BulLepiz. Dis.Afr.(1964), 12, pp. 181-186 ...
BulLepiz. Dis.Afr.(1964), 12, pp. 181-186
PROPHYLAXIE DE LA PERIPNETJMONIE BOVINE PAR LE VACCIN
CULTURE ET L’OVO-VACCIN DANS L’OUEST AFRICAIN
FRANCOPHONE. BILAN DES DERNIERES CAMPAGNES DE
VACCINATION*
J. ORUE
t
* Institut d’Elevage et de A!lédecine vétérinaire des Pays tropicaux. Laboratoire
National de TElevage et de Recherches vétérinaires du Stfnégal-Dakar
En raison de sa position géographique, le Laboratoire National de Recherches
vétérinaires du Sénégal assure, sur demande, la préparation de vaccins destinés aux
pays francophones de l’Ouest africain. Leur large utilisation par ces pays prouve
que la plupart d’entre eux basent la prophylaxie de la péripneumonie contagieuse
sur la vaccination.
Les vaccins employés sont de deux sortes :
- le vaccin culture en bouillon cœur-sérum déjà utilisé depuis 1942 et dont
les services utilisateurs se déclarent généralement satisfaits ;
- l’ovo-vaccin qui, depuis 1960, après une période de prévulgarisation, est
actuellement de pIus en plus demandé.
RAPPEL SUR LA PREPARATION ET L’UTILISATION DES VACCINS
ANTIPERIPNEUMONIQUES
Le vaccin culture est une culture pure de Mycoplasma mycofdes atténuée
par passages en milieu cœur-sérum.
Deux types de vaccins sont préparés, en
raison de la susceptibilité différente des zébus et des taurins r :
- vaccin pour l’immunisation des taurins et des métis taurins-zébus, préparé
à partir d’une souche Tg, adaptée à l’œuf, provenant du laboratoire de Muguga
(Kénya) reçue au Laboratoire en 1957, à son IZ~ passage sur œuf, constituant
une banque lyophilisée qui est actuellement utilisée du 20e au 5oe repiquage en
bouillon cœur-sérum ;
- vaccin pour l’rmmunisation des zébus, préparé à partir d’une souche isolée
à Dakar et adaptée à l’œuf après IO passages sur membrane chorio-allantoïque et
II passages sur vitellus (souche DK 1). Elle est actuellement utilisée pour la
préparation du vaccin du 25e au 50e repiquage en bouillon cœur-sérum.
Le vaccin culture, pour garder toute son efficacité, doit être conservé sur place
ou tout au moins à + 4’ C de sa préparation jusqu’à son utilisation.
L’ovo-vaccin péripneumonique inspiré des travaux de Sheriff et Piercy
ainsi que de ceux de Piercy et Knight, a fait l’objet de 1956 à 1960, de différents
travaux de mise au point au Laboratoire de Hann.2
t
Ce vaccin est constitué actuellement par un broyat d’oeufs embryonnés inoculés
a’
par voie intra-vitelline au 7e jour de l’incubation avec la souche T3 provenant du
#
*Présenté à la ze Réunion du Groupe d’Experts de la FAO/OIE/CCTA sur la Péri-
:
pneumonie Bovine Contagieuse, Muguga, KCnya, février 1964.
1 Taurins : bœufs sans bosse.
2 La péripneumonie bovine - Etude et mise au point de l’ovo-vaccin péripneumonique-
Memerv. G.. et ON~. 5. Rev. El. Méd. vét. Pays trop. (1961), 4, 393-403.

laboratoire de Muguga (Kénya). Les oeufs morts entre le 3e et le 8e jour sont
broyés au mixer, mélangés avec une égale partie de sérum de cheval décomplémenté
et lyophilisé.
Au moment de son emploi, il est indispensable de reconstituer le produit
avec une eau réfrigérée et rejeter toute préparation datant de plus d’une heure et
cependant conservée sur glace.
TECHNIQUE ET LIEU D’ELECTION DE LA VACCINATION
Au cours des dernières années, des études ont été faites sur l’importance du
lieu d’élection de l’injection du vaccin antipéripneum0nique.l En effet pour obtenir
une excellente immunité, il est reconnu depuis longtemps, qu’il convient d’inoculer
une souche relativement virulente. Les expériences réalisées prouvent que le lieu
d’élection de l’injection d’un tel produit est un derme dense, riche en lymphatiques
qui assurent une résorption rapide des germes et ne permettent pas une subculture
“ in loto “, comme c’est le cas au niveau du conjonctif sous-cutané. Les conditions
requises ont été finalement trouvées dans le derme de la face postéro-externe de
l’oreille.
C’est à ce niveau que l’inoculation vaccinale est préconisée, à la dose de I ml,
quelque soit l’âge, le poids ou la race de l’animal. 11 est déconseillé d’inoculer en
sous-cutané les vaccins provenant des souches actuellement utilisées en raison des
réactions importantes souvent observées.
PREVENTION DES ACCIDENTS DE VACCINATION
Le traitement de la péripneumonie bovine 2 par le Novarsenobenzol 3 préconisé
par Wtt, dès 1905, a fait l’objet d’un certain nombre d’expériences avant d’être
largement vulgarisé dans tout l’Ouest africain d’expression française. On sait que
les résultats obtenus contre l’infection naturelle sont spectaculaires dans la majorité
des cas ; la guérison est d’autant plus certaine et rapide que le traitement est plus
précoce.
Le Novarsenobenzol est employé à la dose de 9 gr en 3 injections, à
intervalle de z jours, de préférence en solution à 5 p. IOO.
Ce traitement est indiqué dans le cas de réactions vaccinales trop importantes
à évolution dangereuse, qu’une seule injection suffit souvent à arrêter. Parfois une
2e, et très rarement une 3e injection, sont nécessaires. La température redevient
normale en 24 à 48 h. L’œdème réactionnel régresse rapidement s’il est à sa phase
inflammatoire, plus lentement s’il est déjà organisé.
La guérison clinique par le Novarsenobenzol des cas de péripneumonie latente
souvent révélés par la vaccination, se manifeste par une chute rapide de la tempéra-
ture, une amélioration de l’état général et la régression lente des signes pulmonaires
qui peut être totale. Cependant, il ne s’agit, en fait que d’une guérison clinique ;
l’organisme, il est important de le redire, n’est que très rarement stérilisé et les
animaux restent donc des porteurs de germes.
La thérapeutique de la péripneumonie bovine par le Novarsenobenzol peut
rendre de grands service sous réserve, toutefois, qu’elle soit incluse dans le cadre
d’une prophylaxie générale organisée et dirigée.
1 La péripneumonie bovine. Le lymphotropisme de Mycoplasma mycoides. Conséquences
sur la pathogénie et l’immunogénèse. Crue, J., Memery, G., et Thiery, G. Rev. El. Méd. nét.
Pays trop. (1961), 1, 43-51.
2 La péripneumonie bovine.
Traitement par le Novarsenobenzol. Conséquences
épidémiologiques et prophylactiques. Orue, J., et Memery, G. lieu. El. Méd. vét. Pays trop.
(r96r), 4, 405-411.

OBSERVATIONS A PROPOS DE L’IMMUNITE CONFEREE PAR LES
VACCINS ANTIPERIPNEUMONIQUES PREPARES A DAKAR
Il y a lieu de signaler qu’il n’y a pas de différence notable entre le vaccin culture
en bouillon cœur-sérum et l’ovo-vaccin : tous deux sont considérés comme des
vaccins culture, l’un en bouillon, l’autre en vitellus, milieu spécial de prolifération
du germe. C’est pourquoi l’ovo-vaccin n’est pas un vaccin avianisé, dont la souche
d’origine se serait adaptée à l’œuf tout en conservant ses qualités immunigénes.
II n’y a, pour l’ovo-vaccin comme pour le vaccin culture en bouillon cœur-sérum,
qu’un phénomème d’atténuation par repiquages successifs dans un milieu nutritif.
L’immunité conférée par les uns et par les autres est identique pour un même
degré d’atténuation. Si la qualité de l’immunité conférée par les deux types de
vaccins est considérée comme équivalente, il semble, également, que sa durée soit
sensiblement égale. (A titre indicatif, le temps de protection constaté expérimentale-
ment au laboratoire a été pour certains lots de vaccin supérieur à trois années.)
.
AVANTAGES ET INCONVENIENTS DES DEUX VACCINS
.a
11 résulte de l’expérience acquise au cours des dernières années que la compa-
raison des avantages et des inconvénients respectifs des deux produits actuellement
c
utilisés donnerait plutôt l’avantage à l’ovo-vaccin. Cependant, le vaccin culture
n’en demeure pas moins un bon procédé d’immunisation très employé dans
certaines régions.
L’ovo-vaccin présente l’intérêt de pouvoir se converver pratiquement indéfini-
ment en congélateur à - 15’ : son volume restreint, dû à sa présentation sous
forme lyophilisée, permet de constituer des réserves importantes dans un appareil
de faible encombrement.
Mais l’avantage essentiel de l’ovo-vaccin réside dans une parfaite connaissance
de son innocuité et de son efficacité. Les qualités immunigenes et le degré d’atténua-
tion des souches lyophilisées de départ sont parfaitement connues ; un titrage sur
bouillon cœur-sérum suffit alors pour connaître la richesse en germes de chaque
lot (minimum exigé : zo.ooo unités revivifiables par ml de vaccin reconstitué).
En ce qui concerne le vaccin culture dont la durée de conservation n’excède
pas trois mois, la souche lyophilisée d’origine est également parfaitement connue,
mais les conditions de préparation et de conservation sont telles qu’il est, dans la
pratique courante, impossible de connaître de façon précise la valeur immunigène
d’un lot de vaccin au moment de son utilisation, malgré un titrage en milieu liquide.
Les contre-indications générales de l’emploi des deux vaccins sont les mêmes :
- animaux infectés chroniques et fiévreux,
- animaux âgés de moins de 6 mois.
- sujets débiles,
- femelles en état de gestation avancée.
?
VACCINATIONS ASSOCIEES
Dès 1961, dans la région d’élevage de Thiès, au Sénégal, on associe dans une
même injection intradermique l’ovo-vaccin péripneumonique et le vaccin virus
pestique lapinisé mélangés lors de leur reconstitution, le vaccin antipéripneumonique
reconstitué servant de diluant au vaccin antipestique. Par la suite, au cours des
campagnes de vaccination 1962 et 1963, à l’injection du mélange des vaccins anti-
péripneumonique et antipestique sont associés, au cours de la même séance, les
-----:-- --+:-nm+nll*~1t;nll~ P+ snticharbonneux inoculés par voie cutanée, chacun

d’un côté opposé du thorax. Selon cette méthode, pour laquelle des tests d’efficacité
sont en cours, plus de 150.000 animaux ont déjà été vaccinés, sans aucun accident.
RESULTATS DES DERNIERES CAMPAGNES DE VACCINATION
L’analyse des rapports annuels des Services de 1’Elevage des pays franco-
phones de l’Ouest africain et les renseignements particuliers dus à des échanges
de correspondance permettent d’affirmer que les vaccins antipéripneumoniques
actuellement préparés, vaccin culture en milieu liquide et ovo-vaccin lyophilisé,
utilisés selon les techniques prescrites, donnent en général satisfaction tant au point
de vue de l’efficacité que de l’innocuité.
Les quantités produites au cours des derniéres années par le laboratoire sont
indiquées dans le Tableau ci-aprés :
Vaccin culture
Ovo-vaccin
I Total
Doses
Doses
Doses
en 1961
.
.
1.501.000
186.000
i)
I .687.000
en r962
.
.
698.000
328.000
I .026.000
en 1963
.
.
669.000
525.000
1 .I 94.000
-.-_
-
L
La plupart des services de l’élevage utilisent encore le vaccin culture mais
certains, tel le Service de 1’Elevage de la République Islamique de Mauritanie, ont
tendance à adopter l’ovo-vaccin, et 6.600 bovidés ont été immunisés à titre expéri-
mental, par ce dernier procédé.
Les animaux, par le jeu de la nomadisation, ont
traversé des zones infectées, cohabité avec des malades sans contracter la maladie.
Tous les animaux ont fait l’objet d’examens cliniques répétés et il n’a jamais été
constaté de suite vaccinale, ni oedème, ni adénite, ni avortement, ni réaction brutale
sur des jeunes.
Actuellement, la Mauritanie tend à remplacer le vaccin culture par l’ovo-vaccin.
Au Sénégal, la péripneumonie est une maladie en voie de stabilisation grâce
à des campagnes annuelles de vaccination, dans lesquelles sont utilisés le vaccin
culture dans la plupart des régions d’élevage, et l’ovo-vaccin dans les régions du
Sine-Saloum, de Diourbel et surtout de Thiès, considérée comme zone pilote de
prévulgarisation en raison de la proximité du Laboratoire de Hann.
Depuis 1960, l’ovo-vaccin est le seul employé dans cette région et la maladie
a pratiquement disparu. Près de 150.000 immunisations antipéripneumoniques ont
été ainsi pratiquées et chaque année a vu décroitre le nombre des foyers qui passe
de 36 en 1960 à I en 1963, tandis que le nombre des malades recensés tombe de
576 à 3, celui des morts de gz à z.
Foyers
Morts
Malades
Traite-
Vacci-
ments
nations
.-~
en1960 . .
36
576
906
15.373
en 1961 . .
17
49”
397
572
50.695
en 1962 . .
4
24
47
33
15.527
en 1963 . .
I
2
3
3
45.883
-
-
L--.
Des contrôles sérologiques sont effectués pour vérifier l’efficacité des immunisa-
tions. Ils sont effectués par la méthode de déviation du complément, qui est celle
utilisée au laboratoire pour les tests d’efficacité des lots de vaccins.

Parfois, la vaccination pratiquée systématiquement sur tous les animaux d’un
troupeau, que ce troupeau soit sain, contaminé ou apparemment indemne, pro-
voque des accidents par accélération de l’évolution de la maladie sur des animaux en
incubation ou aggravation de symptômes plus ou moins discrets. Ils traduisent
toujours une infection préexistante au moment de la vaccination, car l’ovo-vaccin
n’a jamais, entre nos mains, reproduit la “ péripneumonie maladie “, malgré des
expériences très sévères et quelque soit le lieu d’élection.
CONCLUSIONS GENERALES
Les conditions d’utilisation des deux vaccins antipéripneumoniques sont
*
différentes.
Bien que l’ovo-vaccin lyophilisé présente d’incontestables avantages
(longue durée de conservation, pouvoir immunigène connu) les services utilisateurs
n’ont pas voulu, en général, rompre brutalement avec le vaccin culture en bouillon
cœur-sérum. Celui-ci a incontestablement fait ses preuves et a encore la confiance
des éleveurs.
’ e
La vulgarisation de l’ovo-vaccin est conduite avec prudence et débute par
l’immunisation des effectifs indemnes en secteur vierge de l’affection. Les animaux
vaccinés dans de telles conditions traversent sans danger les zones infectées sans
*
contracter la maladie.
Praticiens et éleveurs étant d’accord pour reconnaître
I
l’efficacité et l’innocuité de l’ovo-vaccin injecté par voie intradermique, il est à
prévoir que, dans l’état actuel de nos connaissances, ce procédé de vaccination rem-
placera de plus en plus le vaccin culture en bouillon cœur-sérum. D’après nos
expériences, il ne mériterait pas les réserves faites à son sujet par certains auteurs
quant à la possibilité d’un retour à l’état de virulence de la souche vaccinale.
11 convient de rappeler, enfin, que le recherché de toute prophylaxie médicale
est l’éradication de la maladie. La seule vaccination ne saurait y suffire, quelque
soit la valeur du vaccin utilisé. 11 est toujours préconisé de lui associer de sévères
mesures de police sanitaire prévoyant l’abattage des malades. Le Novarsenobenzol,
grâce à ses propriétés thérapeutiques, peut permettre la remise en état des animaux
cliniquement atteints avant leur abattage et leur mise en consommation.
PROPHYLAXIS OF CONTAGIOUS BOVINE PLEUROPNEUMONIA
IN FRENCH SPEAKING M’EST AFRICA BY THE USE OF
AVIANISED CULTURE VACCINE (OVO-VACCINE)
AUTHOR’S CONCLUSIONS
The conditions indicated for the use of the two types of pleuropneumonia
vaccines are different.
While the lyophilised ovo-vaccine provides incontestable advantages such as
duration of viability and known immunogenic property, those who use the vaccine
(e.g. Veterinary Services) have in general not been anxious to break suddenly from
the use of the broth-culture vaccine. This latter has been proved efficacious and is
still accepted with confidence by stock-owners.
The increasing usage of ovo-vaccine is conducted with prudence, and is begun
by its use on the in-contacts on the edge of the focus of infections. Animais thus
vaccinated cari traverse the infected area, without danger of contracting the disease.
As the vaccinators and stock-owners become convinced of the efficacy and innocuity
of ovo-vaccine injected intradermally, the change-over
from broth-vaccine should
L. ----:,-..-A

From our experimental work there is no justification for the reservation by some
authors on the score that this vaccine strain cari regain its virulence.
It is appropriate to recall that the abject of research in a11 preventive medicine
is eradication
of the disease. Vaccination alone is inadequate whatever the value
of the vaccine used. It should always be accompanied by policies of other control
measures including slaughter. Novarsenobenzol, due to its curative properties cari
bring clinically infected animals back to health before final slaughter for food.