INSTITUT D’GLEVAGE ET DE MÉDECINE ...
INSTITUT D’GLEVAGE
ET DE MÉDECINE
VÉTÉRINAIRE DES PAYS TROPICAUX
REVUE D’ÉLEVAGE
ET DE
MÉDECINE VÉTÉRINAIRE
DES PAYS TROPICAUX
La rickettsiose générale bovine
au Sénégal
par M. RIOCHE
Tome XIX : nouvelle sers)
NO 4 - 1966
- - V I G O
-~ T FRÈRES, ÉDITEURS
23, rue de l’École-de-Médecine, PARIS-VI _
Rev. Elev. Méd. Vét. Pays frop., 1966, 19, 4 (485 - 494).
La rickettsiose générale bovine
au Sénégal
par M. R/OCHE
RÉSUMÉ
L’existence de la rickettsiose générale bovine est signalée au Sénégal. Les
travaux déjà effectués dans divers pays sur cette affection sont rappelés. Les
symptômes et lésions sont décrits. La présence de Rickeffsia bovis dans le sang et
certaines anomalies leucocytaires « presque pathognomoniques » permettent
le diagnostic de la maladie. Le seul traitement efficace consiste en injections
d’auréomycine par la voie veineuse à la dose de 4 à 5 mg/kg/jour pendant
4 à 5 jours. Le rôle d’Amb/yoma
variegofum dans la transmission de la maladie
est démontré.
Alors qu’elle était déjà connue dans plusieurs
RÉPARTITION GÉOGRAPHIQUE
pays d’Afrique, la rickettsiose générale bovine à
Rickeftsia bovis (DONATIEN et LESTOQUARD,
En raison de son observation récente, la
1936) est d’observation récente au Sénégal.
répartition des foyers de rickettsiose générale
Plusieurs cas de cette maladie ont été en effet
bovine au Sénégal n’est pas encore connue.
identifiés dans la région du Cap Vert au cours
Jusqu’à présent, elle n’est signalée que dans la
de la saison des pluies 1965.
région du Cap Vert.
Rickeftsio bovis a été décrite pour la première
Le premier cas clinique est observé à San-
fois par DONATIEN et LESTOQUARD (1936)
galkam le 17 août 1965. II s’agit d’une vache
en Algérie. Par la suite, G. DE KOCK, VAN
zébu de race sahiwal. Cet animal fait partie
HEERDEN, R. DU TOIT et W. 0. NEITZ la
d’un lot de 12 zébus de même race importés de
signalent en Afrique du Sud en 1937.
Tunisie le 13 juillet 1965 en vue d’une améliora-
Puis, DONATIEN et LESTOQUARD repren-
tion par croisement des races locales.
nent leurs travaux et concluent que cette ricket-
Cette vache meurt le 15 août.
tsie, fréquente en Algérie, détermine une maladie
Puis les cas se succèdent durant les mois
bénigne, jamais mortelle (1937, 1938 et 1940).
d’août et de septembre.
Si en Algérie les bovins sont peu sensibles à
Sont ainsi identifiés :
l’infection à Rickeffsio bovis, il n’en n’est pas de
- un cas mortel le 21 août,
même dans d’autres régions. En effet, MAL-
- un cas le 22 août,
BRANT, BAYROU et RAPIN en 1939, au Tchad
- un cas le 24 août,
et au Congo-Brazzaville, puis GIRARD et
- un cas le 31 août,
ROUSSELOT en 1945 au Soudan, décrivent une
- trois cas dont un mortel le 13 septembre,
affection grave déterminée par ce protozoaire.
- deux cas le 16 septembre.
FINELLE en 1958 signale une mortalité de 25 p.
100 en République Centrafricaine.
Donc, sur les douze animaux formant ce lot,
Dans le cas présent, c’est sous une forme
dix contractent la maladie et chaque fois Ric-
identique, souvent mortelle, que nous l’avons
keffsia bovis est identifiée dans les prélèvements
observée au Sénégal, chez des bovins importés.
effectués.
4 8 5
Un cas mortel est ensuite observé le 20 sep-
8 jours avec des symptômes de paralysie (**),
tembre, dans un élevage de Sébikotane, sur
le dernier, atteint de graves troubles intestinaux,
une vache jersiaise n’ayant jamais eu de con-
ne résiste que 5 jours (cas de Sébikotane).
tact avec les zébus sahiwal.
Enfin, au mois d’octobre, à Sangalkam, un
b) Sympfômes.
veau ndama, âgé de 3 mois et maintenu en
Bien que dans plusieurs cas le traitement ait
stabulation depuis sa naissance, est envoyé au
provoqué une guérison rapide, la présence
pâturage afin de savoir s’il serait atteint de
de certains symptômes est constante.
rickettsiose naturelle, ceci dans le but de vérifier
Au début de la maladie, l’animal est triste
si les zébus pakistanais avaient été contaminés
et abattu. II se tient debout, immobile, la tête
sur place. Après quelques temps, Rickeffsia bois
basse, ou couché, indifférent à ce qui l’entoure.
est identifiée pendant plusieurs jours dans le
II ne mange pas et ne rumine plus. La tempéra-
sang de l’animal.
ture oscille entre 39O et 41 OC. La respiration est
accélérée et dyspnéique (cl l’auscultation, le
Espèces sensibles.
murmure vésiculaire est perceptible) et la
Nous n’avons observé la maladie naturelle
percussion révèle des zones de matité, en général
que sur des bovins. DONATIEN et LESTO-
bilatérales et localisées aux régions supérieures.
QUARD (1936) ont démontré qu’on pouvait
La toux, quand elle existe, est sèche et quinteuse.
transmettre expérimentalement R. bovis au
Le rythme cardiaque est accéléré. Dans toutes
mouton qui ne présente qu’une hyperthermie
les formes cliniques, les excréments sont diar-
passagère. Ceci a été confirmé par ROUSSELOT
rhéiques.
(1953).
A côté de ces symptômes qui sont constants,
Nous avons tenté de transmettre la maladie
existent assez souvent des signes nerveux. Ils
à la chèvre par inoculation intraveineuse de
peuvent être relativement bénins et disparaître
15 ml de sang d’un bovin infecté. L’animal n’a
après la guérison : paralysie du larynx (cornage)
présenté pendant les deux mois d’observation
ou signes d’hyper-excitabilité.
aucun symptôme et aucune rickettsie n’a pu
Cependant,chez certains animaux,ces derniers
être mise en évidence dans le sang circulant.
peuvent être graves. Deux cas ont été observés :
Par ailleurs, des inoculations de sang à la
souris (par la voie intra-péritonéale) et au cobaye
Premier cas : taureau sahiwal (évolution surai-
(par lesvoies intra-péritonéaleet intra-cardiaque)
guë en 12 heures).
ont été pareillement négatives.
Phases d’excitation et de somnolence. Crises
épileptiformes avec chute sur le sol, yeux révul-
sés, salivation et mouvements de galop. Après
É V O L U T I O N E T SYMPTÔMES
la crise, état d’hébétude puis relever pénible
suivi d’une période de somnolence avec tête
Les symptômes et l’évolution de la maladie
appuyée contre le mur et tremblements muscu-
n’ont pu être étudiés de façon complète que chez
laires généralisés. La mort survient au cours
quelques animaux.
d’une crise épileptiforme.
Deuxième cas : vache zébu sahiwal (évolution
a ) Evolufion.
aiguë en 8 jours).
Dans la forme suraiguë, deux animaux meu-
Dès le début de la maladie, lever et déplace-
rent en 12 heures environ et la mort est pré-
ments difficiles ; membres postérieurs raidis
cédée chez l’un par des symptômes nerveux
(sans doute par gêne articulaire) donnant à la
spectaculaires (*). Chez trois animaux, la mala-
démarche une allure titubante. L’animal bute
die évolue en 5 à 8 jours (forme aiguë). Un
fréquemment. Au bout de deux jours,decubitus
animal guérit en 5 jours après un traitement
sternal, station debout pénible. Le cinquième
à l’auréomycine, un autre meurt au bout de
jour, decubitus latéral, station debout impossible.
(*) Premier cas clinique (décrit plus loin).
(**) Deuxième cas clinique (décrit plus loin).
486
Paralysie apparente avec de courts moments
placards hémorragiques très nombreux sur la
d’excitation (esquisse de mouvements de galop).
pie-mère de la moelle lombosacrée et de la
msensibilité cutanée des membres et de la
queue de cheval (photos 1, 2, 3 et 4).
croupe. Disparition du réflexe pupillaire. Opis-
thotonos permanent. Dès le quatrième jour,
AGENT CAUSAL
b
signe de l’oreille (GIRARD et ROUSSELOT,
1945). Température oscillant entre 38,s et 39,SOC.
L’examen des frottis de sang périphérique
L’évolution se termine par la mort de l’animal.
et des frottis par apposition de rate, poumon,
rein, foie, ganglions lymphatiques, colorés par la
méthode de May-Grunwald-Giemsa, permet
LÉSIONS
de mettre en évidence Rickettsio bovis soit dans
les monocytes, soit dans les macrophages (Pho-
Les muscles peauciers et le conjonctif sous-
tos 5, 6 et 7).
cutané sont le siège d’une congestion intense
qui peut s’étendre à toutes les séreuses. Hydro-
1. Sang périphérique.
péricarde constant, sérofibrineux, parfois hémor-
Toutes les inclusions observées présentent la
ragique. Epanchements citrins dans les cavités
morphologie déjà décrite par de nombreux
pleurales et péritonéale.
auteurs (DONATIEN et LESTOQUARD, 1936,
Lésions hémorragiques constantes dont les
1937, 1940) (GIRARD et ROUSSELOT, 1945)
plus caractéristiques siègent sur le myocarde
(ROUSSELOT, 1953).
et les troncs artèriels. Ce sont des pétéchies et
suffusions sanguines (myocarde) et des placards
a) Corps inifial.
hémorragiques, le plus souvent à la base de
Taille comprise entre 2 ët.8 @. Sa coloration
l’artère pulmonaire ou le long de l’aorte thoraci-
varie du lilas clair au violet foncé. Lorsqu’il est
que. Lésions hémorragiques fréquentes au
gros, le corps initial paraît souvent formé de
niveau de la rate, du péricarde, des poumons et
plusieurs masses sombres noyées dans une
de la plèvre.
gangue de couleur plus claire. II refoule souvent
Congestion active et cedème aigu du poumon,
le noyau en donnant l’impression d’être logé
avec parfois oedème périlobulaire important
dans une encoche de celui-ci. Son contour est en
donnant un aspect en mosaïque différent cepen-
général régulier et arrondi mais peut être
dant de celui observé dans la péripneumonie
irrégulier.
bovine.
En principe, on ne trouve qu’une seule inclu-
sion par cellule mais il n’est pas rare d’en obser-
Autres lésions :
ver plusieurs, de taille variable. Les corps ini-
-
tiaux sont souvent situés dans une vacuole et
foie congestionné et friable,
- rate réactionnelle
(granuleuse au toucher),
paraissent de ce fait entourés d’un halo clair.
- ganglions lymphatiques toujours hyper-
b) Mordu.
trophiés et succulents, parfois congestionnés,
- congestion rénale.
C’est un corps initial en voie de fragmentation
qui se colore par le May-Grunwald-Giemsa en
rose lilas ou en gris mauve. Elle est ronde et
Lésions nerveuses :
d’aspect granuleux. Comme le corps initial,
Congestion plus ou moins intense des ménin-
elle est souvent située dans une vacuole du
ges. Chez une vache sahiwal (2e cas clinique
cytoplasme. Sa taille varie dans les mêmes
:
décrit), congestion intense de la pie-mère qui
proportions que celle du corps initial et comme
est très épaissie et porte sur sa face externe de
lui, elle peut refouler la membrane nucléaire,
très nombreux nodules blanchatres
de la gros-
seur d’une tête d’épingle, disséminés sur toute la
c) Corps élémenfaire.
méninge,
mais particulièrement abondants au
Ils sont de petite taille (0,2 à 0,8 p) et en
niveau du bulbe, de la face inférieure du tronc
général de coloration lilas. Leur situation! à la
cérébral et de la moelle épinière. Pétéchies et
limite de la visibilité les rend difficiles à étudier
REVUE D’ÉLEVAGE
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488
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Photo no 5. - Rickettsio bovis : sang périphérique.
Au centre, monocyte contenant un amas de corps élémentaires.
Clichés GRÉTILLAT (2) ef RIOCHE (M.)
Photo no ‘6. - Rickeffsio bovis : sang périphérique.
Photo no 7. - Rickettsio bovis : frottis de poumon.
Monocyte contenant des corps initiaux
Macrophage contenant quatre corps initiaux (à droite
et quelques corps élémentaires (en haut).
du noyau) et une morula (au-dessus du noyau).
sauf lorsqu’ils sont groupés en amas ou situés
2. Organes divers.
isolément dans de petites vacuoles. Leur mor-
Si les prélèvements sont faits dès la mort de
phologie est coccoïde ou cocco-bacillaire.
l’animal, il est possible de faire des frottis de
La présence de Rickettsia bovis dans le sang
sang et d’y identifier le parasite. Dans le cas
*
s’accompagne de lésions sanguines.
contraire, et de toute façon, on trouve les rickett-
Tous les auteurs qui ont étudié les rickettsioses
sies dans les frottis des divers organes. Les plus
des monocytes mentionnent l’existence d’une
riches sont les poumons, puis les reins, le foie et la
monocytose. La proportion des monocytes est
rate. Les Ricksettsia se trouvent soit dans les
augmentée et le taux de ces cellules peut dépas-
monocytes du sang de ces organes, soit dans les
ser 20 p, 100. ROUSSELOT (1953) insiste sur la
macrophages.
valeur diagnostique de cette augmentation ; mais
II faut insister sur le fait qu’on ne trouve jamais
la monocytose seule ne suffit pas. En effet, la
Rickeffsia bovis dans les cellules réticulo-endo-
formule leucocytaire des bovins varie sensible-
théliales de la tunique interne des vaisseaux
ment d’un jour à l’autre et l’on peut parfois
sanguins.
observer une monocytose moyenne en l’absence
de rickettsiose.
DIAGNOSTIC
Dans la rickettsiose générale bovine, la mono-
cytose est accompagnée d’un ensemble d’autres
Les symptômes décrits ne permettent pas de
modifications qui constituent avec elle un tableau
poser le diagnostic avec certitude mais seulement
presque pathognomonique.
de suspecter la maladie. Seul l’examen des
En effet, outre qu’il y a augmentation de leur
frottis de sang permet de le confirmer. II en est de
pourcentage, la plupart des monocytes ont un
même pour le diagnostic nécropsique.
cytoplasme fortement vacuolaire (dans ces
vacuoles on observe souvent des masses grisâ-
tres à contours indistincts, déjà décrites par
DIAGNOSTIC DIFFÉRENTIEL
DONATIEN et LESTOQUARD, 1936, 1937 ;
on peut aussi y voir des corps élémentaires).
II doit se faire avec la heart-water. En effet,
Souvent, le noyau, bien qu’il conserve sa struc-
les symptômes et lésions de la rickettsiose géné-
ture habituelle, a des contours plus ou moins
rale bovine sont assez voisins de ceux de la
tourmentés ou un aspect « déchiqueté ».
heart-water. Cependant, à l’autopsie, l’oedème
On trouve aussi des cellules ou des formes
périlobulaire observé ne semble pas avoir été
cellulaires dont la présence dans le sang circu-
décrit dans la heart-water. II en est de même de
lant est anormale : nombreuses cellules jeunes,
la congestion du tissu conjonctif sous-cutané et
macrophages, cellules en mitose.
des muscles peauciers car, selon CURASSON
Enfin, il y a raréfaction et même souvent dis-
(1943), elle n’existerait pas dans la heart-water
parition des éosinophiles, anomalie signalée
où, au contraire « . . . on a souvent l’impression
par DONATIEN et LESTOQUARD (1936) dans
d’un animal saigné pour la boucherie ».
la rickettsiose canine à Rickeftsia canis. II semble
Toutefois, le diagnostic ne peut être posé avec
d’ailleurs qu’il s’agisse d’une éosinopénie réelle
certitude que par l’examen des prélèvements
car les éosinophiles sont rares ou absents dans
effectués et la mise en évidence de l’agent causal.
les frottis d’organes hématopoïétiques
des ani-
Dans la rickettsiose générale bovine, Rickeffsia
maux atteints.
bovis est identifiée dans les monocytes du sang
II est important d’insister sur ces modifications
circulant ou des organes ; elle ne l’est jamais
de l’image sanguine car ce sont elles qu’on remar-
dans les cellules de I’endothelium vasculaire.
que en premier lieu à l’examen d’un frottis de
A l’inverse, Cowdria (Rickeffsia) ruminantium
sang et que ces lésions sont toujours très visibles
s’observe dans les cellules réticule-endothéliales
alors que, même dans les formes graves, les
de la tunique interne des vaisseaux ,et jamais
rickettsies peuvent être rares et réclamer un
dans le sang circulant.
examen minutieux. L’observation de ces ano-
Non seulement nous avons identifie Rickettsia
.
malies permettra souvent de poser un diagnostic
bovis dans tous les cas, mais nous avons aussi
précoce, même en l’absence de Rickettsio.
recherché systématiquement à mettre en évidence
.m
491
Cowdria ruminontium sur le cadavre. L’examen
constatons que les deux premiers cas apparais-
des frottis effectués (endothélium de la veine
sent après une sortie malencontreuse au pâturage
jugulaire, frottis de plexus choroïde et calques
d’où les animaux reviennent parasités par des
de cerveau fraîchement prélevés) ont été néga-
tiques (surtout des Amblyommo variegofum).
tifs. Ceci a permis aussi d’infirmer l’existence
Par la suite, bien qu’ils ne soient plus sortis
possible d’une infection mixte à Rickettsia bovis
et qu’ils soient soumis régulièrement à un
et à Cowdria ruminaniium.
traitement ixodicide, les animaux hébergent
quelques tiques vraisemblablement introduites
dans l’étable avec le fourrage vert dont on les
PRONOSTIC
nourrit. Tous les animaux atteints sont parasités
par ces arthropodes.
Le pronostic de l’affection est sérieux puisque
sur 14 cas identifiés, 4 ont été mortels.
A la suite de ces observations, nous constatons
Par ailleurs, la morbidité est élevée, au moins
la contamination naturelle au pâturage d’un
chez le bétail importé, puisque sur 12 zébus
veau ndama à Sangalkam (cf. Répartition
importés, 10 contractent la maladie parmi les-
géographique). Une semaine après sa mise au
quels 3 meurent (2 de forme suraiguë et 1 de
pâturage, il présente une hyperthermie pendant
forme aiguë) et 7 (dont 5 présentent une forme
48 heures (39,9 OC le Ier jour, 39,6 OC le second)
grave d’emblée) guérissent en 3 à 7 jours après
sans autre symptôme morbide. Dès le premier
un traitement par l’auréomycine.
jour d’hyperthermie, des examens quotidiens
d’étalements de sang sont pratiqués et à partir
du 9” jour, Ricketfsia bovis est identifiée dans
MODE DE CONTAMINATION
ces prélèvements.
Les rickettsies persistent
pendant 6 jours puis disparaissent. Ce veau
Pour expliquer l’apparition de cette maladie
fait donc une forme inapparente de la maladie
non encore signalée au Sénégal, on ne peut
qui serait passée inaperçue s’il n’avait été soumis
retenir l’hypothèse selon laquelle les zébus
à une surveillance particulière. Ce fait prouve
pakistanais, déjà prémunis avant leur importa-
cependant la réalité de la contamination sur
tion, avaient fait un accès parasitaire déclenché
place.
par les agressions dues au voyage et à I’acclima-
D’autre part, un broyat de tiques est inoculé
tement.
à deux bovins de race locale. Réalisé avec des
En effet :
Amblyomma variegafum récoltés sur des bovins
de race locale, pâturant dans la région de
a) Rickettsia bovis n’a jamais été signalée en
Thiès, ce broyat est mis en suspension dans du
Tunisie, à notre connaissance.
milieu HBSS (Hank’s balanced salted solution)
b) Si la crise d’acclimatement avait provoqué
pour culture de tissus et inoculé (sans antibiotique)
un tel accès parasitaire, tous les animaux
sous la peau des deux animaux. Respectivement,
auraient été malades en même temps, à peu
16 et 29 jours après l’inoculation, Rickeffsio bois
de jours d’intervalle et peu après leur arrivée au
est identifiée dans les frottis de sang de ces
Sénégal. Or ici, non seulement le premier cas
bovins, persiste quelques jours puis disparaît.
est apparu plus d’un mois après l’importation
La présence des rickettsies s’accompagne des
des zébus (et ceux-ci étaient alors acclimatés
modifications sanguines déjà décrites. Ces ani-
ainsi qu’en témoignait leur bon état général)
maux font une forme inapparente de la maladie
mais encore la répartition dans le temps des
car en dehors d’une légère baisse d’état, ils ne
cas de rickettsiose s’étale sur une période
présentent aucun symptôme morbide.
supérieure à un mois.
Cette expérimentation permet de démontrer
L’origine de cette affection ne peut donc être
la transmission de Rickeffsio bovis par Amblyommo
qu’autochtone. Les faits suivants le confirment.
voriegafum et d’établir que la région de Thiès
Chez les zébus sahiwal normalement mainte-
est un foyer de rickettsiose générale bovine.
nus en stabulation libre (l’enclos dans lequel
II faut donc conclure à l’existence de la rickett-
ils évoluent étant dépourvu d’lxodes) nous
siose générale bovine au Sénégal et que cette
492
maladie se montre particulièrement grave chez
au moins une fois par semaine et, en plus de ce
les zébus pakistanais, animaux neufs et peut-
traitement, de maintenir les bovins récemment
être particulièrement sensibles à cette affection.
importés en stabulation permanente.
CONCLUSION
TRANSMISSION TRANSPLACENTAIRE
C’est la première fois, à notre connaissance,
Une des vaches mortes de rickettsiose étant
que la rickettsiose générale bovine est signalée
en gestation, nous avons fait l’autopsie du fcetus
au Sénégal. Cette observation porte à deux, le
et examiné des frottis de sang et des calques
nombre de rickettsioses des monocytes identifiées
d’organes. Le fcetus, âgé de trois mois, était
dans ce pays, puisque, en 1941, CURASSON y
indemne de lésions et la recherche des rickettsies
signale l’existence de la rickettsiose générale
est restée négative. Cependant, l’étude de ce cas
ovine à Rickeftsia ovina (LESTOQUARD et
unique ne permet pas de tirer de conclusion sur
DONATIEN, 1936).
la transmission ou la non-transmission de cette
Dans ce pays, comme dans toutes les régions
rickettsie par la voie placentaire.
tropicales, Ricketfsia bovis est réellement patho-
gène alors que DONATIEN et LESTOQUARD,
1940, constatent qu’en Algérie, elle ne provoque
TRAITEMENT
que des maladies bénignes. CURASSON (1942)
avait fait la même remarque au sujet du rôle
Parmi les traitements essayés, l’utilisation de
pathogène de Rickeffsia ovina. Aussi nous pensons
l’association pénicilline-streptomycine (3 mil-
que, suivant ROUSSELOT (1953), il faut « . . .
lions U. I. - 3 g/jour) ou de la tétracycline en
accorder à ces affections décrites comme inap-
injection intramusculaire s’est toujours soldée
parentes en Algérie une pathogénicité spéciale
par des échecs.
lorsqu’elles interviennent en pays tropical ».
Seule l’auréomycine par la voie intraveineuse,
Dans les quelques cas que nous avons observés,
à la dose journalière de 4 à 5 mg/kg et pendant
c’est surtout pour le bétail récemment importé
4 à 5 jours, a permis d’assurer une guérison
que cette rickettsiose a été très grave. Nous
rapide des animaux. Mais son efficacité semble
ne disposons pas encore d’observations cliniques
illusoire dans les formes suraiguës.
concernant la maladie naturelle sévissant sur le
A ce traitement spécifique est ajouté une
bétail de race locale pour pouvoir juger de sa
thérapeutique symptomatique (tonicardiaque).
gravité éventuelle pour le cheptel sénégalais.
Insfifuf #Elevage et de Médecine
PROPHYLAXIE
vétérinaire des Pays Tropicaux
Maisons-Alforf
La seule prophylaxie actuellement possible
Laboratoire national de /‘Elevage
est la lutte contre les tiques. II est nécessaire de
et de Recherches vétérinaires
traiter les animaux à l’aide d’un produit acaricide
Dakar-Hann
S U M M A R Y
Bovine Rickettsiosis in Senegal
Bovine Rickettsiosis hos been recorded in Senegal. The work which has been
carried out on this disease in some various countries is reported. The clinical
signs and lesions are described. Diagnose of the disease is made through the
evidence of R. bovis in the blood of infected animais and the presence in it of
some abnormal leucocytes which are nearly characteristic of the disease. The
only effective treatment consists
in Aureomycine. Intraveinous injections at the
dose of 4 to 5 mg/kg/ day during 4 or 5 days.
The part played by Amblyommo
voriegofum in the transmission of the disease
has been established.
493
RESUME N
La Rickettsiosis general bovina en Senegal
Se nofa la existencia de la Rickettsiosis general bovina en Senegal. Se pasan
en revista 10s trabajos ya efectuados en varios paises concerniendo a esta
enfermedad. Las sintomas y las lesiones se describen. La presencia de Rickeitsio
bovis en la sangre y algunas anomalias leucocitarias « casi patognomhicas
»
permiien diagnosticar la enfermedad. Las inyecciones de aureomicina por via
venosa en la dosis de 4 a 5 mg/kg/dia durante 4 o 5 dias son el solo iratamiento
activa. Se demuestra el pape1 de Amblyommo
voriegofum en la transmisibn de la
enfermedad.
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DONATIEN (A.) et LESTOQUARD (F.). -
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LESTOQUARD (F.) et DONATIEN (A.). -
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(tome 1), Vigof frères,1953, 152 p.
Imprimé en France. - Imn JOUVE. 12. Rue de Tournon. Paris U-3’)
ET DE MÉDECINE
VÉTÉRINAIRE DES PAYS TROPICAUX
REVUE D’ÉLEVAGE
ET DE
MÉDECINE VÉTÉRINAIRE
DES PAYS TROPICAUX
La rickettsiose générale bovine
au Sénégal
par M. RIOCHE
Tome XIX : nouvelle sers)
NO 4 - 1966
- - V I G O
-~ T FRÈRES, ÉDITEURS
23, rue de l’École-de-Médecine, PARIS-VI _
Rev. Elev. Méd. Vét. Pays frop., 1966, 19, 4 (485 - 494).
La rickettsiose générale bovine
au Sénégal
par M. R/OCHE
RÉSUMÉ
L’existence de la rickettsiose générale bovine est signalée au Sénégal. Les
travaux déjà effectués dans divers pays sur cette affection sont rappelés. Les
symptômes et lésions sont décrits. La présence de Rickeffsia bovis dans le sang et
certaines anomalies leucocytaires « presque pathognomoniques » permettent
le diagnostic de la maladie. Le seul traitement efficace consiste en injections
d’auréomycine par la voie veineuse à la dose de 4 à 5 mg/kg/jour pendant
4 à 5 jours. Le rôle d’Amb/yoma
variegofum dans la transmission de la maladie
est démontré.
Alors qu’elle était déjà connue dans plusieurs
RÉPARTITION GÉOGRAPHIQUE
pays d’Afrique, la rickettsiose générale bovine à
Rickeftsia bovis (DONATIEN et LESTOQUARD,
En raison de son observation récente, la
1936) est d’observation récente au Sénégal.
répartition des foyers de rickettsiose générale
Plusieurs cas de cette maladie ont été en effet
bovine au Sénégal n’est pas encore connue.
identifiés dans la région du Cap Vert au cours
Jusqu’à présent, elle n’est signalée que dans la
de la saison des pluies 1965.
région du Cap Vert.
Rickeftsio bovis a été décrite pour la première
Le premier cas clinique est observé à San-
fois par DONATIEN et LESTOQUARD (1936)
galkam le 17 août 1965. II s’agit d’une vache
en Algérie. Par la suite, G. DE KOCK, VAN
zébu de race sahiwal. Cet animal fait partie
HEERDEN, R. DU TOIT et W. 0. NEITZ la
d’un lot de 12 zébus de même race importés de
signalent en Afrique du Sud en 1937.
Tunisie le 13 juillet 1965 en vue d’une améliora-
Puis, DONATIEN et LESTOQUARD repren-
tion par croisement des races locales.
nent leurs travaux et concluent que cette ricket-
Cette vache meurt le 15 août.
tsie, fréquente en Algérie, détermine une maladie
Puis les cas se succèdent durant les mois
bénigne, jamais mortelle (1937, 1938 et 1940).
d’août et de septembre.
Si en Algérie les bovins sont peu sensibles à
Sont ainsi identifiés :
l’infection à Rickeffsio bovis, il n’en n’est pas de
- un cas mortel le 21 août,
même dans d’autres régions. En effet, MAL-
- un cas le 22 août,
BRANT, BAYROU et RAPIN en 1939, au Tchad
- un cas le 24 août,
et au Congo-Brazzaville, puis GIRARD et
- un cas le 31 août,
ROUSSELOT en 1945 au Soudan, décrivent une
- trois cas dont un mortel le 13 septembre,
affection grave déterminée par ce protozoaire.
- deux cas le 16 septembre.
FINELLE en 1958 signale une mortalité de 25 p.
100 en République Centrafricaine.
Donc, sur les douze animaux formant ce lot,
Dans le cas présent, c’est sous une forme
dix contractent la maladie et chaque fois Ric-
identique, souvent mortelle, que nous l’avons
keffsia bovis est identifiée dans les prélèvements
observée au Sénégal, chez des bovins importés.
effectués.
4 8 5
Un cas mortel est ensuite observé le 20 sep-
8 jours avec des symptômes de paralysie (**),
tembre, dans un élevage de Sébikotane, sur
le dernier, atteint de graves troubles intestinaux,
une vache jersiaise n’ayant jamais eu de con-
ne résiste que 5 jours (cas de Sébikotane).
tact avec les zébus sahiwal.
Enfin, au mois d’octobre, à Sangalkam, un
b) Sympfômes.
veau ndama, âgé de 3 mois et maintenu en
Bien que dans plusieurs cas le traitement ait
stabulation depuis sa naissance, est envoyé au
provoqué une guérison rapide, la présence
pâturage afin de savoir s’il serait atteint de
de certains symptômes est constante.
rickettsiose naturelle, ceci dans le but de vérifier
Au début de la maladie, l’animal est triste
si les zébus pakistanais avaient été contaminés
et abattu. II se tient debout, immobile, la tête
sur place. Après quelques temps, Rickeffsia bois
basse, ou couché, indifférent à ce qui l’entoure.
est identifiée pendant plusieurs jours dans le
II ne mange pas et ne rumine plus. La tempéra-
sang de l’animal.
ture oscille entre 39O et 41 OC. La respiration est
accélérée et dyspnéique (cl l’auscultation, le
Espèces sensibles.
murmure vésiculaire est perceptible) et la
Nous n’avons observé la maladie naturelle
percussion révèle des zones de matité, en général
que sur des bovins. DONATIEN et LESTO-
bilatérales et localisées aux régions supérieures.
QUARD (1936) ont démontré qu’on pouvait
La toux, quand elle existe, est sèche et quinteuse.
transmettre expérimentalement R. bovis au
Le rythme cardiaque est accéléré. Dans toutes
mouton qui ne présente qu’une hyperthermie
les formes cliniques, les excréments sont diar-
passagère. Ceci a été confirmé par ROUSSELOT
rhéiques.
(1953).
A côté de ces symptômes qui sont constants,
Nous avons tenté de transmettre la maladie
existent assez souvent des signes nerveux. Ils
à la chèvre par inoculation intraveineuse de
peuvent être relativement bénins et disparaître
15 ml de sang d’un bovin infecté. L’animal n’a
après la guérison : paralysie du larynx (cornage)
présenté pendant les deux mois d’observation
ou signes d’hyper-excitabilité.
aucun symptôme et aucune rickettsie n’a pu
Cependant,chez certains animaux,ces derniers
être mise en évidence dans le sang circulant.
peuvent être graves. Deux cas ont été observés :
Par ailleurs, des inoculations de sang à la
souris (par la voie intra-péritonéale) et au cobaye
Premier cas : taureau sahiwal (évolution surai-
(par lesvoies intra-péritonéaleet intra-cardiaque)
guë en 12 heures).
ont été pareillement négatives.
Phases d’excitation et de somnolence. Crises
épileptiformes avec chute sur le sol, yeux révul-
sés, salivation et mouvements de galop. Après
É V O L U T I O N E T SYMPTÔMES
la crise, état d’hébétude puis relever pénible
suivi d’une période de somnolence avec tête
Les symptômes et l’évolution de la maladie
appuyée contre le mur et tremblements muscu-
n’ont pu être étudiés de façon complète que chez
laires généralisés. La mort survient au cours
quelques animaux.
d’une crise épileptiforme.
Deuxième cas : vache zébu sahiwal (évolution
a ) Evolufion.
aiguë en 8 jours).
Dans la forme suraiguë, deux animaux meu-
Dès le début de la maladie, lever et déplace-
rent en 12 heures environ et la mort est pré-
ments difficiles ; membres postérieurs raidis
cédée chez l’un par des symptômes nerveux
(sans doute par gêne articulaire) donnant à la
spectaculaires (*). Chez trois animaux, la mala-
démarche une allure titubante. L’animal bute
die évolue en 5 à 8 jours (forme aiguë). Un
fréquemment. Au bout de deux jours,decubitus
animal guérit en 5 jours après un traitement
sternal, station debout pénible. Le cinquième
à l’auréomycine, un autre meurt au bout de
jour, decubitus latéral, station debout impossible.
(*) Premier cas clinique (décrit plus loin).
(**) Deuxième cas clinique (décrit plus loin).
486
Paralysie apparente avec de courts moments
placards hémorragiques très nombreux sur la
d’excitation (esquisse de mouvements de galop).
pie-mère de la moelle lombosacrée et de la
msensibilité cutanée des membres et de la
queue de cheval (photos 1, 2, 3 et 4).
croupe. Disparition du réflexe pupillaire. Opis-
thotonos permanent. Dès le quatrième jour,
AGENT CAUSAL
b
signe de l’oreille (GIRARD et ROUSSELOT,
1945). Température oscillant entre 38,s et 39,SOC.
L’examen des frottis de sang périphérique
L’évolution se termine par la mort de l’animal.
et des frottis par apposition de rate, poumon,
rein, foie, ganglions lymphatiques, colorés par la
méthode de May-Grunwald-Giemsa, permet
LÉSIONS
de mettre en évidence Rickettsio bovis soit dans
les monocytes, soit dans les macrophages (Pho-
Les muscles peauciers et le conjonctif sous-
tos 5, 6 et 7).
cutané sont le siège d’une congestion intense
qui peut s’étendre à toutes les séreuses. Hydro-
1. Sang périphérique.
péricarde constant, sérofibrineux, parfois hémor-
Toutes les inclusions observées présentent la
ragique. Epanchements citrins dans les cavités
morphologie déjà décrite par de nombreux
pleurales et péritonéale.
auteurs (DONATIEN et LESTOQUARD, 1936,
Lésions hémorragiques constantes dont les
1937, 1940) (GIRARD et ROUSSELOT, 1945)
plus caractéristiques siègent sur le myocarde
(ROUSSELOT, 1953).
et les troncs artèriels. Ce sont des pétéchies et
suffusions sanguines (myocarde) et des placards
a) Corps inifial.
hémorragiques, le plus souvent à la base de
Taille comprise entre 2 ët.8 @. Sa coloration
l’artère pulmonaire ou le long de l’aorte thoraci-
varie du lilas clair au violet foncé. Lorsqu’il est
que. Lésions hémorragiques fréquentes au
gros, le corps initial paraît souvent formé de
niveau de la rate, du péricarde, des poumons et
plusieurs masses sombres noyées dans une
de la plèvre.
gangue de couleur plus claire. II refoule souvent
Congestion active et cedème aigu du poumon,
le noyau en donnant l’impression d’être logé
avec parfois oedème périlobulaire important
dans une encoche de celui-ci. Son contour est en
donnant un aspect en mosaïque différent cepen-
général régulier et arrondi mais peut être
dant de celui observé dans la péripneumonie
irrégulier.
bovine.
En principe, on ne trouve qu’une seule inclu-
sion par cellule mais il n’est pas rare d’en obser-
Autres lésions :
ver plusieurs, de taille variable. Les corps ini-
-
tiaux sont souvent situés dans une vacuole et
foie congestionné et friable,
- rate réactionnelle
(granuleuse au toucher),
paraissent de ce fait entourés d’un halo clair.
- ganglions lymphatiques toujours hyper-
b) Mordu.
trophiés et succulents, parfois congestionnés,
- congestion rénale.
C’est un corps initial en voie de fragmentation
qui se colore par le May-Grunwald-Giemsa en
rose lilas ou en gris mauve. Elle est ronde et
Lésions nerveuses :
d’aspect granuleux. Comme le corps initial,
Congestion plus ou moins intense des ménin-
elle est souvent située dans une vacuole du
ges. Chez une vache sahiwal (2e cas clinique
cytoplasme. Sa taille varie dans les mêmes
:
décrit), congestion intense de la pie-mère qui
proportions que celle du corps initial et comme
est très épaissie et porte sur sa face externe de
lui, elle peut refouler la membrane nucléaire,
très nombreux nodules blanchatres
de la gros-
seur d’une tête d’épingle, disséminés sur toute la
c) Corps élémenfaire.
méninge,
mais particulièrement abondants au
Ils sont de petite taille (0,2 à 0,8 p) et en
niveau du bulbe, de la face inférieure du tronc
général de coloration lilas. Leur situation! à la
cérébral et de la moelle épinière. Pétéchies et
limite de la visibilité les rend difficiles à étudier
REVUE D’ÉLEVAGE
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488
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Photo no 5. - Rickettsio bovis : sang périphérique.
Au centre, monocyte contenant un amas de corps élémentaires.
Clichés GRÉTILLAT (2) ef RIOCHE (M.)
Photo no ‘6. - Rickeffsio bovis : sang périphérique.
Photo no 7. - Rickettsio bovis : frottis de poumon.
Monocyte contenant des corps initiaux
Macrophage contenant quatre corps initiaux (à droite
et quelques corps élémentaires (en haut).
du noyau) et une morula (au-dessus du noyau).
sauf lorsqu’ils sont groupés en amas ou situés
2. Organes divers.
isolément dans de petites vacuoles. Leur mor-
Si les prélèvements sont faits dès la mort de
phologie est coccoïde ou cocco-bacillaire.
l’animal, il est possible de faire des frottis de
La présence de Rickettsia bovis dans le sang
sang et d’y identifier le parasite. Dans le cas
*
s’accompagne de lésions sanguines.
contraire, et de toute façon, on trouve les rickett-
Tous les auteurs qui ont étudié les rickettsioses
sies dans les frottis des divers organes. Les plus
des monocytes mentionnent l’existence d’une
riches sont les poumons, puis les reins, le foie et la
monocytose. La proportion des monocytes est
rate. Les Ricksettsia se trouvent soit dans les
augmentée et le taux de ces cellules peut dépas-
monocytes du sang de ces organes, soit dans les
ser 20 p, 100. ROUSSELOT (1953) insiste sur la
macrophages.
valeur diagnostique de cette augmentation ; mais
II faut insister sur le fait qu’on ne trouve jamais
la monocytose seule ne suffit pas. En effet, la
Rickeffsia bovis dans les cellules réticulo-endo-
formule leucocytaire des bovins varie sensible-
théliales de la tunique interne des vaisseaux
ment d’un jour à l’autre et l’on peut parfois
sanguins.
observer une monocytose moyenne en l’absence
de rickettsiose.
DIAGNOSTIC
Dans la rickettsiose générale bovine, la mono-
cytose est accompagnée d’un ensemble d’autres
Les symptômes décrits ne permettent pas de
modifications qui constituent avec elle un tableau
poser le diagnostic avec certitude mais seulement
presque pathognomonique.
de suspecter la maladie. Seul l’examen des
En effet, outre qu’il y a augmentation de leur
frottis de sang permet de le confirmer. II en est de
pourcentage, la plupart des monocytes ont un
même pour le diagnostic nécropsique.
cytoplasme fortement vacuolaire (dans ces
vacuoles on observe souvent des masses grisâ-
tres à contours indistincts, déjà décrites par
DIAGNOSTIC DIFFÉRENTIEL
DONATIEN et LESTOQUARD, 1936, 1937 ;
on peut aussi y voir des corps élémentaires).
II doit se faire avec la heart-water. En effet,
Souvent, le noyau, bien qu’il conserve sa struc-
les symptômes et lésions de la rickettsiose géné-
ture habituelle, a des contours plus ou moins
rale bovine sont assez voisins de ceux de la
tourmentés ou un aspect « déchiqueté ».
heart-water. Cependant, à l’autopsie, l’oedème
On trouve aussi des cellules ou des formes
périlobulaire observé ne semble pas avoir été
cellulaires dont la présence dans le sang circu-
décrit dans la heart-water. II en est de même de
lant est anormale : nombreuses cellules jeunes,
la congestion du tissu conjonctif sous-cutané et
macrophages, cellules en mitose.
des muscles peauciers car, selon CURASSON
Enfin, il y a raréfaction et même souvent dis-
(1943), elle n’existerait pas dans la heart-water
parition des éosinophiles, anomalie signalée
où, au contraire « . . . on a souvent l’impression
par DONATIEN et LESTOQUARD (1936) dans
d’un animal saigné pour la boucherie ».
la rickettsiose canine à Rickeftsia canis. II semble
Toutefois, le diagnostic ne peut être posé avec
d’ailleurs qu’il s’agisse d’une éosinopénie réelle
certitude que par l’examen des prélèvements
car les éosinophiles sont rares ou absents dans
effectués et la mise en évidence de l’agent causal.
les frottis d’organes hématopoïétiques
des ani-
Dans la rickettsiose générale bovine, Rickeffsia
maux atteints.
bovis est identifiée dans les monocytes du sang
II est important d’insister sur ces modifications
circulant ou des organes ; elle ne l’est jamais
de l’image sanguine car ce sont elles qu’on remar-
dans les cellules de I’endothelium vasculaire.
que en premier lieu à l’examen d’un frottis de
A l’inverse, Cowdria (Rickeffsia) ruminantium
sang et que ces lésions sont toujours très visibles
s’observe dans les cellules réticule-endothéliales
alors que, même dans les formes graves, les
de la tunique interne des vaisseaux ,et jamais
rickettsies peuvent être rares et réclamer un
dans le sang circulant.
examen minutieux. L’observation de ces ano-
Non seulement nous avons identifie Rickettsia
.
malies permettra souvent de poser un diagnostic
bovis dans tous les cas, mais nous avons aussi
précoce, même en l’absence de Rickettsio.
recherché systématiquement à mettre en évidence
.m
491
Cowdria ruminontium sur le cadavre. L’examen
constatons que les deux premiers cas apparais-
des frottis effectués (endothélium de la veine
sent après une sortie malencontreuse au pâturage
jugulaire, frottis de plexus choroïde et calques
d’où les animaux reviennent parasités par des
de cerveau fraîchement prélevés) ont été néga-
tiques (surtout des Amblyommo variegofum).
tifs. Ceci a permis aussi d’infirmer l’existence
Par la suite, bien qu’ils ne soient plus sortis
possible d’une infection mixte à Rickettsia bovis
et qu’ils soient soumis régulièrement à un
et à Cowdria ruminaniium.
traitement ixodicide, les animaux hébergent
quelques tiques vraisemblablement introduites
dans l’étable avec le fourrage vert dont on les
PRONOSTIC
nourrit. Tous les animaux atteints sont parasités
par ces arthropodes.
Le pronostic de l’affection est sérieux puisque
sur 14 cas identifiés, 4 ont été mortels.
A la suite de ces observations, nous constatons
Par ailleurs, la morbidité est élevée, au moins
la contamination naturelle au pâturage d’un
chez le bétail importé, puisque sur 12 zébus
veau ndama à Sangalkam (cf. Répartition
importés, 10 contractent la maladie parmi les-
géographique). Une semaine après sa mise au
quels 3 meurent (2 de forme suraiguë et 1 de
pâturage, il présente une hyperthermie pendant
forme aiguë) et 7 (dont 5 présentent une forme
48 heures (39,9 OC le Ier jour, 39,6 OC le second)
grave d’emblée) guérissent en 3 à 7 jours après
sans autre symptôme morbide. Dès le premier
un traitement par l’auréomycine.
jour d’hyperthermie, des examens quotidiens
d’étalements de sang sont pratiqués et à partir
du 9” jour, Ricketfsia bovis est identifiée dans
MODE DE CONTAMINATION
ces prélèvements.
Les rickettsies persistent
pendant 6 jours puis disparaissent. Ce veau
Pour expliquer l’apparition de cette maladie
fait donc une forme inapparente de la maladie
non encore signalée au Sénégal, on ne peut
qui serait passée inaperçue s’il n’avait été soumis
retenir l’hypothèse selon laquelle les zébus
à une surveillance particulière. Ce fait prouve
pakistanais, déjà prémunis avant leur importa-
cependant la réalité de la contamination sur
tion, avaient fait un accès parasitaire déclenché
place.
par les agressions dues au voyage et à I’acclima-
D’autre part, un broyat de tiques est inoculé
tement.
à deux bovins de race locale. Réalisé avec des
En effet :
Amblyomma variegafum récoltés sur des bovins
de race locale, pâturant dans la région de
a) Rickettsia bovis n’a jamais été signalée en
Thiès, ce broyat est mis en suspension dans du
Tunisie, à notre connaissance.
milieu HBSS (Hank’s balanced salted solution)
b) Si la crise d’acclimatement avait provoqué
pour culture de tissus et inoculé (sans antibiotique)
un tel accès parasitaire, tous les animaux
sous la peau des deux animaux. Respectivement,
auraient été malades en même temps, à peu
16 et 29 jours après l’inoculation, Rickeffsio bois
de jours d’intervalle et peu après leur arrivée au
est identifiée dans les frottis de sang de ces
Sénégal. Or ici, non seulement le premier cas
bovins, persiste quelques jours puis disparaît.
est apparu plus d’un mois après l’importation
La présence des rickettsies s’accompagne des
des zébus (et ceux-ci étaient alors acclimatés
modifications sanguines déjà décrites. Ces ani-
ainsi qu’en témoignait leur bon état général)
maux font une forme inapparente de la maladie
mais encore la répartition dans le temps des
car en dehors d’une légère baisse d’état, ils ne
cas de rickettsiose s’étale sur une période
présentent aucun symptôme morbide.
supérieure à un mois.
Cette expérimentation permet de démontrer
L’origine de cette affection ne peut donc être
la transmission de Rickeffsio bovis par Amblyommo
qu’autochtone. Les faits suivants le confirment.
voriegafum et d’établir que la région de Thiès
Chez les zébus sahiwal normalement mainte-
est un foyer de rickettsiose générale bovine.
nus en stabulation libre (l’enclos dans lequel
II faut donc conclure à l’existence de la rickett-
ils évoluent étant dépourvu d’lxodes) nous
siose générale bovine au Sénégal et que cette
492
maladie se montre particulièrement grave chez
au moins une fois par semaine et, en plus de ce
les zébus pakistanais, animaux neufs et peut-
traitement, de maintenir les bovins récemment
être particulièrement sensibles à cette affection.
importés en stabulation permanente.
CONCLUSION
TRANSMISSION TRANSPLACENTAIRE
C’est la première fois, à notre connaissance,
Une des vaches mortes de rickettsiose étant
que la rickettsiose générale bovine est signalée
en gestation, nous avons fait l’autopsie du fcetus
au Sénégal. Cette observation porte à deux, le
et examiné des frottis de sang et des calques
nombre de rickettsioses des monocytes identifiées
d’organes. Le fcetus, âgé de trois mois, était
dans ce pays, puisque, en 1941, CURASSON y
indemne de lésions et la recherche des rickettsies
signale l’existence de la rickettsiose générale
est restée négative. Cependant, l’étude de ce cas
ovine à Rickeftsia ovina (LESTOQUARD et
unique ne permet pas de tirer de conclusion sur
DONATIEN, 1936).
la transmission ou la non-transmission de cette
Dans ce pays, comme dans toutes les régions
rickettsie par la voie placentaire.
tropicales, Ricketfsia bovis est réellement patho-
gène alors que DONATIEN et LESTOQUARD,
1940, constatent qu’en Algérie, elle ne provoque
TRAITEMENT
que des maladies bénignes. CURASSON (1942)
avait fait la même remarque au sujet du rôle
Parmi les traitements essayés, l’utilisation de
pathogène de Rickeffsia ovina. Aussi nous pensons
l’association pénicilline-streptomycine (3 mil-
que, suivant ROUSSELOT (1953), il faut « . . .
lions U. I. - 3 g/jour) ou de la tétracycline en
accorder à ces affections décrites comme inap-
injection intramusculaire s’est toujours soldée
parentes en Algérie une pathogénicité spéciale
par des échecs.
lorsqu’elles interviennent en pays tropical ».
Seule l’auréomycine par la voie intraveineuse,
Dans les quelques cas que nous avons observés,
à la dose journalière de 4 à 5 mg/kg et pendant
c’est surtout pour le bétail récemment importé
4 à 5 jours, a permis d’assurer une guérison
que cette rickettsiose a été très grave. Nous
rapide des animaux. Mais son efficacité semble
ne disposons pas encore d’observations cliniques
illusoire dans les formes suraiguës.
concernant la maladie naturelle sévissant sur le
A ce traitement spécifique est ajouté une
bétail de race locale pour pouvoir juger de sa
thérapeutique symptomatique (tonicardiaque).
gravité éventuelle pour le cheptel sénégalais.
Insfifuf #Elevage et de Médecine
PROPHYLAXIE
vétérinaire des Pays Tropicaux
Maisons-Alforf
La seule prophylaxie actuellement possible
Laboratoire national de /‘Elevage
est la lutte contre les tiques. II est nécessaire de
et de Recherches vétérinaires
traiter les animaux à l’aide d’un produit acaricide
Dakar-Hann
S U M M A R Y
Bovine Rickettsiosis in Senegal
Bovine Rickettsiosis hos been recorded in Senegal. The work which has been
carried out on this disease in some various countries is reported. The clinical
signs and lesions are described. Diagnose of the disease is made through the
evidence of R. bovis in the blood of infected animais and the presence in it of
some abnormal leucocytes which are nearly characteristic of the disease. The
only effective treatment consists
in Aureomycine. Intraveinous injections at the
dose of 4 to 5 mg/kg/ day during 4 or 5 days.
The part played by Amblyommo
voriegofum in the transmission of the disease
has been established.
493
RESUME N
La Rickettsiosis general bovina en Senegal
Se nofa la existencia de la Rickettsiosis general bovina en Senegal. Se pasan
en revista 10s trabajos ya efectuados en varios paises concerniendo a esta
enfermedad. Las sintomas y las lesiones se describen. La presencia de Rickeitsio
bovis en la sangre y algunas anomalias leucocitarias « casi patognomhicas
»
permiien diagnosticar la enfermedad. Las inyecciones de aureomicina por via
venosa en la dosis de 4 a 5 mg/kg/dia durante 4 o 5 dias son el solo iratamiento
activa. Se demuestra el pape1 de Amblyommo
voriegofum en la transmisibn de la
enfermedad.
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