MINISTERE DE L'ENSEIGGMENT SUPERIEUR ETDE ...
MINISTERE DE L'ENSEIGGMENT SUPERIEUR
ETDE LARECHERCHE SCIENTIMQUE
INSTITUT SENEGAJAIS DE RECklERC~HES
AGRICOLES (1.S.R.A.)
SECRETARIATD'FTATALd.RECHERC~
SCIENTIFIQUE ET TECHNIQUE
LABORATOIRE NATIONAL DE L'ELEV%E
ETDERECHERCHES VEX'ERINAIRES
1'I
EVALUATION DE LA TRYPANOTOLERANCE
Par Saydil M. TOURE
REF. No 63/PARASITO.
MAI 1982.

EVALUATION DE LA TRYPANOTOLERANCE
par Saydil M. TOURE*
t
.*
INTRODUCTION
Dire à quel point un animal domestique donne (ou un troupeau> est en mesure
de supporter la Trypanosomiase, à quel point donc il y a trypanotolerance, c'est
le but des opérations d'évaluation que nous nous proposons de pr6senter. Comme déjà
indiqué par ailleurs, l'évaluation comportera des épreuves expérimentales permet-
tant de mettre en 6vidence des caractères non évidents a priori. La notion de try-
panotolérance est tellement complexe que son évaluation ne saurait être autrement
que complexe, car tenant compte de facteurs du milieu, du vecteur infectant et des
animaux. Ce sont ces facteurs que nous allons passer en revue succinctement.
TRYPANOTOLERANCE ET MILIEU
La trypanotolérance se manifeste dans un milieu infesté de tsé-tsé. Seules
les races trypanotolérantes peuvent se développer dans un tel milieu. Elles peuvent
vivre en milieu indemne mais accusent généralement Une maladie aig& quand elles
sont transposées à nouveau en milieu infesté. Les zones sans glossines sont le do- r
maine des zébus. Il y a des croisements naturels.'entre zébus et bétail trypanoto-
lérant à la limite des deux habitats. Dans ma synthèse sur la trypanotolérance
parue en 1977 ( 8 1, jlavais insisté sur les conclusions de J. PAGOT, 1974 (7) con-
cernant les climogrammes de l'habitat des taurins d'Afrique. Je cite à nouveau cet
auteur :
- "les aires des climogrms correspondant aux (bovins) Nckna ont une sur-
face plus grande que celles du b6ta.i.l a courtes cornes et, dans-ce dernier
cas, la surface de l'aire correspondant au @tail des Lacgunes est minimale,
.- la localisation rentre une nette translation des climogr~s vers les cli-
mats chauds et très humides quand on passe du domaine des Ndama à celui‘des
Saoulés et des Lagunes".
* ISRA- Laboratoire national de 1'Elevage et de Recherches vétérinaires - DAKAR.

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Un Cl~graxune donné, caractéristique d'une zone et dlun type de bétail try-
W'WtOlerant, reflète aussi, en thgorie, l'écologie des glossines tant en ce qui
concerne leur diversité spécifique que leurs fluctuations saisonnières. L?infesta-
tion par les glossines est tr&5 mkarquee là où les températures sont nettement au--
dessus de 21°C et l'humidit6 relative au-dessus de 55 ~$100. Dans de tels milieux
il y a génkalement de nombreuses esp?ces de glossines ) avec desfluctuations sai-
sonnières peu marquGes de leur population : 'c'est le domaine du bétail nain à
courtes cornes. Les clGwgrwrmes des Ndama se rappotient assez souvent à des habi-
tats ne renfermant que deux espèces de glossines, s populations abondantes pendant
une saison des pluies unique mais moins nombreuses en saison sèche (8).
L'évaluation d'une situation de trypanotolérance comportera donc les études
classiques sur Ifécologie des vecteurs, On retiendra qu'il y a un seuil dans la
trypanotolérance. Si la pression glossinaire est trop fortes, il s'ensuit une fai-
ble productivité du bétail trypanotol&ant. Ce qui amene à considérer les vecteurs.
TRYPANOTOLERANCE ET VECTEURS
Il est vrai que la trypanotol&ance est une propriété innée de certainesra--
ces animales. Cependant les facteurs liés aux vecteurs peuvent avoir une influence
sur le de& de tolerance, notamment en ce qui concerne la production de trypano-
somes métacycliques.
Si les types antigéniques variants sont produits en grand
nombre et avec une grande ftiquencc, l'hypothèse d'une faible productivitg n'est
pas à écarter. Cet aspect biologiq.ue a une grande importance dans l'induction dFune
prémunition dans les races reput6es sensibles. Suivant les vecteurs et suivant les
lieux, la virulence au sein d'une même espèce'de Trypanosome nrest pas la même..
Lsétude des types antig6niques variants CVATS) est difficile mais devrait être me.-
née sur le terrain, dans des populations animales trypanotolérantes.
EVALUATION SUR L'ANIMAL
Cette étape n'est qu'une partie des épreuves permettant de juger de 1'6kat
de trypanotolérance. Elle repose sur des comparaisons qui peuvent être rangees dans
deuc catégories :
- les épreuves de pathologie
.- les épreuves zootechniques.
. . ./ . . .

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l") Les épreuves de pathologie.
-w--v ---------- -----.- WI
Il peut sgagir de pathologie naturelle qui permet d'étudier un animal (ou des
E
animaux) dans un milieu infeste ou de pathologie expérir~ntale par infection d'anie
maux neufs. Au cours de ces épreuves, lPexpérimentateur observe tous les faits
cliniques et kvalue tous les param&res biologiques à sa portée :
- bonne santé ou maladie (morbidite, mortalité, avortements, misère physio-
logique, etc...),
- analyses : parasitémie, hématocrite,
- ftiquence des interventions thérapeutiques (trypanocides).
Les prti-infections pourront donner lieu à une appréciation du chancre d'i-
noculation,
De nombreuses épreuves d'infection naturelle et d'évaluation &pid&niologique
ont été réalisées ces derni&es années dans diffkents pays d$Afrique (S.E. TOUX,
1978 ; P.K. M..RPAY, 1977 ; G.S. MXSHFA, E. CAMUS et al, 1979 ; E. CAMUS, J. BELOT
et G.S. MISHRA, 1979 ; H.O. FIMREN et al, 1980 : 14. MW?AY et al, 1981. ; TOURE
198.2) ?9,6,4,1,3,5,11). En dehors de leur caractke comparatif de races, certai-
nes de ces épreuves sont en fait des évaluations de trypanotolérance.
Il en est ainsi de lPexpérience de pathologiac. Compar$e entre bovins ?%bu Go-
bra .et Ndama soumis à l'infection naturelle par des Trypanosomes patho@nes (9).
Les Ndama qui n'ont jamais été infectés présentent une période de pfipatencc lé&--
rement plus &le&e que celle des zébus. Certains Ndama sont restés tifractaires
? la maladie et il est vraisemblable qu'ils aient vécu antérie urement en zone in-
festée. L'infection est plus intense et plus rapide chez les zébus que chez les
Ndama. Ces derniers h&ergent plus souvent Trgpanosoma congoknse que les zébus.
Des mortalités ont été observées dans les deux races (14 sur 24 chez les Ndama et
15 sur 20 chez les .zébus). L*hématocrite au moment de la ,mort est significative-
ment plus élevk chez les Ndama (22,75 + 6,141 que chez les zébus (19,77 7 3,7).
Les Ndama pour lesquels la certitude est établie qu'ils n'ont jamais V&U dans une
région infestée de glossines développent une maladie aiguë, à issue fatale
(6 animaux sur 6). La trypanotolérance serait dès lors largement tributaire de ti-.
actions immunitaires anamnestiques.
On pourra ajouter que, dans des situations particuli&es de forte infesta-
tion en glossines ou bien lorsque la race trypanotol&-ante a perdu de sa pureté
*,.J /.
.
.

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originelle, on pourra observer des parasitémies élevees traduisant certainenicnt des
déficiences immunitaires. C'est ce que r&&ent certains kultats dYévaluation
6pid6miologique obtenus au Bénin par V. CODJA, 1981 (2).
)
Etudiant la trypanotolérance dans les 4 principaux types de bovins de la
Rgpublique populaire du B&in (RPBj : (Borgou? L+yaire, Somba, P&li) p cet au-
~
teur constate une plus grande fr6quence de parasitS.mie positive chez les animaux
de race Borgou (39,47 %) et Somba (24 %1 par rapport aux Lagunaires (18,s %). Dans
tous les cas, il y a nette predominance de T. ?)2uaz par rapport aux autres espèces
patho$nes, à la différence de ce qui se passe au Sénegal oi? 1", congoknse est
prédominant chez le b&ail trypanotolérant. Continuant à comparer les deux situa-
tions, on ajoutera qu'un !grand nombre dPanimaux de la RPB font une parasitemie
décelable (entre 0 et 50 %) alors que les statistique s sur les Ndama du S&&a1
donnent comme valeurs moyennes 11 à 15 %. Des enquëtes faites en Côte d'ivoire (1)
dans les élevages suivis par la SODEPRA, montrent que les Raoul6 sont moins fr6=,
quemment parasités que les Ndama. C'est dire que les situations sont dissemblables
d'un pays à un autre.
L'évaluation épidémiologique peut porter sur les differentes composantes
d'un groupe ethnologique. S,M. TOURE et al, 1981 (105 ont utilisé les techniques
les plus modernes pour la diagnose des Trypanosomiases (technique de WOO, examen
sur larrws ixrmunofluorescence, test micro-ELISA,' test knunospécifique par COU-
plage enzyrrntique) sur du bétail Ndama de haute Casamance, au Sénégal, IXXU? V&?i-
fier si la qualité de leur trypanotolérance est en relation avec la coulEur de
leur robe, compte tenu de la tiputation qu'ont les Xdama de couleur fauve d'être
les plus résistants. Des observations faites, qui ont port6 sur 210 sujets pour
les examens hématologiques et parasitaires et sur 260 pour les études de s&wlogie,
il r6sulte que les Ndama de couleur fauve ne sont ni plus moins trypanotol&nts
que ceux à robe blanche, noire, ou pie, ces derniers ayant souvent., par ailleurs,
une remarquable conformation dsanimaux de trait ou de boucherie. Il n'y a donc
apparemment aucune raison qui justifie le choix de la seule couleur fauve comme
critère de plus grande rkistance aux Trypanosomes.
2O> Les épreuves zootechniques
--me- -----~~-~~-II---~p --Y
Tout ce qui a trait aux performances des animaux wnstitue bel et bien des
tests zootechniques pour apprkier la trypanotolérance. La Trypanosomiase a des
conséquences, même sur les taurins &put& trypanotolérants, si certaines limites
,.. /. . .

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sont franchies. Dans l'enquête faite en Côte diIvoilT,J
relatée ci-dessus; il est
apparu queT&+ troupeaux faisant au total 3,048 @tes, 52 % pksentent un OU plu-
sieurs cas de Trypanoscmiase. Les conséquence0 0 de la maladie sont multiples :
I
mauvais état g&éral, faible poids des veaux à la naissance, mortalité des jeunes
(entre 0 et 1 an, Z5 % de motis dans les troupeaux atteints, contre 10 % dores les
m
troupeaux indemnes ; au-dessus de 1 an, 3 % et l,5 % respectivement). La fr&quence
de Trypanosomiase clinique et dgavortments, les faibles productivités, traduisent
une mauvaise adaptation à un milieu donne.
L'évaluation zootechnique pourr,7 porter aussi sur les cmisemznts de titail
trypanotol&ant avec des races sensibles. Généralement les tiktis résistent beaxoup
mins à la Trypanostiase et rkessitent des traitxments ftiquents ou un transfert
en milieu indemne.
'.
C O N C L U S I O G
L'évaluation de la txypanotolérance fait appel, comme nous le voyox, à de
nombreuses epreuves qui sont de nature parasitologique, séro-immunologique, bio-
chimique et zootechnique. Elle ne peut être tialisée que par une équipe pluridis-
ciplinaire qui, le plus souvent, n'est pas disponible, C'est donc le lieu, ici, de
recommnder le renforcement des études sur la trypanotolérance et la formation
d'équipes pluridisciplinaires pouvant op&er dans les pands pays d'elevage de b&
tail -tr@anotolémnt.
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B I B L I O G R A P H I E
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i
l- CAMUS CE,), BELOT (J-1 et MISHRA (G.S.) .,a Etude de la trypanotol&a;nce de tau-
rins dans la rggion de Boudali en Côte d"Ivoire - Rev. Elev, PI&~, v&--
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Pays trop., 1979, 32 (3) : 24l-245.
-
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tsé-tsé. in Trypanotolérance et Production animale, E. Karbe et
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E.K. Freitas, éditeurs, publication no lj 1980, CREAT, Avetonou:
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entre bovins zébus et Ndama soumis à l'infection naturelle par des
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-

-?-
10 - TOURE (S.M.); SEYE (M.), GUEYE CE.1 et DIAITE (K) - Etudes comparatives SU?
a
les bovins Ndama de haute Casamwce pour évaluer leur trypanotokbmce
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7
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11 - TOURE (S.M.), SEYE 0%) et a1 - Trypanotolérance. Etudes de pathologie compa-
rée entre moutons D~allonké et moutons Peulh du Sahel - Rev. Elev.
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