LA PERIPNEUMONIE BOVINE en AFRIQUE OCCIDENTALE par...
LA PERIPNEUMONIE BOVINE
en AFRIQUE OCCIDENTALE
par J.ORUE
Directeur Adjoint
du Laboratoire Central de 1'Elevage
"Georges Curassonll
Dakar-Hann
~OC- afin
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133--p-37~7~-~\\-
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nir à sa complète éradication. Ces divers facteurs imposent aux recher-
ches de pathologie animale des conditions très spéciales, nécessitent
une organisation particulière, des moyens d'action importants, pour
parvenir à surmonter des difficultés insoupçonnées dans d'autres

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A partir de cette époque, les rapports des vétérinaires du
service de lIElevage permettent d'en suivre l'évolution et la distri-
bution géographique.
Sa propagation est insidieuse, irrégulikre dans le temps et
dans l'espace. Elle connaît des périodes d'exacerbation qui succè-
dent à des périodes d'accalmie pendant lesquelles elle sévit en
foyers peu nombreux et bien circonscrits.
Elle est également plus fréquente, beaucoup plus meurtrière,
et plus envahissante dans les régions humides de la forêt (Haute
Guinée et Côte d'ivoire), dans la zone Guinéenne, le long des
fleuves (Sénégal et Niger). Par contre, dans les zones sahéliannes
on ne la rencontre qu'en foyers disséminés. Il semblerait que la
contagiosité soit liée, p our des causes non encore expliquees,
autant aux conditions climatiques qu'à la réceptivité particulière
de certaines races bovines.
En dehors de ces règles générales épizootologiques d'autres
causes interviennent qui, dans les pays à élevage extensif de la
zone tropicale et subtropicale jouent un rôle certain dans la conser-
vation du virus et dans la propagation de l'affection.
Ces facteurs tiennent :
ID - à la transhumance qui conditionne l'élevage extensif dans les
régions saheliennes. Elle se traduit par des deplacements importants
du nord au sud d'octobre à février (saison sèche), et du sud au
nord de juin à octobre (saison des pluies).
2O - aux mouvements commerciaux qui amènent le bétail principalement
des régions d'élevage des zones sahéliennes vers les centres importants
de consommation de la Côte atlantique.
3” - à des facteurs humains, En effet, l'éleveur s'abstient en général
de déclarer la maladie et , par ses déplacements nécessités par la re-
cherche des pCiturages et des points d'eau, rend inapplicables les
mesures de police sanitaire.
La transhumance et les mouvements commerciaux du bétail
favorisent l'extension de la péripneumonie, d'une part, à l'intérieur
des zones d'élevage, et, d'autre part, dispersent le virus dans les
régions indemnes occupées principalement par les éleveurs sédentai-
res, des régions limitrophes des fleuves, de la zone guinéenne et
de la zone forestière (Moyenne et Basse Côte d'ivoire, Guinée, Togo-
a
Dahomey).
On considère géneralement que les "réservoirs" de virus sont
situés dans les régions sahéliennes de Mauritanie, du Soudan, du Niger,
où la maladie sévit à l'état endémique entretenue par la transhumance,
et, qu'à partir de ces zones d'élevage le contage gagnerait, pério-
diquement, grâce aux mouvements commerciaux, les pays de la zone &ud.
. . . / .a,
RECHERCHES POURSUIVIES EN A.O.F.
Les études dont elle a fait l'objet depuis de nombreuses
années ont porté :

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Actuellement, un foyer très important s'étend sur toute la
Haute Guinée et menace la région du Fouta-Djalon. Un autre, énergi-
quement combattu par le traitement des malades et par la vaccina-
tion systématique des troupeaux, sévit en Mauritanie, le long du
fleuve Sénégal.
Par sa nature même et par son Gvolution particulière, elle
représente un danger constant pour l'élevage dont elle interdit
l'amélioration et, dans beaucoup de régions, le développement ; ces
pertes qu'elle occasionne sont importantes ; elles ont pu atteindre
6% du cheptel atteint.
Ces notions épizootologiques succinctement exposées suffi-
sent cependant à demontrer l'importance que revêt la péripneumonie
pour l'économie de l'Afrique occidentale.
RECHERCHES POURSUIVIES EN A.O.F.
Les études dont elle a fait l'objet depuis de nombreuses
années ont porté :
1" - sur la recherche de traitements curatifs
2" - sur l'amélioration de la prophylaxie médicale par la mise au
point de vaccins sQrs et actifs.
3” - sur les méthodes de diagnostic utilisables dans la pratique
permettant le dépistage des malades, des contaminés et des porteurs
chroniques, ainsi que le contrôle des immunisations.
A. - LE TRAITEMENT
Les vétérinaires du service de lIElevage ont utilisé successi-
vement :
a) la ;érothérapie
b) la chimiothérapie ( arSen1CaUX

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(sulfamides
c) l'antibiothérapie
(pénicilline
(streptomycine
10 - La sérothérapie
Son utilisation ne peut être citée que pour mémoire, en
raison des échecs résultant de son utilis.ation (Curasson 1941)
2+ - La chimiothérapie
Les meilleurs résultats sont obtenus avec les arsénobenzols,
certains sulfamides et antibiotiques.
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a) les arsénobenzols
A la suite des travaux de Witt (1925) l'efficacité du
novarsénobenzol (ou 914) est reconnueen A.O.F. par CURASSON,
GARGADENNEC, MORNET et coll. Son action est d'autant plus efficace
qu'un traitement de choc à fortes doses est institué d'emblée.
b) les sulfamides
De nombreuses expériences concernant l'action des sulfamides
ont été effectuées depuis 1940. Nous citerons les produits les plus
actifs :
- la para-amiao-benzène-sulfonamide (1162 Fourneau).
- la 693 sulfapyridine (p,aminc-phényl-sulfamido-pyridine)
- la para-amino-benzène-sulfonyl (amino 2-méthyl-dierzine)
3” - Les antibiotiques
L'action d'un certain nombre d'antibiotiques a été également
recherchée.
P.MORNET et coll. ont utilisé in vitro et in vivo la pénicil-
line, la streptomycine, la tyrothricine.
La pénicilline est sans action, me^me à fortes doses. Par
contre la streptomycine (2 g par jour pendant 4 jours) est efficace:
son action se traduit par une chute de température et la disparition
des signes cliniques en 20 jours.
Les essais portant sur d'autres antibiotiques doivent être
poursuivis. Dans la pratique seul le novarsénobenzol 'a été vulgarieée
Il connaît la faveur des véterinaires et des dleveurs qui apprécient
son activith immediate,
malgré l'inconvénient de permettre la conser-
vation de l'agent causal dans les séquestres lésionnels, comme l'ont
démontré I.M. IYANOFF et P.P. TARANJUK. Les lésions ne sont pas
stérilisées, et les animaux constitueraient des porteurs de germes
qui continueraient à disséminer la maladie. Par consequent, le trai-
tement au novarsénobenzol permet uniquement de réduire les pertes
économiques, et ne peut en aucun cas contribuer à l'éradication de la
péripneumonie.
B. - LA PROPHYLAXIE MEDICALE
Comme on vient de le voir, les règles de la prophylaxie
sanitaire ne peuvent être appliquées en Afrique ; les essais de trai-
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tement n'ayant pas permis encore la guérison totale des animaux
atteints, on ne peut espérer, dans ces conditions, obtenir des
résultats favorables que par la prophylaxie médicale, c'est-à-dire
en ayant recours à la vaccination des animaux sains.
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Les recherches concernant la mise au point d'un vaccin se
sont poursuivies, depuis de nombreuses années, par les spécialistes
que se sont succédés dans les divers laboratoire de l'A.O.F., d'abord
à Bamako puis au Laboratoire Central de lIElevage à Dakar.
Sans décrire les procedés,
ni les modalités de leur prépara-
tion, citons le vaccin-formolé de CURASSON et BARRAS, préparé à
partir de la sérosité pulmonaire, les virus-vaccins en excipient
gras, expérimentes par GIRARD (1938) PRILIPPE et SISSOKO (1940).
Ces vaccins ont été abandonnés : le vaccin formolé d'une
innocuitê parfaite présente l'inconvenient
de ne donner qu'une
immunité de courte dur6e (au maximum six mois). Sa limite d'utilisa-
tion est très courte (15 jours) : il ne peut être utilise qu'aux
environs immédiats des foyers,
Les vaccins en excipients gras n'ont pas reçu la sanction
de la pratique : ils ne peuvent être titrés correctement et l'injec-
tion vaccinale est suivie, trop souvent, d'oedèmes réactionnels
envahissants et dangereux.
a) le vaccin-culture
On sait que l'agent causal de la péripneumonie, Asterococcus
mvcoideq, fut isolé pour la première fois par NOCARD et ROUX (1895)
qui réussirent à le cultiver dans le péritoine du lapin, en sacs de
collodion, contenant un bouillon. L'inoculation de cette culture à
des bovins par DUJARDIN - BEAUMETZ donne des réactions identiques
à l'inoculation de sErosité prélevée aseptiquement.
Plus tard, en s'inspirant des travaux de WALKER (1920), au
Kénya, sur l'att&nuation des cultures par repiquages successifs, et
de BENNETT (1931),
q ui préconise l'utilisation du sérum de cheval
comme adjuvant, le vaccin-culture est expérimenté en A.O.F. et vulga-
risé 3, partir de 1942.
La préparation correspondant aux demandes des territoires
est régulièrement croissante , pour atteindre 2.850.000 doses en
1958.
Les travaux de recherches concernant l'amélioration des
techniques ont porté :
I0 - sur les milieux de cultures les plus favorables au développement
d'Asterococcus
mycoïdes. Par l'emploi des milieux tryptosés obtenus
par digestion papaïnique : des cultures très abondantes ont été
obtenues qui ont augmenté les qualités immunigènes du vaccin-culture.
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c
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2" - sur l'action de différents acides aminés (tryptophane-asparagine
glycocholle, tyrosine-srginine-
histidine-alanine-leucine)
: les
résultats
ont été décevants.
Par contre nous avons confirmé que le sarum était un élément
indispensable à la culture du virus et qu'il peut être indifféremment
fourni par les espéces animales suivantes : cheval, boeuf, chèvre,
mouton, porc, lapin , cobaye, chien et chat. Contrairement à l'opinion
émise par certains auteurs l'origine du s&rum n'a aucune influence
c
.-
sur la virulence de l'agent pathogène.
3” - sur la voie d'inoculation la plus favorable : voie sous-cutanée,
voie intra-dermique, dans des rcgions riches en lymphatiques, comme
le mufle.
A la suite de nombreuses inoculations il a été démontré
qu'une réaction locale même limitée devait être recherchée : elle
est la preuve d'une immunité? solide qui sIetablit. Dans ce cas, par
l'agglutination rapide sur lame, on met en évidence des anticorps
seriques.
Par contre, après une injection de culture avirulente on
ne constate ni réaction, ni apparition d'anticorps, ni immunité.
ssultats obtenus par la vnccination au vnccin-culture
Les opinions 6mises sur la valeur immunigène du vaccin-
culture sont assez contradictoires, et les avis très divers. Dans
certains territoires, comme le Soudan, l'immunisation par ce prccé-
dé de vaccination est très recherchée. Les éleveurs et techniciens
attribuent à son activité immunigène la disparition presque totale
de la pdripneumonie, à la suite de campagnes de vaccination poursui-
vies systématiquement pendant les cinq dernières années.
Dans d'sutres r&gions, au contraire, de nombreux échecs
lui sont attribuds.
Ces contradictions sont parfaitement explicables. Elles
reconnaissant plusieurs causes qui ti-nnent :
- à 13 nature du vaccin-culture qui est un vaccin vivant
préparé à partir de souches s'atténuant irrégulièrement par repiqua-
ge successifs. Il est sensible à la. chaleur. Sq durde de validité
n'excède pas trois mois.
Les contre-indications qui interdisent son emploi sont connues
et bien précisées dans la littérature ; les animaux infectés chroni-
ques ou fébricitants, les animaux âgés de moins de six mois, les
sujets en mauvais état d'entretien, les femelles gestantes ne doivent
pas être vaccinées. Dans les foyers, l'injection de vaccin-culture
accélérant l'évolution de l'affection, réactive le virus des animaux
contaminés.
l . .
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Son contrôle exige des tests d'innocuité répétés qui doivent
$tre effectués non seulement au Laboratoire, mais également dans
différentes zones d'un même territoire en raison de la sensibilité
particulière des animaux. Dans la pratique, toutes ces conditions
sont rarement remplies, et suffisent à expliquer les échecs enregis-
trés et les "ruptures d'immunité" qui lui sont imputées.
Cependant nous restons persuadés des bons résultats que l'on
peut attendre de l'immunisation au vaccin-culture en respectant les
règles d'utilisation élémentaires qui peuvent être facilités par
l'amélioration des moyens de transport et une collaboration plus
étroite entre le laboratoire et les services d'application.
b) le vaccin avianisé
On sait, principalement depuis les travaux de SHERIFF et
PIERCY (1952),
q ue 1'Asterocoocus
mgcoïdes se développe sur les
membranes chorio-allantoFdes
de l'oeuf embryonné, et que son ntténua-
tion peut être poursuivie, après adaptation sur membrane chorio-allan-
toïde, dans le vitellus.
L'étude de la culture du virus peripneumonique
sur oeuf
embryonné a été entreprise en vue de la préparation d'un vaccin stable
dont la lyophilisation faciliterait la conservation et par voie de
conskquence l'utilisation. Ces travaux se poursuivent, mais les
résultats sont inconstants et, suivant les lots, les titres obtenus
sont très variables.
Ce vaccin ne peut être encore vulgarisé et il serait encore
premature de la substituer au vaccin-culture.
c) LES METHODES DE DIAGNOSTIC
Les techniques de T%U?ER et CAMPBELL (1953) pour la fixation
du complément, et de NEIPiNG et FIELD (1953) pour la séro-agglutina-
tion sur lame ont été expérimentées avec succès.
La fixation du complement est seulement utilisable en labora-
toire.
Par contre, la réaction d'agglutination constitue un procédé
simple,pratique,fncile
à interpréter,et
mérite d'être vulgarisée sur
le terrain. Cette reaction donne d'une part, 1s possibilité de per-
mettre le depistage des malades et des contaminés, et d'autre part,
de contrôler l'efficacitd des vaccinations par la recherche des
anticorps seriques agglutinants.
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