113 LES ZOONOSES par P.MORNET Vétérinaire...
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LES ZOONOSES
par P.MORNET
Vétérinaire Inspecteur Général
Directeur du Laboratoire Central de 1'Elevage
"Georges Curasson"
Dakar-Hann
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LES ZOONOSES
Nous adopterons pour la définition des zoonoses celle de
l'OMS/FAO (1951) : maladies qui se transmettent naturellement des
animaux vertébrés à l'homme et vice-versa.
Elles constituent maintenant l'un des domaines principaux
de l'hygiène publique véterinaire (OMS 1956).
En A.O.F., ainsi que le soulignent très justement SANKALE
et coll. (1958), le contact étroit des populations avec les animaux
domestiques (en particulier gros et petits ruminants), leur cohabita-
tion fréquente, la fréquence des mouvements du bktail sur pied
(transhumance, exportation), et à longue distance, constituent des
facteurs favorables à l'éclosion et à la dispersion des zonnosesi
Nous indiquerons rapidement la fréquence et les caracté-
ristiques des principales de ces affections sur le plan local et les
recherches dont elles ont pu faire l'objet, en suivant la classifi-
cation habituelle.
1 - MALkDIES BACTERIENNES
CHARBON BACTERIDIEN
Il est plus répandu qu'en France, où il est devenu excep-
tionnel, et la plupart des espèces animales peuvent être touchées.
Les zones périodiquement inondées, les vallées et les bas-fonds,
les pâturages de décrue des fleuves et des cours d'eau constituent
les lieux de persistance de l'infection qui est, rappelons-le,
d'origine tellurique.
La contnmina-
tion humumaine se produj.3
le 'plus souvent par consannation
de la
viande des animaux morts, la manipulation de la viande ou des peaux
charbonneuses, le couchage sur des peaux. Si les manifestations
cliniques habituelles sont les pustules malignes, les formes septicé-
miques sont également observées, quoique rarement.
Par ailleurs, cette affection n'offre sous climat tropical
aucune particularité qui ne soit connue en zone tempérée.
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TUBERCULOSE
Dans l'ensemble de l'A.O.F., le pourcentage de bovins
tuberculeux n'atteint pas 1, ce qui est faible par rapport aux
chiffres enregistré dans la Métropole ou même dans d'autres pays
tropicaux (Madagascar par exemple). Le taux d'infection le plus
élevé se situe dans la région Ségou-Macina-Mopti-Baguineda-San
(Soudan). La surcharge des pâturages en certaines saisons doit
être une cause favorisant@ de la contagion.
La tuberculose porcine est plus limitée géographiquement,
simplement par suite de la faible extension de l'élevage de cette
espèce animale dans les territoires. Les taux d'infection atteignent
parfois 3,4 et même 6% au Soudan (Bamako). La contamination est
certainement d'origine humaine; elle est cons&cutive à la distribu-
tion de résidus alimentaires non stérilisés. D'autre part, les con-
ditions d'entretien des porcs défient souvent les règles de
l'hygiène la plus élémentaire. Aucune recherche suivie n'a permis
cependant d'identifier le B.K. en cause.
L'infection humaine par le B.K. bovin n'est pas démontrée.
On sait qu'en France même les etudes donnent des résultats divergents.
On admet cependant que le B.K. bovin peut être responsable des
tuberculoses extra-pulmonaires (ganglionnaires
ou abdominales) et
que le lait, en particulier chez les enfants, constitue une source
d'infection.
Il serait intéressant de faire des enquêtes approfondies
ici, les pasteurs lactophages constituant des 616ments precieux pour
les investigations.
BRUCELLOSE
Les brucelloses animales, qui affectent les bovins, ovins,
caprins, porcins (équins même) et sont les fléaux de l'élevage
européen, n'ont pas été identifiées fréquemment en A.O.F. Elles n'ont
fait l'objet d'ailleurs que d'enquêtes superficielles, sauf au
Soudan et en Haute-Volta par la methode du milk ring test. Mais
l'isolement du germe n'a pas été, à notre connaissance, pratiqué.
Quelle est la part qui revient à ces affections dans
la paucinatalit8
et les avortements chez les bovins, ovins, caprins,
les bursites ou hygromas chez les bovins? Nous n'en savons rien.
Les vétérinaires se sont surtout intéresses aux épizooties
meurtrières 4ui déciment l'élevage. Il est bien certain que les
maladies à retentissement chronique, à évolution torpide, à sympto-
matologie fruste ou équivoque, n'ont pas encore reçu une attention
i
suffisante par suite de la médiocrité des moyens dont nous disposons,
qui ne permettent pas la dispersion des activités.
..* / . . .

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Ce problème est d'ailleurs complexe car si les "avortements"
peuvent e^tre rattachés à la brucellose, ils peuvent aussi bien l'être
aux protozooses (trypanosomiases, piroplssmoses,
trichomonoses), aux
formes eubaiguës de peste bovine ou d'autres maladies infectieuses,
aux vibrioses (Vibrio foetus), aux carences alimentaires...
Les investigations portant sur la brucellose humaine ne
sont d'ailleurs pas plus poussées. On signale des cas sporadiques
ef même une épidémie à Nioro (Soudan) en 1955 (17 cas selon J.P.MARTIN-
rapporté par SANKALE 1958). Le g erme en cause dans les diverses ob-
servations est toujours Brucella melitensis. La clinique offre peu
d'originalité.
La nécessité d'une
vaste enquête sur la plan médical et vétérinaire s'impose.
SALMONELLOSES
MERLE (1958) résume remarquablement le problème des salmo-
nelloses animales pour les divers pays. Si elles intéressent toutes
les espèces animales et causent des pertes considérables aux élevages
dans le monde, elles nesemblent pas présenter de danger immédiat pour
l'homme vivant au contact des animaux malades ou porteurs de germes.
Cependant certaines entérites sont dGes à des salmonelles isolées
de viandes responsables d'intoxications alimentaires.
Ce rôle d'ailleurs, dans ce dernier cas, paraît avoir été
exagéré. Il résulte de nombreuses enquête effectu&es au cours d'épi-
démies d'intoxications alimentaires que les salmonelles responsables
sont fréquemment d'origine exogène ; elles sont apportées par des
souillures du matériel et par l'homme lui-m8me au cours des manipula-
tions des viandes en particulier.
DARASSE et coll. (1957) puis KIRSCHE et BAYLET (1958),
devant la fréquence des salmonelloses à Dakar, chez l'homme et les
animaux de laboratoire, recherchent les Salmonella dans les ganglions
mésentériques de porcs sains, abattus pour la consommation. 2%
sont trouvés positifs par les premiers, 18% par les seconds qui
obtiennent 22 sérotypes différents.
Reste à connaître l'incidence sur la santé humaine des
multiples salmonelles animales. DARASSE conclut fort bien que "le
petit nombre d'infections humaines compar6 au très grand nombre de
Salmonella animales répandues dans le milieu environnant doit nous
faire accepter le principe de la "multivalence des salmonelles" avec
certaines réserves ; cette multivalence se manifeste dans les intoxi-
cations alimentaires, qui réalisent des inoculations massives ou
dans certaines conditions Gpidémiologiques
très particulières (épidé-
mies de crèches , puits infectés), mais, dans les conditions naturelles,
le passage d'une Salmonella animale à l'homme reste un phénomène
rare... If
. . . / ..*

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En conclusion des recherches approfondies doivent être
poursuivies.
LEPTOSPIROSES
Leur existence, quoique soupçonnée chez l'homme grâce
à des recherches sérologique (GOEZ, STEFANOPOULO, Mme KOLOCHINE-
ERBER 1933-1939, BOIRON 1946-1948) ,n'a pas encore été prouvée.
Cependant la confirmation de l'existence de Leptospira
ictero-hemorragiae chez le hhien a étl apportée par DARASSE et
TIDORI (1955).
Il est probable que des enquctes plus poussées permettront
de déceler ces affections aussi bien chez l'homme que chez l'animal.
11 - RICKETTSIALOSES
On peut diviser ce groupe en trois sous-groupes :
Rickettsioses - Coxiellose - Néorickettsioses
Rickettsioses :
La fièvre boutonneuse et le typhus murin ont été retrouvés
en A.O.F. chez l'homme
Coxiellose :
La fièvre Q à Rickettsia burneti, décelée par GIROUD et
coll. 1953-1955 chez l'homme en A.O.F. par la recherche des anticorps
spécifiques, malgré l'absence de signes cliniques, est identiaée
par BAYLET et coli. (Iy58),
cliniquement et sérologiquement, au cours
d'états pseudo-grippaux.
GIROUD, ultérieurement, sur des chèvres, apporte serologi-
quement la preuve de son existence chez les animaux domestiques.
Il isole d'ailleurs une souche à partir de la tique Amblyomma variega-
tum.
Néorickettsioses :
Chez l'homme, GIROUD et coll. (1954) puis BAYLET et coll.
(1957) identifient ces infections.
Ces derniers relèvent les signes
cliniques : états pseudo-grippaux, manifestations vasculaires, mani-
festations meningo-encéphalitiques.
1t
GIROUD (1955) confirme leur existence chez les bovins et
*
les caprins par les réactions sdrologiques et isole des souches à
partir de plusieurs espèces de tiques : Hyalomma, Amblyomma, Boophilus.'
. . . / .*.

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Mais, chez l'homme comme chez l'animal, ce vaste et
complexe problème des rickettsiose mérite de plus amples devaloppe-
ments et des précisions supplémentaires.
III - MALADIES A VIRUS
La seule virose vraiment importante de l'animal, transmis-
sible à l'homme, est la rage, du moins en A.O.F. Toutes les autres
n'ont qu'une incidence limitée ou accidentelle.
Alors qu'en France la rage est devenue très rare, ici,
par suite de l'insuffisance des mesures sanitaires et de l'immensité
du territoire, elle reste enzootique, Et le chien demeure le principal
réservoir de virus.
Son epidémiologie
offre en A.O.F. quelques points non
éclaircis et sa symptomatologie est loin d 'être univoque.
Les travaux de ANDRAL et SERIE (1955-1957) en Ethiopie ont
apporté quelques renseignements précieux,
D'abord pour le diagnostic, L'augmentation du taux desqz
globulines dans le s4rum des chiens constitue, selon eux, en pays
dI,endémie,
un élément de suspicion ou de diagnostic de rage. Les
formes atypiques de cette affection sont en effet fréquentes et les
cas de guérison spontanée ne sont pas rares. Ces auteurs soulignent
également la présence de virus rabique dans la salive de chiens
sains, ce qui pose pour la prophylaxie un problème difficile à
résoudre.
Au Laboratoire Central de lIElevage à Dakar, THIERY, depuis
1955, s'est attaché à améliorer le diagnostic histopathologique et
biologique de cette affection. Par ailleurs il étudie ses caractéris-
tiques en A.O.F. et l'influence de certains facteurs sur la récepti-
vité des animaux (chiens et animaux de laboratoire).
Il est indéniable que la rage, dont l'étude a été un peu
délaissée en France depuis la dccouverte du vaccin pastorien, offre
un champ d'études très étendu.
IV - MALADIES PARASITAIRES
Notre revue sera brève, l'action des parasites animaux sur
la santé animale étant multiple, variée, mais souvent irrégulière ou
tellement accidentelle qu'elle constitue une curiosité clinique ou
nécropsique.
Nous nous limiterons aux infections ou infestations bien
connues et ayant une incidence marquée.

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1" - PROTOZOOSES
La transmission des trypanosomes animaux (T.brucei?) à
l'homme par les animaux sauvages est trop douteuse pour que nous en
faisions état.
La seule protozoose commune à l'homme et aux animaux est
la leishmaniose cutanée (Leishmania tropica).
Elle a été fréquemment décèlée chez l'homme et le chien
dans les régions sahéliennes. Mais elle n'a pas fait l'objet d'études
suivies.
2* - RELMINTHIASES
Maladies à trématodes :
Des enquetes ont étd effectuées chez l'homme et les animaux
(bovins et ovins) sur la répartition géographique des schistosomes.
Maladies à cestodes :
Les deux parasites les plus repandus sont :
Cysticercus cellulosae (ladrerie cl-.r porc), larve de Taenia
solium chez l'homme
Cgsticercus bovis (ladrerie bovine), larve de Taenia saginats
chez l'homme
La cysticercose bovine est la plus fréquente;
elle existe dans tous les territoires d!A.O.F. En Guinée, l'infestatior
des bovins esttrès élevée (10 à 15% parfois), de sorte que non seule-
ment elle constitue pour l'homme un problème sanitaire à considérer
mais encore entraîne des saisies importantes sur les carcasses des
bovins lors de l'inspection des viandes et par voie de conséquence
des pertes économiques considerables.
Aucune recherche n'est à entreprendre dans ce domaine.
Il s'agit seulement d'appliquer rigoureusement les mesures d'hygiène.
Maladies à nématodes :
L'ancylostomose
est le zoonose la plus connue dans les
régions côtières.
L'infection du chien par kncglostoma brasiliense et
Ancylostoma caninum est à l'origine des lésions derme-épidermiques
prurigineuses
de l'homme (larves d'ancylostomes).
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