INSTITUT SENEGALAIS DE RECHERCHES DEPARTEMENT DE...
INSTITUT SENEGALAIS DE RECHERCHES
DEPARTEMENT DE RECHERCHES
AGRICOLES (I.S.R.A.)
SUR LA SANTE ET
LES PRODUCTIONS ANIMALES
LABORATOIRE NATIONAL DE L’ELEVAGE
ET DE RECHERCHES VETERINAIRES
BP 2057 DAKAR-HANN
LA GESTION DES PARCOIJRS DE L’AIRE
D’INFLUENCE DU FORAGE DE TATKI:
RELATIONS ENTRE DONNEES DE VEGETATION,
TAUX D’EXPLOITATION ET TRANSHUMANCE.
Par
Dr Amadou I’amsir DIUP - Vétérinaire Agropastoraliste
CONVENTION FAO/ISRA
REF. N“OS/AGROSTO
CM 10/17 ” EP/SEN/OOl
JANVIER 1991

:. +
AVANT PROPOS
Ce rapport est le deuxième d’une étude financée par la FAO et menée dans la Zone
Sylvopastorale du Sénégal par I’ISRA.
Nous tenons à remercier le Département des Pâturages (AGPC) notamment Mr.
Fernand0 RIVEROS pour l’intérêt qu’il porte à ce travail.
Nos remerciements vont aussi aux autorités de 1’ISRA pour nous avoir confié ce travail
et à tous ceux qui nous ont aidé à l’exécuter. Parmi ceux là, nous citerons notamment les
autorités et le personnel du Service de 1’Elevage à Dakar, Saint Louis, Podor et Tatki.
Toute notre reconnaissance B nos collégues du LNERV (Laboratoire National de
1’Elevage et de Recherches Vétérinaires) et du CSE (Centre de Suivi Ecologique) qui ont bien
voulu relire le manuscrit.
Nos remerciements vont aussi au DSA (Département des Systèmes Agraires) du
CIRAD (Centre de Coopération Internationale en RecherchtiAgronomiques pour le Dévelop-
pement) (France) pour nous avoir fourni gracieusement un logiciel (LISA) qui nous a été trés
utile pour le traitement des données.

-
S
O
M
M
A
I
R
E
-
1. INTRODUCTION
2. GENERALITES SUR L’AIRE D’INFLUENCE DU FORAGE DE TATKI
3. MATERIELS ET METHODES
3.1. Suivi du disponible fourrager herbacé
3.2. Suivi du fonctionnement du forage
3.3. Suivi des mouvements de transhumance
4. RESULTATS ET DISCUSSIONS
4.1. Evolution du disponible fourrager et calcul du taux d’exploitation
4.2. Exploitation des ressources fourragères et fonctionnement du forage
4.3. Transhumance des Cleveurs de Tatki
4.4. Transhumance des éleveurs des autres forages en direction de Tatki
4.5. Relation entre disponibilités fourragères, exploitation des ressources fourragères et
mouvements detranshumance
5. CONCLUSIONS
6. BIBLIOGRAPHIE

1
1. INTRODUCTION
Durant les décennies précédentes, il a beaucoup eté question de sédentarisation de
1 ‘éleveur en Zone Sylvopastorale du Sénégal. La mémoire des «experts» n’avait pas retenu les
années antérieures également difficiles ( sécheresse, éloignement des points d’eau, maladies..)
qui ont fait que l’éleveur ait maintenu certaines stratégies parmi lesquelles la transhumance (1)
pour exploiter au mieux les parcours de cette zone et avoir une meilleure productivité de son
cheptel.
Les conditions d’élevage difficiles des deux dernières décennies (dcheresses persistan-
tes entres autres) a donc rappelé la fragilité des écosystèmes pastoraux sahéliens et la grande
variabilité des ressources naturelles notamment fourragères qui ne pouvaient ainsi être
exploitées que dans le cadre d’un système d’élevage extensif.
La transhumance semble donc de façon globale, être une stratégie tres adaptée à cette
grande variabilité des ressources pastorales. Toutefois, ses conséquences écologiques multi-
ples (surpâturage des zones pourvues en herbe, diffusion de certaines maladies) et socio-
économiques (conflits entre pasteurs résidants et transhumants, entre pasteurs et agriculteurs,
deséquilibre dans l’utilisation des infrastructures hydrauliques, scolaires et sanitaires) font
qu’il est nécessaire de mieux la connaître afin de l’organiser.
Ce présent travail est une introduction à cette tentative d’une meilleure connaissance de
cette mobilité pastorale et de l’utilisation des parcours en saison séche. Nous avons donc tenté
d’une part d’étudier l’évolution du taux d’exploitation des parcours en fonction des données
de végétation (composition floristique et biomasse), du type de sol selon la classification des
éleveurs, de la distance du site au forage et du fonctionnement de celui-ci et d’autre part, de
voir l’influence des parcours sur les déplacements des éleveurs,
Le document comprend des généralités sur l’aire d’influente du forage de Tatki, une
définition de l’approche méthodologique, et une discussion des résultats obtenus.
2. GENERALITES SUR L’AIRE D’INFLUENCE DU FORAGE DE TATKI
L’aire d’influente d’un forage est la zone délimitée par l’ensemble des campements
dont les animaux viennent s’abreuver au niveau de ce forage. Celle de Tatki est comprise entre
les latitudes 16 4’- 16 18”N et les longitudes 15 4’-15 27”W et couvre une superficie de
69.000 ha (figure 1).
.
(1) Le terme de mobilité pastorale serait plus approprié car la nature des mouvements, comme on le verra plus
loin, ne rtpondpas toujours à la définition de «transhumance» Selon BrCmaud (1977)Tcelle-ci est un ensemble
de mouvements saisonniers,rythmiques, de caractère cyclique intéressant la totalité ou une partie du troupeau qui
l’effectue à l’intérieur de parcours coutumiers!’

2
Figure 1 .Situation géographique de l’aire d’inj7uence du forage de Tatki (DIOPJ989).
i.
MAURI~ANl,E
Elle fait partie de la zone sahelienne du Sénégal et appartient au vaste ensemble
écologique dénomme Ferlo ou Zone Sylvopastorale. La saison des pluies y dure environ trois
mois (juin-juillet à octobre); de 1970 à 1985, la hauteur d’eau moyenne enregistrée est de
216+97 mm.
Dans l’ensemble, deux grands types de sois peuvent y être distingués: les sols à relief
plat correspondant aux sommets de dunes peu accusés sableux à sableux-argileux et, les sols
de pénéplaine basse avec bas fonds sablo-argileux à argileux .
Selon la classification des eleveurs (GROSMAIRE, 1954; NAEGELE, 1972; BAR-
RAL, 1982; DIOP, 1989), les premiers types de sols sont appelés séno. Ils se caractérisent par
une végétation ligneuse peu fournie avec présence de Sclerocarya birrea et Commiphora
africana et l’eau y est rare.
En plus de leur texture nettement plus argileuse, les sols de bardiol se reconnaissent par
rapport au séno, par leur couleur plus foncée ou rougeâtre, par la présence de mares et de
termitières, par une végétation plus dense et composée d’essences comme Grewia bicolor,
.
Guiera senegalensis, Dalbergia melanoxylon et Capparis tomentosa.
‘Une Pitude antérieure (DIOP, op.cit) indique qu’en 1985 la végétation ligneuse est
.
représentée notamment par Boscia senegalensis (62%), Balanites aegyptiaca (21%) et
Calotropis procera (12%).
De 1972 à 1982, les herbacées sont dominées par Dactyloctenium aegyptium, Cenchrus
biflorus, Schoenefeldia gracilis (VALENZA, 1984). En 1985, DIOP (1989) indique la prédo-
minance d’Eragrostis tremula, Tribulus terrestris et Aristida mutabilis et une biomasse qui a
varie, de 1970 à cette date, de moins de 100 kg de MS/ha à plus de 1500 kg de MS/ha.

3
A
._

Cette variation de biomasse, comme d’ailleurs pour la composition floristique, est liée
surtout à la pluviométie (PENNING DE WRIES et DJITEYE, 1982).
Les mares sont les sources d’approvisionneme.nt en eau des personnes et du cheptel en
hivernage tandis qu’en saison séche, les ouvrages hydrauliques artificiels notamment le
forage, prennent le relais.
Les données de campagnes devaccination (2) indiquent qu’entre 1978 et 1986, la
moyenne annuelle de l’effectif du cheptel est de 9 300 bovins, 12 200 ovins, 6 100 caprins, 140
équins, 521 asins et 112 camelins soit un total de 10 738 UBT.
Les bovins vont aux pâturages ou aux sources d’abreuvement (forage et mares) sans
berger tandis que les petits ruminants sont gardés.
En saison des pluies, l’éleveur occupe son campement d’hivernage ou rumano. Mais dés
la fin de cette période, il peut se déplacer avec son cheptel. Il occupe alors un campement de
saison sèche ou sédano.
L’aire pastorale de Tatki compte 29 localités (3), 92 campements et une population de
2957 habitants (Figure 2). Les peulsreprésentent l’ethnie la plus importante (82 %) et l’élevage
est l’activid dominante.
Figure 2. Les campements de l’aire dinfi7uence du forage de Tatki (DIOP, 1989).
Nom de campement
L
Nom de lwdid
5
(2) Le comptage au forage donne une situation ponctuelle de l’effectif du cheptel prksent dans l’aire de ce forage
(charge animale) d’oh l’utilisation des données de campagnes de vaccination rdajustks.
(3)EnZoneSylvopastorale,nousdéfinirons 1alocalitCconlmeur~eaireg~graphiqueregroupantdescampements
et pxtant un nom.

3. MATERIEL ET METHODE.
3.1. Suivi du disponible fourrager herbacé et détermination du taux
d’exploitation
Les sites d’échantillonnage de la végétation herbacée sont au nombre de 35 (figure 3).
Leur choix a été fait en fonction du type de parcours (séno ou bardiol) et de la distance au
forage. La carte utilisée pour leur matérialisation a été élaborée a partir d’une esquisse
pédologique et des données de végétation tirées dune étude précédente sur la zone (DIOP,1989).
Sur le terrain, les sites ont été choisis en fonction de leur accessibilité. Nous les avons
donc placés à partir de pistes ou de pare-feux fréquentés (4) et au niveau de chacun d’eux
procédé au marquage d’un certain nombre d’arbres .
Figure 3. Les sites d’échantillonnage de la végétation herbacée.
L.EGENDE
- - - Limite de l’aire
.,........ . . .
Pare-feux
024 Site d’échantillonnage
lIIzrl
Zone de bséno
/Ta
Zone de bardiol
*
Forage
(4j Le manque d’entretien des pare- fe&ait que la plupart d’entre eux ne sont plus praticables même si on peut
toujours les rép&er sur photos aériennes.

5
.
c
Le premier inventaire est fait à la fin de la saison des pluies (en début octobre). Au niveau
de chaque site, les espèces les plus représentées sont notées en abondance - dominante. De
même, trente prélèvements de biomasse sont faits avec un carré de lm de coté.
Les relevés de biomasse sont renouvelés mensuellement au niveau des mêmes sites de
novembre à juillet (la première grande pluie de la zone est tombée au moment même où se
déroulait cette dernière collecte).
La relation suivante permet de calculer le taux d’évolution (TEv) au niveau d’un site:
TEv= lOO*(Bm - Bmt) / Bm
Bm = biomasse de fin de saison des pluies (octobre)
Bmt= biomasse déterminée à un temps t
La consommation du cheptel (TE= taux d’exploitation) et les pertes (par suite de
dégradation naturelle, de l’utilisation par les animaux et de prélèvement par les insectes, etc..)
constituent les principaux facteurs d’évolution de la biomasse. Nous pouvons donc écrire:
TEv= TE + TP
Au niveau des parcours sahéliens, les pertes représentent les 2/3 du disponible fourrager
de début de saison sèche (TOUTAIN et LHOSTE, 1978). En considérant ces pertes identiques
pour tous les sites , la comparaison du taux d’exploitation entre site peut être limitée à celle du
taux d’évolution.
3.2. Suivi du fonctionnement du forage
Comme pour tous les ouvrages hydrauliques motorisés de la Zone Sylvopastorale, la
personne étant chargée du suivi du fonctionnement du forage, enregistre le nombre journalier
d’heures de marche, les quantités de gas-oil consommées et les entretiens effectués. Le suivi
des heures de pompage est fait à partir de ces relevés.
3.3. Suivi des mouvements de transhumance
Durant toute la période de l’étude, les mouvements de transhumance des éleveurs de
l’aire sont notés mensuellement de même que l’arrivée dans la zone des éleveurs des autres
forages.
3.4. Traitement des données
Nous avons regroupé les localités de l’aire en sept secteurs (tableau 1) englobant ainsi
les différents sites (tableau 2). Ces secteurs ont été dénommés en fonction de leur situation
géographique par rapport au forage.

_-_- --__ -. .-. -
- --
6
Tableau 1. Définition des différents secteurs de l’aire d’influente du forage de Tatki
Localités
Secteur
l
superficie (ha)
I 1. Yilo - Lodé -Fété Doundou et Léré
Sud
l
2. Solbadé - Fété Ery - Fété Laobé -
Soucoundou Séno et Rigandé
Sud-Est
13 828
3. Diardé Thioyel -Diardé Koyel - Fété Olé -
Hamed Doulo -Pounédji et Thioukouguel
Nord-Est
4. Bélel Ndiawdy -Boumodi Tétiane -
Boumodi et Diaketé Kodioli
Nord
7 128
5. Asdé Kodioli Uryel -B&el Agabé et Afo
Nord-Ouest
6 135
6. Diamdiayré et Dounoubé
Ouest
9 213
7. Tatki (*)
C e n t r e
3 782
(*) = habitations au niveau du forage et campements aux alentours
Tableau 2. Répartition des sites selon Les diJjrrents secteurs
Secteurs
Sites
Sud
21- 22 - 23 - 24 - 25 - 26
Sud Est
18 - 19 - 20
Nord-Est
2 - 3 - 10 - 11 - 12 - 13 - 14 - 15 - 16
Nord
4 - 5 - 6 - 7
Nord-Ouest
29
Ouest
30 - 31 - 33 - 34
Centre (*)
1 - 8 - 9 - 17 - 27 - 28 -
32 - 35
(*) = sites à moins de 5 km du forage
Le logiciel LISA (Logiciel Intégré des Systèmes Agraires) développé par le DSA du
CIRAD à Montpellier a été utilisé pour le traitement des données.

7
4. RESULTATS ET DISCUSSIONS
4.1. Evolution du taux d’exploitation des parcours
Les espèces herbacées les plus fréquentes à Tatki (tableau 3), sont 9 la fin de la saison
des pluies 1989,Schoenefeldia gracilis Kunth Poaceae (26,7 %), Aristida mutabilis Trin. et
Rupr. Poaceae (23%), Eragrostis tremula Horst. Ex Steud Poaceae (12,3 Yo), Zornia
glochidiata Reichb. Ex DC. Fabaceae (9,l %), Alysicarpus ovalifolius (Schum. et Thonn) J.
Leonard Fabaceae (6,2 %), Dactyloctenium aegyptium (L.) D. de B. Poaceae (4 %), Tephro-
siapurpurea (Le) Pers. Fabaceae (1,9 70) et Cenchrus bij2oru.s Roxb Poaceae (1,7 VO) (tableau
3).

8
Tableau 3. Biomasse, composition floristique et taux d’exploitation des di&Wents secteurs
de L’aire d’injluence du forage de Tatki.
Sch Ari Cen Era Dac Aly Zor Tep
15 0 0 0 0
50 30 10 5 0 0 0 0
45 45 0 0 0 0 0 0
080 0 00 0 00
010 0 0 0
010 5 0 0
0 10 0 30 0 0
0 0 30 0 0
0 60 0 10 0 0
80 0
0. 0 0 0 0 0
10 60 0 0 0
20 60
0
0 0
0
0 0
020 0 0 0
0
80 20
0
0 0
5
60 10
5
0 0
0 20 0 0 0 0
0
15 0 10
0 20
010 0 00
0 80 0
0 0 20 30 0
010 0 0 0
15 0 0 0 0
0 20 0 0 0 0
0 0 20 20 0
0 0 10 20 0
0 40 0 20 20 10
s
- type de sol (1 =séno; 2=bardiol; 3==sé’nohardiol)
D
= distance au forage (km)
B= biomasse (kg M~[N?
TE
- taux d’exploitation (%)
b= site ayant brûlé
Sd1
= Schoenefeldia gracilis
Ari= Aristida mutabilis
Cen = Cenchrus biforus
Era= Eragrostis tremula
Dac = Dactyloctenium aegyptium
Aly= Aiysicarpus ovalifolius
Zor = Zornia glochidiata
Tep= Tephrosia purpurea

La biomasse a été en moyenne de 330 kg de MS/ha avec un maximun 560 kg de MS/
ha (site 35) et un minimum de 170 kg de MS/ha (site 9). Le taux d’exploitation est en moyenne
de 67,2 % au mois de juin et de 77,6 % en juillet. Il a varié entre 27 et 100 % pour les deux
périodes.
Comme indiqué précédemment, si on considere qu’en zone d’blevage extensif du Sahel,
les animaux utilisent le 1/3 du disponible fourrager, la charge animale au niveau de l’aire
d’influente du forage de Tatki durant la saison sèche 1989-90, aura eté de 3551 UBT/j, soit 1
UBT/19ha.
Par rapport aux effectifs de cheptel fournis precédemment (10738 UBT) et au comptage
effectué en juillet (8531 UBT), cette valeur serait plus faible. Ceci serait certainement dû au
fait que nous n’avons pas tenu compte au départ de la paille de l’année précédente.
En réalité, même si cette paille n’est pas appétée en début de saison sèche, au fur et à
mesure que les parcours se raréfient, les animaux ont tendance à tout consommer. A cette
biomasse herbacée résiduelle, il faudra aussi y ajouter celle issue des ligneux. La proportion
de cette strate dans l’alimentation des bovins par exemple peut varier de 10 à plus de 40%
(SHARMAN et GNING, 1983).
Le taux d’exploitation en juin supérieur àcelui de juillet au niveau du site 29, serait aussi
dû à cette paille de l’année précédente. En effet, la distinction entre les pailles des deux années
devenait de plus en plus difficile au fur et à mesure que l’on s’approchait de la fin de la saison
sèche.
Le tableau 4 indique les relations entre le taux d’exploitation et différents paramètres.
Les analyses sont limitées au mois de juin et juillet du fait que les données fournies par l’agent
de 1’Elevage pour la période allant de novembre à mai ne nous ont pas paru satisfaisantes. De
même, les sites 4,5 et 14 n’ont pas été pris en compte du fait qu’ils ont été brûlés par les feux
de brousse dès novembre.
On se rend compte que c’est notamment avec la distance au forage que le taux
d’exploitation a une relation significative. L’effet «abreuvement» semble donc être prépondb
rant sur les autres paramètres et il l’est d’autant plus que la saison sèche avance.
L’état physique de la plante ne semble pas aussi affecter le taux d’exploitation en juin
et juillet, La classification en Graminées fines (A&ida mutabilis et Eragrostis tremula) et
grossières (les autres ) a été basée sur les appréciations des eleveurs. D’autre types de
classification sont données par la littérature (ANONYME, 1982 et GUÉRIN, 1987).
Le niveau de biomasse ne semble pas avoir d’influente sur le taux d’exploitation. Il en
est de même de l’espèce végétale où notre analyse a porte sur Schoenefeldia grucilis du fait
qu’elle est la mieux représentée.
Donc si au début de la saison sèche, l’éleveur choisit le type de parcours et l’animal
sélectionne les espèces à brouter, au fur et à mesure de l’avancée de la saison sèche, on assiste
à une disparition progressive et totale de tout ce qui est paille.

10
1
L’augmentation du taux de Graminées semble cependant entraîner une baisse du TE
ta.ndis que le pourcentage de Légumineuses le ferait augmenter. Nous pensons que ceci ne
serait pas dû uniquement au fait que les feuilles de ces dernières tombent plus facilement. En
effet, cette chute ne peut pas être considérée comme une perte totale de matière sèche du fait
que les petits ruminants peuvent les ramasser (GUERIN ~ DIDIER
, FRIOT
, ..~ 1985).
Tableau 4. Relation entre le taux d’exploitation des parcours et différents paramètres
T.E. (juin) = - 2,O distance + 87,8
T.E (juil) = - 3,8 distance + 107,6
T.E.Cjuin) = - 0,4 biomasse + 81,8
T.E.(iuil ) = - 0,6 E-l biom + 79,9
T.E.(juin) = - O,l.E-1 Gram + 68,l
T.E.(juil) = - 0,3 Graminée i- 101,l
T.E.(juin) = - 0,4.E-1 Légu -+ 66,5
T.E.(juil) = + 0,4 Légumine + 70,l
T.E.(juin) = 0,3 Lég/Gram c 67
T.E.(juil) = + 4,4 Lég/Gram + 74,8
T.E.(juin) = - 0,6.E-2 Scho + 67,4
T.E.(juil) = - 0,2 Gramfine + 84,l
T.E.(juil) = - 0,3 Gramgros c 87
T.E.Cjuil) = - 0,2 Schoenef + 83,8
biom= biomasse:
Gram= Graminées;
Légu= Légumine= Lkg= Légumineuses
Gramfïne= Graminees fines ; Gramgros= Graminees grossières
Schoenef= Schoenefeldia gracilis
S= significatif à 0,05; NS= non significatif à 0,05
Contrairement à ce qui a été signalé par les eleveurs (DIOP,l989), les parcours de
séno seraient plus exploités que ceux du bardiol (tableau 5).

-.---- _- .-._.- ----. .---
11
Tableau 4. Evolution du taux d’exploitation selon le type de parcours
Y
Type de
Taux d’exploitation( 3
parcours
N
Biomasse
Jum
Jmllet
crrp fis /mg
Séno
13
35,8k7,4
68,1$19,3
81,5~16,3
Bardiol
17
33,629,3
68,6221,3
74,2224,1
Sénobardiol:
2
34 ‘2
50 211
80,5&19,5
4.2. Exploitation des ressources fourragères et fonctionnement du forage
Le forage de Tatki a fonctionné .pendant la saison sèche 1989-1990 pour une durée de 1199
h (figure 4).
figure 4. Evolution du nombre d’heures de fonctionnement du forage de Tatki
1400 Heure 00
1200
0

I
#
4
e-1
0
Nov. 89 Déc. Janv. 90 EV. Mars Avril Mai
Juin Juil.
Mois
-
-~
Le taux d’exploitation des parcours par heure de fonctionnement du forage durant la
saison sèche 1989-90 est donc égal à 0,065% . Même si pour les raisons évoquées précédem-
ment, nous n’avons pas pu déterminer mensuellement ce facteur, nous pouvons nous rendre
compte qu’il est fort possible de suivre le taux d’évolution des parcours d’une aire d’influente
d’un forage à partir du nombre d’heures de pompage de ce forage.
4.3. Transhumance des éleveurs de Tatki
Pour la saison sèche 1989-90, sur 285 gaflédji recensés dans l’aire d’influente du forage
de Tatki la moitié ont quitté leur rumano (campement d’hivernage) avant fin décembre
(figure 5).

12
Figure 5 : Importance des mouvements de transhumance
àes éleveurs de Tatki selon la période de l’année
N
Parmi les éleveurs transhumants, 39,5% sont restés dans la Zone de Tatki (figure 6).
165% sont allés au Walo, 33% au niveau des autres forages (les plus fréquentes ont été Widou
Tiengoli, Ganina, Mbiddi et Tessékr~ et 11% sont partis pour des zones nettement plus
éloignées notamment dans la région du Sine Saloum.
Figure 6. Importance des mouvements de transhumance des éleveurs de Tatki en direction
des diférentes zones.
Tatki 39.5 %
Walo 16.5
.tres zones 11%
.
Autres forages 33 %
En considérant Pe disponible fourrager au moment du départ des éleveurs, on pourrait
dire que parmi les motifs de transhumance, des facteurs autres que la quantid de biomasse
interviennent largement. Comme signal& par KANE et a1 (1984), la transhumance vers des
localitks éloigkes ne serait donc pas exceptionnelle,

13
,t,‘q:;
Le déplacement vers le Walo est estimé à 16,5%. Comparé aux 3% donnés par Barrai
(1982) pour cette partie de la Zone S ylvopastorale, il est relativement important. Cet accroisse-
ment des mouvements en direction du Fleuve Sénégal est probablement un effet de l’»Aprés-
Barrage»(7).
Parmi les transhumants de Tatki, 78% se sont déplacés avec toute leur famille. Le taux
d’occupation des rumano est donc égal à 53,3 %. Le gall& qui transhume avec l’ensemble du
cheptel bovin et de petits ruminants serait le mode de transhumance le plus courant (70%).
Les éleveurs qui transhument uniquement avec leurs petits ruminants sont cependant
assez nombreux (25%). Les moutons notamment semblent faire l’objet d’une attention
particulikre avec l’augmentation de leur prix sur le marché national et l’éleveur n’hésite pas
à se déplacer pour leur trouver du bon pâturage (les zones avec Zornia glochidiata ou boisées
nous ont ét6 signalées par les éleveurs).
Les membres des galkkdji en transhumance se sont en majorité d6placés ensemble avec
leur troupeau dans un sens unique (transhumance unidirectionnelle); 5% se sont cependant
scindés pour aller dans des zones différentes (tableau 6).
Tableau 6. Importance de l’ejjfectifdes ranshumants selon la fraction de famille et le
nombre de direction
Famille
Nombre de direction
Effectif
Partie
I Partie
2
l
~
4.4. Transhumance des éleveurs des autres forages en direction de Tatki
Nous avons enregistré 8 1 éleveurs des autres forages venus en transhumance dans l’aire
d’influente de Tatki. Les secteurs Sud, Sud-Est et Ouest ont accueilli la presque totalité de ces
éleveurs (95,5%) (figure 7).
P
(7) La mise en service du barrage de Diama sur le Fleuve Sénégal est à l’origine d’une augmentation des activités
agricoles dans la région de la vall6e; les éleveurs seraient peut être tentés de renouer avec une pratique de
transhumance vers le Nord comme avant l’implantation desforages.

Figure 1: Importance des mouvements de transhu.mance des
éleveurs des autres forages en direction des di@+ents
secteurs de l’aire d’influente du forage de Tatki.
Sud
44%
Centre
1%
Les éleveurs sont arrivés pour la plupart entre Février et Avril 1990 (Figure 8). Ils ont
donc quitté leur rumano plus tard que les éleveurs de Tatki ou bien ils ont séjournés auparavent
dans d’autres zones. Les 3/4 viennent des forages alentours (Bélel Bogal, Niassanté et Widou
Tiengoli (tableau 7).
Figure 8 : Importance des mouvements de transhumance
des éleveurs des autres forages en direction de
l’aire d’injluence de Tatki selon la période.
Février
41%
Avril
26%

-
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Tableau 7. Importance des é’leYeurs tfanshurnants selon leurs provenances.
I PROVENANCE
EFFECTIFS
PROVENANCE
EFFECTIFS
I
I
l Bélel Bogal
3%
Binguel Séno
4%
I
l
I Niassanté
25%
3%
I
l
Mbaye Awa
I
l
Widou Tiengoli
19.5%
Ganina
3%
I
I Bouteyni
5.5%
I
I
Souylène
I Autres*
l
6%
I
(*) Amali, Thiangaye, Thillé Boubacar, Sine Saloum
705% sont venus à Tatki avec leurs bovins et petits ruminants (tableau 7) mais
contrairement aux éleveurs résidants ti Tatki, ceux qui sont venus uniquement avec leurs
bovins sont relativement plus nombreux que ceux accompagnés seulement de letis petits
ruminants.
Tableau 8. Importance des éleveurs étrangers transhumants selon les espèces animales
conduites
ESPECES
EFFECTIFS
Bv.Pr.
70.5 %
Bv.
16 %
Pr.
13.5 %
Bv= Bovins
Pr = Petits ruminants
4.5. Relation entre disponibilités fourrag&res, exploitation des parcours et
mouvements de transhumance
La figure 9 représente simultanément les caractéristiques des parcours, le taux d’exploi-
tation et la situation de transhumance. Sur la base de ces éléments, les différents secteurs de
l’aire pastorale peuvent être regroupés comme suit: Sud et Ouest, Sud-Est et Nord-Ouest, Nord
et Nord-Est et Centre.
Pour le secteur Sud-Est cependant, le taux d’exploitation élevé aurait pu faire penser à.
une situation de transhumance favorable (départ des éleveurs locaux en transhumance faible
et forte arrivée de transhumants étrangers). Parmi les explications qui peuvent être fournies,
nous indiquons l’importance des troupeaux présents dans la zone, le nombre de petits
ruminants qui les composent ou un mauvais suivi des éleveurs qui en réalité transitent pour aller
vers d’autres zones.

16
., .._~
., ‘.‘ /, :
Le même constat peut aussi être fait pour le secteur Ouest qui semble avoir un taux
d’exploitation un peu plus faible compare à la situation de transhumance.
Pour le secteur Centre, l’effet «abreuvement» permet de comprendre que le taux
d’exploitation soit élevé en dépit du fait que peu d’éleveurs y résidaient.
/Figure 9. Ressources fourragères, taux d’exploitation et situation de transhumance
au niveau des différents secteurs de l’aire pastorale de Tatki.
84%
15%
13%
39 *
*
30%
I*
** 50%
.+*
53%
**
**.+
k.li
3%, 7%
90%
39%
60%
l3 m
o73
89%
28 *&**
60%
*-
35%
*
*
A*
0
6
o%s
B
CF
TE
JZI-E RT
*B
= biomasse d’octobre (fin de saison des pluies) (g MS/ha)
“R
= biomasse d’octobre (fii de saison des pluies) (g MS/ha)
‘CF
= composition floristique (B Graminée ; (1 : Légumineuse)
*TE = taux d’exploitation en juillet (fin de saison sèche
*ETE = effectif des transhumants itrangers (%)
*RT
= rapport di: transhumance(non transhumant/transhumant)

_-- . .
___- -.---~C-.--
17
5. CONCLUSION
Nous avons essayé dans le cadre de cette présente étude de mettre en évidence des
relations entre le taux d’exploitation des parcours et les caractéristiques de la végétation
herbacée d’une part, entre le taux à’exploitation et le fonctionnement du forage d’autre part et
enfin entre la mobilité pastorale et certains paramètres du milieu.
Les observations n’ont duré qu’une saison sèche avec des moyens humains et logisti-
ques tres limités. Par conséquent, les résu1tat.s qui en sont issus sont localisés dans le temps et
au niveau d’un seul forage et ne pourront pas pour 1”instant servir de modèles.
Nous pensons cependant que l’application d’une telle méthodologie avec un certain
nombre de répétitions permettra la mise en forme Se modèles élaborés.
La prévision du mode de gestion des ressources fourragères dans la Zone Sylvopasto-
rale du Sénégal pourrait aussi être envisagée à long terme. Ainsi, il sera possible aux Services
de développement qui y évoluent d’adapter leurs stratégies d’encadrement.
6. BIBLIOGRAPHIE
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