Rev. Elev. Méd. vét. Pays trop.. 1981,34 (3) : ...
Rev. Elev. Méd. vét. Pays trop.. 1981,34 (3) : 275-279
Couleur de la robe chez les N’Dama
de haute Casamance, Sénégal
par E. GUEYE (1) A. NICOLAS (1) et S. M. TOURE (1)
(1) I.S.R.A. Centre de Recherches zootechniques de Kolda et Laboratoire National de fElevage et de Recherches
Vétérinaires, B.P. 2057, Dakar-Hann République du Sénégal.
RÉSUMÉ
Les auteurs ont fait une enquête en haute Casamance, au Sénégal, sur la répar-
tition des couleurs de la robe chez les N’Dama locaux, avec comme but final de
vérifier si les animaux de couleur fauve sont; comme il est le plus souvent estimé,
plus trypanotolérants que ceux porteurs de robes de couleurs différentes. Des
observations faites, qui ont uorté sur 1 009 animaux rénartis. dans une même et
seule région, en 11 &oupeaÛx, il ressort 2 types dominants de robe : les robes
froment fauves typiques de la race N’Dama (26,6 p. 100 de l’effectif total étudié) et
les robes blanches oÛ gris clair (22,3 p. 100) qui sont l’indice d’un apport génétique
du zébu Gobra dont la couleur blanche constitue une caractéristique raciale.
Les autres types de robe (pie rouge, pie noir, grises mouchetées) seraient dues à
l’impact génétique à des degrés divers de taurins trvpanotolérants autres aue les
N’Dama.-Les auteurs obs&ent que les animaux à rybe blanche ou gris clair sont
les seuls à ne pas être présents à partir de la tranche d’âge de 12 ans. Ils discutent de
.
cette particularité. -
’ L’étude de la valeur de la trypanotolérance de ces N’Dama en fonction de la
cauleur de leur robe fait l’objet d’un second article publié dans cette même Revue.
:
i
*
INTRODUCTION
admettre qu’à l’heure actuelle les robes des
populations taurines groupées sous cette dési-
La sélection du taurin N’Dama est entre-
gnation sont assez disparates - que ce soit
prise, depuis 1972, au Centre de Recherches
en Guinée même ou au Sénégal où il y a de
zootechniques de Kolda (CRZK) en haute
nombreux types de phanères. Cette hétéro-
Casamance, dans le sud du Sénégal.
généité résulte certainement de croisements
d’absorption avec le zébu ou d’autres taurins
L’un des critères de sélection retenu a été
génétiquement différents. Les N’Dama en
la couleur fauve de la robe. Les raisons justifiant
question sont toujours du type à longues
ce choix sont au nombre de trois : la robe
cornes, qui constitue le premier groupe dans la
fauve est celle du troupeau originel ; c’est la
classification du bétail trypanotolérant d’Afrique
plus prisée à l’exportation ; les animaux de
occidentale, le deuxième étant représenté par
fr
cette couleur passent pour être les plus résistants
les taurins à cornes courtes (Baoulé, Bétail des
E
aux trypanosomoses.
Lagunes, etc.).
F
La première de ces raisons est confirmée
La seconde raison, qui facilite l’exportation
par le fait que, dans le berceau de cette race,
des animaux à robe fauve, est un fait patent,
situé dans le Fouta Djallon, en Guinée, la
non scientifiquement justifié. Il s’agit là d’un
majorité des N’Dama est de cette teinte (1, 2).
choix d’autant plus subjectif que les animaux
En retenant comme hypothèse qu’à l’origine
présentant d’autres types de robes sont d’aussi
les N’Dama étaient de couleur’ fauve, il faut
bonne conformation de bovins de boucherie
- 275 -

que les N’Dama fauves, avec des poids et des
Ce tableau montre qu’en la matière 2 types
rendements semblables.
de robe dominent :
Enfin, concernant la troisième raison, il n’a
-. les robes froment fauves (froment foncé,
jamais, jusqu’ici, été démontré que les N’Dama
fauve, fauve délavé) typiques de la race N’Dama,
à robe fauve disposent d’une trypanotolérance
qui sont les plus fréquentes, bien que ne repré-
supérieure à celle constatée chez les animaux
sentant que 26,6 p. 100 de l’effectif total étudié ;
de même race mais aux robes de teintes diffé-
-- les robes blanches ou gris clair, soit
rentes.
22,3 p. 100 de ce même effectif, trouvent certaine-
Comme la sélection sur le seul critère de la
ment leur origine dans un métissage plus ou
robe fauve restreint l’éventail génétique de cette
moins lointain avec le zébu Gobra qui est de
race et limite ses possibilités de multiplication
couleur blanche.
dans les stations d’Etat de sélection et de repro-
duction, il a paru important d’étudier d’abord
Les autres types de robes courantes en haute
la fréquence et la répartition des différents
Casamance seraient dus à une imprégnation
types de phanères des N’Dama de haute Casa-
du type local par des taurins trypanotolérants
mance, tels qu’ils se présentent en milieu
autres que le N’Dama (5).
d’élevage traditionnel et, dans un deuxième
L’ensemble des robes grises avec des nuances
temps, d’utiliser les données ainsi recueillies
diverses (blanc, gris, gris clair, gris foncé)
pour évaluer la qualité de leur trypanotolérance,
représente 34,7 p. 100 de l’effectif total. Un
en fonction de la couleur de leur robe.
pourcentage aussi élevé prouve que I’impré-
gnation de la teinte blanche du zébu Gobra
Situation générale
est très persistante.
Les observations ont été faites dans la zone
Ces résultats semblent confirmer ceux obtenus
d’influente du CRZK, c’est-à-dire auprès des
par la SATEC en août 1973 dans le secteur de
troupeaux villageois situés à proximité, recevant
Kolda, ainsi que ceux obtenus en 1977 par
régulièrement la visite de chercheurs dans le
G. PALMER0 et B. DIA0 (4) toujours dans
cadre de la prévulgarisation. Au total 1 009 ani-
ce même secteur qui donnaient : 21 p. 100 de
maux appartenant à 11 troupeaux ont été
robes gris clair, 25,7 p. 100 de robes fauves
identifiés par relèvement de leur signalement,
et 7 p. 100 de robes noires.
puis regroupés par catégories.
i
Ces opérations ont permis de retenir huit
Répartition des différents types de robes en
couleurs de robe, couvrant à elles seules la
fonction du troupeau
presque totalité de ce cheptel, à l’exception de
3,l p. 100 d’animaux aux robes diverses ne
Ces proportions ne sont p+ homogènes sur
correspondant pas à la nomenclature utilisée.
l’ensemble de la région étudiée, où l’on observe
En définitive la répartition détaillée par type
de sensibles variations d’un troupeau à l’autre.
de robes a été la suivante :
C’est ainsi que l’étude de la répartition des
TABL. N'I-Couleur de la robe chez les taurins N'Dama. (Zone d'emprise du C.R.Z.K.)
Effectif observé 1009
Couleur de la robe
Nombre total 1009
Pourcentage
Fauve ou froment
ou fauve délavé
268
26,6 (+_ 2,6)
33,3
Pie rouge
68
6,7 (+ 1,5)
Noir
102
10,1 (+_ 1,9)
17,l
Pie noir
71
7.0 (+ 1,6)
L
Blanc ou gris clair
22,3 (+ 2,6)
34,7
I
225
Gris ou gris foncé
125
12,4 (2 ~0)
*
Gris (ou blanc) moucheté
90
8,9 (2 1,s)
11,8
Gris truité
29
2,g ci: 1,O)
Divers autres
31
3,1 (+ 1,l)
- 276 -

couleurs de robes par troupeau a donné les
niveau des troupeaux, ce serait donc au niveau
résultats d’ensemble suivants :
des villages que les variations seraient les plus
importantes : de 26,4 à 63,6 p. 100 pour les
- Le taux des robes fauves (froment ou
robes grises avec leurs nuances, et de 16,6 à
fauve délavé) varie de 11,l à 52,95 p. 100 suivant
58,l p. 100 dans le cas de robes fauves d’animaux
le troupeau considéré, alors que celui des robes
(froment fauve, pie rouge).
où le fauve domine (froment, fauve, pie, rouge)
varie de 15,7 à 61,3 p. 100. A noter que 4 trou-
peaux ont moins de 25 p. 100 d’animaux à robe
Répartition des différents types de robes en
fauve dominant et que seuls 2 troupeaux ont
fonction du sexe
plus de 55 p. 100 d’animaux de ce même type
de robe;
Le calcul de cette répartition a montré qu’il
- Le pourcentage des robes blanches (ou
n’existe pas de différence sensible entre les
gris clair) varie de 0 à 53.1 p. 100. Celui des robes
mâles et les femelles. C’est ainsi que pour
à dominante’ grise varie de 22,6 à 69,2 p. 100
nous en tenir aux robes principales :
suivant les troupeaux. On ne trouve que 3 trou-
-- pour les robes fauves, froment ou fauve
peaux dont le taux de robes grises est inférieur
délavé, on a observé 27,4 chez les mâles et
à 30 p. 100 mais dans 4 autres troupeaux ce
26,2 chez les femelles, ces taux étant respective-
pourcentage est supérieur à 60 p. 100.
ment de 21,4 et 22,7 p. 100 pour les robes blanches
-
ou gris clair.
Parmi les robes marquées de noir (noir ou
pie noir) les variations sont plus faibles -- de
9,6 à 30,6 p. 100, avec des pourcentages allant
de 12 à 17 p. LOO dans 6 troupeaux.
Répartition en fonction de l’âge des animaux
Mais ces variations paraissent relativement
plus faibles lorsqu’elles concernent les différents
Cette répartition est donnée dans le tableau
troupeaux d’un même village. Ainsi, plus qu’au
suivant :
TABL. N'II-Couleur des robes en fonction de l'âge des animaux (nombre et
pourcentage d'animaux examinés)
-
l-2 ans
2-4 ans
4-6 ans
6-8 ans
8-10 ans
10-12 ans
2 an8 et +
Totaux
N-336
N=166
N=135
N=lBO
N=125
N=45
N=22
Robe fauve
froment ou
27,l
28,3
25,2
21,7
31,2
26,7
27,3
26,6
fauve délavé
Robe blanche
27,4
17,s
23
25,6
13,6
22,2
0
22,3
ou gris clair
Robe grise
10,4
10,8
14,l
12,2
15,2
17,s
18,2
12,4
gris foncé
Robe gris
11,l
839
7,2
11,l
13,6
899
moucheté
8.0
9,o
Robe gris
393
197
292
9,1
239
truité
393
396
OS7
Robe pie
11,7
8
13,6
790
noire
498
798
4,4
4,4
Robe noire
9,s
14,s
11,l
7,2
996
839
931
10,l
Robe pie
6,O
6,1
8
2
991
697
rouge
794
697
Autres
231
2,4
397
393
596
494
0
391
TlYG-tUX
33,3
16,4
13,4
17,8
12,4
435
292
100
- 277 -

d’où il ressort :
d’une trypanotolérance moins marquée par
- que les taux des robes fauves (froment
rapport à celle manifestée par les N’Dama aux
ou froment délavé) sont variables avec l’âge
robes d’un autre type.
?.+
(21,7 p. 100 chez les animaux de 6 à 8 ans
contre 31,2 p. 100 chez ceux de 8 à 10 ans pour
nous en tenir aux deux extrêmes);
CONCLUSION
- que celui des robes blanches ou gris clair
varie de façon assez irrégulière en fonction de
Dans le cheptel taurin de la zone d’emprise
l’âge avec comme extrême 13,6 p. 100 de 8
du CRZ de Kolda, 2 types de robes dominent :
.*
à 10 ans contre 27,4 p. 100 de 0 à 2 ans.
les robes fauves ou fauve délavé d’une part, les

Par contre les taux des robes noires, gris
robes blanches ou gris clair d’autre part. Ces
2
foncé, gris et pie noir sont relativement stables
dernières, qui résultent vraisemblablement d’une
tout au-long de la vie du troupeau.
imprégnation de zébu C?obra sont plus nom-
Ces pourcentages et leur évolution dans le
breuses que les robes fauves ou fauve délavé.
temps ne permettent pas de conclure pour savoir
Quel que soit le sexe ou la classe d’âge des
si une population présentant un type de robe
animaux, il semble que les proportions de ces
donné se maintient, de la naissance à la réforme,
deux types de robes restent sans grandes varia-
de la même façon que les autres ou si, au
tions.
contraire, ce même type étant l’indice d’une plus
Au sein des différ&ts villages, les éleveurs
grande sensibilité aux maladies, la trypanoso-
ont tendance a manifester une préférence pour
mose notamment, elle disparaît en leur faveur.
l’un ou l’autre de ces types de robes, qui ne
Ce tableau montre que la robe blanche
privilégie pas nécessairement la robe fauve.
ou gris clair disparaît au-dessus de l’âge de
Vu la grande diversité de couleurs de la robe
12 ans -- alors que tous les autres types de
des taurins N’Dama, il apparaît nécessaire de
robe sont encore présents à 12 ans et plus.
redéfinir les caractéristiques de ce bétail. Il
Est-elle éliminée pour cause de maladie ou
semble difficile d’imposer la couleur fauve à
les animaux qui en sont porteurs sont-ils
des éleveurs qui ne manifestent aucune ten-
réformés de préférence avant d’avoir atteint
dance naturelle à la sélection sur ce type de
cet âge, à moins que la teinte de la robe ne
robe. Ce serait d’ailleurs réduire l’éventail
s’altère avec le vieillissement au point d’entraîner
des possibilités génétiques.
alors sa transformation en une certaine catégorie
Seule une étude de la trypanotolérance per-
de gris ? La question ainsi posée mérite que l’on
mettrait de justifier objectivement le choix de
s’y arrête pour savoir notamment si l’élimi-
la couleur fauve pour la sélection du taurin
nation relativement prématurée des animaux
N’Dama. Ce sera l’objet d’une publication
à robe blanche ou gris clair résulte ou non
ultérieure.
SUMMARY
Colours of the coat in N’Dama cattle.
A survey in the upper Casamance, Senegal
1 009 N’Dama (humpless West African long horned cattle), divided into
populations according to the colours and patterns of the coat, were studied in
herds kept under surveillance around the Center for Research on Animal Husban-
dry, Kolda, Senegal. Two types were predominant : e) truc or washed out fawn-
colour ; b) white or light-grey.
There were very little variation in the proportions of each type of pattern
analysed according to the sex of the animals or their age group. It seems necessary
to redefine the types of breeds and to avoid considering the fawn-coloured animais
as the only representative of the standard.
In traditionnal breeding communities, this fawn-coloured pattern is not a
criterion of superiority in terms of trypano-resistance.
RESUMEN
Color del pelo en 10s hovinos N’Dama de alta Casamancia, Senegal
Los autores hicieron una encuesta en alta Casamancia, en Senegal, sobre la
reparticion de 10s colores del pelo en 10s bovinos N’Dama del pais. Su objeto era de
- 278 -

averiguar si 10s animales de color leonado son nks trrpanotolerantes que 10s
teniendo pelos de colores diferentes como se 10 estima las mas de las veces. Las
observaciones de 1 009 animales distribuidos en una sola region en Il rebafios
mostraron dos tipos de pelo predomindntes : 10s pelos de color trigo leonado
tipicos de la raza N’Dama (26,6 p. 100 del ganado estudiado) y 10s pelos blancos o
grises claros (22,3 p. 100) que son el indicio de la presencia de genos del cebu Gobra
cuyo color blanco constituye una caracteristica racial.
Los otros tipos de pelo (pio rojo, pio negro.. gris moteado) provendrian de 10s
cruzamientos con otros bovinos tripanotolerantes. Los autores notan que 10s ani-
males con pelo blanco o gris claro son 10s solos ausentes a partir del grupo de
12 aiïos de edad. Discuten de esta particularidad.
Un segundo articula publicado en este numero estudia el valor de la tripano-
tolerancia de dichos bovinos N’Dama en funcion del color de su pelo.
BIBLIOGRAPHIE
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vention en faveur de l’élevage. Paris, SATEC, 1973.
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