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MINISTERE DU DEVELOPPEMENT RURAL
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INSTITUT SENEGALAIS DE RECHERCHES
A G R I C O L E S ( I . S . R . A . )
-------_-_
LABORATOIRE NATIONAL DE L’ELEVAGE
ET DE RECHERCHES VETERINAIRES
BP 2057
D A K A R - HANN
ECOLOGIE DES PRINCIPALES ESPECES
DE TIQUES VECTRICES
AU SENEGAL
Par
A . G U E Y E , J . L . C A M I C A S ,
Mb. MBENCUE, A. DIOUF
General Meeting and Conference of the
R E F . No 87/PARASITO.
, Africa Association Insect Scientist (AAIS)
DECEMBRE 1987.
Dakar, Sénégal 7 - 10 décembre 1987

ECOLOGIE DES PRINCIPALES ESPECES
DE TIQUES VECTRICES
4 AU SENEGAL
A . G U E Y E , J . L . C A M I C A S
Mb. MBENGUE, A. DIOUF
Les données concernant la biologie et l’écologie des principaux vecteurs
en l’occurrence A. wtiegatum,
8 . d&culu.rtatti e t ï3. gtigqi d a n s d i v e r s e s
zones géographiques du Sénégal sont rapportées. La distribution de ces
tiques avant la période de sécheresse actuelle est précisée.
L’incidence épidémiologique de ces acariens est ex’aminée.
1. I N T R O D U C T I O N
Les maladies transmises par les tiques en Afrique occidentale et centrale
n’ont fait l’objet que d’études restreintes concernant leur épidémiologie et
leur diagnostic respectifs.
L-a mise en évidence des principaux vecteurs
demeure encore un champ d’investigations dont les résultats permettront de
préciser la répartition des affections et leur évolution dans le temps. Néan-
moins,
certains genres ou espèces sont déjà connus pour leur capacité à
transmettre des agents pathogènes donnés notamment des protozoaires et des
rickettsies.
Dans ce groupe, sont inclus Amblqumma. wakiegc&m (FABRICIUS,
1794) et les espèces du genre I3uapIz&Zti, dont quelques unes jouent un rôle
important dans I’infestation parasitaire du bétail au Sénégal. L’écologie de
ces tiques dans la région éthiopienne a déjà été abordée par certains auteurs
(HOOGSTRAAL, 1956 ; MOREL, 1969). Cependant, les données relatives à
leurs populations locales au niveau de zones écologiques moins étendues qui
représentent très souvent des régions propices à l’élevage sont réellement
limitées.
A cette échelle géographique, les conséquences d’une quelconque
perturbation des conditions écologiques sont plus apparentes sur la biologie
et le niveau des populations de ces acariens.
. . . / . . .

- 2
II. POPULATIONS DE TIQUES
Les espèces jouant un rôle vectoriel majeur ou susceptible de le jouer
au Sénégal sont : AmbLyomma va&Qgd;tum, #%qhihn &co&natun ( K O C H , 1 8 4 4 )
e t Buupk~3un geigyi ( 14ESCHLIMANN & M O R E L , 1 9 6 5 ) . Pc~up/~Xti a~~uJ?uXti
(SAY, 1821) dont la présence a été signalée dans ce pays il y a quelques
années (MOREL, 1961) semble plutôt en voie de disparition. Les études menées
présentement sur l’ensemble de ces espèces montrent une modification de leur
distribution et parfois de leurs effectifs.
1 /Situation actuelle
AmbLyomma vah..&gatum
Vecteur de la Cowdriose et des Theilerioses à Theileka mutati (THEILER,
1906) et à Th. uelideha (UI LENBERG, 1964), cette espèke est également sus-
pectée au Sénégal de transmettre les ehrlichioses bovine et ovine et les anaplas-
moses des ruminants domestiques.
La distribution de cette tique intéresse une grande partie de la région
éthiopienne à l’exclusion de l’Afrique australe (HOOCSTRAAL, 1956 ; MOREL,
1969). Elle a été également introduite à Madagascar et aux Caraibes. En
Afrique de l’Ouest, elle est localisée au niveau des steppes boisées
xerophytes
sahéliennes sud , des savanes et des mosai’ques
forêt-savane équatoriales.
Au Sénégal, l’habitat de l’espèce est constitué par les Niayes reliques de
forêts guinéennes en zone sahélienne, les savanes nord et sud soudaniennes
et les forêts-savanes nord guinéennes.
La dynamique des populations au niveau de ces différentes zones phyto-
géographiques est caractérisée par l’existence d’une seule génération annuelle
(CAMICAS, 1981 ; GUEYE, 1986), avec un pic des imagos à la saison des
pluies, l’apparition des larves à partir d’octobre et des nymphes en novembre
(graphique 1) . Des différences significatives apparaissent cependant dans
l’intensité de I’infestation des bovins, des ovins et des caprins selon les zones
écologiques. Cette variation peut être attribuée à la fois à la capacité de
prolifération de ces arthropodes en fonction des caractéristiques de l’habitat
et aussi à leurs préférences d’hôtes qui sont très larges. Ces observations
sont très évidentes dans la zone des Niayes où à cause de l’absence de gibier,
. . . / . . .

Infestatlons Tiques
(Eck
e logarithmique)
AMBLYOMMA VARIEGATUM : Bovins, chèvres (Niayes)
100GO (
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Imagos (5ovins;
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Nymphes !Chèvres)
Larves :Ch<?vres;
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- 3
le cycle se limite essentiellement aux bovins et aux caprins. Les imagos
infestent principalement les bovins tandis que les immatures se retrouvent
dans leur grande majorité sur les caprins. Au Sénégal Oriental, en zone
de savane nord-soudanienne,
les populations semblent plus limitées sur le
bétail à cause notamment de l’existence en plus grand nombre d’hôtes sauvages
eu égard à la proximité du parc national du Niokolo Koba.
Tique impliquée dans la transmission de la piroplasmose bovine à BubeAu
bigemim SMITH et KILBORNE 1893 et de I’anaplasmose bovine à AnapLanma
mang,&&. C’est une espèce propre à la région éthiopienne ; elle est absente
cependant de la sous région australe.
En Afrique occidentale,
son aire de distribution coi’ncide avec la steppe
boisée xerophyte sahélienne sud et la savane nord soudanienne. Sa présence
est notée au Sénégal dans ces deux types d’habitat
et dans la région des
Niayes. Les bovins supportent l’essentiel de I’infestation occasionnée par ce
Booph,il.a.
La dynamique des populations dans la zone des Niayes où cette espèce
est dominante se caractérise p a r la permanence d’une certaine charge parasi-
taire sur les bovins et par l’existence de trois vagues successives (graphique 2).
Au cour de la saison des pluies, il y a une réduction drastique de cette tique
sur le bétail comme si les pluies entravaient l’activité du parasite.
Espèce vicariante de la précédente en zone de savanes sud-soudaniennes
et guinéennes où elle est supposée assurer la transmission de Babeha bigemina.
Ce rôle vectoriel n’est pas encore entièrement démontré, néanmoins, des babésies
ont été trouvées chez cette espèce (GRAF et al, 1981).
Au Sénégal,
ce Boop&& se retrouve au sud de I’isohyète des 900 mm de
pluies annuelles.

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Boophilus decoloratus
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Infestation Tiques
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(Echelle logarithm ique)
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BOOPHILUS GEIGYI
: BOVINS
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lOO(.
lC(

- 4
La dynamique de cette tique est assez similaire à celle de 8. deccrktltitrs
avec une activité plus marquée à la saison sèche qu’à la saison des pluies où
o n n o t e u n e n e t t e r é d u c t i o n d e s e f f e c t i f s .
Espèce introduite dans la zone éthiopienne, elle s’est adaptée aux savanes
subtropicales sud-soudaniennes (MOREL, 1 9 6 9 ) . Ce Booptiti est le vecteur
de la piroplasmose bovine en Amérique. Sa présence signalée naguère dans les
Niayes (MOREL, 1961) et en Casamance, n’est plus remarquée dans ces deux
r é g i o n s .
2ISituation a v a n t l a s é c h e r e s s e ( c a r t e 1 )
L ’ a i r e d e d i s t r i b u t i o n d e c e s d i f f é r e n t e s e s p è c e s aGant l a s é c h e r e s s e
était très étendue et couvrait plus ou moins l’ensemble du pays. Outre leur
localisation actuelle, les populations d’A. utiegatum e t d e 8. dec~&7t~titi s e
r e t r o u v a i e n t e n z o n e s a h é l i e n n e n o r d , l e l o n g d u f l e u v e S é n é g a l e t d e s e s
ramifications qui offraient grâce à leur végétation riveraine dense un habitat
favorable à leur maintien.
Des populations’ de 8. an~uRuXti é t a i e n t l o c a l i s é e s d a n s l e s s a v a n e s
s o u d a n o - g u i n é e n n e s d e l a BaSse C a s a m a n c e e t d e l a r é g i o n d e K é d o u g o u .
IMPLICATIONS EPIDEMIOLOGIQUES
Les principales maladies transmises par les tiques au bétail dans la sous-
r é g i o n s o n t l a C o w d r i o s e , l e s E h r l i c h i o s e s , les Anaplasmoses et les Piroplas-
moses.
Selon le profil de la coexistence entre l’hôte, l’agent pathogène et le vec-
t e u r d a n s u n e z o n e é c o l o g i q u e d o n n é e , c e q u i d é t e r m i n e l e c a r a c t è r e s t a b l e o u
instable
d e s e n z o o t i e s , oh a
une plus ou moins grande répercussion de ces
maladies sur la santé des animaux.
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Pour la Cowdriose, si généralement on constate une stabilité enzootique
pour les bovins autochtones, c’est loin d’en être le cas pour les bovins importes
qui succombent très souvent à l’infection. Dans la zone des Niayes, les petits
ruminants qui ne sont pas soumis au même mode d’élevage que les bovins et ne
sont pas exposés régulièrement à I’infestation ixodidienne, payent un lourd
tribut à cette maladie quoiqu’ils fassent depuis longtemps l’objet d’un élevage
traditionnel dans ce milieu.
Les Ehrlichioses, à l’instar de la Cowdriose, manifestent une grande
pathogénicité pour les animaux introduits et constituent une contrainte patholo-
gique importante à la saison des pluies moment de prolifération des tiques.
L’Anaplasmose bovine qui affecte sérieusement le cheptel en zone sahé-
lienne suite aux modifications écologiques pose des problèmes d’épidémiologie
non encore résolus. La compréhension des causes de cette instabilité enzoo-
tique exige au préalable une identification des vecteurs et la connaissance
de l’état immunitaire des animaux.
Enfin, pour les Piroplasmoses, l’évaluation de leur impact est moins aisée
car l’usage de médicaments polyvalents ne permet pas toujours de les distinguer
de la trypanosomose animale qui recoupe les mêmes aires de distribution.

- 6
CONCLUSION
Malgré les perturbations climatiques régnant actuellement au niveau des
zones sahéliennes et soudaniennes, les tiques considérées jusqu’ici comme les
vecteurs majeurs continuent à se maintenir dans leurs habitats naturels qui
correspondent aux écosystèmes pastoraux les plus recherchés. II est admis
généralement que le cheptel autochtone vivant dans les zones d’enzootie soit
peu affecté par les mortalités occasionnées par ces anthropodes quoique I’im-
pact de cette pathologie sur la productivité des troupeaux mérite d’être évalué.
La transhumance et la tendance à une sédentarisation des zébus dans les
régions méridionales plus favorables du point de vue alimentaire se heurtent
par contre à cette contrainte que constituent les maladies transmises par les
tiques dont l’importance en Afrique occidentale et centrale est mal appréhendée.
Par ailleurs, une simple amélioration des conditions climftiques est susceptible
d’entraîner des bouleversements si importants sur le niveau des populations
de tiques, que des pullulations de ces acariens peuvent être observées dans
de vastes régions géographiques à l’instar de ce qui se passe présentement
dans la zone sahélienne où ffyuXamma &pe4?.-&&um (SCHULZE et SCHLOTTKE,
1929)envahit les pâturages et infeste massivement les bovins. De telles
situations poseront à coup sûr de sérieux problèmes d’épidémiologie.

- 7
B I B L I O G R A P H I E
CAMICAS (J. L. ) , CORNET (J. P. ) - Contribution à l’étude des tiques
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GRAF (J.F.), NIEDERER (A.),. AESCHLIMANN (A.), BURGDORFER (W.) -
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GUEYE (A.), MBENGUE (Mb.), DIOUF (A.), SEYE (M.) - T i q u e s e t
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HOOGSTRAAL (A.) - African I x o d i d a e . 1. Ticks of the Sudan ( W i t h
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Res. Rep. Namry 0050502907, Washington ( US. COVT. Print Office),
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6- MOREL (P.C. ) - Contribution à la connaissance de la distribution des
tiques (Acariens,
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Thèse doctorat Sci. Nat., Fac.Sci. Orsay, Univ. Paris, 16 décembre
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