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REPUBLIQUE DU SENEGAL
MINISTERE DU DEVELOPPEMENT
RURAL ET DE L'HYDRAULIQUE
INSTITUT SENEGALAIS DE RECHERCHES
AGRICOLES (I.S.R.A.)
DEPARTEMENT DE RECHERCHES SUR LES
PRODUCTIONS ET LA SANTE ANIMALES
LABORATOIRE NATIONAL DE L'ELEVAGE
ET DE RECHERCHES VETERINAIRES
B.P. 2057
DAKAR-HANN
LA DIFFUSION DU PROGRES GENETIQUE PAR
LA MISE EN PLACE DE GENITEURS
AU SENEGAL
Par
Dr Mamadou MBAYE
Communication à l'atelier sur "l'amélioration
génétique des bovins en Afrique de l'Ouest"
Banjul, Gambie, du 17 au 2&octobre 1992
Octobre 1992.

1. INTRODUCTION
Le cheptel sénégalais est caractérisé par sa diversité, son nombre et sa
bonne adaptation aux conditions climatiques et sanitaires souvent défavorables.
Il constitue une base essentielle de l'économie nationale par sa contribution
à la formation du P.I.B. national
et à celle du P.I.B. du secteur primaire
chiffréesrespectivement à 6,5 et 3,2 p.100 (1).
Toutefois,
ses performances sont faibles ; en effet, toutes espèces con-
fondues, la production laitière estimée à 198 650 tonnes ne permet d'assurer
à chaque sénégalais que 29 litres de lait par an (5). Le niveau de production
en viande connaît une baisse régulière ; ainsi la consommation per capita qui
était de 21 kg en 1960 a baissé jusqu'à 10 kg (5) en 1988 (5).
Face à cette situation et devant une démographie galopante (3 Z), des
mesures ont été prises afin de pouvoir améliorer les productions animales.
Parmi ces mesures, figure en bonne place un programme d'amélioration
génétique du potentiel animal local qui a été confié à la recherche zootech-
nique.
Ce programme d'amélioration génétique a débuté en 1925 au CNRA de Bambey
par la mise en place d'un modèle de croisement visant à obtenir un bovin de
trait de bon gabarit et d'une bonne valeur bouchère. Il s'est poursuivi au
niveau des Centres de Recherches Zootechniques de Dahra et de Kolda qui, par
ce biais, devaient impulser la production de viande en intervenant essentielle-
ment sur le génotype des animaux et en diffusant ce matériel génétique amélioré
en dehors des stations.
Les moyens mis en oeuvre pour l'exécution de ce programme et les résul-
tats obtenus sont présentés et analysés dans ce présent document.
. . ./ . . .

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II. LES SYSTEMES D'AMELIORATION GENETIQUE
Au Sénégal, deux systèmes ont été éprouvés: il s'agit du croisement entre
races locales à des fins de produire un bovin de trait et d'autre part, la
sélection des races locales.
2.1 - Le croisement
Le croisement, utilisant comme races parentales le zébu Gobra et le Tau-
rin Ndama, a été initié au niveau du Centre National de Recherches Agronomiques
de Bambey.
Il a permis la création d'un métis dit"de Bambeq'caractérisé par les
degrés de sang : 13/16 de Ndama et 3/16 de zébu Gobra. Sa diffusion, tentée
par le système des parcs de saillies en milieu villageois, a été très tôt
interrompue par l'arrêt du programme. Et son utilisation a été effective sur-
tout au niveau des unités expérimentales du Sine-Saloum.
2.2 - Programme de sélection des races bovines locales
La sélection bovine au Sénégal est encore exclusivement réalisée en sta-
tion et porte essentiellement sur la production bouchère.
Un schéma de sélection a été adopté et pratiqué au niveau des deux Cen-
tres de Recherches Zootechniques du pays (Dahra et Kolda), avec :
. chez les mâles quatre étapes :
- au sevrage (entre 6 et 9 mois) jugement sur les performances pondérales
et staturales, les animaux retenus sont placés en prétestage collectif ;
- à l'issue du prétestage collectif, avec des critères de choix identiques
à ceux de la phase précédente ;
- les animaux choisis sont placés ensuite en prétestage individuel à la
suite duquel, les jeunes mâles sont jugés sur leurs propres performances
pondérale et staturale, alimentaire (indice de consommation) et sexuel-
les (libido, valeur de la semence) ;
. . . / . . .

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- enfin, les animaux retenus sont utilisés pour la fécondation des
femelles du Centre, et de l'extérieur (diffusion de géniteurs) afin
de porter un jugement sur la valeur de leur descendance
. chez la femelle :
chez
Les critères de choix sont moins sévères quelles mâles. Les femelles sont
évaluées sur leurs performances pondérales, staturales, de reproduction (préco-
cité, fréquence de vêlage et la production laitière).
Pour les performances pondérales, des seuils ont été fixés (tableaux 1
et 2) pour le zébu Gobra.
Tableau 1 : Seuils fixés pour le jugement des mâles Gobra (Source 4)
Poids à la
Seuils
naissance
Poids à
Poids à
Poids à
(kg)
6 mois
12 mois
24 mois
Destinées
Testage en station
20 %
22
106
138
287
Testage hors station
70 %
Réformés - Castrés
Tableau 2 : Seuils fixés pour le jugement des femelles Gobra (Source 4)
Poids à la
Seuils
naissance
Poids à
Poids à
Poids à
6 mois
12 mois
24 mois
Destinées
(kg)
80 %
19
70
97
159
Lot reproduction
20 %
Réforme
. . . / . . .

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. Chez le taurin Ndama, les critères suivants ont été retenus :
. la couleur de la robe : la robe fauve est un critère déterminant
chez le mâle
. le poids : le choix sur cette variable se fait chez le mâle à 6 mois,
16 ou 18 mois et 22 ou 24 mois, et chez les femelles au moment de la
première mise à la reproduction. Il n'y a pas cependant de seuils
fixés, mais pour les mâles, les futurs géniteurs sont identifiés à
partir du lot de taurillons issus d'abord du prétestage collectif
puis individuel,
2.2.1 - Les résultats de la sélection bovine
Chez le zébu Gobra, l'application du schéma de sélection a permis d'amé-
liorer de façon sensible les poids à âges types. T,e poids à la naissance enregis-
tre une augmentation de plus de 5 kg ; celui à 6 mois a été presque doublé
(tableau 3).
Par ailleurs, avec une amélioration des conditions de l'environnement,
les gains géngtiques attendus par génération (tous les 7, 9 ans) sont de
7,13 kg, 14,03 kg, 10,2 kg respectivement pour les poids à 6 mois, 12 mois
et 18 mois (6).
Tableau 3 : Croissance du zébu Gobra
Naissance
6 mois
10 - 12 mois
Age adulte
Type d'élevage
(4 6 ans)
-
Elevage traditionnel
16
53
Elevage encadré (SODESP)
22
135
300 - 400
CRZ/Dahra
. moyenne générale
25,5
103,9
146,7
. lot élite 1
26,0
99
147,5
335,2
. lot élite 2
25,4
103,8
150
332,l
Source : . Mamadou DIOP - Mémoire de confirmation 1987 (2)
. Productivité du zébu Gobra - UNIVAL (6).
. . . / . . .

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Chez le taurin Ndama, une évolution nette a été enregistrée au niveau
de la croissance des produits issus du troupeau de fondation et ceux nés au
CRZ de Kolda (tableau 4).
Tableau 4 : Croissance du taurin Ndama (Source 7)
Poids (kg)
Naissance
6 mois
12 mois
Troupeau de fondation
17,6
80,l
112,3
Animaux nés aux CRZ
. Mâles
17,8
87,04
115,08
. Femelles
16,6
86,lV
100
. . . / . . .

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III. DIFFUSION DU MATERIEL GENETIQUE
Avec les premiers résultats du programme d'amélioration génétique, il a
été retenu le principe d'intégrer le cheptel bovin du Sénégal. L'objectif
visé était :
. de faire bénéficier à ce cheptel du progrès génétique obtenu en station,
. de réaliser un testage hors station des géniteurs. Le voie choisie fut
alors la mise en place de géniteurs mâles.
3.1 - Les moyens de la diffusion du matériel génétique
3.1.1 - Les moyens techniques et humains
En rapport avec les zones ciblées par cette diffusion, les CRZ ont été
dotés des moyens suivants :
. une bétaillère pour tous les convoyages en dehors du département d'implanta-
tion du Centre,
. des fiches individuelles pour chaque géniteur retenu,
. des ressources humaines chargées de l'organisation,de la mise en place et
du suivi des géniteurs et comprenant :
- le personnel des CRZ : le chercheur responsable de la vulgarisation,
un agent technique d'élevage et un chauffeur,
- le personnel technique des services régionaux et départementaux.
3.1.2 - Le contrat d'amélioration génétique
Il s'agit essentiellement d'un texte approuvé par les autorités de l'éle-
vage et de la recherche sous la forme d'un contrat comportant un préambule
et deux
titres.
. . . / . . .

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a) Préambule
Il s'agit des généralités devant permettre d'assurer une réussite de
l'opération à savoir :
- la participation indispensable des pasteurs et des services et projets de
l'état intervenant dans le secteur de l'élevage,
- la nécessité de réaliser de
bonnes conditions d'abreuvement et d'alimentation,
- la mise en place d'un encadrement rapproché des troupeaux d'accueil des
géniteurs.
b) Titre 1
. Les obligations de l'éleveur qui portent sur :
- les soins à dispenser au géniteur cédé et qui doivent être à
l'image de ceux d'un bon père de famille ;
- la clause de garder pendant quatre ans minimum le géniteur sous
réserve de la survie de ce dernier ;
- le paiement,étalé en quatre annuités,du prix de cession du
géniteur ;
- la castrationou l'élimination des autres mâles présents au sein
du troupeau lors du placement du géniteur ;
- la déclaration des naissances et l'identification des produits.
c) Titre II
. Les obligations du CRZ et des services et projets de l'élevage :
- le reproducteur de cession doit être sain, d'un bon potentiel
génétique, d'une bonne aptitude à la monte et âgé de 30 mois au
minimum. En cas d'insuffisance sexuelle, le géniteur doit être
remplacé.
. . ./ . . .

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- En outre, le CRZ et les services d'élevage se doivent d'assurer :
. le contrôle de la descendance des produits des géniteurs,
. des tests de performances en station sur les taurillons issus de
géniteurs de cession,
. le remplacement des géniteurs morts.
De par son contenu, ce contrat a subit une série de modifications. A
l'origine, vers les années 1965, il s'agit d'une simple location de geniteurs
selon un coût annuel de 2 000 F. Dans son exécution, il impliquerait le ser-
vice de l'élevage, le CRZ et l'élevage. En 1975, la formule cession-vente
fut retenue et le prix du géniteur Gobra porté à 80 0000 F CFA payables en
quatre annuités dont la première était versée au moment de la réception.
Les structures concernées restaient identiques. En 1982, le prix de cession
fut porté à 100 000 F avec toutefois les mêmes modalités de règlement.
Par,ailleurs,
la priorité a été accordée aux sociétés ou projets de développe-
ment de l'élevage et ceci en rapport avec leur possibilité d'assurer un suivi
des géniteurs (ressources humaines et financières disponibles et moyens tech-
niques adéquats).
3.2 - L'organisation de la diffusion de géniteurs
Elle était assurée par les CRZ en rapport avec les services régionaux
et départementaux de l'élevage et/ou les responsables des sociétés ou projets
régionaux chargés du développement de l'élevage.
Tout éleveur intéressé par un géniteur doit passer obligatoire par le
service de l'élevage de sa localité ou la société régionale chargée du
développement de l'élevage.
Les besoins totaux recensés sont présentés au cours de la réunion
annuelle en présence du responsable du CRZ de Dahra.
Selon le disponible en géniteurs, une répartition était alors faite
par région et un planning de mise en place adopté d'un commun accord avec
les chefs des services régionaux de l'élevage.
. . ./ . . .

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3.2.1 - Mise en place des géniteurs
Elle se faisait soit par convoyage à pied, soit par la bétaillère du CRZ.
* Le convoyage à pied : cette méthode était surtout pratiquée par les
éleveurs des régions voisines : Diourbel - Fleuve.
* Le convoyage par bétaillère.
Dans ce cadre, les géniteurs étaient déposés au niveau de la structure
locale de l'élevage. Les éleveurs avisés à l'avance passaient récupérer l'ani-
mal de leur choix.
Pour chacun des types de convoyage, les dispositions sont prises afin
que chaque éleveur signe le contrat avant d'entrer en possession de con animal.
3.3. - Nombre de géniteurs placés
Pour la période allant de l'année 1965 à 1983, 441 géniteurs Gobra ont
été placés au niveau des régions administratives de Louga, Diourbel, Saint-
Louis, Kaolack, Fatick et Tambacounda (7).
Quant au Taurin Ndama, le nombre de géniteurs produit est une centaine (8).
La zone de placement était essentiellement la région naturelle de la Casamance.
3.4 - Les problèmes identifiés
Ils portent sur différents aspects de cette amélioration à savoir :
. le noyau de base trop faible pour que la diffusion de géniteurs puisse avoir
un impact réel. Ainsi, le nombre de géniteurs mis en place était trop limité
et il n'existait pas de structures intermédiaires pour la multiplication
des taureaux et leur diffusion .
. la participation insuffisante des différents acteurs concernés et impliqués
dans cette opération : il s'agit ici essentiellement des éleveurs et des
services de l'élevage. Les premiers se contentaient de recevoir les animaux,
. . . / . . .

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et les seconds n'assuraient pas le suivi des animaux. Dès lors, il n'y
avait pas souvent de retour des informations sur le comportement des géni-
teurs, le nombre de produits obtenus et leurs performances;
. les problèmes matériels : l'utilisation de la bétaillère ne se faisait pas
sans grandes difficultés liées :
- à l'enclavement des zones, d'où des problèmes d'accès surtout en
hivernage,
- au coût du transport (maintenance de la bétaillère et frais de carbu-
rant), aussi à partir de 1982, le coût était à la charge des éleveurs,
. le choix de la race : ce problème s'est surtout posé dans le contexte du
CRZ de Dahra où les éleveurs ont affiché un intérêt particulier aux géni-
teurs zébu Guzerat. Cet intérêt se jusitifie par le niveau de performances
des croisés FI en rapport avec le phénomène d'hétérosis, mais aussi par
l'attrait des races exotiques ;
. les conditions environnementales souvent rigoureuses du milieu d'accueil
posaient le problème de l'adaptation des géniteurs et étaient souvent à
l'origine de la mortalité élevée, 22,5 % (il s'agit des mortalités déclarées).

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IV. CONCLUSION
Après la mise en place du programme de sélection bovine au niveau des
Centres de Recherches Zootechniques de Dahra et de Kolda, il avait été retenu
de diffuser le matériel génétique amélioré à travers le système traditionnel
d'élevage.
Cette opération initiée en 1965 pour le zébu Gobra et en 1975 pour le
taurin Ndama a permis d'une part de placer respectivement 441 et 100 géniteurs
zébu Gobra et Ndama, et d'autre part, d'obtenir une excellente sensibilisation
des éleveurs caractérisée par la forte demande devenue très vite supérieure à
l'offre.
Cependant,
il est à signaler un certain nombre de problèmes qui sont :
. la faible participation des acteurs concernés et impliqués dans cette opéra-
tion de diffusion,
. le noyau de base de cette sélection qui ne permet pas à cette diffusion
d'avoir un impact réel,
. le coût de l'opération lié essentiellement à la réduction des ressources
des structures de recherche, à la localisation souvent difficile d'accès
des zones ciblées,
. la présence d'autres races bovines exotiques qui attiraient certains
éleveurs,
. et les conditions environnementales souvent rigoureuses.
La levée de ces contraintes passerait par une implication de tous les
acteurs concernés par l'amélioration génétique, une fixation claire des
objectifs de cette amélioration, et enfin la création d'un marché de géni-
teurs qui puisse concurrencer le marché de la viande.
. . ./ . . .

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B I B L I O G R A P H I E
COMITE NATIONAL D'AMELIORATION GENETIQUE
"Amélioration génétique des espèces géniteurs au Sénégal". Définition d'un
cadre général. - 11 p. Mars 1990.
DIOP (M.)
Etude du système d'élevage dans la zone d'emprise du CRZ de Dahra. Mémoire
de titularisation. - 75 p. Ocotbre 1987.
MBAINGINGATOLOUM (F.M.)
"L'insémination artificielle bovine au Sénégal". Thèse de Doctorat vétérinaire
n"18. EISMV - LJCAD. - 164 p. 1982.
4- NDIONE (C.M.)
"Quelques données relatives à la production de viande bovine à partir de zébu
Gobra". Thèse de Doctorat vétérinaire n"6. EISMV - UCAD. 1981.
5- MINISTERE DELEGUE CHARGE DES RESSOURCES ANIMALES
Plan d'action de l'élevage. 1985.
6- SOW (R.), THIONGANE (P.I.), TRAIL (J.C.), DENIS (J.P.), MBAYE (M.), DIALLO (1) -
"Productivité du zébu Gobra au Sénégal". Etude et document. Vol 1 no2 UNIVAL.
1988.
7 - Rapports d'activités du CRZ de Dahra des années 1965 à 1983.
8 - Rapports d'activités du CRZ de Kolda des années 1976 à 1986.