1971
\\,
/
2
8
-. 30 avril
13 - 15
mai
-m
Fig.21b.- Evolution des températures
autour de 1.a. presqu’île du Cap-Irert
(février à juin 1971) d’après CON’AM (1972).

- La sortie du 30-31 octobre a eu lieu après la première apparition soutenue
d’alizés, du 21 au 27 octobre. Les eaux à 28’C sont chassées vers le large
et les eaux qui appartenaient au sommet de la thermocline apparaissent en
surface (21-23’). Le front n’a pas encore atteint la surface à la côte et
l’enrichissement en surface n’a pas commencé. Nous nous trouvons dans la
2e phase’ de HAGEN.
- le 29 et 30 décembre, les eaux chaudes supérieures à 24°C ont été
chassées vers le large et le sud et ont disparu de la carte. Le front,
marqué par le resserrement des isothermes 18 à 21°C, apparait pour la
première fois en surface au milieu du plateau continental. ‘Les eaux inférieures
à 18’C se trouvent au voisinage immédiat de la côte. C’est le début
de la 3e phase de HAGEN : l’enrichissement en surface commence à la côte.
.- le 21 et 22 janvier, la situation a peu évolué : l’isotherme 18’C est
toujours plaqué à la côte ; les isothermes 19-20” ont quelque peu gagné
vers le large mais leur tracé est très anarchique et le front s’est
étalé. En fait, durant le mois de janvier 1971, d’après l’indice d’upwelling
journalier *. Les alizés ont très peu soufflé, ils ont même été absents
12 jours d’affilée.
La sortie du 21-22 janvier reflète donc cette importante relaxation des
vents : les réserves potentielles d’énergie formées par les remontées
d’eaux profondes, dont parlaient BANG et ANDREWS, sont insuffisantes puisque
nous nous trouvons en début de saison froide (peu d’eaux froides accumulées
à la côte), le front n’est plus entretenu et commence à se résorber.
L’aspect sinueux et l’espacement des isothermes sont d’ailleurs caracté-
ristiques de la dissipation des zones frontales. Cette situation n’est
pas exceptionnelle : il semble que l’upwelling marque souvent un palier
en janvier, dû à des phases de vents favorables peu nombreuses et trop
espacées dans le mois (TEISSON, 1982).
- le 18 et 19 février, les alizés ont repris ; le front a fait sa réapparition
sous une forme très prononcée, active : il se situe sur le rebord du
plateau continental, sur les fonds de 200 m. Les eaux inférieures à
16” font leur apparition à la côte. L’upwelling est bien développé.
C’est la 4e phase du modèle de HAGEN.
- les 2 sorties suivants, 4 mars et 25 mars, ont lieu en pleine période
d’upwelling. Le front se situe au delà des fonds de 200 m, preuve d’une
activité intense et de réserves d’énergie considérables dues à d’importantes
remontées d’eaux froides. On observe d’ailleurs des eaux inférieures à
15” à la côte. C’est le maximum d’extension et d’activité de l’upwelling.
t Voir TEISSON (1982) pour la définition et le calcul.

- L a f i n d u m o i s d ’ a v r i l v o i t l’arriv’ée d e s e a u x s u p e r f i c i e l l e s c h a u d e s ,
d u e s a u x p l u i e s d a n s l e g o l f e d e G u i n é e , a u S u d d e s c ô t e s s é n é g a l a i s e s .
C e s e a u x s u p e r f i c i e l l e s legères, e x c é d e n t a i r e s s u r l e g o l f e d e G u i n é e
p r o g r e s s e n t v e r s l e N o r d 5t t e n t e n t d e r e c o u v r i r l e s e a u x l o u r d e s
d’upwclling.
A i n s i l e 2 8 a v r i l , b i e n (que l e s a l i z é s s o i e n t t o u j o u r s
_
présents, le front a commencé à s e r e p l i e r s o u s l a p r e s s i o n d e s e a u x
c h a u d e s e n p r o v e n a n c e d u S u d ( q u i n ’ a p p a r a i s s e n t p a s e n c o r e s u r l a
c a r t e ) . L e s e a u x i n f é r i e u r e s à 18’“C s o n t t o u j o u r s p r é s e n t e s s u r l e
p l a t e a u .
- l e s d e u x c a m p a g n e s s u i v a n t e s ( 1 3 e t 1 8 m a i ) v o i e n t l a l e n t e d i s s i -
p a t i o n d e l a s t r u c t u r e f r o n t a l e , les isothermes 18 à 20°C se rapprochant
dans un premier temps de la côte, puis s’enfonçant doucement (downwelling: .
-La c a m p a g n e d u 2 4 j u i n m o n t r e q u e l e s e a u x c h a u d e s o n t r e c o u v e r t t o u t e
l a z o n e .
L a c o m b i n a i s o n d e s c o u p e s v e r t i c a l e s e t d e s v u e s h o r i z o n t a l e s n o u s a
p e r m i s d e m i e u x s u i v r e l ’ é v o l u t i o n d e l ’ u p w e l l i n g a u x a l e n t o u r s d e l a
P r e s q u ’ î l e d u C a p V e r t . D é b u t a n t s o u v e n t b r u t a l e m e n t f i n o c t o b r e - d é b u t
novembre , avec la première incursion d’alizés soutenus, il atteint
s o n p l e i n d é v e l o p p e m e n t e n f é v r i e r , l o r s q u e l e s a l i z é s s o n t b i e n
établis. A tout moment de la saison froide, l a p o s i t i o n e t l ’ a s p e c t d u
f r o n t , v i s u a l i s é p a r l e s i s o t h e r m e s 18 à 21°C, r e n s e i g n e s u r l e
d é v e l o p p e m e n t e t l ’ a c t i v i t é d e l ’ u p w e l l i n g . E n rgstlmé
- n o v e m b r e à j a n v i e r : e n r i c h i s s e m e n t s o u s l a t h e r m o c l i n e q u i r e m o n t e

-
-
-
à l a c ô t e .
- f é v r i e r - m i - a v r i l : 2 c a s p o s s i b l e s : 1 ) l e f r o n t s e s i t u e a u d e l à
-
-
-
des fonds de 200 m avec les isothermes parallèles et très rapprochés :
upwelling très intense.
2 ) l e f r o n t s e s i t u e a u - d e s s u s
d u p l a t e a u c o n t i n e n t a l a v e c d e s i s o t h e r m e s e s p a c é s e t d é c r i v a n t d e s
méandres : upwel’ling p e u a c t i f , p é r i o d e d e r e l a x a t i o n . C o m m e n o u s
l ’ a v o n s v u e n 1 . 4 . ces périodes de relaxation sont loin d’être néfastes.
S u r v e n a n t a p r è s u n e p é r i o d e d ’ u p w e l l i n g i n t e n s e , l e s p é r i o d e s d e
r e l a x a t i o n p e r m e t t e n t a u p h y t o p l a n c t o n d e r e s t e r p l u s l o n g t e m p s d a n s
l a z o n e e u p h o t i q u e e t d e c o n s o m m e r a u m i e u x l e s s e l s n u t r i t i f s a m e n é s
l o r s d e l a p é r i o d e a c t i v e p r é c é d e n t e . C e s o n t l e c a r a c t è r e i n t e r m i t t e n t ,
les pulsations de l’upwelling,qui c o n t r i b u e n t à l a f o r t e p r o d u c t i v i t é
des régions côtières
- m i - a v r i l - m i - j u i n : lente dissipation des structures d’upwelling
d u r a n t d e s p é r i o d e s d e r e l a x a t i o n d e p l u s e n p l u s l o n g u e s . D e s p é r i o d e s
de vent très courtes suffisent cependant à reconsolider ces structures et
faire apparaitre des manifestations évidentes d’upwelling (cf 1.5. obser-
v a t i o n s d e B A N G e t .ANDREWS), phenomène c o n n u (de persistance de l’upWell.%

sous la Presqu'île du Cap-Vert. L'arrivée des eaux chaudes en provenance
du Sud accélère le processus de dissipation par mélange au niveau de la
zone frontale. Ces eaux chaudes,
légères,progressent ensuite très rapidement
vers le Nord et recouvrent en quelques jours le plateau continental
sénégalais : les eaux froides lourdes s'enfoncent, la saison chaude
s'installe.
2.2
MODELE D'LJPWELLING DEPENDANT DU TEMPS SUR LE MILIEU DU PLATEAU
ET SUR LE TALUS.
Jusqu'à présent, nous avons considéré des phénomènes stationnaires,
en supposant que le vent soufflait depuis suffisamment longtemps pour
que le mouvement des eaux soit devenu permanent. De même, l'hypothèse
de l'invariance des champs de densité (ou de température) le long
de La côte, qui nous a permis de décrire puis d'intepréter les structures
hydrologiques à l'aide du modèle empirique de Hagen, découlait également
de la stationnarité du phénomène: nous avons supposé que les radiales
ou les campagnes, effectuées à des dates bien précises, étaient repré-
sentatives des conditions moyennes sur une plus grande période. Il reste
à déterminer la part de la structure qui peut être considérée comme
invariante ou représentative d'une grande période, et celle qui dépend
des conditions instantanées, le vent en particulier. Enfin, l'allure
du plateau continental qu'on sait jouer un rôle important, doit être
prise en compte.
Ces remarques nous ont amené à étudier un modèle simplifié d'upwelling
dépendant du temps, sur la partie extérieure du plateau continental et
sur le talus ; après avoir exposé le modèle
nous tenterons d'isoler,
i
dans les distributions des températures observées précédemment, les
structures permanentes des structures instationnaires.
2.2.1. Formulation
Ce modèle a été avancé par JAWOWITZ et PIETRAFESA (1980) pour expliquer
les circulations instationnaires observées en réponse à une contrainte
de vent sur le plateau continental au large de la Caroline du Nord.

54
/
h(x)
Nous nous plaçons au (delà de la couche limite côtière, à une certaine
distance de la côte, Ioù les effets haroclines et de mélange horizontaux
peuvent être négligés. La profonrleltr h (x) du plateau et du talus
décroit de manière monotone avec x, et est indépendante de y, la coor-
donnée parallèle à la côte. Initialement le fluide est au repos avec
une stratification ve,rticale
,JJ = $o (z), Au temps t = 0, une tension
de vent uniforme 9 parallèle à la côte est appliquée, dans la direction
des y négatifs (condition d’upwelling ‘T ‘= y y < 0).
On recherche une solution indépendante de :y P<our un mouvement quasi
géostrophique induit *par le vent. Les termes ‘non linéaires et les termes
caractérisant le m6lange horizontal sont: négligeables au premier ordre.
En supposant que le transport global transversal est nul sur une verticale
(équation de continui té), l’équation int:ég,rée par rapport à z des moments
sur oy conduit à :
On suppose que la tension sur le fond est linéaire.
et on définit une échelle de longueur à cette paramètrisation.
d=Cl /f
f paramètre de Coriolis
Les équations qui gouvernent le champ de .vitesse u, v, w, et la distri-
bution de densité dans la région intérieure, au delà des couches limites
de surface et de fond, s’écrivent, avec les hypothèses précédentes.

(3)
as + 22 = 0
=-3x
a%
3. = _ 3 Lra) w
a t
2%
Nous ne nous interessons qui à la distribution de densité - A partir de la
dernière équation, en exprimant w en fonction de v,puis
de v, on obtient :
11 est commode de définir une échelle de vitesse V et un temps adimensionné
par :
En prenant comme condition initiale v (x,t = o) = o, on obtient
v = v (1 - e- n,
(4)
2.2.2. Discussion
L’équation précédente représente la perturbation du champ de densité -
En un point donné, 5 &a& .l d _
4
est indépendant du temps
a%
8R arc.
e t p o s i t i f (V 4 0
z (0
a?!? ( 0
“ 4
représente donc l’évolution en fonction du temps de la perturbation de la
densité en un point donné.

Cette perturbation est positive en tout point quelque soit le temps. Nous
retrouvons là un résultat classique (de l’upwel’ling, l’élévation des
isopycnes due à une contrainte de vent. La perturbation est maximale
pour yL
= 1, s0i.t t = $- en un point donné.
Pente des isopycnes
------mm-----
- - - - - - - - - - - - - - - -
- - -
_ -
On l’obtient en dérivant l’équation (4)
1. Considérons tout d’abord une topographie du fond telle que
a8 = constante ((pente uniforme) alors :
G
Comme 2.
-3 em
et V sont négatifs
‘“5 s
est du signe de
“‘tr
6%
-2 33
Au tout début de l’upwelling lorsque II-) est inférieur a
est positif
la%
en tout point : les isopycnes remontent lorsqu’on se dirige vers les
faibles profondeurs,
Le modèle n’étant pas valable sur les petits fonds puisqu’on a négligé
les effets de mélange, soit ho la profondeur à partir de laquelle le
modèle n’est plus valable, et posons

Lorsque
o est supérieur à 2, les isopycnes sont toujours inclinés vers
Y
le haut dans les eaux profondes ( 2s /a*
)O)etd escendent dans les
eaux peu profondes en direction de la côte
( ôS /aoc (0) U Cela implique
qu’une saillie, une poussée vers le haut existe au niveau des isopycnes :
cette “proturbérance”
est marquée par une crête à
= 2
pour
“I
h
=
g dt/2
C o m m e
asA ‘c est négatif, la crête se déplace vers le large avec une
vitesse :
4A
En résumé, dans le cas d’une pente constante, la situation se présente
ainsi, à un instant donné t,,
.

(2) Considérons maintenant une topographie de fond telle que la pente
soit égale à une constante dans les petits fonds et à une constante
bien plus importante par grandes profondeurs. Ces deux régions sont
reliées par une région intermédiaire, le rebord du plateau continental,
où %h* croît rapidement. Si dans cette région, il existe un point ou
4 a& / (2 1’
est supkieur 21 Z,, alors en ce point
QQe”
est négatif quelque soit le temps t d’après l’équation ( 5 )
Ainsi, dès le début de l’upwelling, une saillie des isopycnes se
développera dans la. région du rebord du plateau et se maintiendra
jusqu’à ce que 1 .
d6passe 2 dans cette Ggion, soit durant pratiquement
la totalité de l’upwelling. Cette crête des isopycnes existe indé-
pendamment de la crête formée dans les eaux peu profondes lorsque no% 2
* Q-Q
-/--I_--_~--.--_

2.2.3. Application du modèle à la radiale du Cap Vert
Nous allons examiner la distribution théorique des îsopycnes en
réponse à un vent de 5 m/s soufflant parallèlement à la côte à
partir du temps t = 0. Le seul paramètre qui reste à spécifier est le
paramètre d
JANOWITZ et PIETRAFESA ont montré à partir de considérations sur
l'écoulement turbulent dans la couche de fond, que d pouvait être
approximé par
113
d =2;d x (0.3,Y/Q""
En posant de manière classique *= gair Cd W2, nous obtenons d
sous la forme :
d = 1 x (0.3 Cd pair )1'2 W
-
206
Sk
-3
où Cd est le "drag coefficient" = 1.3. 10
et W la vitesse du vent.
Le paramètre de Coriolis 6 vaut 3.7. 10-5 -1
d
au niveau du Sénégal
Pour un vent moyen de 5 m/s, nous aurons donc :
d = 4.5. m
D'après la description du chapitre 1, la ligne de sonde des 20 mètres
représente la limite des processus de mélanges cotiers. Nous
n'appliquerons le modèle que dans les fonds supérieurs à ho = 20 m.
Nous nous intéresserons tout d'abord à la zone du milieu du plateau
continental, dont la pente moyenne sera supposée constante, égale
-3
à 2 1 0 . D'après l'équation (6), la pente des îsopycnes est du
signe de 2- 't avec
t=b dt,'h.
Avec le début des vents favorables, les isopycnes remontent lorsqu’on
se dirige vers la côte ( 7 (2 ; "p/a,,O>. Lorsque qd = ddt ,
0
h
une crête dans l’allure des îsopycnes apparaît au dessus de la profondeur
ho.Cette crête située à l= 2, va se déplacer vers le large et se trou-
vera au bout du temps t sur les fonds de
h = 5dt/2 = 7.2 t avec t en jours.
Au bout d'une semaine, la crête se trouve sur les Eonds de 50 m,
en deux semaines sur les fonds de 100 m, en 1 mois sur les fonds de
200 m... Réciproquement,
elle apparait sur les fonds de 20 m au bout de :
t = ho/7.2 = 2.8 jours (67 heures)
La v.itesse de déplacement de la crête vers le large est de
= 3.6 km/jour
-gm-'L
Ainsi 2.8 jours après que le vent ait commencé à souffler, une
crête des isopycnes apparaitra sur les fonds de 20 m et se déplacera

vers le large à ].a vitesse de 3.6 km/jour.
Existence d'une saillie brutale des isopvcnes au niveau du rebord
-
-
-
-
- - i l
du plateau
Nous avons vu que si h
était supérieur à 2, une
crête secondaire des
sentir au niveau du
rebord du plateau, cette Crète étant présente durant pratiquement
tout l'upwelling. La topographie du fond pour la radiale du Cap Vert
est présentée par le profil bathymétriquce au large du Cap Manuel (fig.22)
Nous avons calculé pour ce profila h
pt 7)'h
en certains points (h
2-F.
a-2
étant la profondeur et x la distance a la C$!e)
! x(km)
!
0
!
24
!
36
! 41
!
46.!
48 !
50
! 52.5
!
- - -
- ---~
! h Cm>
!
0
!
25
!
50
!
75
! 100
! 150
! 200
! 250
!
!
!
!-F-!---*l-- - I
. _-.~- !
!
!
,h, ay WI!
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!
! 0.14
! 0. 2!3
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! 1.07 ! 12.50 ! 7.78
!12.00
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- - - -
- --_ m--v
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!
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21
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!
!
7
!
W
-
-
-
A
- ! --_ ! --.-_- !
!
!
,H ; Ry,$',
.
.
!
! 1.26
! 2.33
! 2.49 ! 4.05 ! 0.97
!
!
- - - - - - --_ _-.---
Pour les fonds compris entre 75 et 150 m,H>2:. La théorie nous indique
qu'il y aura un renflement, une Crète des isopycnes au-dessus de
cette zone qui correspond au rebord du plateau continental. Le même
calcul montre qu'il existe également une zone où H)2 au large de
Saint-Louis, comprise entre 100 et 150 m, et à Sangomar entre 75 et
125 m. Au large de Cayar et Mboro, nous n'avons pas trouvé de région
H) 2. La mise en application de cette théorie doit tenir compte de
l'hypothèse principale de départ t à t = 0, le vent se met à souffler
Il faut donc séparer la saison froide en diverses périodes : les pé-
riodes de relaxation, marquées par des vents faibles ou contraires qui
correspondent aux situations de repos
; et les périodes de vents forts
favorables à l'upwelling, où nous pourrons appliquer le modèle précé-
dent. Ce "découpage" de la saison froide a été réalisé à l'aide du
calcul de l'indice d'upwelling journalier, à partir du transport
d'Ekman S =*/
qui dépend du carré de la vitesse du vent (TELSSON
8
1982). Nous avons ainsi isolé les périodes de relaxation (indice
faible) des périodes d'intensification (indice élevé, supérieur à
0.95), pour la saison 1968-1969 (fig.23 ) et tenté d'interpréter les
structures observi?es sur la radiale du Cap Vert (fig.20).

200 -
300 -
IOOkm 80 60 40
20 0
Sangomar
-:=‘z Zone du rebord du plateau continental
Fig. ,2.- Profil bathymétrique en différents points du littoral
sénégalais.

CCTCBRE
biCVEE(BRE
CEtEnBRE
J A N V I E R
FEVRIER
MARS
A V R I L
M A I
1
-6.10
1.27
0.48
0.88
0.63
0.82
1,CO
3 . 7 4
2
0.42
1.09
0.73
0 . 5 8
0.51
1.37
1.c5
1.30
3
CIO5
0152
0.72
0.43
0.73
1.52
1.89
1.59
4
-O*C0
0.34
o.a
0.97
0.37
1.14
1.22
2.18
5
O-CO
0.37
0.89
O.d5
0.08
0.64
1 .55
1.21
b
C.C.7
O-26
0.97
0.52
0.41
0.20
2.12
0.85
7
c.10
0.19
l*OF
0.12
0.75
c-57
1.45
û.01
8
-c.i7
0.41
1.24
0.0
1.89
o-84
1.61
0 . 5 4
9
-0.09
0.31
1.27
0.20
1.05
O-97
1.71
0.98
1 0
0.10
0.51
1.25
1.33
1.01
0. a9
1 . 3 0
-0.06
1 1
-0.06
1.01
i-02
1.00
0.8i3
L-i.4
I.C5
-0.16
12
-0.09
0*92
C-96
1.06
1.09
0.78.
1.12
O-17
13
C*G2
0.47
1.02
2.87
0.85
0.34
1.46
0,8 7
14
c. 11
0.80
O-63
0 . 8 9
17 -A?
-w-H
0.30
û.90
ü. 38
is
0.58
f-14
q-80
0.04
0.33
c.35
C.61
0.33
16
1.72
1.49
0.98
0.73
0.29
-0.21
o-99
0.39
17
a*54
1.66
0.72
0.77
0.22
-0.03
0.40
0.54
18
-0.01
ii13
a.60
0.46
0.48
0.40
0.29
0.76
13
0.00
O-83
0.62
0.40
0.85
0.41
0.29
i.78
20
0.38
0.35
a . 7 5
0.20
1.14
-0-04
'O-28
1.15
21
ci.26
O-16
0,97
O-49
0.74
0.09
0.41
I.C4
2 2
c-28
0.40
0 . 7 7
0.00
1.13
0.19
0.61
0 . 4 4
L3
-C.CI
C.29
0.43
0.70
1.27
OS??
C.58
0 . 3 2
24
0 . 2 0
0.12
O-35
O-31
0.4c
1.33.
0.48
0,Ol
25
G.?U
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0.33
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0.06
1.22
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0.67
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1.36
0.72
27
c.01
0.55
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0.94
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i-18
1.70
0.57
28
0.11
0*55
0.40
O-01
0.74
1.04
1.62
0.72
f9
0.67
0.66
l-14
0.01
0.0
0.77
1.47
l.G7
30
2.00
0.55
0.99
0.12
0.0
0*75
1.27
0 . 5 4
31
1.78
0.0
0.78
0.20
0.0
1.00
0.0
0
.
3
6
Fiq 2 3
1968 146s
INDICE
UPkELLIhG CC'I'IEA
PTE CCTE

63
13-14 novembre 1968
Le trait marquant de la coupe T-z est la saillie, la remontée très
brutale des isothermes sur les
fonds de 75 m, amenant des eaux
froides jusqu’à 25 m sous la station C. D’après l’indice d’upwelling,
la période du 4 au 10 novembre a été une période de relaxation, et les
vents ont soufflé favorablement à partir du 11 novembre. Les vents
soufflent favorablement depuis moins de 3 jours, c’est trop tôt pour que
La Crète qui se propage vers le large ait eu le temps de se former. La
remontée brutale des isopycnes observée ce jour là, caractérise donc
l’upwelling du rebord du plateau, dans la région 02. Comme l’avaient
noté .JANOWITZ et PIETRAFESA, cette remontée peut être de plus grande
ampleur que la Crète qui se propage.
11 décembre 1968
Après une période de relaxation fin novembre début décembre, les alizés
ont repris depuis le 6 décembre. On observe une Crète des isothermes au
dessus des fonds de 30 m. Les vents soufflant depuis 5 jours, la Crète
prévue par la théorie devrait se trouver sur les fonds de 35 m (7.2.x5).
La Crète observée est donc bien prédite par la théorie. Si les vents
continuent de souffler, elle se déplacera vers le large. Au large, le
renflement des isothermes sous la station D correspond à la région
H>2 du rebord du plateau.
10 janvier 1969
Après:une période de relaxation début janvier, les alizés ont repris
depuis une journée. A la côte les isothermes sont horizontaux ; le
renflement des isothermes sur les fonds de 70-100 m peut être la
réponse à la phase d’upwelling qui démarre, alors que les eaux côtières
sont toujours au repos. Ainsi, le début d’une phase d’upwelling se
traduirait par une remontée des eaux froides au niveau du rebord du
plateau continental (temps de réponse de l’ordre d’une journée) ; les
eaux cotières ne commenceraient à se refroidir que bien plus tard,
surtout en début de saison froide, puisque des écarts de 4 jours ont
été observés entre le début d’une phase de vents favorables et le
début du refroidissement à la station côtière de Thiaroye,en novembre
1968 (TE~SSON 1982)

21 février 1969
L’indice d’upwelling nous indique une phase d’upwelling du 8 au 13 février
une phase de relaxation du 14. au Ii 9, puis une reprise à partir du 20.
Comme nous l’avions noté, en 2.1.2, la coupe T-Z a 1 ‘allure d’un
upwell ing complè t.ement développé : les vents qui n’ont repris que
depuis deux jours ont suffi à effacer toute trace de la période de
relaxation qui a duré 6 jours. Le front, mi.s en place et alimenté par
l’upwelling précédent, du 8 au 13 février, a traversé sans s’affaiblir
cette période de rel.axation : nous avons là un exemple de la persistance,
de la très lente dissipation d.es zones frontales ainsi que de la
“prédisposition”
des masses d’eaux à la moindre phase de vents soutenus,
lorsque l’upwelling est déjà développé. Notons sans l’expliquer, l’absence
de Crète dans Les isot’hermes, preuve qu’un rnod2lle conceptuel ne peut tout
prendre en compte.
13 mars 1969
Du 21 février au 13 mars, les alizés ont soufflé très épisodiquement ;
ils n’ont véritablement été présents que du 2 au 4, puis le 9 et 11 mars.
Le front s’est légèrement rapproché de la côte. On observe une Crète
marquée sur les fonds de 80-I 00 m, sans doute la réponse à la journée
d’alizés du 11 mars!, 2 jours plus tôt.
28 avril 1969
Après 11 jours de relaxation, les aliz,és ont repris le 25 avril. Durant
cette longue période de vents faibles, ‘les eaux de surface ont subi
un important réchauffement et le front se retrouve à la côte. On
note que les effets du nouvel upwelling qui a démarré depuis trois
jours se fait sentir sur les fonds de 60 m et non pas à la côte :
ils se traduisent par une Crète des isothermes dans la région du rebord
du plateau continental.
20 mai 1969 :
Les alizés qui avaient cessé de souffler depuis le 6 mai, ont fait
leur réapparition le 19. Durant quinze jours de vent faibles ou contraires
un downwelling (plongée des eaux superficielles) s’est amorcé. Nous
nous trouvons en pleine période de transition saison froide - saison
chaude. Les alizés qui soufflent à nouveau freinent ce mouvement de
plongée et l’upwelling reprend au dessus des fonds de 75 m et tente
de percer vers le haut, formant la Crète caractéristique du rebord du

plateau. Notons que de part et d’autre de cette région, aux profondeurs
de 75-100 m et à la côte, le downwelling est généralisé. Les phases
d’alizés de la fin mai sont en général très brèves , celle-ci durera
du 19 au 21 mai : la lente plongée des eaux superficielles et du front
reprendra, freinée de temps à autre par des phases d’alizés de plus
en plus courtes et espacés, jusqu’à ce que les eaux chaudes en prove-
nance du sud viennent recouvrir toute la zone et occuoer les couches
superficielles.
Sur 7 radiales en saison froide, nous avons observé six fois une
saillie des isothermes sur le rebord du plateau continental dans la
région prédite par le modèle de JANOWITZ et PIETRAFESA. Cette saillie
était également présente lors d’autres campagnes du “Laurent Amaro” :
la campagne du 14 au 17 novembre 1968(fig,Zi)montre en surface l’upwelling
qui débute devant Saint-Louis et en baie de Gorce. Hais la coupe à 25 m
de profondeur est caractéristique : les eaux les plus froides ne sont
plus observées à la côte, mais au niveau du rebord du plateau continental.
Les deux langues d’eaux froides, au nord et au sud, suivent rigoureu-
sement l’isobathe 100 m, ce qui correspond à la région H)Z au niveau
de Saint-Louis du Cap Vert et de Sangomar. C’est pendant cette campagne
qu’avait été effectuée la radiale du Cap-Vert du 14 novembre 1968 dejà
étudiée auparavant. Les vents soufflant depuis moins de 3 jours, la
crète qui se propage n’a pas eu le temps de se former, et nous
n’observons que la remontée des isothermes sur le rebord du plateau,
nettement mise en évidence sur la coupe à 25 m. Notons au passage que
la région située entre la Presqu’île du Cap Vert et Kayar n’est le siège
d’aucun upwelling : durant cette période, les vents ont soufflé du
Nord-Nord-Ouest à 6 m/s, c’est à dire perpendiculairement à la direction
de la côte dans cette région (indice d’upwelling très faible à négatif):
nous avons donc un piling-up à la côte, une convergence des eaux
superficielles chaudesdu large vers la côte. L’isotherme de surface 26’C
qui était repoussé à 80 km au large par l’upwelling de Saint-Louis
se trouve ramené à la côte au niveau de Kayar ; la même situation se
reproduit à 25 mètres. Nous avons là une illustration de la remarque
faite en 1.4. sur la distinction des régimes hydrologiques suivant
les régions et sur la difficulté de l’upwelling à s’installer et à
persister entre la Presqu’île du Cap Vert et Kayar.
La saillie des isothermes au niveau du rebord du plateau continental
semble être un des aspects significatifs de l’upwelling sénégalais.
Etant présente durant pratiquement toute la durée de l’upwelling,
cette remontée est plus facilement observée que la crzte qui se propage.

E N
SURF A C E
17" 1
A
25 M E T R E S
(
>21
FIG. 24 .- Isothermes du
4 au 17 novembre 1968

En étudiant à nouveau les campagnes de 1’Alexander von Humboldt et du
Capricorne (fig. 3et 6), nous constatons que la langue d’eaux froides
se situe toujours à l’aplomb du rebord du plateau continental : la re-
montée des isothermes au niveau de la rupture de pente du plateau ap-
paraît souvent plus intense que la remontée à la cote. Ceci rejoint la
théorie de HILL et JOHNSON (1974) dé.taillée dans TEISSON (1981) :
lorsque l’upwelling est pleinement développé, les vitesses verticales
sont maximales au-dessus du rebord du plateau et la circulation trans-
versale peut être représentée par :
0
- d
Ce type de circulation s’applique plus spécialement à la Petite Côte :
il nous a guidé pour Elaborer le schéma présenté en 1.5. Il est égale-
ment en accord avec l’aspect tridimensionnel de l’écoulement proposé
par SMITH (fig. 16).

CONCLUSION
Nous nous sommes strictement limités dans ce document à l’étude des pro-
cessus physiquesqui gouvernent l’écosystème d’upwelling (cf. fig.2). La
connaissance de l’upwelling sénégalais est loin d’être achevée puisque
les aspects biologiques n’ont pas été abordés. Nous n’avons eu outre pas
considéré les phénomènes à grande échelle ou à très petite échelle. Le
lecteur trouvera des informations sur les interactions océan-atmosphére
(connexions entre les anomalies de la circulat:ion atmosphérique observées
dans l’Atlantique Nord et les réponses de type El Nino dans le Golfe de
Guinée et l’Atlantique Oriental, variations interannuelles de l’upwelling)
dans les articles de HISART) (1980) et MERLE (1980). L’étude des micros-
tructures (turbulence, éparpillement du Planct:on, processus de mélange) a
été traitée,entre autres, par SHARP (1980), OWEN (1980), KLJLLENl3ERG (1977).
Il nous
a semblé qu’une première approche de l’upwelling sénégalais devait
se limiter à l’étude à moyenne échelle qui permet de comprendre les grandes
lignes du phénomène, les variations à grande ou 3 petite échelle venant se
superposer par la suite aux caractèristiques moyennes. C’est dans cet esprit
que l’aspect de l’environnement en péri.ode d’upwelling a été décrit dans la
première partie : nous avons tenté de déterminer le plus concrètement
possible les différents paramètres explicatifs du milieu, tels qu’ils
avaient été définis dans l’introduction (largeur de la zone d’upwelling,
origine des masses d’eaux.....)
Les structures hydrologiques et la circulation sont apparues très différentes
au nord et au sud de la Presqu’fle du Cap Vert:. Cette hétérogénéité spatiale
de l’upwelling est due à la topographie du fond. Sur un plateau continental
étroit, abrupt, comme sur la côte nord, l’upwelli.ng est strictement côtier,
dans une bande d’une vingtaine de kilomètres d.e large, Sur un plateau
large et en pente douce, avec une rupture de pente au niveau du talus,
comme sur la côte sud, l’upwelling principal apparait sur le rebord du
plateau et une seconde cellule d’upwelling se forme au dessus du milieu
du plateau. Si la pente du plateau est très faible comme c’est le cas à
partir de Mbour, les processus thermohalins - évaporation, réchauffement -
deviennent prépondérants sur les petits fonds et la circulation d’upwelling
n’atteint plus la côte,
La mauvaise orientation de la côte entre la Presqu’fle du Cap Vert et Kayar
rend cette région peu propice au développement d’un upwelling stable : cette
région joue le rôle de barrière hydrologique entre les conditions de milieu
de la côte nord et de la côte sud.

69
En saison d’upwelling, le courant de surface porte vers l’équateur
le long du littoral sénégalais, Le contre courant en profondeur dirigé
vers le pôle, caractéristique des régions d’upwelling, est présent au
dessubi du plateau sur la côte nord, mais est rejeté sur le talus sur
la côte sud. Ces observations concordent pleinement avec celles de
HWER (1976) effectuées dans d’autres régions d’upwelling.
L’enrichissement en sels nutritifs a été mis en évidence par des
mesures directes de la teneur en nitrates et phosphates. L’origine
des masses d’eaux qui remontent est plus profonde au sud (75-100 m)
qu’au nord (30 - 50 m), indiquant un upwelling potentiellement plus
riche sur la Petite Côte. Les vitesses verticales ont été très délicates
à estimer. Les valeurs moyennes obtenues de 5 m/jour sont à considérer
avec précaution : il est vraisemblable que des vitesses plus élevées
doivent être observées en pleine période d’upwelling.
Les eaux d’upwelling sont bordées vers le large par un front associé
à un intense “jet” équatorial, qui est également un aspect caractéris-
tique, remarqué dans d’autres régions d’upwelling. L’allure du
front et sa position renseignent sur l’activité et le développement de
l’upwelling.
Dans la seconde partie, nous avons étudie l’évolution de l’upwelling
sur deux échelles de temps, l’échelle de temps saisonnière, et celle
liée aux fluctuations de vent, de l’ordre de quelques jours. La
première étude réalisée à partir du modèle de HAGEN a permis de suivre
l’évolution de la pycnocline puis du front. Les quatre phases du modèle
ont été identifié
sur la radiale du Cap Vert : la circulation et l’enr .l-
chissement ont été mis en évidence.
Le second modèle a tenu compte de la topographie du fond et de l’allure
du plateau. La condition H = hh”/h’*>2 a permis d’identifier les
régions du plateau avec une rupture de pente au niveau du talus : la
remontée très intense des isothermes 2 cet endroit, prédite par la
théori.e, a bien été observée sur la radiale du Cap Vert ainsi que sur
d’autres radiales du littoral.

E M E R C I E M E N T S
Je tiens 8. exprimer ma reconnaissance à Mr FONTANA, Directeur du
CRCDT, qui a mis à ma disposition les moyens matériels nécessaires à
la poursuite de ce travail.
Je remercie chaleureusement l'ensemble des chercheurs et
te&niciens du Centre pour llaccueil qu'ils m"ont r6serv6 tout au long
de mon séjour et plus sp&5alement MM. PACES et CAVERIVIERE pour avoir
bien voulu relire et corriger certaines parties de ce rapport.
Que M. LEDCULCH, commandant du N/O CAURI, et Mademoiselle LEROUX
soient ici sincérement remerci6s pour leur disponibilité et leur
serviabilit6.
Je voudrais enfin adresser de vifs remerciements au "Pool des
secrétaires~t pour leur travail et leur
lit6 constante.,

BIBLIOGRAPHIE
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lated processes off Baja California. Calif. Coop. Oceanic. Fish.
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BARBER (R.T.), 1977.- The JOINT-l expedition of Coastal Upwelling
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