INSTITUT D'ÉLEVAGE ET DE MÉDECINE VÉTÉRINAIRE...
INSTITUT D'ÉLEVAGE ET DE MÉDECINE
VÉTÉRINAIRE DES PAYS TROPICAUX
REVUE D’ÉLEVAGE
E T D E
MÉDECINE VÉTÉRINAIRE
DES PAYS TROPICAUX
La coccidiose intestinale
des ruminants domestiques au Sénégal
Epidémiologie, répartition géographique,
importance économique
par G. VASSILIADÈS
Tome XXII (nouvelle série)
NO 1 - 1 9 6 9
._
VIGOT FRÈRES, ÉDITEURS
23, rue de l’École-de-Médecine, PARIS-VI’
Rev. Elev. Méd. vét. Pays froc., 1969, 22, 1 (47-53)
La coccidiose intestinale
des ruminants domestiques au Sénégal
Epidémiologie, répartition géographique,
importance économique
par G. VASSILIADÈS
RÉSUMÉ
A la suite d’une série d’enquêtes épidémiologiques effectuées au Sénégal, il
apparaît que la coccidiose intestinale des ruminants domestiques est une affec-
tion parasitaire grave, fréquente en certaines régions,
La coccidiose existe sous la forme laiente ou chronique dans tout le pays
tandis que la coccidiose aiguë atteint essentiellement les troupeaux situés dans la
moitié nord du Sénégal (moins de 1.000 mm de pluies par an) où les conditions
d’élevage sont plus difficiles (longue saison sèche, végétation rare).
Les espèces en cause sont, pour les bovins : E. zurni, E. bovis, E. ellipsoidolis,
E. ouburnensis, E. subspherico, E. cylindrico, E. olobamensis et E. wyomingensis ; et
pour les petits ruminants : E. ninakolhyakimovae, E. arloingi, E.parva, E. ahsata,
E. faurei, E. chrisfenseni, E. crandollis, et E. intricafo.
Des enquêtes épizootologiques effectuées en
sitose, très souvent associée à une ou plusieurs
1965, 1966 et 1967 par le Service de Parasitologie
helminthiases, I’anguillulose par exemple.
du Laboratoire national de Recherches vétéri-
naires de Dakar, dans les grandes régions
d’élevage du Sénégal, mettent en évidence la
PLAN ET MÉTHODES DE TRAVAIL
fréquence d’une protozoose, la coccidiose intes-
tinale des ruminants domestiques.
Dans chaque région prospectée, les enquêtes
Cette aifection parasitaire, dont l’importance
sont menées par village à partir de prélèvements
semble avoir été méconnue jusqu’ici, cause des
fécaux moyens opérés directement dans le
pertes économiques importantes parmi le cheptel
rectum des animaux les plus maigres du trou-
sénégalais (amaigrissement des malades, mor-
peau présentant des troubles gastro-intestinaux
talité élevée, en particulier chez les plus jeunes).
(diarrhée), avec parfois une baisse notable de
Cette note a pour but de présenter un tableau
l’état général (poi I piqué, anémie, faiblesse).
d’ensemble sur I’épidémiologie et la distribution
Les prélèvements sont conservés et stabilisés à
géographique au Sénégal de la coccidiose intes-
l’aide d’une solution de bichromate de potas-
tinale des ruminants domestiques, avec I’inven-
sium à 2 p. 100, puis entreposés à + 4 OC avant
taire des espèces de coccidies en cause, et de
leur acheminement et leur examen au Labora-
souligner l’action prépondérante du climat et du
toire de Dakar quelques jours après.
mode d’élevage sur la gravité de cette para-
La recherche des coccidies dans les excré-
- 4-I -
ments, sous leur forme enkystée (oocystes),
Cinq grandes régions sont ainsi déterminées :
est faite d’abord par examen microscopique
A. -- Sénégal-occidental,
direct, puis par examen après concentration des
B. -- Sénégal-septentrional,
oocystes par flottation accélérée en milieu sucré
C. -- Sénégal-oriental,
saturé (LEVINE, 1961).
D. -- Sine-Saloum,
Les déterminations spécifiques sont basées sur
E. -- Casamance.
les mensurations et les caractères morpholo-
giques des oocystes sporulés, les temps de spo-
A. Sénégal occidental.
rulation en étuve humide à -I- 30 OC et l’espèce
Cette région biogéographique correspond
de l’hôte (selon LEVINE, 1961 ; PELLERDY,
approximativement à la presqu’île du Cap-Vert
1965).
et à son arrière-pays la région deThiès (cf. carte).
De très nombreux cas de coccidiose aiguë
PRÉSENTATION DES RÉSULTATS
sont diagnostiqués en toute saison dans cette
zone à grande concentration de bétail (marché
Les résultats des diverses enquêtes épidémio-
d’approvisionnement de Dakar).
logiques sont groupés et interprétés en fonction
La coccidiose existe à l’état enzootique dans
de régions biogéographiques naturelles déter-
tous les troupeaux.
minées :
Les enquêtes montrent que les malades sont
- par l’importance et la répartition du
tous des animaux ayant subi une agression
régime des pluies,
physiologique (« stress » des auteurs anglo-
- par leur hydrographie et leur flore (cf.
saxons : fctigue de voyage, changement d’en-
carte).
vironnement et d’alimentation, mise en stabu-
1
Distribution géographique des principaux foyers de coccidiose mis en évidence au Sénégal.
- 4 8 -
lation permanente de sujets habituellement
également important. L’action pathogène de ce
laissés en liberté) (VASSILIADES, 1965).
complexe parasitaire est la résultante de très
mauvaises conditions climatiques et notamment
-_
B. - Sénégal septentrional.
l’alternance d’une longue saison sèche (sous
alimentation et malnutrition) et d’une saison des
Limitée au sud par un axe transversal ima-
pluies favorisant la prolifération des parasites
ginaire MBOUR-BAKEL, cette zone correspond
(polyparasitisme).
à toute la partie nord du Sénégal et constitue
une entité bioclimatique caractérisée par un
C. - Sénégal orientai.
climat sahélien typique avec passage progressif
vers le sud à un climat de type soudanien (plu-
Cette partie du Sénégal jouissant d’un climat
viométrie moyenne toujours inférieure à 75û mm)
sub-soudanien à sub-guinéen (1 .OOO à 1.500 mm
(cf. carte).
de pluies par an) (cf. carte) l’alimentation des
Tous les bovins, ovins et caprins contrôlés
troupeaux est généralement assez bonne durant
sont porteurs de nombreuses espèces de cocci-
toute l’année.
dies, d’ailleurs très souvent associées chez un
En conséquence, le parasitisme bien que
même hôte à des helminthes, constituant ainsi
toujours présent dans les troupeaux contrôlés,
un état de polyparasitisme chronique (Région
est bien toléré en dépit de conditions de tempé-
de Matam, Rapport annuel, Laboratoire de
rature et d’humidité favorables à la prolifération
I’Elevage Dakar, 1963).
des coccidies.
Chez les petits ruminants notamment, I’infes-
Dans le nord de cette zone où les conditions
tation coccidienne très importante, jointe à une
sont nettement moins bonnes (saison sèche plus
helminthiase chronique, entraîne de nombreux
accentuée avec moins de 1.000 mm de pluies)
cas de mortalité principalement autour des
des épidémies graves de coccidiose sont obser-
grands centres d’élevage (Kébémer, Dara).
vées chaque année en
début d’hivernage
C’est ainsi qu’en novembre 1967, à Kébémer,
(Région de Bakel, Rapport annuel, Laboratoire
une épidémie grave de coccidiose aiguë a
de I’Elevage, Dakar, 1963).
entraîné une mortalité supérieure à 50 p. ICO
(association
: Eimeria SP,, 6unosfomum s p . e t
D. - Sine-Saloum.
Strongyloides SP.).
Cette région présente un climat soudanien
A Dara, en élevage intensif, les cas de cocci-
typique de plus en plus accentué du nord (750 mm
.r
diose aiguë sont également très fréquents.
de pluies) au sud (1.000 mm) où la végétation
En septembre 1966, 200 chèvres de « Maradi »
plus dense annonce le climat sub-guinéen de la
étaient atteintes de coccidiose avec une mortalité
Casamance (cf. carte).
de l’ordre de 15 p. 100 ; en mars 1967, 12veaux
Du point de vue épidémiologique les condi-
originaires de Dara et ramenés à Dakar à des
tions générales sont sensiblement les mêmes
fins d’expérience présentaient des symptômes
qu’au Sénégal septentrional, mais une pluvio-
de coccidiose sub-aiguë avec baisse considérable
métrie plus importante et mieux répartie atténue
de l’état général due à un polyparasitisme
la gravité de l’affection permettant une meilleure
important (GRETILLAT & VASSILIADES, 1968)
alimentation des troupeaux.
c
(association : Eirnerio sp., Trichostrongylus sp.,
Les examens de laboratoire mettent en évi-
Cooperia sp. et Strongyloides SP.).
dence la présence constante de coccidies dans
La période de disette qui sévit chaque année
l’ensemble du cheptel de cette région. Certains
.*
de mars à juin, en fin de saison sèche, en affai-
animaux sont atteints de coccidiose chronique
blissant la résistance des infestés chroniques
qui peut passer à la phase aiguë à l’occasion
favorise la prolifération des parasites gastro-
d’une baisse de l’état général provoquée par
intestinaux et des coccidies en particulier.
des facteurs extrinsèques.
Du point de vue épizootologique, la coccidiose
C’est ainsi qu’une enzootie grave de coccidiose
dans cette région du Sénégal est caractérisée
aiguë a été constatée à Maka-Koulibenta en
par un parasitisme coccidien généralement très
mars 1965 dans un troupeau de veaux récem-
L”
élevé associé à un parasitisme à helminthes
ment vaccinés contre la peste. 50 p. 100 d’entre
- 49 -
eux présentaient une diarrhée profuse avec
Les espèces suivantes ont été déterminées (par
maigreur extrême, anémie, faiblesse, hyper-
ordre de fréquence) :
thermie et poil piqué. Chez ces animaux la
Genre Eimeria Schneider, 1875 (Protozoa,
vaccination bovipestique a entraîné une défi-
Eimeriidoe).
cience de résistance de l’épithélium intestinal qui
a) Chez les bovins :
a permis une prolifération rapide des coccidies.
En avril 1965, dans les environs de Fatick, des
- Eimeria zurni (Rivolta, 1878) Martin, 1909
cas de coccidiose aiguë sont constatés sur des , (fréquence : 38 p. 100) ;
I
veaux parqués dans les enclos étroits et mal-
- Eimeria bovis (Zublin, 1908) Fiebiger, 1912
I
propres situés dans des campements de transhu- l (21 p. 100) ;
mance peulhs. Dans ces cas, le mode de gardien-
Ces deux espèces, très souvent associées chez
nage (surcharge et mauvaise hygiène des parcs
un même hôte, sont reconnues comme les plus
de stabulation) est responsable du développe-
pathogènes (DAVIS & BOWMAN, 1957 ; FITZ-
__
ment et de l’importance de I’infestation.
GERALD, 1964).
- Eimeria ellipsoidalis Becker & Frye, 1929
E. - Casamance.
(12 p. 100).
L’espece est peu pathogène (HAMMOND,
La région de Casamance constitue la partie ~ SAYIN & MINER, 1962).
méridionale du Sénégal, au sud de la Gambie
(cf. carte). Elle est caractérisée par un climat
- Eimerio ouburnensis Christensen & Porter,
sub-guinéen à guinéen (1.000 à 1.500 mm de
1939 (12 p. 100) ;
pluies par an).
- Eimeria subspherica Christensen, 1941 (6 p.
Dans la majeure partie des troupeaux bovins,
100) ;
ovins et caprins contrôlés en Casamance, la
- Eimeria cylindrica Wilson, 1931 (6 p. 100) ;
présence des coccidies en nombre plus ou moins
- Eimeria brasiliensis Torres & Ramos, 1939
élevé a été mise en évidence.
’
(2 p. 100) ;
II s’agit toujours d’un parasitisme latent bien
- Eimeria olnbamensis Christensen, 1941
toléré par les animaux quoique très souvent i (2 p. 100) ;
associé à des helminthiases chroniques.
- Eimerla wyomingensis Huizinga & Winger,
=
Aucun cas de coccidiose clinique aiguë n’a été
1942 (1 p. 100).
observé.
En Afrique Occidentale, toutes ces espèces
Ainsi donc, malgré un parasitisme coccidien
t
sont déjà signalées, mais uniquement au Nigeria
relativement élevé, la coccidiose clinique semble
par LEE & ARMOUR (1959).
très rare en Casamance.
En effet, le climat chaud et humide de cette
b) Chez les ovins ei caprins :
région, s’il favorise la prolifération des parasites, 1
-, Eimeria ninakolhyak\\movae
Yakimoff 8( Ras-
protège le bétail contre les disettes de saison 1 tegaleff, 1930 (28 p. 100).
sèche et les accidents digestifs dus aux brusques
C’est l’espèce la plus fréquente et la plus
changements d’alimentation qui, dans les régions
pathogène (LOTZE, 1954).
plus sèches du Sénégal, sont souvent à l’origine
- Eimeria orloingi (Marotel, 1905) Martin,
de graves épidémies
de coccidiose aiguë.
1909 (27 p. 100).
:
D’après LOTZE (1952 & 1953) cette espèce
CONCLUSIONS
j
est très pathogène.
- Eimeria parva Kotlan, Mocsy & Vajda, 1929
_
Des résultats obtenus au cours des enquêtes
(13 p. 100) ;
épidémiologiques dont nous venons de donner
- Eimerio ahsafa Honess, 1942 (11 p. 100).
l’essentiel nous pouvons tirer les conclusions
Cette dernière est l’une des plus pathogènes
suivantes :
actuellement connues chez les petits ruminants
10 Les coccidies sont toujours présentes chez
(SMITH, DAVIS & BOWMAN, 1960).
les bovins, ovins et caprins du Sénégal en toutes
- Eimeria faurei (Moussu & Marotel, 1902)
périodes de l’année.
Martin, 1909 (10 p# 100) ;
- 50 -
- Eimerio christenseni Levine, Ivens & Fritz,
30 Cet équilibre instable peut être rompu
1962 (6 p. 100) ;
par tout facteur externe ou interne provoquant
-.
- Eimeria crandaflis Honess, 1942 (3 p. 100).
la baisse de l’état général de l’animal avec
D’après POUT (1965), E. crondallis est suff-
diminution de la résistance aux infections :
samment pathogène pour entraîner l’apparition
a) mauvaise hygiène générale,
de symptômes cliniques de coccidiose.
b) surmenage, fatigue de voyage, chocs
- Eimeria intricota Spiegl, 1925 (2 p. 100).
physiologiques divers (vaccination),
En Afrique E. ninakolhyakimovae
et E. intricota
c) sous-alimentation et carences alimentaires
.
existent en Tunisie (BALOZET, 1932) et au
de fin de saison sèche ; changement brusque
I
Nigeria (HALL, 1931 in THOMSON & HALL,
d’alimentation en début de saison des pluies
1931) ; E. arloingi au Maroc (VELU, 1919 ; (herbes vertes très riches en eau) provoquont des
,
BALOZET, 1922), en Tunisie (BALOZET, 1922)
troubles gastro-intestinaux (diarrhée),
au Congo-Kinshasa (DEOM & MORTELMANS,
d) maladies intercurrentes,
1956) au Mali et au Sénégal (CURASSON, 1921) :
e) infestation massive par des helminthes par-
E. faurei en Tunisie (BALOZET, 1932), au Maroc
ticulièrement pathogènes (bunostomes, anguillu-
(BOUIN, 1919) et au Congo-Kinshasa (DEOM
les, par exemple).
& MORTELMANS, 1956), mais E. ahsata, E. par-
Ceci explique les épizooties de coccidiose
va, E. crandallis et E. christenseni sont signalées
constatées chaque année dans les zones sahé-
pour la première fois en Afrique Occidentale.
liennes et soudaniennes du Sénégal situées
20 La présence des coccidies est généralement
au nord de I’isohyète des 1.000 mm (cf. carte).
bien supportée quand l’hôte est en excellentes
conditions physiques. C’est la coccidiose latente
Instifut d’Elevage et de Médecine vétérinaire
ou chronique des zones humides de Casamance
des Pays tropicaux. Maisons-Alforf
(France).
et du Sénégal-oriental et plus généralement
Laboratoire national de I’Elevage
des régions situées au sud de I’isohyète des
et de Recherches vétérinaires
1.000 mm (cf. carte) à climat sub-soudanien à
de Dakar (Sénégal).
guinéen.
SUMMARY
Intestinal coccidiosis of domestic ruminants in Senegal.
Epidemiology, geographical location, economic importance
Following several epidemiologic surveys carried out in Senegal, it appears
that intestinal coccidiosis of domestic ruminants is a severe parasitic affection
frequent in some areas.
Latent or chronic forms of Coccidiosis are widespread in the country, but
acute form of the disease is only prevalent in the Northern part of Senegal (less
than 1,000 mm of rain per year) where the ecological conditions are more unfa-
vorable (long rainy season, scarce vegetation).
The following species have been recorded in cattle : E. zurni, E. bovis, E. ellip-
soidolis, E. ouburnensis, E. subspherico, E. cylindrico, E. olobamensis and E. wyo-
mingensis ; in small ruminants : E. ninakoihyokimovae,
E. arloingi, E . parva, E.
ahsata, E. faurei, E. chrisfenseni, E. crandallis, and E. infricafa.
RESUMEN
La coccidiosis intestinal de 10s rumiantes domésticos en Senegal.
Epidemiologia, reparticibn geogrdfica, importancia econbmica
Después de una serie de encuestasepidemiologicas hechasensenegal, parece
que la coccidiosis intestinal de 10s rumiantes domésticos es una enfermedad
parasitaria severa, frecuente en ciertas regiones.
- 5 1 -
REVUE D’ÉLEVAGE
Se encuentra la coccidiosis bajo forma latente o cronica en todo el pais, mien-
tras la forma aguda ocurre principalmente en el norte de Senegal (menos de
1.000 mm de Iluvias por aïïo) donde las condiciones ecologicas son mas desfavo-
rables (larga estacion seca, vegetacion escasa).
Las especies incriminadas son
las siguientes en 10s bovinos : E. zurni, E. bovis, E. eilipsoidol~s, E. ouburnensis,
E. subspherico, E. cylindrico, E. alabomensis
et E. wyomingensis ; y en 10s pequetïos
rumiantes : E. ninakoihyokimovoe,
E. arloingi, E. parva, E. ahsafa, E. fuurei, E. chris-
fenseni,
E. crandollis, y E. infricato.
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ches vétérinaires de Dakar-Hann (Sénégal)
34, 369-373.
(non publiés).
*
.
.
Imprimé en Fronce. - I~D. JOUVE. 12. Rue de Tournon. Paris w3*)
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La coccidiose intestinale
des ruminants domestiques au Sénégal
Epidémiologie, répartition géographique,
importance économique
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des ruminants domestiques au Sénégal
Epidémiologie, répartition géographique,
importance économique
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RÉSUMÉ
A la suite d’une série d’enquêtes épidémiologiques effectuées au Sénégal, il
apparaît que la coccidiose intestinale des ruminants domestiques est une affec-
tion parasitaire grave, fréquente en certaines régions,
La coccidiose existe sous la forme laiente ou chronique dans tout le pays
tandis que la coccidiose aiguë atteint essentiellement les troupeaux situés dans la
moitié nord du Sénégal (moins de 1.000 mm de pluies par an) où les conditions
d’élevage sont plus difficiles (longue saison sèche, végétation rare).
Les espèces en cause sont, pour les bovins : E. zurni, E. bovis, E. ellipsoidolis,
E. ouburnensis, E. subspherico, E. cylindrico, E. olobamensis et E. wyomingensis ; et
pour les petits ruminants : E. ninakolhyakimovae, E. arloingi, E.parva, E. ahsata,
E. faurei, E. chrisfenseni, E. crandollis, et E. intricafo.
Des enquêtes épizootologiques effectuées en
sitose, très souvent associée à une ou plusieurs
1965, 1966 et 1967 par le Service de Parasitologie
helminthiases, I’anguillulose par exemple.
du Laboratoire national de Recherches vétéri-
naires de Dakar, dans les grandes régions
d’élevage du Sénégal, mettent en évidence la
PLAN ET MÉTHODES DE TRAVAIL
fréquence d’une protozoose, la coccidiose intes-
tinale des ruminants domestiques.
Dans chaque région prospectée, les enquêtes
Cette aifection parasitaire, dont l’importance
sont menées par village à partir de prélèvements
semble avoir été méconnue jusqu’ici, cause des
fécaux moyens opérés directement dans le
pertes économiques importantes parmi le cheptel
rectum des animaux les plus maigres du trou-
sénégalais (amaigrissement des malades, mor-
peau présentant des troubles gastro-intestinaux
talité élevée, en particulier chez les plus jeunes).
(diarrhée), avec parfois une baisse notable de
Cette note a pour but de présenter un tableau
l’état général (poi I piqué, anémie, faiblesse).
d’ensemble sur I’épidémiologie et la distribution
Les prélèvements sont conservés et stabilisés à
géographique au Sénégal de la coccidiose intes-
l’aide d’une solution de bichromate de potas-
tinale des ruminants domestiques, avec I’inven-
sium à 2 p. 100, puis entreposés à + 4 OC avant
taire des espèces de coccidies en cause, et de
leur acheminement et leur examen au Labora-
souligner l’action prépondérante du climat et du
toire de Dakar quelques jours après.
mode d’élevage sur la gravité de cette para-
La recherche des coccidies dans les excré-
- 4-I -
ments, sous leur forme enkystée (oocystes),
Cinq grandes régions sont ainsi déterminées :
est faite d’abord par examen microscopique
A. -- Sénégal-occidental,
direct, puis par examen après concentration des
B. -- Sénégal-septentrional,
oocystes par flottation accélérée en milieu sucré
C. -- Sénégal-oriental,
saturé (LEVINE, 1961).
D. -- Sine-Saloum,
Les déterminations spécifiques sont basées sur
E. -- Casamance.
les mensurations et les caractères morpholo-
giques des oocystes sporulés, les temps de spo-
A. Sénégal occidental.
rulation en étuve humide à -I- 30 OC et l’espèce
Cette région biogéographique correspond
de l’hôte (selon LEVINE, 1961 ; PELLERDY,
approximativement à la presqu’île du Cap-Vert
1965).
et à son arrière-pays la région deThiès (cf. carte).
De très nombreux cas de coccidiose aiguë
PRÉSENTATION DES RÉSULTATS
sont diagnostiqués en toute saison dans cette
zone à grande concentration de bétail (marché
Les résultats des diverses enquêtes épidémio-
d’approvisionnement de Dakar).
logiques sont groupés et interprétés en fonction
La coccidiose existe à l’état enzootique dans
de régions biogéographiques naturelles déter-
tous les troupeaux.
minées :
Les enquêtes montrent que les malades sont
- par l’importance et la répartition du
tous des animaux ayant subi une agression
régime des pluies,
physiologique (« stress » des auteurs anglo-
- par leur hydrographie et leur flore (cf.
saxons : fctigue de voyage, changement d’en-
carte).
vironnement et d’alimentation, mise en stabu-
1
Distribution géographique des principaux foyers de coccidiose mis en évidence au Sénégal.
- 4 8 -
lation permanente de sujets habituellement
également important. L’action pathogène de ce
laissés en liberté) (VASSILIADES, 1965).
complexe parasitaire est la résultante de très
mauvaises conditions climatiques et notamment
-_
B. - Sénégal septentrional.
l’alternance d’une longue saison sèche (sous
alimentation et malnutrition) et d’une saison des
Limitée au sud par un axe transversal ima-
pluies favorisant la prolifération des parasites
ginaire MBOUR-BAKEL, cette zone correspond
(polyparasitisme).
à toute la partie nord du Sénégal et constitue
une entité bioclimatique caractérisée par un
C. - Sénégal orientai.
climat sahélien typique avec passage progressif
vers le sud à un climat de type soudanien (plu-
Cette partie du Sénégal jouissant d’un climat
viométrie moyenne toujours inférieure à 75û mm)
sub-soudanien à sub-guinéen (1 .OOO à 1.500 mm
(cf. carte).
de pluies par an) (cf. carte) l’alimentation des
Tous les bovins, ovins et caprins contrôlés
troupeaux est généralement assez bonne durant
sont porteurs de nombreuses espèces de cocci-
toute l’année.
dies, d’ailleurs très souvent associées chez un
En conséquence, le parasitisme bien que
même hôte à des helminthes, constituant ainsi
toujours présent dans les troupeaux contrôlés,
un état de polyparasitisme chronique (Région
est bien toléré en dépit de conditions de tempé-
de Matam, Rapport annuel, Laboratoire de
rature et d’humidité favorables à la prolifération
I’Elevage Dakar, 1963).
des coccidies.
Chez les petits ruminants notamment, I’infes-
Dans le nord de cette zone où les conditions
tation coccidienne très importante, jointe à une
sont nettement moins bonnes (saison sèche plus
helminthiase chronique, entraîne de nombreux
accentuée avec moins de 1.000 mm de pluies)
cas de mortalité principalement autour des
des épidémies graves de coccidiose sont obser-
grands centres d’élevage (Kébémer, Dara).
vées chaque année en
début d’hivernage
C’est ainsi qu’en novembre 1967, à Kébémer,
(Région de Bakel, Rapport annuel, Laboratoire
une épidémie grave de coccidiose aiguë a
de I’Elevage, Dakar, 1963).
entraîné une mortalité supérieure à 50 p. ICO
(association
: Eimeria SP,, 6unosfomum s p . e t
D. - Sine-Saloum.
Strongyloides SP.).
Cette région présente un climat soudanien
A Dara, en élevage intensif, les cas de cocci-
typique de plus en plus accentué du nord (750 mm
.r
diose aiguë sont également très fréquents.
de pluies) au sud (1.000 mm) où la végétation
En septembre 1966, 200 chèvres de « Maradi »
plus dense annonce le climat sub-guinéen de la
étaient atteintes de coccidiose avec une mortalité
Casamance (cf. carte).
de l’ordre de 15 p. 100 ; en mars 1967, 12veaux
Du point de vue épidémiologique les condi-
originaires de Dara et ramenés à Dakar à des
tions générales sont sensiblement les mêmes
fins d’expérience présentaient des symptômes
qu’au Sénégal septentrional, mais une pluvio-
de coccidiose sub-aiguë avec baisse considérable
métrie plus importante et mieux répartie atténue
de l’état général due à un polyparasitisme
la gravité de l’affection permettant une meilleure
important (GRETILLAT & VASSILIADES, 1968)
alimentation des troupeaux.
c
(association : Eirnerio sp., Trichostrongylus sp.,
Les examens de laboratoire mettent en évi-
Cooperia sp. et Strongyloides SP.).
dence la présence constante de coccidies dans
La période de disette qui sévit chaque année
l’ensemble du cheptel de cette région. Certains
.*
de mars à juin, en fin de saison sèche, en affai-
animaux sont atteints de coccidiose chronique
blissant la résistance des infestés chroniques
qui peut passer à la phase aiguë à l’occasion
favorise la prolifération des parasites gastro-
d’une baisse de l’état général provoquée par
intestinaux et des coccidies en particulier.
des facteurs extrinsèques.
Du point de vue épizootologique, la coccidiose
C’est ainsi qu’une enzootie grave de coccidiose
dans cette région du Sénégal est caractérisée
aiguë a été constatée à Maka-Koulibenta en
par un parasitisme coccidien généralement très
mars 1965 dans un troupeau de veaux récem-
L”
élevé associé à un parasitisme à helminthes
ment vaccinés contre la peste. 50 p. 100 d’entre
- 49 -
eux présentaient une diarrhée profuse avec
Les espèces suivantes ont été déterminées (par
maigreur extrême, anémie, faiblesse, hyper-
ordre de fréquence) :
thermie et poil piqué. Chez ces animaux la
Genre Eimeria Schneider, 1875 (Protozoa,
vaccination bovipestique a entraîné une défi-
Eimeriidoe).
cience de résistance de l’épithélium intestinal qui
a) Chez les bovins :
a permis une prolifération rapide des coccidies.
En avril 1965, dans les environs de Fatick, des
- Eimeria zurni (Rivolta, 1878) Martin, 1909
cas de coccidiose aiguë sont constatés sur des , (fréquence : 38 p. 100) ;
I
veaux parqués dans les enclos étroits et mal-
- Eimeria bovis (Zublin, 1908) Fiebiger, 1912
I
propres situés dans des campements de transhu- l (21 p. 100) ;
mance peulhs. Dans ces cas, le mode de gardien-
Ces deux espèces, très souvent associées chez
nage (surcharge et mauvaise hygiène des parcs
un même hôte, sont reconnues comme les plus
de stabulation) est responsable du développe-
pathogènes (DAVIS & BOWMAN, 1957 ; FITZ-
__
ment et de l’importance de I’infestation.
GERALD, 1964).
- Eimeria ellipsoidalis Becker & Frye, 1929
E. - Casamance.
(12 p. 100).
L’espece est peu pathogène (HAMMOND,
La région de Casamance constitue la partie ~ SAYIN & MINER, 1962).
méridionale du Sénégal, au sud de la Gambie
(cf. carte). Elle est caractérisée par un climat
- Eimerio ouburnensis Christensen & Porter,
sub-guinéen à guinéen (1.000 à 1.500 mm de
1939 (12 p. 100) ;
pluies par an).
- Eimeria subspherica Christensen, 1941 (6 p.
Dans la majeure partie des troupeaux bovins,
100) ;
ovins et caprins contrôlés en Casamance, la
- Eimeria cylindrica Wilson, 1931 (6 p. 100) ;
présence des coccidies en nombre plus ou moins
- Eimeria brasiliensis Torres & Ramos, 1939
élevé a été mise en évidence.
’
(2 p. 100) ;
II s’agit toujours d’un parasitisme latent bien
- Eimeria olnbamensis Christensen, 1941
toléré par les animaux quoique très souvent i (2 p. 100) ;
associé à des helminthiases chroniques.
- Eimerla wyomingensis Huizinga & Winger,
=
Aucun cas de coccidiose clinique aiguë n’a été
1942 (1 p. 100).
observé.
En Afrique Occidentale, toutes ces espèces
Ainsi donc, malgré un parasitisme coccidien
t
sont déjà signalées, mais uniquement au Nigeria
relativement élevé, la coccidiose clinique semble
par LEE & ARMOUR (1959).
très rare en Casamance.
En effet, le climat chaud et humide de cette
b) Chez les ovins ei caprins :
région, s’il favorise la prolifération des parasites, 1
-, Eimeria ninakolhyak\\movae
Yakimoff 8( Ras-
protège le bétail contre les disettes de saison 1 tegaleff, 1930 (28 p. 100).
sèche et les accidents digestifs dus aux brusques
C’est l’espèce la plus fréquente et la plus
changements d’alimentation qui, dans les régions
pathogène (LOTZE, 1954).
plus sèches du Sénégal, sont souvent à l’origine
- Eimeria orloingi (Marotel, 1905) Martin,
de graves épidémies
de coccidiose aiguë.
1909 (27 p. 100).
:
D’après LOTZE (1952 & 1953) cette espèce
CONCLUSIONS
j
est très pathogène.
- Eimeria parva Kotlan, Mocsy & Vajda, 1929
_
Des résultats obtenus au cours des enquêtes
(13 p. 100) ;
épidémiologiques dont nous venons de donner
- Eimerio ahsafa Honess, 1942 (11 p. 100).
l’essentiel nous pouvons tirer les conclusions
Cette dernière est l’une des plus pathogènes
suivantes :
actuellement connues chez les petits ruminants
10 Les coccidies sont toujours présentes chez
(SMITH, DAVIS & BOWMAN, 1960).
les bovins, ovins et caprins du Sénégal en toutes
- Eimeria faurei (Moussu & Marotel, 1902)
périodes de l’année.
Martin, 1909 (10 p# 100) ;
- 50 -
- Eimerio christenseni Levine, Ivens & Fritz,
30 Cet équilibre instable peut être rompu
1962 (6 p. 100) ;
par tout facteur externe ou interne provoquant
-.
- Eimeria crandaflis Honess, 1942 (3 p. 100).
la baisse de l’état général de l’animal avec
D’après POUT (1965), E. crondallis est suff-
diminution de la résistance aux infections :
samment pathogène pour entraîner l’apparition
a) mauvaise hygiène générale,
de symptômes cliniques de coccidiose.
b) surmenage, fatigue de voyage, chocs
- Eimeria intricota Spiegl, 1925 (2 p. 100).
physiologiques divers (vaccination),
En Afrique E. ninakolhyakimovae
et E. intricota
c) sous-alimentation et carences alimentaires
.
existent en Tunisie (BALOZET, 1932) et au
de fin de saison sèche ; changement brusque
I
Nigeria (HALL, 1931 in THOMSON & HALL,
d’alimentation en début de saison des pluies
1931) ; E. arloingi au Maroc (VELU, 1919 ; (herbes vertes très riches en eau) provoquont des
,
BALOZET, 1922), en Tunisie (BALOZET, 1922)
troubles gastro-intestinaux (diarrhée),
au Congo-Kinshasa (DEOM & MORTELMANS,
d) maladies intercurrentes,
1956) au Mali et au Sénégal (CURASSON, 1921) :
e) infestation massive par des helminthes par-
E. faurei en Tunisie (BALOZET, 1932), au Maroc
ticulièrement pathogènes (bunostomes, anguillu-
(BOUIN, 1919) et au Congo-Kinshasa (DEOM
les, par exemple).
& MORTELMANS, 1956), mais E. ahsata, E. par-
Ceci explique les épizooties de coccidiose
va, E. crandallis et E. christenseni sont signalées
constatées chaque année dans les zones sahé-
pour la première fois en Afrique Occidentale.
liennes et soudaniennes du Sénégal situées
20 La présence des coccidies est généralement
au nord de I’isohyète des 1.000 mm (cf. carte).
bien supportée quand l’hôte est en excellentes
conditions physiques. C’est la coccidiose latente
Instifut d’Elevage et de Médecine vétérinaire
ou chronique des zones humides de Casamance
des Pays tropicaux. Maisons-Alforf
(France).
et du Sénégal-oriental et plus généralement
Laboratoire national de I’Elevage
des régions situées au sud de I’isohyète des
et de Recherches vétérinaires
1.000 mm (cf. carte) à climat sub-soudanien à
de Dakar (Sénégal).
guinéen.
SUMMARY
Intestinal coccidiosis of domestic ruminants in Senegal.
Epidemiology, geographical location, economic importance
Following several epidemiologic surveys carried out in Senegal, it appears
that intestinal coccidiosis of domestic ruminants is a severe parasitic affection
frequent in some areas.
Latent or chronic forms of Coccidiosis are widespread in the country, but
acute form of the disease is only prevalent in the Northern part of Senegal (less
than 1,000 mm of rain per year) where the ecological conditions are more unfa-
vorable (long rainy season, scarce vegetation).
The following species have been recorded in cattle : E. zurni, E. bovis, E. ellip-
soidolis, E. ouburnensis, E. subspherico, E. cylindrico, E. olobamensis and E. wyo-
mingensis ; in small ruminants : E. ninakoihyokimovae,
E. arloingi, E . parva, E.
ahsata, E. faurei, E. chrisfenseni, E. crandallis, and E. infricafa.
RESUMEN
La coccidiosis intestinal de 10s rumiantes domésticos en Senegal.
Epidemiologia, reparticibn geogrdfica, importancia econbmica
Después de una serie de encuestasepidemiologicas hechasensenegal, parece
que la coccidiosis intestinal de 10s rumiantes domésticos es una enfermedad
parasitaria severa, frecuente en ciertas regiones.
- 5 1 -
REVUE D’ÉLEVAGE
Se encuentra la coccidiosis bajo forma latente o cronica en todo el pais, mien-
tras la forma aguda ocurre principalmente en el norte de Senegal (menos de
1.000 mm de Iluvias por aïïo) donde las condiciones ecologicas son mas desfavo-
rables (larga estacion seca, vegetacion escasa).
Las especies incriminadas son
las siguientes en 10s bovinos : E. zurni, E. bovis, E. eilipsoidol~s, E. ouburnensis,
E. subspherico, E. cylindrico, E. alabomensis
et E. wyomingensis ; y en 10s pequetïos
rumiantes : E. ninakoihyokimovoe,
E. arloingi, E. parva, E. ahsafa, E. fuurei, E. chris-
fenseni,
E. crandollis, y E. infricato.
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