Hull. Org. mond. Santé 1961. 25, 581-588 ...
Hull. Org. mond. Santé
1961. 25, 581-588
Bull. Wld Hlth 0%.
Un nouveau molluscicide, le diméthyldithiocarbamate
de zinc (zirame)
S. GRETILLAT 1
Des essais jaits au laboratoire et sur le terrain, psouvent l’action molluscicide d’un
! ’
produit chimique de synthèse, le diméthyldithiocarbamate de zinc, ou zirame.
Non toxique pour l’homme et les animaux domestiques, il tue Biomphalaria pfeifferi
gaudi, Bulinus guernei, Bulinus senegalensis et Lymnaea caillaudi, à la concentration de
I
1 p.p.m.
II agit JJJêJllC en milieu chargé en matières organiques. Très diffusible, il n’exige aucun
faucardage préalable dans les gîtes encombrés de plantes aquatiques.
A la dose de 10 p.p.m., des tests de rémanente contrôlée montrent que, 30 jours après
l’épandage, le milieu n’est plus viable pour les mollusques, qui sont tués après 48 heure.~
de contact.

Propriété interessante à signaler, le diméthyldithiocarbamate de zinc est toxique pour
les larves de Culex fatigans et d’Anopheles SP., aux doses active.~ contre les mollusques
d’eau douce.
I N T R O D U C T I O N
sur son emploi éventuel dans la lutte contre les mol-
lusques d’eau douce.
Un programme de prophylaxie antibilharzienne
Depuis ce travail, et à notre connaissance, les
devant être mis sur pied au Sénégal, des essais au
seuls essais réalisés sur les propriétés molluscicides
laboratoire et sur le terrain ont été réalisés avec dif-
de ce produit sont ceux de Paulini, Chaia & de
férents produits molluscicides parmi lesquels le
Freitas, au Brésil.2
diméthyldithiocarbamate de zinc. Ce sont les résul-
Ces auteurs ont employé des comprimés et une
tats obtenus avec ce composé chimique qui font
poudre renfermant 50% de diméthyldithiocarbamate
l’objet du présent article.
de zinc et 50 % de carbonate de calcium, commercia-
L!‘action oligodynamique du zinc sur les mol-
lisés par la C.Q.R.B. sous le nom de R.
‘us&~es d’eau douce a été signalée par Deschiens &
Les essais au laboratoire et sur le terrain ont mon-
llolinari (1957), pour l’oxyde de zinc. La grenaille
tré que ce mélange est actif à 100% contre Austral-
de zinc, est, elle aussi, molluscicide (Deschiens &
orbis glabratus à des doses de 5 p.p.m. en 24 heures
Molinari, 1957; Deschiens, Molinari & Bertrand,
de contact.
1957).
Le produit que nous avons expérimenté se présente
Nolan & Bond (1955), au cours d’essais faits en
sous la forme d’une poudre micronisée, dont 100%
laboratoire sur l’activité antimollusque de différents
des particules sont d’un diamètre inférieur à 40 CL,
produits chimiques, signalent que le diméthyldithio-
parmi lesquelles 90% ont un diamètre inférieur à
carbamate de zinc tue Australorbis glabratus (Say),
10 p> ce conditionnement étant spécialement étudié
après 24 heures de contact, à des concentrations de
pour être employé sous forme de bouillie anticrypto-
1 à 1,5 partie par million (p.p.m.). Ces auteurs consi-
gamique, titre 90 % de diméthyldithiocarbamate de
dèrent ce dérivé organique du zinc comme un (( poten-
zinc. Faiblement soluble dans l’eau (65 mg/l), sa
tjal molluscicide )), mais ne donnent aucune précision
solubilité est cependant largement suffisante pour son
utilisation comme molluscicide, car les doses actives
1 Chef du Laboratoire d’Helminthologie, Laboratoire
national de Recherches vétérinaires de Dakar, République
-
-
=
du Sénégal.
9 Voir la note à la page 706 de ce numéro.
1066
- 581 --
-

582
s. GRETILLAT
se situent bien au-dessous de cette concentration.
TABLEAU 1
Ce dérivé organique du zinc, commercialisé par La
POURCENTAGES DE MORTALITÉ DE DIVERSES ESPECES
Société R. P. sous le nom de C., est utilisé à l’heure
DE MOLLUSQUES SOUMISES A L’ACTION DU ZIRAME
actuelle dans la lutte contre les cryptogames para-
A DIFFÉRENTES CONCENTRATIONS 0
sites des végétaux.
Concentration an zirame
E s p è c e
(p.p.m.)
,-- -...,. -...-.-( -_ ~- ..~
---.~_-
ESSAIS AU LABORATOIRE
0,5
/
1
/

2
,
3
5
:*
Matériel et techniques
Biomphalaria
j
I
/
Pour travailler sur un matériel homogène, les mol-
gm$ri
l
1
l
20
1
90
i 100
' 100
100
lusques avec lesquels sont faits les tests d’activité et
l
de rémanente sont choisis parmi des spécimens
I
Bulinos
j

j
adultes de 60 à 90 jours d’âge, élevés au laboratoire,
guernei
40
I
90
100
100
100
et appartenant aux espèces suivantes : Biomphalaria
-1.'
/
pfeifferi gaudi Ranson, Bulinus guernei Dautzemberg,
Eulinus
/
senegalensis
1
3 0
~
5 0
1 0 0
1 0 0
1 0 0
Bulinus scnegalensis Miiller, et Lynmaea raillaudi
Bourguignat.
Les essais ont été réalisés dans des aquariums de
Lymnaea
c a i l l a u d i
1
/

40
i
90
j 100
100
100
verre ne présentant aucune armature métallique,
d’une contenance totale de 6 1, remplis aux deux
a Température de l’eau: 24-25’ C; pH: 63; temps de contact:
24 h; réanimation: 60 h. Les chiffres représentent la moyenne
tiers (4 1) d’eau filtrée, provenant d’un gîte à
de quatre essais, pour chaque concentration.
planorbes et à limnées, proche du laboratoire, et
servant à nos élevages de mollusques.
Comme il s’agit ici de tests de comparaison, nous
Pendant toute la durée des expériences, l’eau des
pensons qu’il ne peut nous être reproché de n’avoir
aquariums est aérée par des oxygénateurs à bulles, et
pas suivi rigoureusement le protocole classique
les mollusques ont à leur disposition des feuilles de
d’expérimentation où le temps de contact est fixé à
laitue bouillie.
24 heures.
Trente mollusques de chaque espèce sont placés
Contre B. pfeifferi gaudi, B. guernei, B. senegalensis
dans chacun des aquariums contenant une solution
et Lyuwaca caillaudi, le zirame à la concentration
molluscicide de concentration déterminée. Au bout
de 24 heures de contact, ils sont retirés, mis a laver
TABLEAU 2
et à réanimer pendant 60 heures dans un aquarium
POURCENTAGES DE MORTALITÉ DE DIVERSES ESPECES
contenant de l’eau de gîte filtrée.
DE MOLLUSQUES SOUMISES A L’ACTION DE DIFFÉRENTS
C’est au bout de ce temps de réanimation que les
MOLLUSCICIDES fl
pourcentages de mortalité sont évalués pour chacune
des concentrations en produit actif.
cuivre
/ neutre de
Comme l’indique le tableau 1, des concentrations
E s p è c e
1 cuivre
0.5
de diméthyldithiocarbamate de zinc à 0.5 p.p.m. et
0,5
)
p.p.m.
,
p.op.tl.
(
p.$n.
p.p.m.
1 p.p.m. semblent être insuffisantes pour obtenir un
effet complet après 24 heures de contact.
Biomphalaria
j

;

I
pfeifferi
Le zirame agissant beaucoup plus lentement que
gaudi
/
100
1
70
8 0
43
les sels de cuivre solubles, tels que l’acétate neutre de
!
I
cuivre ou le sulfate de cuivre, nous avons, pour cette
Bulinus
guernei
i

100
/
70

80
26
raison, fait des essais avec un temps de contact plus
1

/
_ _ _ .I-----I-.-.-.i
long (48 heures), en comparant l’activité du dimé-
Bulinus
/
1
thyldithiocarbamate de zinc avec celles du sulfate de
senegalensis
j 100
i
60 80

:
40

cuivre, de l’acétate neutre de cuivre et d’un mollus-
cicide récent, le dichloro-5,2’ nitro-4’ salicylanilide
Lymnaea
ou Bayer 73. Le temps de contact étant de 48
caillaudi
;

100 1
100 100
:

55
heures, la concentration des solutions en produit
actif a été de 0,5 p.p.m. (tableau 2).
a Température de l’eau : 24-25’ C ; pH: 6,5 ; temps de cen-
.,
tact : 48 h. ; réanimation : 60 h.

LE ZIRAME, NOUVEAU MOLLUSCICIDE
583
TABLEAU
3
EFFET RÉMANENT DU ZIRAME SUR DEUX ESPÈCES DE MOLLUSQUES EN AQUARIUM ’
-
Mortalité (%)
Biomphalaria pfeifferi gaudi
Bulinus guernei
Zirame
(p.p.m.)
Durée (jours)
15
/
2 1
/
3 0
/
45 / 60
1 1 5
i
2 1
/
3 0
1 4 5
i 6 0
~.. _..~._~ .____ -__. _--.-.- ~~-~~ -----.
u Température de l’eau : 24-26” C ; pH : 6,4 ; temps de contact : 48 h : réanimation : 60 h.
de 0,s p.p.m. et avec un temps de contact de 48
L’examen du tableau 3 montre que la rémanente
heures, a une action létale supérieure à celle des sels
du produit tombe brusquement à 0 entre le 30e et le
solubles de cuivre ou du Bayer 73.
45c jour, que cela soit à 5 p.p.m. ou à 10 p.p.m. Nous
signalerons cependant que les mollusques ayant
Swvmptômes d’intoxication chez les mollusques
servi aux tests des 45e et 60e jours présentaient
Contrairement à ce qui se passe avec les sels de
tous des symptômes de subintoxication tels que:
cuivre solubles où les symptômes d’incoordination
faible adhérence du pied au substrat, signes de
motrice sont les plus marqués, le diméthyldithio-
fatigabilité, réflexes presque nuls aux excitations
carbamate de zinc à 1 p.p.m. provoque surtout
mécaniques.
des troubles où dominent des signes de fatigabilité
et une diminution des réflexes aux excitations
InJuence du pH de l’eau sur l’activité du zirame
mécaniques.
Testé sur B. pfeifferi gaudi, B. guernei et L. caillaudi
En ce qui concerne les voies de pénétration et le
placés dans une eau ayant un pH voisin de 8, le
mode d’action du zirame, il semble qu’il soit un peu
zirame a donné des résultats identiques à ceux enre-
trop tôt pour conclure. La voie digestive ne semble
gistrés dans des milieux ayant un pH légtrement
pas être la seule en cause, car chez les spécimens pla-
inférieur à la neutralité.
cés dans des solutions à 5 ou 10 p.p.m., les accidents
Si le diméthyldithiocarbamate de zinc est stable en
toxiques apparaissent dès que les mollusques sont en
milieu basique, il serait par contre tout à fait contre-
contact avec le milieu.
indiqué d’essayer de renforcer ou d’accélérer son
activité molluscicide en lui ajoutant du sulfate de
Pouvoir rémanent du zirame dans un milieu riche en
cuivre. Il y a en effet incompatibilité chimique entre
matières organiques
ces deux produits.
Afin de nous rendre compte dans quelle mesure ce
produit est susceptible d’être fixé par les matières
Action oligodynamique du zirame
organiques, nous avons fait quelques essais dans des
Nous avons essayé de savoir dans quelle mesure
aquariums dont le fond était recouvert d’une couche
l’ion zinc seul était capable d’intoxiquer et de tuer
de débris végétaux et d’excréments de mollusques sur
les mollusques.
une épaisseur de 2-3 cm (aquariums ayant servi
Pour cela nous avons placé des B. pfeifiri gaudi
pendant six mois à l’élevage des mollusques).
dans des solutions de sulfate de zinc de concentration
Les contrôles de rémanente sont faits à intervalles
croissante, et avons constaté qu’une solution à 20
réguliers avec 20 B. pfeifferi gaudi et 20 B. guernei
p.p.m. était nécessaire pour obtenir la mort de tous
laissés 48 heures en contact avec la solution à tester
les spécimens après 24 heures de contact.
puis mis à réanimer dans une eau de lavage pendant
Pour le zirame, il semble donc que le zinc n’est
60 heures.
pas le seul élément actif, ou que, peut-être, son
Avant chaque contrôle de rémanente les aqua-
association avec un radical organique favorise
riums en expérience sont réajustés à leur niveau
son absorption et renforce sa toxicité pour les
z
initial pour compenser les pertes par évaporation.
mollusques.

584
S. GRETILLAT
Activiti du zirame sur les pontes
de la mare sont jonchés de très nombreuses coquilles
Deux essais consécutifs nous ont montré qu après
vides de ce mollusque, qui d’après leur aspect (restes
un séjour de 24 heures dans une solution de dimé-
de matières organiques dans leur partie moyenne)
thyldithiocarbamate de zinc à 5 p.p.m., suivi d’un
laissent supposer que la mort remonte à quelques
temps de lavage de huit jours, les œufs de B. pfeifiri
jours.
gaudi et de L. caillaudi ont leur croissance ralentie,
puis stoppée, et que finalement les jeunes embryons
Essai 2. Mare de Makile (Sénégal Oriental). Au
de mollusques sont tués dans leurs alvéoles. Dans le
mois de février, ce n’est qu’une simple résurgence
même temps, des pontes du même âge donnent de
dont l’eau très boueuse est un gîte permanent $
jeunes mollusques dans des aquariums témoins. Ce
B. guernei, et un refuge de crocodiles.
produit a donc une action ovicide sur les pontes des
Etant donné l’impossibilité oit nous nous trouvions
mollusques d’eau douce.
de pouvoir faire le calcul exact du volume d’eau B
traiter, puisqu’une partie de cette mare est constituée
par une nappe souterraine, nous l’avons estimé à
ESSAIS SUR LE TERRAIN
200-250 m3 et y avons déversé le 2 février 1961, un
Nous avons essayé le diméthyldithiocarbamate de
kilo de zirame (environ 5 p.p.m.).
zinc dans des gîtes à mollusques du Sénégal Oriental
Le fond de cette résurgence est vaseux sur une
et de la Presqu’île du Cap Vert.
épaisseur d’au moins 50 cm. Le pH de l’eau est de
En raison de la nature un peu particulière de ces
6,5 et sa température de 21” à 23’C.
gîtes au cours de la saison sèche, le produit n’a été
Le jour du traitement, des fragments de branches
testé que dans des marigots ou des mares perma-
d’arbres immergés sont recouverts par des centaines
nentes.
de B. guernei. Laissés en place pour pouvoir opérer
par la suite les contrôles d’activité, nous les trouvons
Essai 1. Mare de Pana1 (Sénégal Oriental). Point
débarrassés de tout mollusque 14 jours après, alors
d’eau permanent servant à l’abreuvement du bétail
que de très nombreuses coquilles vides de B. guernci
et à l’alimentation en eau des habitants de la région.
flottent à la surface de l’eau, ou sont sur les bords
De dimensions importantes (200 m x 140 m), cette
fangeux de la mare.
mare qui est un gîte à B. guernei contient environ
25 000 m3 d’eau. Le fond en est vaseux et les abords
Essai 3. Marigot de Bountounko (Sénégal Orien-
immédiats sablo-argileux. La flore aquatique n’est
tal). Point d’eau extrêmement boueux (30 à 40 cm
représentée que par de très rares pieds de nénuphars.
de vase). Au mois de février l’épaisseur de l’eau n’y
Le pH de l’eau au moment du traitement est de 6,4
atteint pas plus de 40 cm et ses dimensions varient
et sa température varie entre 20” le matin et 24”
entre 100 à 150 m de diamètre.
le soir.
C’est le bas fond du lit d’un ruisseau affluent de la
Elle est traitée le 2 février 1961 avec du zirame en
Gambie qui coule seulement pendant la saison des
poudre à raison de I-1,5 p.p.m. (cette approxima-
pluies. La haute teneur en matières organiques de
tion étant due à la difficulté de calculer le volume
l’eau de ce marigot, qui est un gîte permanent à
exact de l’eau de la mare).
B. guernei, nous a incité à le choisir pour y faire un
essai. Le pH de l’eau est de 6,6 et sa température
Lors du traitement, de très nombreux B. guernei
varie de 22’ à 27°C.
sont trouvés sur les bords, et surtout sur des frag-
ments de bois pourri, plus ou moins immergés, qui
II est traité au zirame le 3 février 1961 à raison de
sont laissés en place pour faciliter les contrôles
1 p.p.m.,par épandage de la poudre à la surface de
d’efficacité. Le produit est répandu (< à la volée H à
l’eau. Le 15 février 1961, il nous est impossible de
une des extrémités de la mare en ayant soin d’utiliser
retrouver un seul B. guernei vivant sur les fragments
le vent dominant pour disperser la poudre qui
de racines de nénuphars sur lesquels on le trouvait
retombe à la surface de l’eau 10-40 m en avant de
pourtant en grand nombre le jour du traitement.
l’opérateur.
Essai 4. Marigot de SangaIkam (Presqu’île du Cap
Les contrôles d’efficacité sont faits 14 jours après,
Vert, à 27 km de Dakar).
cn examinant les fragments de bois pourri (bâtons
Bas fond du lit d’un ruisseau ne coulant que pen-
pièges) situés à l’extrémité opposée de l’endroit où a
dant la saison pluvieuse, cette collection d’eau utili-
été répandu le produit. Aucun B. gueunei n’est
sée en saison sèche pour l’irrigation des cultures de
retrouvé sur ces débris végétaux, par contre les bords
la Ferme du Laboratoire National de Recherches

LE ZIRAME, NOUVEAU MOLLUSCICIDE
585
Vétérinaires de Dakar, est un gîte permanent à
niques, et occupé par une végétation aquatique très
L. caillaudi, B. pfeifleri gaudi et B. senegalensis. Sa
dense. Les contrôles d’activité sont faits deux jours
proximité de Dakar, un fond très vaseux et une végé-
après le traitement, non sur bâtons pièges, mais à
tation aquatique très dense, constituée par des Pistia
l’aide de petites cages en treillis de nylon où nous
stratiotes, nous a incité à choisir ce point d’eau pour
avons enfermé une cinquantaine de mollusques
faire des essais d’activité et de rémanente sur le
récoltés dans le gîte. Trois cages sont ainsi disposées
terrain.
en des points différents du marigot, l’une d’elles
La partie traitée de ce marigot se présente fin
étant placée dans la partie amont du marigot où le
décembre sous la forme d’un bief fermé en amont et
produit n’agira que par diffusion.
en aval, ayant une longueur de 180 m, une largeur
Les contrôles du pouvoir rémanent du zirame dans
variant entre 4 et 5 m et une profondeur de l-2 m
le temps sont pratiqués de la manière suivante: trois
suivant les endroits. Le volume de l’eau est estimé à
semaines après le traitement, puis toutes les semaines
1100 à 1200 m3. Au moment du traitement, le pH de
des prélèvements sont faits et ramenés au labora-
l’eau est de 6,4 environ et sa température varie de
toire pour tester en aquarium le pouvoir mollusci-
17°C le matin, à 25°C le soir à 17 heures.
cide de l’eau traitée sur des mollusques d’élevage,
Le 29 décembre 1960 nous le traitons au zirame à
que l’on laisse 48 heures dans ce milieu. Les pour-
raison de 10 p.p.m., afin de nous rendre compte du
centages de mortalité sont établis après un temps de
pouvoir rémanent de ce produit utilisé à forte con-
réanimation de 60 heures dans de l’eau de gîte
centration.
filtrée.
Pour l’épandage du molluscicide, nous sommes
Les contrôles de rémanente des 3.Y jour et 42e jour
obligés, étant donné la présence des Pistia qui
ont été faits avec des temps de contact prolongés
recouvrent la surface de l’eau, de faire dégager un
(5 jours) la quantité de zirame encore présente dans
petit chenal de 50 cm de largeur, dans la partie
l’eau ayant considérablement diminué (tableau 4).
axiale du bief, à la surface duquel nous répandons le
Sur le terrain, même en milieu très chargé en
produit, en tenant compte de la profondeur de l’eau
matières organiques, et sans qu’il soit nécessaire de
à l’endroit traité. Pour la partie la plus en amont,
procéder au faucardage des plantes aquatiques
nous nous contentons de déverser le molluscicide à
encombrant le gîte, le diméthyldithiocarbamate de
une vingtaine de mètres de l’extrémité du marigot,
zinc diffuse très facilement et le point d’eau traité ne
pour faire un test sur le pouvoir de diffusion du
peut être repeuplé par des mollusques adultes pen-
zirame dans un milieu très chargé en matières orga-
dant une période de 30 à 3.5 jours.
TABLEAU 4
TESTS DE RÉMANENCE DANS UN MARIGOT TRAITÉ AVEC DU ZIRAME A 10 p.p,m.
.-.~_--_--..-
-._
--r
MortalitB ( % )
-.-
-~---.---.-
--_~
Dur&e de la
D a t e
Endroit trait8 directement
/
Endroit traité par diffusion
~-.-- ~-
rémanente
B.g$yrl
!
(jours)
B. guernei
L. caillaudi
(
B. ,idl”
/
B. goernei
L. caillaudi
[-----
.”
1
i
--...- -----
~~ -..... _ .---.
~.= - -
.--. - - -
-=- ~=.L~~~ ~-. .--.-... -... .~~
---î-----
!
TmW;;Ften
t du
/
/

!
29.1230
-~
j
100
]
100
-
-
- 100 100
-
-
-
100 100
-~~ I

~-
1
O-
_i_--- --‘-
19.1.61
/
100
:
100
100
I
100

100 100
1

2’
-~
-
1 -
/
26.1.61
100
100
100
/
100

100
1
100

1 26
-
/
,-/
-i.
2.2.61
,
60
9 0
1 100
/
45

/
55

j
80

/
35

en laissant les mollusques 5jours en contact avec le milieu
I
10.2.61
1 5
‘i
5
j
30

j

0
j
0

(

-5 42
P
I
en laissant les mollusques Bjours en contact avec le milieu
~-~-
~-~-

5 8 6
S. GRETILLAT
TABLEAU 5
TESTS DE TOXICITÉ DU ZIRAME SUR POISSONS EN AQUARIUM
--I_
Temps de survie (heures)
Concentration -
en zirame
Caraussius auratos
Tilapia melanopleora
(p.p.m.) --
Poisson 1
Poisson 2
Poisson 1
Poisson 2
Poisson 3
--~
v.----_=Ez~-
_.~------ .-. .-- .~.~. ~..
1
pas de mort dans les huit jours
pas de mort dans tes huit jours
-.._ -_________-..____--~--
2
2 4
4 8
7 2
7 2
_.. -I_-_-
I
~---~---.-
!-- ~....._
5
2 6
3 0
l

9
__________-.-..--.._____
_-__-.~----..
1 0
2 0
3
8
5
-_~-- ‘---. .‘- ---
5 0
4
1 0
5
4
-.-~- --l
/
/
_~.~___~--
-..----
Toxicité du diméthyldithiocarbamate de zinc pour
faite dans le marigot de Sangalkam) ne serait pas ou
l’homme, les animaux domestiques et la Jàune
peu toxique pour les adultes de T. melanopleura. En
aquatique
ce qui concerne les jeunes alevins, il n’en est pas de
même, et une concentration de 1,5 p.p.m. est suffi-
Moyennant quelques précautions & prendre lors
sante pour les détruire (constatation faite à la mare
de l’épandage (éviter le contact du produit avec les
de Pana]).
muqueuses et les yeux), le zirame ne présente prati-
Sur les autres représentants de la faune aquatique
quement aucune toxicité pour l’homme. Les travaux
de Hodge, Maynard et al. (1952) ont montré que la
(coléoptères, nématodes, batraciens), le zirame ne
semble avoir aucune action toxique, même à la
DLS, pour ce produit est voisine de 1450 mg/kg.
concentration de 10 p.p.m.
Nous avons donné à un mouton 25 mg/kg/jour
dans sa ration pendant huit jours, sans que cet
animal présente de troubles d’intoxication chro-
DISCUSSION
nique.
Les résultats obtenus au cours de ces essais mon-
Dans la pratique, l’eau des gîtes à mollusques trai-
trent que le diméthyldithiocarbamate de zinc a une
tées à raison de 10 p.p.m. (10 mg/l), ne présente donc
activité molluscicide très marquée, au laboratoire
aucun danger pour l’homme et les anjmaux domes-
comme sur le terrain, même à la concentration de
tiques qui l’utilisent comme boisson.
1 p.p.m.
Lloyd (1960) a signalé que les sels solubles de zinc
Il agit plus lentement que les sels solubles de
ont une action létale sur les poissons par leur action
cuivre, mais il présente sur eux les avantages sui-
irritante sur la muqueuse branchiale. Il estime que
vants: Il ne se combine pas avec les matières orga-
la dose toxique correspond à celle qui provoque,
niques, et en conséquence son activité ne diminue que
en aquarium, l’arrêt des mouvements respiratoires
très lentement dans le temps. 11 diffuse très facile-
en 5 heures, chez la moitié des poissons en expé-
ment, même dans des gîtes très encombrés par de
rience.
nombreuses plantes aquatiques, et ne nécessite pas
Avec le zirame nous avons obtenu au laboratoire,
de faucardage préalable. Il est stable et actif dans les
sur Caraussius auratus et Tilapia melanopbwa
(es-
eaux alcalines.
pèce très commune dans les marigots et mares du
A la concentration de 10 p.p.m., il a montré sur le
Sénégal), les résultats consignés dans le tableau 5.
terrain, et dans des conditions particulièrement défa-
Si l’on s’en tient aux critères de Lloyd, les doses
vorables, un pouvoir rémanent d’au moins un mois,
toxiques pour les adultes de ces deux espèces, se
en rendant le milieu incolonisable pour les mol-
situeraient entre 5 et 10 p.p.m. (Caraussius serait
lusques adultes.
plus sensible que Tilapia).
Il serait hors du sujet de discuter ici des avantages
Sur le terrain, une dose de 10 p.p.m. (constatation
et des inconvénients des principaux produits utilisés

LE ZIRAME, NOUVEAU MOLLUSCICIDE
587
à l’heure actuelle dans la lutte antimollusque, cha-
support respiratoire aux larves de moustiques des
cun d’eux présentant des propriétés qui justifient
genres Taeniorhynchus et Ficalbia.
son choix suivant les conditions du milieu où l’on
En conclusion, le diméthyldithiocarbamate de zinc
travaille. A notre connaissance, aucun d’eux cepen-
est un molluscicide qui mérite de figurer parmi les
dant n’est toxique pour les larves de moustiques,
produits utilisés dans la lutte prophylactique contre
tout au moins aux doses actives contre les mol-
les bilharzioses, et présente en outre l’avantage de
lusques. Or, comme nous le signalons dans un
-_
détruire les larves de moustiques.
autre article (à paraître), le diméthyldithiocar-
Améliorations à apporter au conditionnement du
. bamate de zinc se révèle être toxique pour les
produit
~- larves de Culex fatigans et Anopheles SP., dans les
conditions du laboratoire et de la pratique, à des
Pour l’emploi dans les conditions de la pratique
concentrations de l-2 p.p.m.
courante, la présentation du produit sous forme de
poudre micronisée n’offre aucun avantage pour le
Le produit employé dans un marigot et dans un
traitement des gîtes à mollusques.
bassin en ciment à raison de 10 p.p.m. a détruit des
Comme le diméthyldithiocarbamate de zinc est
larves de C. fatigans ou empêché leur pullulation
faiblement soluble dans l’eau, et qu’il diffuse facile-
pendant une période de 30 jours.
ment, nous pensons que son conditionnement sous
Nous signalerons d’autre part que le zirame, tou-
forme de comprimés ou de petites briquettes, se dis-
jours employé à cette dose, détruit les plantes aqua-
solvant en 24 heures par exemple, faciliterait son
tiques du genre Pistia, dont les racines servent de
emploi.
REMERCIEMENTS
Nous tenons à remercier Monsieur le Professeur Ran-
Lacan, Directeur du Service des Grandes Endémies du
son du Museum d’Histoire Naturelle de Paris, d’avoir
Ministère de la Santé et des Affaires Sociales de la
bien voulu déterminer notre matériel malacologique.
République du Sénégal de nous avoir donné toutes faci-
Nous sommes reconnaissants au Docteur Orue, Direc-
lités pour l’accomplissement de ce travail.
teur de la Région de Recherches Vétérinaires et Zoo-
Nous remercions aussi la Société Rhône Poulenc (de
techniques de l’Ouest Africain à Dakar, et au Docteur
Paris) qui nous a fourni le produit nécessaire à ces essais.
SUMMARY
Zinc dimethyldithiocarbamate (ziram-a synthetic
vegetation from the snail habitats before treatmcnt is not
chemical compound that has up to the present been used
necessary.
mainly for controlling fungal infections of plants-has
recently been shown to have marked molluscicidal as
(c) It is stable in alkaline waters.
well as fungicidal properties. In both laboratory and
In a field test carried out in a very muddy “ marigot “,
field tests this compound has proved extremely effective
covered with a dense growth of the water plant Pistia
against the freshwater snails Biomphalaria
pfeifferi gaudi,
stratiotes, it was found that 30 days after the application
Bulinus guernei, Bulinus senegalensis and Lymnaea cail-
of ziram at a dosage of 10 p.p.m. the “ marigot” was still
laudi, which are abundant in the ponds, “ marigots ” and
uninhabitable by adult snails.
streams of Senegal.
With regard to the effect of ziram on the egg-clusters of
In Iaboratory tests of the compound, exposure for
snails, it was observed in laboratory tests that exposure
24 hours to a concentration of 2 p.p.m. or for 48 hours
for 24 hours to a solution containing 5 p.p.m. ziram
to a concentration of 0.5 p.p.m. resulted in a 100~~ kil1
retarded and, eventually, brought to a stop the develop-
of a11 the above-mentioned snail vectors of bilharziasis.
ment of the eggs, which died in the clusters.
Ziram acts more slowly than copper sulfate, but it has
D the following advantages over the latter compound:
Ziram is practically non-toxic to man and domestic
animals. As to its effect on aquatic fauna other than snails,
(a) It is effective even in waters with a very high con-
at concentrations below 10 p.p.m. it is not very toxic to
* tent of organic matter.
adult fish, but it kills the Young fry. It has no lethal action
Ch) It is highly diffusible, SO that clearance of aquatic
either on water beetles and nematodes or on frogs.

5 8 8
S. GRETILLAT
In the course of the experiments, it was discovered that,
one operation control measures against bilharziasis and
at the dosages used to destroy snails, ziram also killed
malaria. The molluscicidal and larvicidal effects of the
the larvae of Culex fatigans and Anopheles sp. This
application of ziram to habitats at a dosage of 10 p.p.m.
larvicidal property Will make it possible to combine in
may be expected to last up to 30 days.
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
.-JC
Deschiens, R. & Molinari, V. (1956) Bull. Soc. Path. exof.,
Hodge, H. C., Maynard, E. A., Downs, William, Blan-
49,llll
chet, Harvey, J., jr & Jones, Chester, K. (1952) eV
Deschiens, R. & Molinari, V. (1957) Bull. Soc. Path. exot.,
J. Amer. pharm. A~S., 41, 662
i
50,62
Llyod, R. (1960) Ann. appl. Biol., 48, 84
Deschiens, R., Molinari, V. & Bertrand, D. (1957) Bull.
Nolan, N. 0. & Bond, H. W. (1955) Amer. J. trop. Med.
Soc. Path. exot., 50, 59
Hyg., 4, 152
PRINTED IN SWITZERLAND