CONTRIBUTION A L’HARMONISATION DE COMPTE GLOBAL ...
CONTRIBUTION A L’HARMONISATION DE COMPTE GLOBAL
FILIERE VIANDE BOVINE
Par
CHEIKH Mb. NDIONE’
et
MBAYE YADE’
’ Institut Sénegalais de Recherches Agricoles.
’ Institut du Sahel/ PRISAS.
1

Introduction
La filière bovine comprend un circuit vif emprunté par le bétail vivant et un circuit mort, celui
de la transformation du bétail en viande. Une étude de la commercialisation, partant de
l’amont vers l’aval, bute sur la difficulté qui consiste à exprimer tous les paramètres en terme
de viande rouge : ce qui rendrait plus harmonieuse l’expression des parts respectives. En effet,
depuis les zones de production jusqu’aux centres de consommation, le bovin vivant est
caractérisé par son poids vif et carcasse. Entre ces points, l’animal transporté puis transformé
en viande, voit son poids vif et carcasse subir des changements. Ces variations sont transmises
d’un acteur à l’autre ; depuis le producteur, en passant par les dioula puis le chevillard pour
arriver, en dernier lieu , au boucher.
Du producteur au dioula, ce sont les pertes de poids dus au transport qui sont transférées ; le
chevillard en prenant le relais du dioula accuse des variations liées au rendement et au
ressuyage tandis que le boucher subit les pertes liées à la découpe. Habituellement, nous
exprimons les postes de dépenses et de recettes selon l’unité caractéristique de l’état de
l’animal à chaque étape. Cette démarche apparaît insatisfaisante quand on veut évaluer et
analyser la répartition des charges et des marges entre les acteurs pour chaque kg de viande
produit. En effet le producteur et le dioula voient leurs charges et marges exprimées en kg vif
au moment où celles du chevillard et du boucher sont libellées en kg de viande rouge.
L’harmonisation des unités utilisées pour calculer ces ratios nous permet de mieux apprécier
les performances individuelles des acteurs.
Nous avons été confrontés à cette situation dans le cadre de l’étude (sur l’impact de la
dévaluation) au moment de confectionner le compte global de la filière bovine au Sénégal.
L’objet de ce travail est de présenter la méthodologie développée pour contourner cette
difficulté.
Matériel et méthode :
Il est devenu une pratique courante au Sénégal de classer les bovins en catégories selon un
âge qui est supposé correspondre à une fourchette de poids typiques tout au moins en élevage
traditionnel extensif. Cette subdivision, qui est adoptée ici, permet de classer les bovins
destinés à la commercialisation en veaux/velles (âgés de 0 à 1 an), taurillons/génisses (1)
(âgés de deux à trois ans) ; taurillons/génisses (2) (âgés 3 à 4 ans), taureaux (bœufs)/vaches au
delà de 4 ans.
L’abattage des femelles de moins de 4 ans étant interdit, nous sommes concernés uniquement
par les veaux, les taurillons, les taureaux et les vaches de réforme. A chacune de ces catégories
correspond un rendement moyen carcasse accepté par les professionnels de la viande et vérifié
par les enquêtes de la Direction de 1’Elevage ou la Société de Développement de 1’Elevage en
Zone Sylvo-Pastorale, SODESP. Dans le cadre de cette recherche nous nous sommes
intéressés aux mâles de 5 ans pesant 450 kg perdant 15 % de son poids lors de son transport,
atteignant un rendement carcasse de 50 % et caractérisés par des pertes au ressuyage de 4 %
et à la découpe de 2 %.

Présentation de la filière bovine : axe Dahra Dakar.
La filière bovine (ici prise en exemple) sénégalaise débute en Zone Sylvo-pastorale qui est
localisée au nord du Sénégal. Cette zone représente une multitude de points de collecte
primaire de bovins matérialisés par les points d’eau (forages et puits). Ce sont les dioula
chargés de la collecte primaire qui fréquentent ces marchés dispersés un peu partout. Ensuite
les animaux collectés sont acheminés vers Dahra, foirai1 de rassemblement fréquenté par des
commerçants qui connectent ce point aux foirails de consommation dont un bel exemple est
le marché de Thiaroye. Thiaroye matérialise la fin du circuit vif et le début du circuit mort
qu’affectionne le chevillard chargé de la transformation du bétail en viande. Le chevillard est
supposé être le commerçant de gros pour la viande et celui de la viande au détail est le
boucher.
Tableau 1 : Etapes successives dans la filière bovine sénégalaise : poids et prix de référence
(1996).
Etape
Zone Sylvo-Pastorale :
Dahra, foirai1 de
Thiaroye, foirai1
Abattoirs de Dakar
collecte primaire
rassemblement
de
consommation
Poids
450*
428*
385*
192*
Prix moyen avant
300
365
440
1040
dévaluation
Prix moyen après
375
425
520
1240
dévaluation
* Kg de poids vif
* * kg de viande
Calcul des coefficients de conversion :
En remontant le filière à contre courant, il devient possible d’exprimer la part respective des
acteurs intervenant dans la commercialisation du bétail et de la viande en terme de kg de
viande rouge produit ou servi. Pour cela, il nous faut un coefficient de conversion dérivé des
coefficients techniques caractéristiques de chaque étape. Cette remontée permet d’isoler les
pertes et les variations suivantes :
n pertes à la découpe PD ;
H pertes au ressuyage PR ;
n rendement carcasse RC ;
W pertes lors du second transport PT2 : de Dahra à Thiaroye;
W pertes lors du premier transport PT1 : des points de collecte primaire à Dahra
Pour chaque acteur, le tableau ci-dessous est utilisé pour déterminer le coefficient de
conversion. A côté de ces paramètres, il faut tenir compte d’un facteur de correction (FC)
permettant de ne tenir compte que du revenu du chevillard tiré de la viande rouge car le
cinquième quartier participe à ce revenu. On le dérive du
revenu du chevillard tiré
uniquement de la viande rouge divisé par celui obtenu en vendant aussi bien la viande rouge
que le cinquième quartier.
Comme les revenus dont il dérive ce facteur est variable. Ne pas corriger le revenu du
chevillard en isolant seulement la part de la viande rouge, c’est surestimer la contribution
3

.
revenant aux acteurs situés en amont. Le coefficient de conversion (CC) est obtenu en divisant
le facteur de correction (FC) par le produit de (l-PD), (l-PR), (l-RC), (l-PT2), (l-PTl).
Soit :
cc = FC / ((l-PD) “(l- PR) “(l- RC) * (1-PT2) * (1-PTl)).
Tableau 2 : Dérivation du coefficient de conversion des revenus et charges des acteurs
exprimés en kg de viande rouge.
Acteurs
l-PD
l-PR
l-RC
l-PT2
1-P-I-l
CF’
coefficient
conversion
producteur
0,98
0,96
030
09
0,95
0,93 / 092
231/2,28
dioula 1
0,98
0,96
050
0,90
1
093 /og2
2,19 / 2,16
dioula 2
098
0,96
050
1
1
0,93 1092
1,97/1,95
chevillard
0,98
1
1
1
1
l/l
1,02 / 1,02
boucher
1
1
1
1
1
111
I/l
Tableau 3 : Compte de la filière
AVANT DEVALUATION
APRES DEVALUATION
MONTANT /kg vif
COEFFICIENT
MONTANT&
MONTANT par
COEFFICIENT
MONTANT/kg de
de conversion
VIANDE ROUGE
kg vif
de correction
viande rouge
viande rouge
viande rouge
CI PRO
4755
231
110
51,13
228
117
RBE PROD
252,45
231
583
323,87
228
738
CI DIOULA 1
1023
2,19
22
11,17
2,16
24
RNE DIOULA 1
38,98
2,19
8 5
19,09
2,16
41
CI DIOULA 2
923
1,97
1 8
10,66
195
2 1
I
I
I
RNE DIOULA 2
25,22
1,97
50
37,12
1,95
72
CI CHEVILLARD
63,25
1,02
64
68,ll
1,02
6 9
RNE chevillard
12649
* CF avant/après la dévaluation
4

1,02
129
1793.5
1,02
183
CI BOUCHER
32,66
1
3 3
4559
1
4 6
RNE BOUCHER
156,OS
1
156
189,06
1
189
Total
Légende : CI = consommations intermédiaires ; RBE = revenu brut d’exploitation ;
En multipliant ce coefficient par les consommations intermédiaires et les recettes obtenues par
enquêtes , on exprime les dépenses consenties et les revenus reçus par chaque acteur pour
produire ou servir un kg de viande rouge au consommateur. En agrégeant ainsi, on obtient le
compte global de la filière. Le coefficient de correction permet de passer de l’éleveur au
boucher dès l’instant qu’on sait que chaque fois que le boucher vend une unité de viande, 2,31
unités de kg vif ont été produites par l’éleveur.
Pour le producteur, nous obtenons un revenu brut d’exploitation qui rétribue la main d’œuvre
familiale, le management et le placement dans le troupeau. Pour les autres acteurs nous
parvenons à un revenu net d’exploitation.
En comparant les périodes avant et après la dévaluation, on constate que le pasteur ont pu
contenir l’augmentation de ses consommations intermédiaires (par kg de viande produit)
autour de 6,4 % tout en obtenant une hausse de son revenu brut d’exploitation de 26,6 %.
C’est là une portion de la filière qui a pu résister au choc monétaire que représente la
dévaluation. Ses charges ont augmenté de 7f par kg de viande rouge offert pendant que son
revenu subissait une hausse de 155 f/kg.
Cependant, le chevillard est parvenu, qualitativement, au même résultat (8 % d’augmentation
de CI et 42 % de hausse du revenu net). L’explication est que les chevillards ont pu s’opposer,
sur un terrain purement syndical, à l’augmentation des charges de transformation que la
SERAS3 voulait leur transférer.
En comparant les périodes avant et après la dévaluation, on constate une baisse du coefficient
de correction viande du producteur et ceux des dioula ; pendant que ceux des acteurs du
circuit mort restent constants. On en déduit que le pasteur convertit mieux sa production en
viande depuis l’avènement de la dévaluation.
5

Quand la ligne “total” du tableau ci-dessus est exprimée en f CFA/kg de viande rouge, la
somme des consommations intermédiaires et des revenus nous donne le prix du kg de viande
au consommateur. Tandis que, horizontalement, on peut lire, pour chaque poste de dépenses et
de revenus la contribution et la rétribution de chaque acteur pour un kg de viande rouge servi
au consommateur.
Cette approche du compte global de la filière a l’avantage de permettre la comparaison de
plusieurs systèmes de production et plusieurs filières (d’approvisionnement) en appréciant
leur capacité à limiter leurs charges et à engranger les bénéfices de la dévaluation ou d’autres
chocs. On peut aussi utiliser cette approche pour calculer le prix aux acteurs exprimé en terme
de viande rouge. Ainsi le prix au producteur est égal à son revenu brut d’exploitation + ses
consommations intermédiaires ; le prix au dioula 1 est égal au prix au producteur + (les
consommations intermédiaires + le revenu net d’exploitation) du dioula 1, etc...
Graphe 1 :Revenus d’exploitation avant et aprbs dévaluation
6 0 0
m Avant
-t après
Revenu
Revenu
Revenu
Revenu
Revenu
Brut
Brut
Brut
Brut
Brut
Pasteur.
dioula 1
dioula 2
chevillard
boucher

.
.
Consommation intermédiaires des acteurs avant et après la
dévaluation
~-Avant
+ A p r è s


.
Prix aux acteurs avant et après la dévaluation
1 6 0 0
1400
1 2 0 0
1000
mb Avant
-Après
600
Rix
Prix dioula
Rix dioula
Ri%
prix
Roducteur
1
2
chevillard
boucher
acteurs