Annales de Parasitulugie (Paris), t. 42,...
Annales de Parasitulugie
(Paris), t. 42, 1967. n” 5. pp. 533 à 542
1.s Hehninthes parasites d’animaux sauvages au Sénégal
Histiacepblus bucorui
n. sp. (Hedruridae, Nermrtodb),
parasite du ventricule succenturié de BU~>~S Ayinirus
(Boddaert) (Grand Calao d’Abyssinie)
Par Simon GRETILLAT
En mars 1965, à l’autopsie d’un Bucorvus abyssinicus (Boddaert) abattu en forêt
au Sénégal oriental, nous pûmes récolter dans la sousmuqueuse
du ventricule succen-
turié, un lot important de Némstodes (47) appartenant à la famille des Hedruridae Rail-
liet, 1916, sous-famille des Histiocephalinae
Gendre, 1922, et au genre Histiocephalus
Diesing, 18.5 1.
Genre HISTIOCEPHALUS Diesing, 1851.
La bouche est entourée de quatre litvres, dont deux médianes trilobées ornées de
deux paires de petites papi,lles et deux latérales avec deux amphides bien développées.
Pseudolèvres avec bord postérieur échancré fonmant des expansions digitiformes
OLI foliacées recouvrant les parois latérales de la tête qui est circonscrite en arrière par
une série de renflements cuticulaires formant une sorte de collier. Cavité buccale
cylindrique.
Mâle avec deux larges ailes caudales supportées par quatre paires de papilles
préanales et deux paires postanales toutes pédonculées.
Spicules égaux et très longs dans l’espkce type H. laticaudatus (Rud., 1819), mais
inégaux dans les autres espkes. Absence de gubernaculum.
Vulve de la femelle en position antérieure.
Parasites du gésier des oiseaux.
HISTIOCEPHALUS BUCORVI n. sp.
HAJZUTUS : Vers de petite taille, effilés des deux bouts avec extrémités contournées
particulièrement la partie postérieure du mâle (allure de spirure). Couleur rouge carmin
.-
à l’état frais disparaissant dans les lpremières minutes de séjour en alcool.
Cuticule striée transversalement.

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EXTRÉMITÉ CÉPHALIQUE(~~~. 3).
Deux lèvres médianes à bord trilobé avec deux paires de papilles dont une bien
développée.
FIG. 1. - Histiocephalus bucorvi n. sp. A) tête en vue apicale.
B) tête en vue dorsale. C) tête en vue latérale. D) tête, we
sagittale latéro-latérale.
Deux lèvres latérales à bords pourvus de quatre dents bien distinctes.
La tête est ornementée de deux pseudolèvres coiffant littéralement les parties
latérales de la tête. Leur bord antérieur est flanqué de deux renflements tuberculeux
alors que le postérieur, largement échancré et étalé, forme six expansions digitées,
légèrement renflées dans leur partie moyenne et terminées par une pointe mousse. La
longueur et l’épaisseur des digitations vont en diminuant de l’extérieur vers le centre,
les expansions latérales de 30 à 35 v débordant sur les parois ventrale et dorsale de la
tête. Deux amphides nettement visibles.

.
HELMINTHES D’ANIMAUX SAUVAGES AU SENEGAL
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Immédiatement en arrière de l’extrémité postérieure des pseudolèvres,
la cuticule
du ver est surélevée par 48 renflements longitudinaux formant une sorte de collier
céphalique.
Mde :
Longueur : 7 à 7,5 mm.
Largeur maxinmm : 130 à 135 us
Cuticule striée, Distance interstries : 4 à 5 u.
Capsule buccale cylindrique de 50 u de hauteur sur 19 u de diamètre.
Esophage de 2,4 mm de longueur totale. Portion musculaire : 305 u.
Anneau nerveux, pore excréteur et diérides à 170 u de l’extrémité céphalique.
FIG. 2. - Histiocephalus bucorvi :
extrémité postérieure du mâle.
Deux ailes caudales bien développées supportées par sept paires de papilles nette-
ment pédonculées dont cinq préanales et deux postanales précédant deux paires de
petites papilles sessiles placées à proximité de l’extrémité de la queue qui mesure 80 u
(fig. 2).
Deux phasmides difficilement visibles.
Spicules inégaux à pointe mousse légèrement renflée, sans aile latérale ni ornemen-
tation spéciale. Le gauche mesure 800 u, le droit 178 u. Il n’y a pas de gubernacu-
lum (fig. 3).

.
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Femelle :
Longueur : 13,7 à 16,8 mm.
Largeur maximum : 210 à 230 CI.
c
Cuticule striée. Distance interstries : 5 à 6 u.
Capsule buccale de 60 à 65 p de profondeur sur 20 à 22 II de diamètre.
Oesophage de 3 mm de longueur totale. Portion musculaire de 465 CI.
FIG. 3. - Histiocephalus
FIG. 4. - Histiocepha-
hucorvi : Spicules.
lus hucorvi : vulve et
sphincter de l’ovojecteur.
Anneau nerveux. pore excréteur et diérides à 180-l 95 v de l’extrémité céphalique.
Queue de 120 w.
Vulve placée en position antérieure, un peu en avant de la terminaison de l’mo-
phage, à 2,5 mm de l’extrkmité céphalique.
Ovojecteur de 500 à 600 ~1 de long, terminé au niveau ,de la vulve par un sphincter
@g. 4).
CEufs de 53-60 11 x 29-37 H in utero et em,bryonnés au moment de la ponte.

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Discussion
A l’heure actuelle, le genre Histiocephalus comprend trois espkces, toutes parasi-
tes d’otitidae (Outardes). Ce sont :
H. Zaticaudatus (Rud., 1819) décrit d’Ot& tetrax Lin. (Canepetière), mais trouvé
aussi chez la poule et le canard domestique.
H. tridens Gendre, 192 1, chez Trachelotis senegulensis Vieill. (Poule du Pharaon)
à Labé, Guinée française (8 juillet 1907).
H. chorioditis Ortlepp, 1938, chez Choriotis kori Burch (Giant Bustard) Transvaal
du Nord.
L’ornementation céphalique chez les Histiocephalus est si originale qu’elle permet
presque à elle seule de différencier les espèces déjà décrites.
H. lzcaudatus a le bord de chaque pseudolèvre très profondément échancré pour
former dix digitations terminées chacune par deux ou trois pointes atteignant à peine
le bord supérieur du collier périkphalique (fig. 5 a et b).
Chez H. tridens, le nombre de digitations est réduit à six par pseuddèvre.
Elles
sont sensiblement égales, ont une forme régulière avec une extrémité simple, atteignant
la partie moyenne du collier péricéphalique (fig. 5 c et d).
H. choriotidis, dont seule la femelle est connue, a six expansions pseudolabiales
à bords plus ou moins parallèles et dont l’extrémité tronquée est pluridenticulée (deux
à quatre crénelures discrètes), mais atteint seulement le tiers antérieur d’un collier
céphalique très développé (75 ti de haut) (fig. 5 e).
H. bucorvi n. sp. est donc nettement différent de H. laticaudatus et H. choriotidis,
mais son ornementation céphalique serait voisine de celle de H. tridens. Cependant,
si d’on se rapporte au dessin de Gendre (1921), les digitations du bord postérieur de la
pseudolèvre sont d’égale longueur chez H. tridens alors que les externes sont beaucoup
plus longues que les internes dans l’espèce que nous venons de décrire. De même,
elles sont nettement plus foliacées chez H. bucorvi que chez H. tridens et ne recouvrent
que légèrement le bord supérieur du collier céphalique qui a 28 ~1 de haut chez le mâle
et 38 p de haut ‘chez la femelle de H. bucowi alors qu’il mesure respectivement 16 et
.
20 p chez H. tridens.
Au sujet du spicule gauche (L. = 700 U) de H. tridens, Gendre parle d’une mem-
brane hyaline placée à l’extrémité distale et « enveloppant I’organe à la manière d’un
cache-pointe », le corps étant strié transversalement. Le .spicule droit (155 II) a une
petite aile latérale et une petite épine recourbée à l’extrémité.
Or, chez H. bucorvi, les spicules ont chacun une extrémité mousse légèrement
renflée, le corps sans ornementation spéciale ni expansion alaire.
Nous considérons donc comme nouvelle l’espèce que nous venons de décrire et
l’app,elons Histiocephalus bucorvi n. sp.
Annales de Parasitologie
humaine et comparée (Paris), t. 42, 1967, no 5
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Histiocephalus bucorvi n. sp.
Hôte : Bucorvus abyssinicus (Grand Calao d’Abyssinie).
Localisation : Sous-muqueuse d’u ventricule succenturié.
Provenance : Koungheul, Tambacounda (Sénégal). Forêt sèche.
-.
Date : 10-3-65.
Type et paratypes déposks au M’uséum d’Histoire Naturelle de Paris [Laboratoire de
Zool.ogie (Vers) (Professeur A.-G. Chabaud)].
I
e
, o./mm.
1
FIG. 5. - Extrémités céphaliques de a) et b) Histiucephalus
IaticaudaCus (Rud., 1819) (d’après
Drasche, 1884). c) cl d) Hisiiocephtrlus
tririerm Gendre, 1921 (d’après Gendre). e) Hisfiocephnlus
choriotidis
Ortlepp, 1938 (d’après Ortlepp).
Position systématique du genre HZSTZOCEPHALUS Diesing, 1851.
L’ornementation céphalique chez Histiocephalus est une transformation du bord
postérieur très développé des pseudolèvres qui est échancré et forme des digitations
aux contours originaux et caractéristiques de chaque espèce. Les pseudolèvres sont
dépourvues de pointe apicale.
Si l’on se réfère au travail de Bain et Chabaud en 1965, ces caractères permettent
de ranger ce genre dans la sous-famille des Habronematinae Chitwood et Wehr, 1932,
plutôt que dans la famille des Acuariidae Seurat, 1913, où les pseudolèvres sont
pourvues d’une pointe apicale, avec une ornementation kphalique constituée de cordons
prenant naissance au niveau des angles labiaux. Les formations en casque du genre

HELMINTHES D’ANIMAUX SAUVAGES AU SENEGAL
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Schistorophm
Railliet, 1916 ont d’ailleurs la même origine comme l’a tout dernière-
m.ent fait remarquer Inglis (1965).
Dollfus et Chabaud en 1957 ont souligné les différences entre Acuarides et Habro-
nèmes, malgré la présence d’une ornementation céphalique complexe dans ces deux
groupes. Ils ont cependant hésité & maintenir la sous-famille des Histiocephalinae où
il aurait fallu grouper Parabronema Baylis ,1921, Hadjelia Seurat, 1916 et Histiocepha-
lus Diesing, 1851.
La description d’un quatrième Histiocephalus confirme l’importance de ce genre
et rend difficile son rangement parmi les Habronematinae, puisque le taxon supragénéri-
que Histiocephalinae Gendre, 1922 est antérieur à Habronematinae Chitwood et Wehr,
1932.La nomenclature à admettre serait celle proposée par Bain et Chabaud en 1965,
voisine de celle adoptée récemment par Skrjabin et Sobolev (1963) dans le volume XI
de Osnovi Nematodologii, à savoir :
D’une part, les Habronematinae Chitwood et Wehr, 1932, comprenant les Habro-
nèmes dépourvus d’ornementation céphalique,
D’autre part, les Histiocephalinae Gendre, 1922, comprenant les Habronèmes
pourvus d’une ornementation céphalique provenant d’une modification des lèvres ou
des pseudolévres.
Cette sous-famille comprend cinq genres :
Parabronema Baylis, 1921,
Cyrnea Seurat, 1914.
Hadjelia Seurat, 1916.
Parahadjelia Lent et Freitas, 1939.
Histiocephalus Diesing, 1851.
Famille des ACUARZZDAE Seurat, 1913.
Parmi ce lot important d’hlistiocephalus,
se trouvait un exemplaire mâle d’Acuaride
de trb petite taille contrastant avec les autres par sa couleur blanc nacré.
Des cordons céphaliques bien développés, r&urrents, mais non ,anastomosés pos-
térieurement le plaçant dans le genre Dispharynx Railliet, Hem-y et Sisoff, 1912.
Ce genre comporte à l’heure actuelle une soixantaine cl’esp&ces dont un certain
nombre sont sans doute synonymes.
Ne voulant pas ajouter à cette liste une nouvelle espèce d&rite sur un unique
exemplaire mâle, nous en donnerons seulement la morphologie et les dimensions en
considérant qu’il est intéressant de signaler ce genre ohez un hôte (Bucorvus abyssi-
nzcus) dont les parasites internes sont très peu connus.
DYSPHARYNX sp.
Un exemplaire mâle de couleur blanc nacré, à extrémité postérieure très fortement
recourbée sur elle-même et de très petite taille : longueur : 6,25 mm - largeur maximum
au niveau de la partie moyenne du corps : 230 p.

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Cuticule striée. Distance interstries : 12 u environ.
Extrémité céphalique acuminée avec deux pointes apicales et papilles peu visibles.
Quatre cordons Céphali#ques sinueux de 17 b de large, récurrents à 700 LJ de
l’extrémité antérieure, mais non anastomosés, la branche récurrente étant relativement
courte (130 à 190 P) (fig. 6 D).
A la bouche fait suite un pharynx allongé, légèrement sinueux, de 230 LI de long
sur 13 H de diamètre, auquel succede un œsophage musculaire de 520 ~1 et un œso-
phage glandulaire de 2,4 mm.
Deux petites diérides tricuspides (fig. 6 E) sont ZL 480 p de l’extrémité ckphalique,
au même niveau que le pore excréteur, l’anneau nerveux en étant distant de 275 11.
FIG. 6. - Dispharynx sp. (mâle). A) Extrémité postérieure. B) Spicules. C) Spicule droit
vu de face et tête du spicule gauche. D) Extrémité antérieure. E) Diéride et détail du
cordon céphalique.
L’extrémité postérieure en pointe mousse est flanquée ,de deux ailes caudales- bien
développées supportées par quatre paires ‘de papilles préanales pédonculées. Le bord
postérieur du cloaque, qui est à 480 p de l’extrémité postérieure, est encadré par deux
papilles implantées sur deux petites aires subcirculaires striées. Quatre paires de grandes
papilles postcloacales ou caudales pédonculées sont disposées de part et d’autre d’une
bande cuticulaire épaisse et striée allant du cloaque à l’extrémité de la queue qui porte
une petite paire de papilles et deux phasmides (fig. 6 A).

HELMINTHES D’ANIMAUX SAUVAGES AU SENEGAL
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Les spicules sont différents et inégaux (fig. 6 B et C). Le gauche est effilé à son
extrémité distale qui a une pointe mousse. Il mesure 1 .lOO n. Le droit, beaucoup
plus trapu, est légèrement courbe, Epais dans ses trois quarts antérieurs, mais aminci
postérieurement, il est terminé par un crochet mousse largement ouvert. Il mesure 250 u.
Résumé
D’après un lot important (47) de Nématodes adultes des deux sexes, récoltés au
cours de l’autopsie d’un Bucorvus abyssinicus, dans la sous-muqueuse de l’estomac
glandulaire, il est décrit un Hedruridae nouveau, Histiocephalus
bucorvi n. SP., ce qui
porte à quatre le nombre des espèces connues d’Histiocephalus.
L’étude détaillée de la structure céphalique et de l’ornementation des pseudolèvres
de cet Hedruridae permet de confirmer la valeur de la sous-famille des Histiocephalinae
Gendre, 1922 qui a priorité sur Habronematinae Chitwood et Wehr, 1932.
Sur un spécimen unique mâle trouvé aussi dans la sous-muqueuse du ventricule
succenturié du même hôte, il est décrit un Acuariidae appartenant au genre Dispharynx.
Remerciements
Nous tenons à remercier M. G. Vassiliades qui a abattu le Bucorvus abyssinicus sur lequel
nous avons récolté cet intéressant matériel, ainsi que M. le Professeur A.-G. Chabaud qui
nous a permis d’effectuer une partie de ce travail d,ans son laboratoire et nous a guidé et
conseillé dans l’étude de ce matiiel.
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Muséum National d’Histoire Naturelle.
57, rue Cuvier, Paris-Y].