La streptothricose cutanée II. Sur quelques cas...
La streptothricose cutanée
II. Sur quelques cas spontanés
chez des caprins dans la région de Dakar
par G. MÉMERY
INTRODUCTION
Bouc rJ0 I
Au cours de l’année 1958 et plus particulière- /
11 est en assez bon état général mais marque
ment au cours de la saison des pluies, une affec-
une certaine répugnance à se déplacer et de-
tion cutanée, localisée principalement au niveau
meure immobile ou bien se couche lorsqu’il
de la tête, du scrotum, et de l’extrémité inférieure
n’est pas sollicité.
des membres a été observée sur plusieurs boucs
Son museau, envahi de croûtes, est sale et
de la Ferme de Sangalcam, annexe du Labora-
crevassé jusqu’au milieu du chanfrein. Lescroûtes
toire Central de I’Elevage de Dakar (1). Cette
des lèvres, dont quelques-unes sont arrachées,
affection que nous nous proposons de décrire
certainement par la préhension des aliments,
présente des analogies certaines d’une part avec
sont plates, minces et craquelées. Sur leur pour-
la streptothricose bovine, d’autre part avec le
tour, elles sont plus épaisses et forment un en-
strawberry foot-rot du mouton (11).
semble irrégulier de troncs de cônes de dimen-
sions variables empiétant souvent les uns sur
OBSERVATIONS
les autres. Les plus grands ont un centimètre de
diamètre à la base et un centimètre environ de
1. Etat des animaux
hauteur.
en début de l’observation
Au niveau du chanfrein elles sont sensible-
ment identiques aux précédentes bien que plus
En septembre 1958, est posé par un infirmier
uniformes et moins crevassées. Leur épaisseur
le diagnostic d’écthyma contagieux sur un bouc
atteint 1/2 cm en moyenne.
qui présente au niveau du museau et de la com-
Leur arrachement découvre un épiderme à
missure des lèvres quelques croûtes grises et
vif, sanieux, rouge, dont les papilles sont très
rugueuses.
fortement hypertrophiées et s’encastrent inti-
Un mois après, nous apprenons que les croûtes
mement, à la manière d’un doigt de gant, dans
ont envahi entièrement les lèvres et ont atteint
une architecture identique mais complémentaire
une partie du chanfrein. Les autres éléments du
de la face interne des croûtes.
troupeau sont apparemment indemnes de ma-
D’autres lésions sont découvertes en différents
ladie.
points du corps. Un érythème douloureux et
Le caractère évolutif de ces lésions, et l’absence
suintant intéresse la couronne des membres
de contagion apparente de l’affection infirment
antérieurs.
Des proliférations dermo-épider-
le diagnostic d’ecthyma contagieux, et nous déci-
miques, plus ou moins importantes, en modifient
dons d’aller inspecter nous-même le troupeau,
le profil normal, et des croûtes grises, rugueuses,
où trois nouveaux cas sont décelés.
épaisses,
craquelées et légèrement sanieuses
recouvrent l’ensemble. Le sac scrotal est aussi
Reçu pour publication : mai 1960.
envahi sur un tiers de sa surface par des croûtes
Rev. Elev. Méd. vét. Pays trop., 1960, 13, no 2-3
dont l’épaisseur est environ d’un demi-centi-

Fig. 1. - Skeptothricose chez le bouc : lésions de la tête et des membres (partie inférieure).
mètre et dont la surface, craquelée et sanieuse,
Enfin sur la couronne supérieure gauche un
montre des traces de grattage, laissant supposer
érythème suintant commence à se manifester.
l’existence d’un prurit impérieux.
Enfin d’autres croûtes ont proliféré en cer-
Bouc no 3
taines régions très pileuses, poitrine et barbe en
particulier, où leur épaisseur atteint 3 ou 4 cen-
Quelques papules discrètes sont visibles aux
timètres.
commissures des lèvres. Le scrotum est, par
contre, atteint sur la moitié de sa surface, et les
B
couronnes des membres postérieurs montrent
OUC no 2
des lésions à un stade assez avancé. Ces lésions
II présente quelques papules érythémateuses
sont cependant identiques par leur aspect et
aux commissures des lèvres, dont certaines sont
leurs caractères à celles décrites chez les deux
déjà recouvertes de croûtes grisâtres et coni-
animaux précédents.
formes.
Les trois animaux sont isolés et placés en
m
Sur le chanfrein une croûte épaisse bien déli-
observation pendant deux mois dans le but de
mitée et certainement plus ancienne que les
suivre l’évolution de cette affection et d’en faire
précédentes intéresse une petite surface seule-
une étude clinique et expérimentale plus appro-
ment.
fondie.
144

Fig. 2. - Streptothricose chez le bouc : lésions de la tête.
2. Evolution de la maladie
tion rapide d’une croûte d’abord mince et jau-
nâtre, qui s’épaissit en trois ou quatre jours et
Au bout d’un mois, nous notons les observa-
reprend l’aspect de la croûte primitive.
tions ci-après :
Des infections secondaires pyogènes se déve-
loppent en certains points et un pus crémeux,
Bouc no I
légèrement sanieux, parfois verdâtre, envahit les
Au niveau de la tête : Les croûtes s’étendent
interstices sous-crustacés (Infections à staphy-
très lentement vers les parties plus pileuses et
locoques et à streptocoques pyogènes, mais
gagnent irrégulièrement le pourtour des yeux et
principalement,
semble-t-il, à Corynebocterium
des oreilles. Au niveau de la mâchoire inférieure
eyo@nes ou au bacille de Schmorl).
où le poil est très long, les croûtes sont très
Au niveau du poitrail : L’évolution est lente et
épaisses, très adhérentes et sèches. Elles forment
difficile à suivre. Les croûtes sont épaisses. Elles
des blocs compacts difficiles à arracher, étant
sont parfois entraînées par la croissance des
solidement fixées par les poils qu’elles englobent.
poils et ne sont plus en contact avec la peau.
Après arrachement expérimentai ou acciden-
Au niveau du scrotum : Peu à peu toute la partie
tel de l’une d’elles, une exosérose épidermique
inférieure du scrotum est atteinte. Les croûtes
accompagnée en certains points de suffusions
très adhérentes sont ourlées sur leur pourtour
sanguines apparaît et provoque la reconstitu-
d’un oedème érythémateux, sensible au toucher
14.5

Fig. 3. - Streptothricose chez le bouc : lésions des parties inférieures des membres (couronne),
et légèrement suintant. Leur épaisseur atteint
tate une inflammation interdigitée, suintante.
1 cm environ. Elles portent à leur surface des
nauséabonde à anaérobies (Spherophorus necro-
traces de grattage et s’accompagnent de petites ’ phorus ou Fusiformis nodosus de BEVEKIDGE (3)
hémorragies au fond de certaines crevasses.
ou encore à spirochètes (Treponema podovis de
Des infections secondaires se manifestent par un
L. et P. BLAIZOT (4).
pus crémeux qui sourd par endroit. A la face
L’état général est mauvais. L’animal s’alimente
interne des cuisses et sous le ventre d’autres
mal ; la préhension des aliments est difficile et
croûtes se développent par contact, semble-t-ii,
la mastication douloureuse. II se déplace peu
avec les précédentes ; elles sont moins épaisses
et reste le plus souvent accroupi.
et moins craquelées, car plus récentes.
Deux mois environ après le début de I’obser-
Au niveau des membres : Des lésions suintantes
vation il meurt dans un état de cachexie avancée
occupent la couronne des quatre membres. Elles
avec des lésions des membres lui interdisant
atteignent en certains endroits les paturons, le
toute station debout.
boulet et s’élèvent même jusqu’à la racine des
membres en plaques irrégulières. Les couronnes
Bouc no 2
œdématiées et suintantes sont très sensibles et
ne permettent à l’animal qu’une station debout
La maladie évolue chez cet animal comme chez
pénible et douloureuse.
le précédent. Cependant l’atteinte étant à I’ori-
Les complications sont nombreuses. A côté
gine moins grave, les lésions de la face commen-
des infections pyogènes déjà signalées, on cons-
cent seulement à gagner le chanfrein. Les cou-
146

ronnes des membres postérieurs sont entière-
COMMENTAIRES
ment cedématiées et les paturons couverts de
zones croûteuses, alors que celles des membres
1. Apparition et développement
antérieurs sont moins atteintes. Le scrotum pré-
de la maladie
sente uniquement une petite croûte d’un centi-
mètre de diamètre. L’animal s’alimente bien et
Seuls ces mâles adultes ont été atteints. II ne
son état général est encore satisfaisant. II est
semble cependant pas, malgré les apparences,
alors soumis à un traitement dont les résultats,
qu’une sensibilité liée au sexe puisse être incri-
excellents, sont consignés plus loin.
minée. Si le premier animal touché est un mâle,
comme tout mâle de cette espèce il se bat régu-
Bouc no 3
lièrement avec ses congénères du troupeau.
Vraisemblablement les frottements, les égrati-
L’évolution des lésions est identique à celle
gnures, et les irritations qui se produisent au
observée chez le premier bouc et la mêmedescrip-
niveau de la tête lors de ces batailles ont favorisé
tion serait à reprendre point par point. Comme
la transmission, ce qui explique que seuls les
pour le bouc no 2 un traitement est institué, qui
boucs aient contracté l’infection, dont la porte
« fixe » la dermatose, mais ne l’améliore pas.
d’entrée paraît s’être située au niveau de la
Le sujet ne peut se rétablir et meurt au bout de
tête.
trois mois. Les lésions stationnaires sont demeu-
Les premiers symptômes se sont manifestés au
rées suffisamment importantes pour entraver
cours du mois de septembre, après la période des
une bonne alimentation du malade et accélérer
pluies, puis la maladie a évolué en saison sèche,
l’état de faiblesse.
même sur des animaux maintenus à l’intérieur.
147

Les précipitations atmosphériques, dans ce cas,
rapide. Les lésions semblent d’autre part s’étendre
ne jouent apparemment pas un rôle aussi impor-
non par la formation de nouvelles papules sur
tant que chez le bœuf.
des régions encore indemnes, mais par Ia pro-
II est remarquable que le troupeau auquel
gression d’un bourrelet marginal érythémateux
appartiennent les animaux malades passe la
œdématié et suintant,
journée dans la brousse où les arbres épineux
AU niveau des parties pileuses il n’a pas été
croissent en abondance et que ces lieux de pacage
facile de suivre l’évolution des lésions. Les
soient les mêmes que ceux des bovins de la
croûtes englobent les bulbes pileux lors de leur
Ferme dont un certain nombre sont atteints de
formation et sont ainsi solidement fixées à la
streptothricose.
peau. La chute des poils n’est constatée que là
où ils sont courts et tÎns(membres
et ventre par
2. Lésions
exemple). Dans les régions où ils sont longs et
durs, cette chute ne s’effectue pas et les poils
Les parties glabres et principalement les lèvres
continuent à pousser normalement malgré les
et le museau ont été les premières lésées. L’ani-
lésions.
mal en se lechant et se grattant avec les dents,
Au niveau des couronnes, les réactions dermo-
principalement au niveau du scrotum et de
épidermiques sont plus importantes que sur les
l’espace interdigité, doit contaminer de cette
autres régions du corps. II se forme de véritables
manière des régions plus pileuses où les altéra-
végétations confluentes de la grosseur d’une
tions se développent rapidement. Ce n’est que
cerise recouvertes de croûtes qui sont très rapi-
sur l’animal anciennement infecté et très atteint
dement crevassées et sanieuses, conséquence des
que l’on trouve des croûtes sur les autres régions
tractions que subit la peau de ces régions lors de
du corps (menton et poitrail).
la marche.
Les lésions débutent par une inflammation
Par arrachement, on découvre un épiderme
dermique avec réaction épidermique se tradui-
congestionné et sanieux ayant les mêmes carac-
sant par la formation de papules érythémateuses
tères que précédemment mais présentant une
puis suintantes. Plusieurs papules peuvent appa-
hypertrophie des papilles dermiques plus pro-
raître distinctes les unes des autres ou plus ou
noncée encore. L’inflammation générale y est
moins coalescentes. La coagulation de la sérosité
toujours très intense, l’oedème érythémateux
qui sourd à leur surface entraîne la formation
sensible qui l’accompagne rend les déplacements
rapide d’une croûte mince qui s’épaissit ensuite
douloureux et la quête de la nourriture pénible.
du fait de I’exosérose toujours existante, mais
Les croûtes qui s’étendent sur les membres n’ont
surtout à la suite de la réaction hyperkérato-
pas de caractères particuliers mais leur arrache-
sique importante de l’épiderme.
ment accidentel ou volontaire entraîne la chute
Par arrachement on découvre un derme sous-
des poils fins et courts de ces régions, contraire-
jacent érythémateux et œdématié, avec des
ment à ce qui se passe là où ies poils sont durs et
papilles hypertrophiées et sanieuses. Ces diverses
longs.
réactions, plus intenses et plus anciennes au
Des complications sont de règle, surtout sur
centre de la lésion qu’à sa périphérie, contribue
les parties inférieures des membres ; on note des
à donner à la croûte cet aspect « conique ou
infections à spirochètes qui rétrocèdent rapide-
tronconique » caractéristique, déjà décrit.
ment par des traitementsau novarsénobenzol, des
Par coalescence il se forme les plaques croû-
infections à anaérobies avec suintement putride
teuses plus ou moins uniformes où il devient
interdigité (piétin ou Foot rot des Anglo-saxons)
impossible de distinguer les papules initiales.
attribué principalement à Fusiformrs nodosus en
Elles sont généralement grises, crevassées et
association ou non avec le spirochète, mais aussi
sanieuses. Leur face interne est percée d’une
des infections secondaires purulentes sans loca-
multitude de petits cratères correspondant aux
lisations précises. Un pus sous-crustacé, blanc,
papilles dermiques, et recouvert d’un léger
sanieux, ou légèrement verdâtre, généralement
enduit blanc sec ou parfois crémeux.
bien lié, peut sourdre à la surface des croûtes par
Au niveau du scrotum, si leur origine est
l’interstice d’une crevasse. La présence de ce pus
identique, la coalescence des croûtes est plus
fait perdre aux croûtes les caractères spécifiques
148

de la maladie, Ces infections purulentes sont
(Ies amas paraissent provenir de la désagréga-
principalement dues à des staphylocoques et des
ion des filaments.
streptocoques pyogènes, à des corynébactéries
Sur les frottis effectués avec la face externe des
banales ou pathogènes tel le bacille pyogène
Iroûtes, iI n’est pas possible d’observer les élé-
(Corynebacterium pyogenes), enfin au bacille de
nents précédents alors qu’ils le sont à partir du
la nécrose (Sphorophorus necrophorus).
produit de grattage de la surface de l’épiderme
‘raîchementdécouvert. La concentration en micro-
srganismes est toutefois moins importante.
ÉTUDE EXPÉRIMENTALE
Ce germe végète donc dans l’interstice SCUS-
crustacé en contact de l’épiderme et protégé du
A. - Etude bactériologique
milieu extérieur par les croûtes.
a) Bacfériosco~ie des croûtes
b) Isolemenf du germe
L’examen microscopique d’un frottis de I’en-
Pour l’isolement on utilise de la gélose au sang
droit de la face Interne des croûtes peut être fait
coulée en tubes ou en boîtes de Pétri. L’inocu-
directement ou après coloration.
!um est le produit de raclage de la face interne
Bien que la coloration de Gram donne des
d’une croûte arrachée extemporanément de pré-
résultats satisfaisants, la méthode la plus rapide
férence. Un certain nombre de boîtes ou tubes
et la plus fine consiste à employer la thionine
est employé. Les souillures souvent nombreuses
phknlquée. Le Giemsa chaud est aussi excellent,
ont tendance à en envahir toute la surface grâce
mais cette technique est plus longue et le colo-
à leur croissance rapide sur ce milieu riche.
rant moins stable. Quelle que soit la coloration
De petites colonies grises visibles dès la
utilisée, on peut déceler sur de tels frottis la
48” heure sont repiquées en vue de leur isole-
prksence d’un parasite (bactérie ou champignon)
ment. Elles sont très adhérentes au milieu et
apparaissant sous un certain nombre d’aspects
difficiles à prélever. Le repiquage s’effectue sur
bien caractéristiques.
gélose-sérum (10 y0 de sérum de cheval), I’obser-
Les formes filamenteuses ayant l’allure d’un
vation des colonies y étant plus facile que sur
mycelium prédominent généralement. Le fila-
gélose au sang et le développement des colonies
ment peut être simple, uniformément coloré,
encore satisfaisant.
non segmenté, articulé de loin en loin au niveau
de noeuds légèrement plus larges. Des formes de
c)
Coracfères
morphologiques
bourgeonnements latéraux ont été observées.
Mais les figures les plus fréquemment rencon-
L’étude bactériologique est encore très suc-
trées sont des fragments mycéliens à diamètre
cincte et non terminée. Les grandes analogies que
variable formés d’éléments cocciformes dispo-
ce germe présente avec ceux isolés des cas de
sés en double, triple, quadruple rangées. Nous
streptothricose bovine font l’objet d’une étude
avons convenu de dénommer « pseudo-myce-
comparative en cours.
lium » (5) de tels filaments. Les ramifications ne
AU point de vue morphologique, ce microorga-
sont pas rares ; elles possèdent généralement un
nisme présente plusieurs phases, se succédant
nombre inférieur de rangées de cocci à celui du
plus ou moins rapidement dans le temps selon le
filament initial.
milieu employé (riche ou pauvre, solide ou
Parfois le pseudomycelium semble avoir éclaté
liquide), ie nombre de repiquages subis par le
et les éléments cocciformes s’être répandus en
germe, la température et le degré hygrométrique.
amas. On rencontre dans certains d’entre eux
Les colonies de 24 à 48 heures sont formées
des cocci beaucoup plus grands que les précé-
d’un feutrage mycélien (uniformément coloré par
dents, plus fortement colorés, disposés en rangées
Ia thionine phéniquée, irrégulièrement par le
simples ou doubles, et à partir desquels nous
Gram) non septé, mais articulé et ramifié :
avons pu observer des figures de germination.
certains filaments présentent parfois un renfle-
A côté des formes mycéliennes ou pseudomy-
ment ampullaire à leur extrémité.
céliennes on constate la présence d’amas de cocci
Rapidement les parties les plus anciennes se
où les deux types précédents sont représentés.
divisent en éléments cocciformes disposés en
149

rangées simples, doubles, triples etc.,., l’ensemble
A partir des culfures pures
gardant la morphologie du mycélium initial d’où
le nom de pseudomycélium que nous IV; avons
Comme dans la maladie du boeuf il n’a pas
donné. Puis les cocci ne forment plus que des
encore été possible de reproduire expérimen-
amas compacts sans structure, la majorité pet--
talement la maladie naturelle. Seules ont été
dant peu à peu leurs propriétés tinctoriales.
obtenues, et uniquement sur les régions de peau
Seuls certains d’entre eux, généralement de
traitée, des lésions caractéristiques et morpholo-
type différent par leur taille, leur aspect et leur
giquement identiques à celles de l’infection natu-
mode d’apparition, restent colorables par la
relle. Cependant elles prennent plus ou moins
thionine phéniquée. Repiqués sur un milieu neuf
rapidement une allure régressive, analogue aux
et adéquat, ils donnent des figures de germina-
lésions de la maladie naturelle en voie de gué-
tion et un nouveau mycélium caractéristique.
rison. Elles n’ont jamais tendance à l’extension,
ni à la généralisation.
d) Caractères culturaux
La technique est celle que nous avons decrite
pour le boeuf (5).
Gélose au sang : Colonies fines, grises, adhé-
.
Nous avons inoculé des chèvres, des mouions,
rentes au milieu, apparaissant en 24, 48 heures.
des lapins, des boeufs zébus et N’Dama, et les
La culture est plus rapide après entraînement,
résultats de ces inoculations sont en tout point
Vers la 72e heure elles perdent leur caractère R
comparables à ceux obtenus avec des souches
pour devenir S puis elles se pigmentent en jaune
bovines (5).
vers le 5” jour, deviennent brillantes, crémeuses
La sensibilité de la chèvre vis-à-vis de cette
et moins adhérentes au milieu. Elles peuvent
souche, ne s’est pas révélée supérieure à celle
atteindre 2 mm de diamètre. L’hémolyse du sang
constatée envers des souches d’origine bovine.
de boeuf est constante dès la 72e heure.
Géiose sérum : L’aspect des cultures est sensible-
ment identique : mêmes caractères, même évo-
C. - Traitement
lution.
Bouillon sérum : La culture se manifeste par des
Traifement spécifique
flocons qui se fixent sur les parois du tube ou
tombent au fond. Certains viennent en surface
- Auréomycine (chlorhydrate injectable). Une
formant un pseudo-voile. Le liquide reste clair
injection intraveineuse de 100 mg chaque jour
ou se trouble très légèrement.
pendant 4 jours.
Gélose profonde : Apparition de colonies sphé-
- Auréomycine (pommade). Après les injec-
riques, opaques, légèrement arborescentes sur
tions précédentes les régions où l’épiderme ne
toute la hauteur du tube.
semblait pas avoir repris un aspect normal ont
été enduites chaque jour avec de la pommade
i30~illon V F. anaérobie : Culture en légers
jusqu’à la formation d’un épiderme sain.
flocons qui se déposent au fond du tube ; le
liquide reste clair.
Eau de levure : aucune culture.
Traitement adjuvant
Gélatine :
Culture faible, meilleure après
adjonction de sérum. Aucune liquéfaction après
- Eau oxygénée à 20 volumes diluée au
10 jours de culture à 37OC.
l/lO.
- Solution de novarsénobenzol.
B. - Reproduction expérimentale des ksions
Au niveau des couronnes et des espaces inter-
digités un traitement secondaire est institué pour
A parfir des croûtes
lutter contre les infections à anaérobies et à
spirochètes. Pendant 4 jours les lésions sont soi-
Les résultats sont identiques à ceux obtenus à
gneusement nettoyées et humectées, alternative-
partir de cultures pures.
ment avec l’eau oxygénée, et le novarsénobenzol.
150

Résulfofs
clinique dans toute son ampleur et ses aspects
ovolutifs.
Bouc no 2
La souche isolée chez la chèvre est difficile à
Les croûtes ont commencé à tomber dès le
différencier des souches d’origine bovine que
i ’
2~’ jour du traitement. Le 4e jour, la plupart I nous possédons. Les particularités constatées ne
avaient séché et disparu. Cependant, alors que
sont pas qualitativement plus importantes que
certaines étaient remplacées par un épiderme
celles existant entre ces dernières. Malgré ces
lisse et sain, tel qu’il apparaît chez le lapin par
résultats et les fortes présomptions qu’entraî-
exemple, lors de guérison naturelle, d’autres
nent nos observations, il n’est pas possible d’affir-
découvraient un épiderme rugueux où, semble-
mer que seul ce microorganisme est l’agent causal
t-il, de nouvelles croûtes auraient pu se former.
de cette affection. Certaines réserves doivent
Ces régions traitées à la pommade ont pris rapi-
encore être faites tant que la maladie expéri-
dement un aspect normal.
mentale ne sera pas superposable sous tous ses
Au niveau de l’extrémité inférieure des
aspects à la maladie naturelle.
membres, grâce au traitement adjuvant, les
La streptothricose de la chèvre est, d’autre
lésions suintantes, nauséabondes et prolifera-
part, une affection connue depuis longtemps dans
tives ont disparu en 3 ou 4 jours. Les croûtes de
l’Ouest africain bien qu’elle n’ait jamais étésigna-
la maladie spécifique sont tombées sans se refor-
Iée au Sénégal. Dès 1927, elle est décrite par
mer.
BEST (6) au Nigeria puis par BEATON (9) et
signalée au Tanganyi ka en 1927 et 1930. Toute-
Bouc flo 3
fois les lésions qui sont décrites par BEATON (9)
ne correspondent pas exactement à celles que
II etait très atteint lorsque le traitement fut
nous avons observées. Elles se localisent dans les
instrtué.
Les croûtes avaient déjà envahi la
régions de dos et du garrot, pour envahir peu à
racine des membres et l’animal restait la plu-
peu les côtes et la croupe, sans provoquer la
part du temps couché. Le traitement spécifique
chute des poils. En particulier les lésions de la
précédent a dû être répété trois fois à 8 jours
tête et des membres ne sont pas enregistrées.
d’intervalle, tandis que les soins externes étaient
Toutefois, selon KEARNEY (10) et BEATON (9),
poursuivis.
le germe mis en évidence par bactérioscopie et
Après le premier traitement, un certain nombre
par culture est très voisin sinon semblable à ceux
de croûtes, parmi les plus récentes, ont séché et
isolés chez les bovins et bien que les descriptions
sont tombées. D’autres ont régressé en surface
soient assez sommaires, nous pouvons l’identifier
sans toutefois disparaître complètement (scro-
sinon le rapprocher de celui que nous avons
tum, couronnes). La première interruption de
étudié. En Grande-Bretagne, une affection voi-
huit jours vit les infections secondaires de l’espace
sine des moutons est décrite depuis quelques
interdigité se développer de nouveau tandis que
années sous le nom de streptothricose » ou de
les croûtes demeuraient stationnaires.
« Sfrawberry foot rd » HARRIS (1948) (11). Les
Malgré deux autres traitements aucune amélio-
lésions sont localisées sur les membres, mais ne
ration plus substantielle ne put être obtenue et
sont pas signalées sur la tête, sinon exception-
l’animal, affaibli, finit par mourir dans le ma-
nellement. Un germe identique ou voisin est
rasme.
isolé qui permet de reproduire la maladie.
NISBET et BANNATYNE (1955) font état d’une
DISCUSSION
affection similaire mais les lésions siègent au
niveau des régions laineuses. Ils observent cepen-
Nous nous sommes trouvé devant le même
dant des lésions sur les couronnes et le scrotum
problème que pour la streptothircose bovine :
des mâles, identiques à celles que nous avons
isolement d’un germe de la famille des Actino-
décrites. Le même germe est isolé et permet de
mycetacae (BUCHANAN), trouvé en grande
reproduire les lésions. LALL et RAJAGOPALAN
abondance dans les lésions lorsqu’elles sont
(1949), en Inde (13), ont fait une relation sem-
étendues, qui permet de reproduire localement
blable.
un tableau lésionnel typique, mais pas l’entité
II semble donc que, pour le mouton et la chèvre
151

comme pour les bovins, la streptothricose revête
BIBLIOGRAPHIE
selon les régions et les climats des aspects diffé-
rents qui sont l’expression d’une seule et même
1. LABORATOIRE CENTRAL DE L’ÉLEVAGE.
affection.
Dakar, Rapport sur le (onctionnemenf 1958 : 54.
Bien que leur rôle pathogène exclusif ne soit
2. BEVERIDGE (W. 1. B.). -1. Council Sci. Ind.
pas encore démontré, il est troublant de constater
Res., 1935, 8 : 308.
que les germes isolés dans cette dermatose,
3. BEVERIDGE (W. 1. B.). - /. Council SO. Ind.
quel que soit le pays où elle est observée et I’as-
Res., 1938, I I : 103.
pect sous lequel elle se présente, sont toujours
4. BLAIZOT (L.) et (P.). - C. R. Acod. SC;.,
les mêmes ou très voisins les uns des autres.
1928, 187 : 911.
La streptothricose de la chèvre n’est sans doute
5. MEMERY (G.) et THIERY (G. ). - Strepto-
que l’extension occasionnelle et sporadique de la
thricose bovine (à paraître).
maladie du boeuf, plus répandue et que nous
6. BEST (J. M. B.). - Ann. Repf Vef. Depf Nigeria,
étudions plus longuement (5).
1927 : 29.
7. ANONYME. - Ann. Rept. Vet. Dept Sci. and
CONCLUSION
Ani, Husb., Tangonyika, 1929.
8. ANONYME. - Ann. Rept Depf Vet. SO. ond
Quelques casspontanés de streptothricose cuta-
Ani., Husb. Tanganyiko, 1930.
née sont étudiés chez des boucs de la région de
9. BEATON (W. G.). - Ann. Repf Vet. Depf
Dakar : symptômes, évolution, lésions.
Nigeria, 1932 : 20.
Les recherches expérimentales portent sur
10. KEARNEY (W.). -Ann. Rept Vef. Dept Nigeria
l’étude bactériologique et les essais de traite-
1927 ; 53.
ment.
11. HARRIS (S. T.). - J camp. Path., 1948, 58 :
L‘étroite parenté avec la maladie chez les
314.
bovins est soulignée.
12. NISBET (D. 1.). et BANNATYNE (C. C.) -
laboratoire central de I’Elevage
Vet. Rec., 1955, 67 : 713.
« Georges CURASSON »
13. LALL (H. K.) et RAJA COPALAN (V. R.). -
Directeur : P. MORNET.
Indian 1. vet. Sci., 1949, 19 : 1.
SUMMARY
Cutaneous Streptothricosis, II. Note on several cases of spontaneous infection in goats in the
region of Dakar.
In the Dakar area, during the rainy season of 1958, a cutaneous infection of goats on a bree-
ding station, was observed. The infection was localised principally on the head, the scrotum and the
lower parts of the legs. The syndrome and lesions were studied and the author describes his experi-
mental bacteriological investigations and attempts at treatment. This latter consisted of I/V injections
of aureomycin chlorohydrate (100 p, d. for 4 days) and cleaning up of the lesions alternately with
-
H, 0, and a solution of novarsenobenzol.
This infection bears analogies with bovine streptothricosis and strawberry foot-rot of sheep.
An isolate of an organism of the family Actinomycetacae reproduced a local lesion typical to the natu-
rai lesion, but the natural clinical syndrome did not ensue. The isolated organism was difficult to dif-
ferentiate from that of bovine origin.
152

c
RESUMEN
Streptotricosis cuthnea. II. Sobre algunos casos exponthneos
en ganado caprino de la regi6n de Dakar.
En la region de Dakar, durante la estacion de las Iluvias de 1958, una afeccion cutanea, que se
localiza de preferencia en cabeza, escroto y parte inferior de las extremidades ha sido observada
en varios machos cabrios de una granja ; sintomas, evolucion y lesiones son estudiados. El autor
describe 10s resultados de sus experiencias bacteriologicas y tratamientos que ha ensayado. Han
consistido éstos, en inyecciones intravenosas de chorhidrato de aureomicina (100 mg durante 4 dias)
y limpieza de las lesiones empleando alternativamente agua oxigenada y una solution de novarseno-
benzol.
Esta afeccion presenta analogias con la streptotricosis bovina y con la strawberry foot-rot del
s
cordero. El autor ha aislado un germen de la familia de las Actinomicetcjceas que permite reproducir
localmente un cuadro de lesiones tipico, pero no la enfermedad clinica natural. La cepa aislada es
. _
diflcil de diferenciar de las cepas de origen bovino.
153

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