PARASITOLOGIK - Recherches sur le cycle évolutif...
PARASITOLOGIK - Recherches sur le cycle évolutif du schistosome des
Ruminants domestiques de l’Ouest-Africain (Schistosoma curassoni
Brumpt, 1931). Note (*) de M. SIMON GH~TILLAT, transmise par
M. Clément Bressou.
Le cycle évolutif expérimental du schistosome parasite des Ruminants domes-
tiques de l’Ouest-Africain, permet de confirmer l’espèce Schrstosoma curassoni
et de décrire ses formes larvaires toutes particulières où le stade « sporocyste N
est absent.
La schistosomiase bovine est une affection parasitaire très répandue
au Sénegal ct en Mauritanie.
Dans le but d’étudier l’épidémiologie de cette helminthiase, nous fîmes
au cours de 1960, 1961 et 1962, plusieurs enquêtes malacologiques dans
les points d’eau de la Casamance, du Sénégal oriental, du plateau du
Tagant et du bas-fleuve SCnégal. D’après les résultats obtenus à la dissection
de plusieurs centaines de bulins,
les deux gastéropodes d’eau douce,
Bulinus guernei Dautzenberg, au Sénégal, et Bulinus truncatus rohlfsi
(Clessin), en Mauritanie, furent considérés comme étant les hôtes inter-
médiaires de la bilharzie en cause.
Afin d’apporter la preuve expérimentale de la valeur vectrice de ces
deux mollusques, nous avons tenté, avec succès, la réalisation du cycle
expérimental de ce schistosome au laboratoire.
Plan de travail. - Élevage de B. guernei et de B. truncatus rohlfsi à
partir de souches provenant de la région de Thiès (Sénégal) et du plateau
du Tagant (Mauritanie) (‘).
Récoltes d’œufs de schistosomes à partir de raclats de muqueuse intes-
tinale de moutons et de chèvres atteints de schistosomiase et sacrifiés
aux abattoirs de Dakar.
Prélèvements de schistosomes adultes dans les veines mésentériques
de ces mêmes animaux pour identification de l’espèce.
Éclosion artificielle des œufs, puis lavage et concentration des miracidia
dans de l’eau servant à nos slevages de bulins (eau puisée dans un gîte
à mollusques proche du laboratoire, puis filtrée sur bougie poreuse).
Mise en présence des miracidia avec un certain nombre de B. truncatus
rohlfsi OU de B. guernei pendant 4 h, à la température de 26-280, dans une
eau de même origine, de pH 6,3-6,4, éclairée par une lampe de 200 W.
Lavage et mise en aquarium des mollusques, puis dissections échelonnées
d’un certain nombre d’exemplaires pour suivre l’évolution des formes
larvaires chez l’hôte intermédiaire.
Cinq essais d’infestation ayant porté respectivement sur 242 B. guernei
et 145 B. truncatus rohlfsi ont été positifs.
R&&ats de l’expérimentation. - L’œuf de ce schistosome mesure I IO

(2)
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à 150 [J. dc long sur 30 à CIO ;J. de large. 11 est oblong et pourvu d’une pointe
terminale bien rnarquk (fis. hj. A la tempGratuw clc z(;-%‘: il kliit dans
l’eau en 5 A IO mn. Le miracidium qui en sort a une durk de slwvie de
8 à 16 h et pénètre chez le bulin vecteur par l’orifice pulmonaire.
Au lieu de se .transformer en sporocyste, son massif cellulaire interne
donne dos grappes de masses globuleuses situées principalement le long
du tube intestinal du gastéropode. Ces itlCments unicellulaires,
constitués
par une masse hyaline présentant un noyau p6riphériquc, se multiplient
très vite par bourgeonnement externe et envahissent rn quelques jours
tous les tissus interstitiels du bulin, son pied, puis finalement son hépato-
pancréas.
Ils ont de 25 à 70 ;J. dc diamètre (fig. U).
Schisfosoma curassoni. - A, euf: B, formes larvaires globuleuses à bourgeonnement
externe; C, forme larvaire allongée avec multiplication des noyaux; L), forme larvaire
présentant deux bourgeons terminaux;
E et F, furcoccrcaires en voie de différencia-
tion; G, furcocercairc mûre.
Chez B. truncatus rohlfsi, entre les 15e ct 20e jonrs, ces élbmerl-l;s présentent
une organisation cellulaire par multiplication 5 partir du noyau initial,
deviennen-t mobiles, ct vont peu à peu se difI’Grencier cn quelques jours
en furcocercaires (fig. Cj.
Deux bourgcons apparaissent à leur partie postérieure, puis un étfan-
glement SC produit au niveau de leur partie moyenne, 1’~lément prenant
au fur et à mesure qu’il s’accroît, l’allure d’une furcocercaire (fig. D et E).
Les ébauches des ventouses ventrale et orale se font de plus en plus
distinctes, alors que les deux bourgeons terminaux s’allongent pour former
la fourche caudale (fig. F).
Chez environ Lp y/0 des El. truncutus roldfiyi infestés, la jeune cercaire
ainsi formée, qui est très mobile, se dkgage des tissus qui l’environnent
25 A 35 jours aprés l’infestation du mollusque par les miracidia, pour gagner
les tissus sous-cuticulaires du bulin (fig. G).
Dimensions de la furcocercairc mûre : longueur totale, 380 ;J.; longueur
de la queue sans la fourche, 190 ;A; longueur de la fourche caudale, 80 à
I)O {J..

Chez .B. guernei, hôte moins réceptif que le précédent, cette migration
ne se produit que vers le 60’3 jour, parfois beaucoup plus tard.
Discussion. - Contrairement à ce qui a été observé chez Schistosoma
hoois (Sonsino, 1876) et chez les autres représentants du genre Schistosoma
Weinland, 1855, dont le cycle évolutif est connu, où la multiplication
des formes larvaires a lieu sous forme de sporocystes e.t où les furcocercaires
se développent à l’intérieur de sporocystes, notre schis-tosome présente
une parthenita toute particulière, d’allure très primitive, puisque sa furco-
ccrçaire se différencie directement à partir d’éléments initiaux, se multi-
pliant chez le mollusque par bourgeonnement externe et non interne.
Ce schistosome ne peut donc appartenir qu’à une espèce dont la biologie
est encore inconnue. L’étude de plus de IOO exemplaires, mâles et femelles,
nous a permis de mettre en évidence certains caractères morphologiques
et anatomiques nous permettant de rattacher cette bilharzie à l’espèce
décrite par E. Brumpt en 1931, sous le nom de Schistosoma curassoni sp.
inquirenda, sur du matériel récolté par G. Curasson dans le foie d’un bovin
aux abattoirs de Bamako (République du Mali) (‘).
Les principaux caractéres distinctifs qui caractérisent cette espèce sont
les suivants : absence d’epines à la surface du canal gynécoph,ore;
nombre
de testicules chez la plupart des mâles : 4; cuticule de la femelle striée
et présentant de toutes petites épines dans sa partie la plus postérieure.
Enfin, un caractère que Rrumpt n’avait pas mentionné (les deux femelles
qu’il avait à sa disposition étant en mauvais état), ovaire spiralé.
(*) Séance du 27 août 1962.
(1) M. le Professeur G. Ranson du Muséum d’Histoire naturelle de Paris a déterminé
notre matériel malacologique.
(?) E. BRUJIPT, Ann. Parasit. hum. camp., (d), 0, 1931, p. 325.
(Laboratoire National de Recherches vétérinaires de Dakar, Sénégal
et Instiiut d’Élevage et de Médecine uétérinaire des Pays tropicaux.)

Estrait des Cornpts rendus des séances de 1’.4cadPmi~~ des Sciences,
t. 255, p. 1 ci-iy-I(i*?!), séance du ler octobre r!)(i,x.
GAUTHIER-VILLARS & Cie,
55, Quai des Grands-Augustins, Paris (t;“),
éditeur-Ilnprilneur-Lihr,irc.
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Imprimé en I:rnnce.