DIRECTION DES RECHERCHES SUR LES CULTURES ET...
DIRECTION DES RECHERCHES SUR LES
CULTURES ET SYSTEMES PLUVIAUX
IGRAMME LEGUMINEUSES
RAPPORT D'ACTIVITES 1994/95
DU SERVICE
SOC10 ECONOMIE.
MBENE DIEYE FAYE
BAMBEY
ISRA
MARS 95
Ireau : CNRA de Bambey - B. P. 53 Tel. 73.6050, 73.6051, Fax 7350.52 Télex 61117lSRA SG

1 INTRODUCTION
1
Les activités en matière de recherches socio économiques au sein du
~
programme légumineuses, et plus particulièrement dans l’opération niébé, ont
~
redémarré depuis septembre 1993 et portent sur les principaux axes suivants:
les études d’impact des nouvelles technologies proposées à travers les
??
essais sur le niébé menés en milieu paysan ou essais mini-kit;
:.
suivi de la commercialisation du niébé vert et sec;
Pour les études d’adoption et d’impact, les principaux paramètres suivants
ont été retenus: variétés améliorées, pratiques culturales, (modes de semis,
protection phytosanitaire) et techniques de stockage du niébé sec. Le suivi de
la commercialisation porte essentiellement sur l’évolution des prix, les
systèmes de transfert du niébé des zones excédentaires vers les zones de
consommation déficitaires, ainsi que sur les préférences variétales.
L’exécution de ce programme de recherches suit un calendrier saisonnier.
~
C’est ainsi que les activités de saison sèche se distinguent de celles
d’hivernage. Le présent rapport concerne les résultats de recherches menées
~
durant la campagne 1993/1994 en fonction des saisons

2
I LES ACTIVITES DE SAISON SECHE
1.1. SUIVI DES TECHNIQUES DE STOCKAGE
II s’agit là d’un suivi des différentes techniques de stockage du niébé sec
adoptées par les paysans, en mettant l’accent sur l’impact de l’utilisation des
fûts métalliques, comme principale méthode de stockage recommandée dans
le cadre du projet de recherche collaborative I.S.R.A. / C.R.S.P. - NIEBE.
Les enquêtes ont été menées en grande partie dans le nord et le centre-
nord du bassin arachidier, principale zone de culture du niébé (voir figure 1).
En effet, 89,5 % de la production et 89 % des superficies emblavées en 1993
étaient localisées dans cette zone. Les enquêtes socio - économiques de
saison sèche se sont déroulées dans 4 villages: N’datt Fall, N’dangour, Keur
Boumi, et N’dialouye Marone.

Figure 1. Superficies emblavées en niébé par zone
2L 160
2

140
2
'2
120
-National *B. arachidier
L
100
ii
-4
80
-2
L
60
a
ii
40
20
01984 1985 1986 1987 1988 1989 1990 1991 1992 1993
ANNEES

3
1.1. Justification du choix des villages
N’datt Fall est un village où les mini-kits sont menés durant 9 années
~
avec la participation d’un groupement de 5 hommes. II s’avère opportun de voir
dans le cadre des études d’impact le degré d’adoption des fûts métalliques
comme technique de stockage par les paysans participant ou non aux essais.
N’dangour et Keur Boumi sont deux villages où les essais sont menés
~
avec la collaboration de groupements de femmes. Ces groupements n’utilisent
~
que les fûts métalliques offerts par le projet pour stocker leur récolte de niébé.
Suivre les stocks au niveau de ces groupements permettrait de mieux
~
apprécier la rentabilité des fûts.
N’dialouye Marone est un village hors mini-kit, encadré par la Vision
Mondiale (O.N.G.). Ce village avait abrité en septembre 1993 un séminaire de
démonstration aussi bien sur les nouvelles techniques de stockage (méthode
des trois sacs en plastique) que sur les méthodes de traitement des graines de
niébé sec avant le stockage pour l’élimination des oeufs, des larves et des
adultes de bruche (utilisation de la cendre et de l’énergie solaire). Dans ce
village, 5 paysans ont fait l’objet de suivi.
Le suivi des techniques de stockage suivi a pour objectif d’une part de
~
connaître l’appréciation que les paysans portent sur elles et de comparer
~
d’autre part les prix de vente du niébé sec entre village mini-kit et village hors
~
mini-kit.
1.1.2. Résultats et discussions
A N’datt Fall, les stocks suivis ont été estimés à 8 110 kg de niébé dont
10 % de variétés améliorées. Pour la préservation de la qualité des graines, 37
fûts grand modèle de 160 kg , 20 fûts galvanisés petit modèle et des sacs en
plastique ont été utilisés comme moyen de stockage. Chaque fût grand modèle
contient 160 kg de niébé tandis que les petits modèle contiennent chacun 45
(kg). Ces méthodes permettent aux paysans une meilleure maîtrise de la

4
~
gestion des stocks et par conséquent d’attendre la meilleure période pour
~
vendre la récolte à des prix intéressants.
Toutes les variétés améliorées (10 % des réserves) ont été stockées dans
~
les fûts galvanisés petit modèle offerts ‘par le projet, 73 % des stocks étaient
~
dans des fûts grands modèle, soit un total de 83 % des réserves dans des fûts
~
métalliques contre 17 % seulement dans des sacs.
II ressort de ces chiffres que l’utilisation des fûts métalliques comme
~
technique de stockage proposée dans le cadre du projet de recherches
~
collaborative ISRA./ CRSP-NIEBE, trouve un écho favorable auprès des
~
paysans de ce village qui l’ont largement adoptées.
A N’dangour, un groupement de 40 femmes participe à la conduite des
essais mini-kit. II en est de même pour Keur Boumi. Dans chacun de ces
villages le groupement a reçu du projet 2 fûts métalliques grand modèle et 4
fûts galvanisés petit modèle. A N’dangour, 407 kg de niébé étaient stockés,
contre 331 kg à Keur Boumi. Les stocks étaient constitués uniquement de
variétés améliorées récoltées à partir des essais (tab. 1).
Tableau 1: Variétés et quantités stockées (en kg) à N’dangour et Keur
Boumi
NB: Le suivi n’a pas concerné les stocks individuels des femmes. Ceux-ci
sont généralement faibles et destinées à l’auto consommation
A N’dialouye Marone, les stocks suivis étaient estimés à 4000 kg. La
~
principale méthode de stockage utilisée était celle des sacs en plastique de 70

~
kg. Elle était utilisée pour le stockage de 64 % des réserves, contre 36 % dans
~
des fûts métalliques grand modèle. Lors des enquêtes, 37 sacs et 9 fûts
~
métalliques ont été recensés chez les 5 paysans suivis.
La méthode des trois sacs n’a pas été utilisée par les paysans de ce
~
village’ qui ne trouvent pas économique le fait d’investir 900 fcfa, le prix de 3
~
sacs pour ne stocker que 50 kg de niébé.
Quant aux techniques de traitement pré stockage des graines, la méthode
de la cendre a été testée avec succès sur 30 kg de variété de niébé locale par
un consultant de brousse de la Vision Mondiale. Cependant, la diffusion de
cette méthode en milieu paysan est très limitée à cause de l’insuffisance des
cendres, malgré l’intérêt que les femmes portent sur celle-ci. En effet,
l’introduction de “foyers améliorW’ initiés dans le cadre de la lutte contre la
désertification, a fait que les femmes utilisent moins de bois pour la cuisine.
D’où les faibles quantités de cendres disponibles après chaque cuisson.
L’utilisation de l’énergie solaire comme méthode de traitement contre les
bruches démontrée lors du séminaire sur les techniques de stockage n’a été
pratiquée que par le consultant de brousse de la Vision Mondiale qui dispose
du matériel requis.
Les autres paysans ont utilise des sacs vides pour étaler leur récolte sous
le soleil avant le stockage.
Les résultats de ces enquêtes montrent, d’une manière générale, que les
paysans apprécient positivement les fûts métalliques qu’ils jugent pratiques et
très efficaces pour la conservation du niébé sec. Toutefois, ils notent des
difficultés dans l’acquisition du matériel. C’est ainsi qu’en 1993 / 94, année où
la récolte de niébé a été particulièrement bonne, les fûts métalliques ont été
souvent hors de portée. Le prix unitaire avait atteint dans la région de Louga 4
500 fcfa en début de saison sèche. II s’y ajoute l’enclavement des villages
comme N’dialouye Marone qui ne favorise pas l’accès aux fûts, car les paysans
doivent souvent dépenser près de 1 500 fcfa par fût pour le transport du lieu
d’achat à leur village.

6
II faut cependant noter les efforts consentis par la Vision Mondiale pour
approvisionner les paysans des villages enclavés en sacs plastiques utilisables
pour le stockage. Cette O.N.G. a mis à leur disposition plus de 10 000 sacs sur
la base d’un système de crédit. Ces sacs plus accessibles que les fûts sont
d’après les paysans, très fragiles et moins efficaces. Ils se fendent facilement
sous l’effet de la chaleur. En plus, leur durée de vie dépasse rarement un an à
cause de leurs multiples trouaisons dues aux rongeurs et aux bruches.

1.2. SUIVI DE LA COMMERCIALISATION DU NIEBE SEC
La forte production de niébé enregistrée en 1993 (plus de 55 000 tonnes)
a fait qu’en plus des problèmes de stockage, ceux de la commercialisation se
sont posés tant au niveau micro que macro économique. De novembre 1993 à
juillet 1994, la commercialisation du niébé sec a été suivie aussi bien au niveau
des marchés du nord et de l’intérieur qu’au niveau des villages cités plus haut.
Ces marchés sont dynamiques dans la vente des produits agricoles et peuvent
influencer les prix de vente à l’échelle nationale, particulièrement sur ceux du
niébé.
1.2.1. La commercialisation du niébé de consommation
Durant toute la période considérée (novembre 1993 à juillet 1994) le prix
moyen du kg de niébé était en dessous de 100 fcfa dans certains marchés
comme ceux de Diouroup, Bambey Sérère, Thilmakha, Sagatta et Louga.
Des prix très bas compris entre 20 et 30 fcfa/kg ont été même enregistrés
dans ces villages de novembre à janvier. Par contre, ces prix variaient entre 75
et 250 fcfa à Dakar, Koumpentoum, Nioro et Saint-Louis (tab. 2).
Tableau 2: Variation des prix (en fcfa) du kg de niébé en 1993 / 1994
Koumpentoum
200 200 150
150
125
100
1 2 5 2 0 0
200
(Tambacounda)
Dakar
75
125 150 125
150
200
200 200 250
NB: Ces données présentent les résultats d’enquêtes menées tous les 15
iours.
---
_
--

Les raisons de la différence constatée dans l’évolution des prix d’une
i
zone à une autre sont multiples:
.
Les paysans qui ne disposaient pas de fûts étaient obligés d’écouler une
bonne partie de leur récolte pour éviter les attaques des graines par les
bruches. En effet, le niébé fortement bruché ne peut servir qu’à alimentation
du bétail et a des difficultés d’écoulement, vu sa mauvaise qualité. Durant
cette période, l’offre étant très importante, les acheteurs bana bana 1
avaient fixé les prix à des niveaux très bas compris entre 25 et 30 fcfa dans
les zones excédentaires. Par contre les paysans qui disposaient des fûts
métalliques avaient la possibilité d’attendre la période propice pour écouler
leur produit. C’ est ainsi qu’ à N’datt Fall les paysans ont attendu jusqu’en
mars pour commencer à vendre leur récolte (tab. 3).
.
Les prix élevés notés dans les marchés de Dakar, Koumpentoum, Nioro
et Saint-Louis sont liés: à la rareté du niébé du fait qu’elles n’en produisent
pas suffisamment, aux difficultés de transfert des excédents vers ces zones
déficitaires et au fait que depuis la dévaluation du franc CFA, le niébé est
intégré de plus en plus dans l’alimentation quotidienne des populations
urbaines.
A Dakar par exemple, des produits importés comme les lentilles, les petis
pois et les haricots blancs, devenus trop chers sont progresivement emplacer
~
par le niébé.
l
~‘Bana-bana
est un collecteur qui sillonne les rnarchks et achète rassemble de petites quantités d’un
1
produit qu’il achète en vue de le revendre.

9
Tableau 3: Recettes encaissées par les paysans après stockage à N’datt Fall
Noms des paysans
Quantités
Prix du kg (fcfa)
Recettes totales
vendues (kg)
(fcfa)
Cheikh
Niass
1440
70
100800
Ousmane Fall
1760
70
123200
N’diol
Diop
1 000
70
70000
Bara
Diop
640
70
44800
Modou
Mbaye
320
70
22400
TOTAL
5160
70
361200
Si ces paysans ne disposaient pas de fûts pour le stockage, cette même
quantité de 5160 kg serait vendue au mieux des cas à 30 fcfa le kilogramme,
ce qui ne générerait qu’une recette de 154 800 fcfa. En vendant par contre au
prix de 70 fcfa fixé par W.N.C.A.S. (Union Nationale des Coopératives
Agricoles du Sénégal) pour la période de février à mai 1994, grâce au stockage
avec les fûts, les paysans ont pu obtenir les recettes supplémentaires de 206
400 cfca (361 200 - 154 800).
En supposant que tous les fûts soient acquis durant la campagne 1993/94
au prix de revient unitaire de 3500 fcfa et que chacun contienne 160 kg de
niébé (comme déclaré par les paysans), le coût total du stockage des 5 160 kg
(environ 32 fûts) serait de 112 875 fcfa.
Les bénéfices supplémentaires, toutes choses étant égales par ailleurs
s’élèveraient dans ces conditions à 93525 fcfa (206400 - 112875) soit un gain
de 2900 fcfa par fût. Si l’on sait que la durée de vie des fûts métalliques est
parfois supérieur à 10 ans on comprend alors l’intérêt que présentent les
investissements consentis en achetant les fûts.

10
1.2. 2. La commercialisation des semences de niébé
La vente des semences a débuté en juillet 1994. Pour le niébé
traditionnel, les semences ordinaires sont vendus à 80 fcfa le kg tandis que les
semences conditionnées sont commercialisées par W.N.C.A.S. à raison de
150 fcfa le kg. Les prix des variétés améliorées varient entre 150 (dans les
villages) et 350 fcfa prix fixé par la Vision Mondiale pour la vente des
semences sélectionnées.
La variété la plus sollicitée par les paysans pour semence était la Melakh.
L’accent a été mis sur l’aspect précoce de cette variété qu’ils qualifient de
variété “secours” pendant la période de soudure. Cependant, les semences de
la Melakh ne sont disponibles qu’au niveau des paysans qui participent aux
essais mini-kit. Les autres ayant tendance à consommer en vert toute leur
production de cette variété, ont du mal à constituer un stock de semence
personnel.
Le suivi de la vente des semences a donné les résultats suivants (tab.4)
Tableau 4 Quantités vendues et recettes encaissées
Villages
Quantité
Prix de vente kg
Recettes
vendue (kg)
(fcfa)
encaissées
N’datt Fall
740
175
129 500
N’dangour
367
150
64 225
Keur Boumi
280
170
49 000
A N’dialouye Marone les paysans ont gardé leur propre semence de
variété traditionnelle. Le consultant de brousse de la Vision Mondiale qui
disposait d’une petite quantité de semence de Mouride en a offerte
gratuitement à 7 autres paysans qui étaient venus le solliciter.
..C -

Il
AUTRES ACTIVITES
En marge de ce suivi, des enquêtes préliminaires ont été menées dans 12
villages pour la mise en place de nouveaux essais mini-kit pour la campagne
1994/95. A l’issue de ces enquêtes, 5 villages ont été retenus parmi les 12
enquêtés. Au total, pour cette campagne, les essais mini-kit sont implantés
dans 9 villages avec II groupements dont 6 de femmes (tab. 4).
Tableau 4: Sites d’essais mini-kit pour 1994
Région
Site
Interlocuteurs Effectifs Début essais
Diourbel
Thilmakha - Poleck
hommes
5
1994
femmes
80
1994
Fatick
Keur S.M. Gueye
hommes
5
1994
N’dangour
femmes
40
1993
Keur Boumi
femmes
40
1993
Louga
Sine Dieng
femmes
70
1993
N’gueune Sarr
hommes
5
1994
Nékhedji Palène
hommes
5
1994
Thiès
Thilmakha N’doucoumane
hommes
5
1988
femmes
60
1991
St-Louis
Semelle
femmes
70
1994
Les sites de Gatt (hommes) dans la région de Diourbel, N’datt Fall
(hommes) dans la région de Thiès, Sine Dieng (hommes) et Lampsar (hommes
et femmes) ne font plus l’objet de suivi sauf dans le cadre des études d’impact.

12
L LES ACTIVITES D’HIVERNAGE
Les activités de recherches socio économiques ont porté pendant
1
l’hivernage 1994 sur les taux d’adoption des variétés améliorées de niébé, à
~
savoir la IS86 275 (Mouride) et la IS 89 504 (Mélakh) ainsi que sur le suivi de
~la commercialisation du niébé vert. Les objectifs de ces enquêtes sont
l
de déterminer le degré de connaissances de ces variétés par les paysans,
? ?
1. de recueuillir leur avis et d’identifier les difficultés éventuellement liées à
l
l’adoption de ces variétés
(* d’apprécier l’impact de ces nouvelles variétés sur la commercialisation du
niébé en vert. Le suivi de la commercialisation du niébé vert permettra en
outre d’apprécier la rentabilité de cette activité et la place que les femmes y
occupent.
~
l
Ce rapport traitera des résultats d’enquêtes menées dans les régions
(
nord et centre nord du bassin arachidier. Les villages de Gatt dans la région de
Diourbel et de N’datt Fall dans la région de Thiès ont été retenus pour les
raisons suivantes:
~

ils font partis des premiers villages dans lesquels les variétés Mouride et
?
1
Mélakh ont été testées
ces villages sont tous situés dans la zone d’intervention du projet et ont
~*
beaucoup d’expériences dans la conduite des essais mini-kit: ils pourraient
donc servir de villages pilotes dans le transfert des variétés améliorées. En
outre, Gatt a la particularité de ne pas bénéficier d’appui extérieur pour la
vulgarisation des ces variétés.
La commercialisation du niébé vert aété suivie sur , l’axe Thiès-Louga
l
parce que longeant la zone la plus touchée par les programmes de distribution

de semences améliorées de niébé et où la vente de niébé vert est une activité
très développée comparé aux autres principaux axes routiers du pays.

13
1. ADOPTION DES VARIETES
Les taux d’adoption des variétés améliorées Mouride (vulgarisée en 1992)
et Mélakh (en pré vulgarisation) ainsi que les impacts des techniques de
culture proposées dans le cadre du projet ont fait l’objet d’une évaluation
pendant l’hivernage 1994 dans les villages de Gatt, et de N’Datt Fall.
~
1.1. Le village de Gatt
Sur les 80 chefs de carré2 que compte le village, 40 choisis sur la base de
leur dynamisme dans l’agriculture ont été interrogés sur leur degré de
connaissance des varétés améliorées introduites dans le village dans le cadre
du projet ISRA CRSP/niébé. Parmi ces paysans, 36 ont déclaré avoir connu et
semé Mouride ou Mélakh ou les deux à la fois; soit 85% du total des personnes
interrogées. Une large dominante de la Mélakh a été notée. Les quantités
semées de cette variété ont été estimées à 150 kg contre 70 kg pour la
Mouride. Selon les témoignages, les autres carrés qui n’ont pas semé ces
variétés profitaient des opportunités offertes par les champs des voisins pour
les besoins de leur consommation.
La dissémination des variétés en dehors du village est assurée par les
paysans qui ont participé à la conduite des essais mini-kit. C’est au cours de
leur rencontre qu’ils livrent à d’autres villageois de manière informelle des
informations relatives à l’existence de telle ou telle nouvelle semence dans leur
village respectif. C’est ainsi que ces variétés sont connues et semées dans
certains villages autour de Gatt jusqu’à un rayon de 17 km sauf dans sa partie
nord (e). Le seul problème noté dans le système de transfert des
semences entre villageois est celui du mélange des variétés. Ce qui à long
terme peut constituer des limites quand à l’appréciation de certaines
caractéristiques de ces variétén
~
2Le carré est considéré dans ce texte comme une unité d’habitation qui regroupe plusieurs
ménages.

14
1.2. Le village de N’Datt Fall
Dans ce village, des enquêtes sont menées auprès des 36 chefs de carré
que compte le village. Les varidtés Mouride et Mélakh sont connues et semées
par toutes ces personnes enquêtées. Les investigations menées en dehors du
village ont montré que ces variétés sont très répandues dans la communauté
rurale qui est couverte par le programme de distribution de semences menée
par la Vision Mondiale. Cette 0 N G a distribué 75 tonnes de Mouride et
Mélakh dans les régions de Thiès et Louga durant la campagne 1994/95,
contre 5 tonnes de ces mêmes variétés en 1993. Pendant l’hivernage 1994, les
semences sont réparties entre 1875 paysans à raison de 4 kg chacun.
Partout où ces variétés sont introduites, les appréciations ont porté sur
leur précocité, surtout pour la Mélakh. Cependant, même si les variétés sont
adoptées par les paysans auxquels elles sont destinées, des limites sont
notées quant à l’expansion des superficies qui leur sont réservées. Les
explications avancées dans ce sens par les paysans peuvent être résumées
comme suit:
.
au champ les gousses de la IS89 504 moisissent sous l’effet de la pluie et
la IS86 275 est très attaquée par les pucerons. Si la première contrainte
évoquée peut être atténuée par un bon planning des récoltes, il n’en est
pas de même pour la deuxième qui nécessite un traitement phytosanitaire.
Le litre de produit coûte entre 9000 fcfa et 12000 fcfa, et sont souvent hors
de portée des paysans. L’accés difficile à la terre noté chez les femmes
peut aussi expliquer en partie les limites dans l’expansion des surfaces
emblavées. Les femmes qui traditionnellement sont les productrices de
niébé disposent de petites parcelles sur lesquelles ellesdoivent faire
plusieurs cultures pendant l’hivernage;
les graines de Mouride jugées trop petites sont difficiles à commercialiser et
?
la Mélakh, en plus de son manque de goût qui fait qu’elle entre rarement
dans la préparation des repas, est très attaquée par les bruches de
stockage. A sec ces variétés sont surtout conservées pour semences car

15
les variétés locales traditionnelles comme N’diaga Aw, Baye N’gagne,
Patate3 et Marne Fama sont préférées pour la consommation à sec à la
place des variétés améliorées. Les variétés N’diaga Aw et Patate en plus de
leur saveur donnent une coloration particulière aux plats de riz surtout
(rouge tomate). Pour la transformation en farine ou en brisures (utilisées
comme riz), les variétés blanches sont les plus ciblées seulement pour la
Mouride le fait que sa peau s’enlève difficilement pose des problèmes à ce
niveau aussi.
La seule raison majeure évoquée par les paysans reste les difficultés
notées pour la commercialisation de la Mouride. Car pour les autres aspects, il
suffit que le paysan soit sûr de pouvoir écouler sa production à un prix
rémunérateur, pour que les superficies emblavées augmentent. Dans ce cas,
toutes les charges de production pourraient être couvertes par les recettes
tirées de la vente. Et par ailleurs, il faut noter qu’à l’état vert, la Mélakh est
d’une très grande importance alimentaire pour les paysans, car certaines
familles en consomment jusqu’à 7 kg par jour au début des récoltes sous forme
bouillie ou en association avec des céréales.
En marge de ces enquêtes, d’autres ont été menées au niveau des
~
nouveaux sites pour connaître les appréciations faites par les paysans sur les

variétés améliorées qui leur sont proposées. Les quantités suivantes ont été
~
récoltées à partir des essais auxquels des paysans individuels et des
groupements féminins ont participé à la gestion (Tab. 1.).
3Patate est une variét6 de niéb6 locale de type N’diaga Aw bien appréciée dans la zone de
~

Gatt

1 6
Tableau. 1. Quantités de niébé produite en kg
Variétés Mélakh
Mouride
Diongama
Ndiambour
Villages
Thilmakha-Poleck
109
118
183
168
Keur S.M. Guèye
107
106
56
86
Nékhédj
104
96
81
81
Ngueune Sarr
103
98,5
147
81,5
Semelle
61
79
20
45
A Thilmakha Poleck (Diourbel), les variétés recensées avant la mise en
place des essais étaient Baye N’gagne, Mougne, Patate, Marne Fama. Les
récoltes sont destinées à auto consommation. Faute de semences d’arachide
en quantité suffisante, les paysans emblavent maintenant des champs en
culture pure de niébé. Un groupement féminin de 80 femmes et 5 paysans
individuels ont participé à la gestion des essais. Leurs principales
appréciations portent sur la précocité et la productivité des variétés.
A Keur S&igne Madieng Guèye (Fatick), la seule variété recensée était
de type 58-57 chez les paysans impliqués dans les essais. Les productions
~
n’étaient pas importantes. Pas de culture pure de niébé et la méthode qui
existait consistait à mélanger une poignée de semences de niébé avec celles
~
d’arachide dans les semoirs au moment du semis.
Les variétés son bien appréciées mais les paysans souhaiteraient avoir
des variétés plus fourragères car l’essentiel des récoltes est utilisé pour
1
l’alimentation du bétail.
A Nékhédj (Thiès), Marne Fama, N’diaga Aw et Mougne étaient les
variétés disponibles dans le villages. Les paysans pratiquent la culture pure du
niébé et peuvent emblaver jusqu’à 2 ha toutes variétés confondues. Les
problèmes évoqués concernant ces variétés sont liées aux difficultés de
stockage de la Mélakh. Suite à une restriction budgétaire opèrée sur les fonds
CRSP/NIEBE, les paysans n’ont pas bénéficié des fûts métalliques qui
auparavant étaient offerts par le projet.

A N’gueune Sarr (Louga), Les appréciations ont porté beaucoup plus sur
la Mélakh que sur les autres variétés à cause de sa précocité et de sa
tolérance aux pucerons (principaux ennemis du niébé dans cette zone). Pour la
cuisson, les femmes n’ont pas encore noté de différence entre les variétés,
mais pour la commercialisation elles signalent que Mélakh et Diongama
pourraient présenter des avantages par rapport aux variétés locales à cause
de la grosseur des graines et de leur coloration blanche. Certaines de ces
femmes sont spécialisées dans la collecte et la commercialisation du niébé.
A Semelle (St Louis), l’importance des variétés dans leur système de
culture a été la remarque généralement formulé par les paysans et surtout par
les membres du groupement féminin qui paricipé à la conduite des essais. En
effet, dans ce village leniébé a toujours été cultuvé, mais il arrivait rrarement à
maturié car les paysans ne disposaient que de variétés à cycle long. Les
femmes sont donc enthousiastes et très disposées à continuer la culture de
ces nouvelles variétés de niébé. Les vers ont détruit une bonne partie de leur
culture.
A Douba Lampor, (Koumpentoum) village hors mini-kit, les paysans
après avoir testé certaines variétés en 1993 n’ont pas hésité à envoyer
quelqu’un à Bambey pour avoir des semences. Faute de quantité suffisante
pour satisfaire leur demande, nous leur avons aidé dans l’acquisition de
variétés améliorées en leur facilitant l’achat auprès des paysans qui avaient
participé aux essais et qui à cet effet avaient gardé des semences à vendre. 23
kg de Mouride, 30 kg de N’diambour et 47 kg de Mélakh ont pu être collectés
pour ces paysans. Cela montre l’intérêt que ces derniers (habitant en pleine
zone de coton) portent à la culture du niébé en général et aux variétés
améliorées en particulier. Pour les besoins de la consommation, la variété
Mougne est beaucoup plus appréciée que les autres. Pour leur première
expérience, les résultats sur les quantités produites n’ont pas été obtenus dans
les détails les documents sur lesquels ils étaient consignés ont été détruits par
un incendie. Toutefois ils ont remarqué que la Mélakh était la plus hâtive de
toutes les variétés mais la moins productive. En plus des attaques de chenilles,
les dates de semis qui ne coincident pas toujours avec leur pratique
traditionnelle ont été citées comme principales contraintes.

1 8
2. SUIVI DE LA COMMERCIALISATION DU NIEBE VERT
Du 14 septembre au 19 octobre 1994 la commercialisation du niébé vert a
5té suivi au niveau de 35 points de ventes localisés sur l’axe Thiès-Louga. II a
Sté procédé à un enregistrement hebdomadaire des quantités vendues et des
:ypes de vendeurs rencontrés.
Tableau 2. Quantités recensées et variétés dominantes
Yobservation
1 Total
36

II a été vérifié sur un échantillon lors des enquêtes sur un échantillon de
~
20 bassines, 20 bols et 20 sachets que les poids moyens d’une bassine et d’un
bol de niébé vert sont respectivement 10 et 3 kg; tandis qu’un sachet de
~
graines vertes pèse 1 kg.
En ce qui concerne les intervenants, le recensement n’a concerné que les
vendeurs rencontrées et qui étaient toutes des femmes. Leurs effectifs ont
varié entre 18 et 327 femmes lors de ces enquêtes avec un maximum de 327
au cours de la dernière semaine du mois de septembre. Ces femmes sont
aidées par des enfants (garçons et filles). Elles prélèvent sur le champ du mari
ou sur leur propre champ; dans tous les deux cas la gestion des recettes
utilisées pour les dépenses familiales leur revient.
Les prix de vente enregistrés ont varié d’une semaine à une autre entre
500 et 1200 fcfa pour les bassines; 150 et 400 fcfa pour les bols; et restent
fixés à 100 fcfa pour les sachets durant toute la période de l’enquête. Des six
relevés effectués, il ressort qu’une quantité égale à 11886 kg a été vendue
pour un montant égal à 702500 fcfa; soit un prix moyen du kg égal à 60 fcfa.
Les expériences menées au laboratoire ayant montré qu’un kg de niébé vert
correspond à 0,251 kg de niébé sec, on se rend compte que la vente du niébé
vert est financièrement plus rentable que celle du niébé sec dont le prix du kg
au producteur dépasse rarement 100 fcfa sauf pour les semences. Cette
activité est d’autant plus rentable avec les variétés hatives comme la Mélakh
dont le prix du kg de gousses peut atteindre 120 fcfa (voir première semaine du
tableau 2).
L’apparition simultanée de la Mélakh et de B21 sur le marché est liée au
fait que durant les premières semaines de récoltes toutes les gousses vertes
de Mélakh sont auto consommées et les paysans ne dégagent pas encore de
surplus commercialisable. II faut attendre à ce qu’une autre variété arrive à
maturité pour que les paysans puissent récolter assez pour la consommation et
pour la commercialisation. En outre, le démarrage tardif de l’hivernage dans
certaines parties de cette région a eu des répercussions sur les récoltes des
différentes variétés donc sur leur période d’apparition sur le marché. II n’est
pas constaté de préférences sur les gousses vertes sauf pour le Baye N’gagne
qui une fois sur le marché est très sollicité par la clientèle à cause de ses

20
gousses bien remplies et très jolies à voir; tandis que celles de la Diongama
sont rarement commercialisées car elles ne sont pas toujours pleines et
rétrécissent vite. Pour les graines vertes, celles de la Mélakh, de la B21 et de
Marne Fama (variété locale) sont celles qui se commercialisent le plus
facilement car elles sont très grosses, claires et leur couleur ne change pas
sous l’effet de l’emballage: c’est les variétés les plus vendues en sachets parce
que attirant vite l’attention des acheteurs. Les bana-banas qui viennent
collecter d’importantes quantités préfèrent cependant les gousses à la place
des graines dont la conservation est plus difficile.
Les enquêtes effectuées au niveau des villages ont montré que malgré
les limites rencontrées les variétés Mouride et Mélakh sont partout appréciées
par les paysans. C’est ainsi que dans le cadre des études d’impact, il sera
aussi question à travers des cas qui seront choisis de déterminer la place du
niébé dans le régime alimentaire des populations aussi bien rurales
qu’urbaines par référence aux nouvelles variétés. Les raisons évoquées
concernant les préférences variétales devront faire aussi l’objet d’analyse plus
approfondie.
Le suivi hebdomadaire de la commercialisation du niébé vert a permis
d’avoir une idée générale sur l’importance de cette activité et sur l’impact des
variétés précoces comme la Mélakh sur les prix de vente pratiqués. Un suivi
journalier permettrait de déterminer avec plus de précision les quantités
commercialisées, les recettes encaissées, le nombre de personnes directement
impliquées ainsi que l’impact réel des variétés améliorées sur la
commercialisation du niébé vert. II faut noter que les impacts réels de ces
variétés ne peuvent encore être appréciés car la Mouride vient de boucler ses
deux années d’après vulgarisation et la Mélakh, malgré son adoption de fait
par les paysans reste officiellement au stade de pré vulgarisation.

21
CONCLUSION
Au Sénégal le stockage et la commercialisation sont parmi les principales
contraintes limitant la production du niébé.
Au terme des enquêtes, on s’est rendu compte que l’utilisation des fûts
métalliques comme technique de conservation proposée par le projet de
recherches collaboratives ISRAKRSP-NIEBE est largement adoptée par les
~
paysans encadrés. Des difficultés existent cependant dans l’acquisition de ce
~
matériel par les paysans.
Toutes fois, des efforts sont consentis par la Vision Mondiale pour
approvisionner les paysans en sacs de stockage grâce à un système de crédit.
~
II serait souhaitable que cette initiative de la Vision Mondiale soit élargie aux
~
fûts, dont la disponibilité peut influencer positivement la commercialisation du
~
niébé sec.
Par ailleurs, des actions sont entreprises pour pallier la faiblesse des prix
liée à l’importance et au manque de matériel de stockage. Parmi ces actions on
note:
l’opération initiée par l’Union Nationale des Coopératives Agricoles du
Sénégal qui consiste à collecter 1000 tonnes dans le nord et le centre - nord
du bassin arachidier pour une valeur globale de 70 000 000 fcfa. Cette Union a
mis en place 28 points d’achat dans les régions de Louga (avec 12 points),
Thiès et Diourbel avec chacune 8 points de collecte. Ainsi, durant la période
de février à mai, 648 tonnes de niébé ont été achetées dans la région de
Louga, 242 tonnes dans la région de Thiès et 110 tonnes dans celle de
Diourbel. Le niébé stocké dans des magasins à N’dande (région de Louga), à
Pout (région de Thiès), et à N’doulo (région de Diourbel), une fois
reconditionné sera destiné au marché intérieur et même extérieur.
la vulgarisation de technologies de transformation permettant d’intégrer
davantage le niébé dans le régime alimentaire des populations;
la recherche de débouchés pour le niébé entreprise par L’U.N.C.A.S. et la
Vision Mondiale qui mènent des négociations avec les autorités béninoises et

22
sud-africaines pour l’exportation vers ces pays;
la mise en place par le Gouvernement sénégalais d’un comité de
concertation et de réflexion sur la mise en place d’une filière niébé durable.
Le suivi hebdomadaire de la commercialisation du niébé vert a permis
d’avoir une idée générale sur l’importance de cette activité et sur l’impact des
variétés précoces comme la Mélakh sur les prix de vente pratiqués. Un suivi
journalier permettrait de déterminer avec plus de précision les quantités
commercialisées, les recettes encaissées, le nombre de personnes directement
impliquées ainsi que l’impact réel des variétés améliorées sur la
commercialisation du niébé vert. II faut noter que les impacts réels de ces
variétés ne peuvent encore être appréciés car la Mouride vient de boucler ses
deux années d’après vulgarisation et la Mélakh, malgré son adoption de fait
par les paysans reste officiellement au stade de pré vulgarisation.
Dans le cadre des études d’impact, il sera aussi question à travers des
études de cas de déterminer la place du niébé dans le régime alimentaire
populations aussi bien rurales qu’urbaines par référence aux nouvelles
variétés. Les raisons évoquées concernant les préférences variétales devront
faire aussi l’objet d’analyse plus approfondie.