-i INSTITUT D’ÉLEVAGE ET DE MÉDECINE ...
-i
INSTITUT D’ÉLEVAGE ET DE MÉDECINE
VÉTÉRINAIRE DES PAYS TROPICAUX
REVUE D’ÉLEVAGE
ET DE
MÉDECINE VÉTÉRINAIRE
DES PAYS TROPICAUX
Note préliminaire sur l’épidémiologie
de la distomatose bovine au Sénégal
par S. GRÉTILLAT
I Tome XIV lnouvelle sérlej
No3 - 1 9 6 1
I
-~ v1ci0T FRÈRE, ÉDITEURS
>
23, rue de l’École-de-Médecine, PARIS-VI’

Note préliminaire sur l’épidémiologie
de la distomatose bovine au Sénégal
par S. GRÉTILLAT
La distomatose bovine existe au Sénégal et les
l’hôte intermédiaire vecteur de Fasciolo gigantica
rapports annuels du Service de I’Elevage signa-
dans cette partie de l’Ouest-Africain. - -
lent, dans les relevés des abattoirs de Saint-Louis,
Des enquêtes malaco-épidémiologiques faites
Dakar, Louga, Thiès, Dagana, Podor, Mbaké,
au cours de l’année 1960 en Haute-Casamance,
Kaolack, Tambacounda, Kedougou, Vélingara,
dans le Sine-Saloum, au Sénégal oriental, dans
Sediou et Ziguinchor, l’existence de douves dans
le Cayor, dans la presqu’île du Cap Vert, et des
les canaux biliaires des bovins abattus (MOREL,
essais d’infestation expérimentale sur des mol-
1959).
lusques d’élevage nous ont permis de détermi-
II va sans dire que le fait de trouver des douves
ner :
dans le foie d’un bovin sacrifié à l’abattoir,
10 L’hôte intermédiaire de F. gigantica au
n’implique pas obligatoirement l’existence de
Sénégal ;
la distomatose bovine dans la région.
20 Certains. facteurs écologiques et épidémio-
En effet, à part le cas bien particulier du petit
logiques expliquant la fréquence ou la rareté
abattoir placé au centre d’une zone d’élevage
de la distomatose bovine dans des régions où
productrice d’animaux de boucherie (*), la
existe pourtant son mollusque vecteur.
transhumance, et surtout les transactions com-
merciales, ne permettent pas en général de con-
naître l’origine des bovins abattus et les endroits
ENQUETE MALACO-ÉPIDÉMIOLOGIQUE
où ils ont contracté leur parasitisme.
FAITE EN HAUTE-CASAMANCE
La répartition géographique d’une maladie
parasitaire à Trématodes ne peut donc être
Le fleuve Casamance dans sa partie amont
connue que par l’examen des conditions épi-
a un débit extrêmement variable suivant les
démiologiques présentées par chaque région, et
époques de l’année.
par la connaissance de l’hôte intermédiaire du
A Kolda, à environ 30 kilomètres de sa source
parasite.
(fig. l), c’est, en fin de saison sèche (avril-mai),
En ce qui concerne la distomatose bovine,
une petite rivière de quelques mètres de large
c’est, au Sénégal, Fosciola gigontico Cobbold,
sur 30 à 50 cm de profondeur. Par contre,
1885, (douve géante) qui est le parasite en cause.
pendant toute la saison des pluies (juin à novem-
Ce trématode a besoin, pour accomplir son
bre), c’est un véritable fleuve de plusieurs dizai-
cycle évolutif, de la présence d’un gastéropode
nes de mètres de largeur.
d’eau douce du genre Lymnoeo, Lamarch, 1779.
Au cours d’une enquête malaco-épidémiolo-
Nous avons pensé qu’en examinant le régime
gique effectuée vers la fin de juin 1960, nous
hydraulique et la faune malacologique des
avons trouvé, dans la Casamance et ses affluents
points d’eau de différentes régions du Sénégal,
(marigots), une abondante faune malacologique
il nous serait peut-être possible de déterminer
représentée par les espèces suivantes :
Biom~halario
pfeifferi goudi Ranson.
Bulinus guernei Dautzemberg.
(*) Celui de Kolda, par exemple.
Bulinus senegalensis Müller, (Groupe forskali/).
Rev. Elev. Méd. vét. Pays trop., 1961,14, no 3.
Lymnaeo caillaudi Bourguignat.
Reçu pour publication : juin 1961.
Anisus sp.
283

GUiME “-Po~tuc~isC ‘*Y__
W
Fig. 1. - Carte de la région de Kolda.
En pointillé, les marigots affluents de la Casamance.
Les chiffres romains indiquent l’emplacement et le
numéro de chaque gîte à mollusques prospecté se rappor-
tant au tableau. no 3,
Le tableau no 1 résume les résultats de cette
divisées chacune par 25. Les deux résultats obte-
enquête malacologique et donne les principales
nus, et arrondis à un nombre entier, donnent le
conditions présentées par les différents gîtes :
maximum et le minimum par unité de surface
nature du fond et de la flore aquatique, tempé-
de gîte.
s
rature et pH de l’eau, nature du support où ont
été trouvés les mollusques.
Résultats trouvés à la dissection des mollusques
Les signes (+) indiquent pour chaque espèce
récoltés.
récoltée, sa densité approximative par mètre
carré de surface de gîte.
Les pourcentages d’infestation, ainsi que la
+ = 2 à 3 par mètre carré
nature des formes larvaires de trématodes trou-
++ = 3 à 5 par mètre carré
vés à la dissection des mollusques récoltés sont
+++ = 5 à 10 par mètre carré
donnés dans le tableau no II. (Une centaine de
++++ = plus de 10 par mètre carré.
spécimens disséqués pour chaque espèce).
Pour l’évaluation du chiffre : nombre de mol-
lusques/m2
nous délimitons en les jalonnant,
FRÉQUENCE DE LA DISTOMATOSE BOVINE
deux surfaces carrées de 5 mètres de côté,
EN RÉGION DE KOLDA
dans deux endroits choisis du gîte à prospecter.
(Enquête faite aux abattoirs)
Le même opérateur récolte pendant 15 minutes,
dans chacune des aires ainsi déterminées, tous
Pendant notre séjour à Kolda, du 29.6.60 au
les mollusques visibles en surface et en profon-
5.7.60, nous avons pu examiner à l’abattoir local
d e u r . L e s r é c o l t e s u n e f o i s d é n o m b r é e s s o n t
les viscères de 24 bovins.
284

TABLEAU 1 - Résultats obtenus au cours des eaquetes mslacologiques effectidea en ré&on de Kolda
Espkces récoltées
Gftes
Nature
Fonds
more 0
pH
Suppbrt
Biom. Rul.. Anis. Lym. Bes.
Cassmsnce
rive droite en
f V=eux graminées 28; 6,6 bois pourri rares +H+
+
+H+ +
Kolda
amont du pont
:1
Casamance
pierreux
néant
270 6,8
ciment du
+t+
+
+++
+
Kolda
sous le pont
pont
Casamance
nénuphars 2~ 6,'7
nénuphws
+
++k
+
+
+k
:II
milieu du fleuve
vaseux
Pistia
Kolda
en amont du pont
Aeshornia
àmm
Cassmance
nénuphars 30°
6,7 nénuphars
+
+tt
+
4-b
m
IV
milieu du fleuve
vaseux
Pistia
Pistia
+t
Kolda
en amont du pont
Aeshotia
à 100 m
Cassmance
il
nénuphars 30"
6,8
nénuphsrs
i+!-
+
+
aüniveaudéver-
vaseux
Kolda
Pistia
Pistia
-l+
+
soir UC. publics
Cas-ce
VI
rive gauche en
* vaseux graminées 27O
bois pourri
+l+
+i
+t
Kolda
amont du pont
Csssmance
nénuphars 28O 6,8
nénuphars
+
+
ni
milieu du fleuve
veaeux
Pistia
Solda
en face abattoir
Aeshornia
Narigot en bor
2-70
'Pistia 23 la
+
+
dérive ou
VIII
dure foret clas-
marigot
sée de Rahor -
Kolda
route de Tomba-
en crue
bois pourri
counda
IX
Pistia 280 6,8 Pistia
Narigot en
+k
Ssrekeita
crue
vaseux
bois pourri
6 km Kolda
graminées
+
+t
X
Pistia
27O
6,8 nénuphars +
ff
f
+ t
ti
B-ntankcun~ou
Tete de msrigot
vaseux
nénuphars
pontes
14 kn Kolda
nombr.
mxigot
nénuphars
nénuphars -H-1-+
+
pie=- cBpex
Biom,
= Jiomphûlaria pfeifferi gaudi
LP.
= Lymnaea csillaudi
hl,
= Bulinus guernei
B. s. = Pulinus senegelensis
AlliS.
= Anisus spO
Nous mentionnons seulement pour mémoire l’existence / I’épidémiologie des affections à trématodes de l’homme et
de très nombreux gros mollusques tout le long des bords
des animaux domestiques).
du fleuve Casamance, mais qui ne jouent aucun rôle dans
285

TABLENJ
I
- IInfestation des mollusques.
Formes lzkvaires trouvées à la dissection
Mollusques I
Fasciola Sch. hae-
Espèce
xiphido- Ceroaires
gigantica
matobium corcaires
cysto-
Echinost@ Ampbisto-
phores
midae
midae
Lymaea
60 à 80 $
Oailhldi
10 $
Biomphalaria
pfeifferi gaudi
10 y:
10 $
5 %
Bulinus
guernei
a5 à VO $
EUltiUS
senegalensis
15 %
AlliSlXS
SP.
15 5
Tous ces animaux provenaient de la région,
Pour contrôler la valeur de ce mollusque
et sur 24 examinés, 14 d’entre eux étaient para-
comme vecteur hôte intermédiaire de F. gigantica
sités par Fasciola gigantico : 7 massivement,
au Sénégal, nous avons procédé, au labora-
6 avaient une forte infestation, 1 seulement ne
toire, à des infestations expérimentales sur
présentait que quelques douves dans ses canaux
des L. caillaudi d’élevage, une souche de Kolda
biliaires.
(Casamance), et une souche de Thiès-Fandène
Le registre des saisies de cet abattoir signale
(Cayor).
pour un abattage quotidien de 3 à 4 bovidés,
un ou deux foies saisis pour distomatose. Comme
Protocole expérimental.
le centre de Kolda se ravitaille en viande dans
les villages des environs sans avoir recours à
La récolte d’oeufs de F. gigantica dans des
l’importation d’animaux d’autres régions, c’est
fèces de bovidés est longue et fastidieuse. Par
pratiquement 30 à 50 p. 100 des bovins adultes
cette méthode on introduit d’autre part dans les
aui sont atteints de distomatose dans cette partie
incubateurs de nombreux protistes, (en parti-
de la Haute-Casamance.
culier des Ciliés), qui entravent le bon dévelop-
pement des embryons de douves. C’est pourquoi
nous avons préféré prélever des ceufs dans la
vésicule biliaire des animaux atteints de disto-
HÔTE INTERMÉDIAIRE
matose.
DE FASCIOLA GIGANTICA AU SÉNÉGAL
Pour se procurer des milliers d’oeufs de F. gi-
gantico il suffit de récupérer le contenu de la vési-
D’après les récoltes que nous avons pu faire
cule biliaire d’un foie saisi aux abattoirs pour
dans les points d’eau de différentes régions, la
fasciolose.
Limnée que l’on trouve au Sénégal appartient
Ces pontes sont lavées une dizaine de fois
à l’espèce Lymnaea caillaudi (*).
pour les débarrasser de la bile, puis mises à
incuber dans de l’eau de gîte à mollusques fil-
trée. Les incubateurs sont maintenus pendant
environ un mois à une température de 250-
(*) A ce sujet nous remercions monsieur le professeur
G. RANSON du Muséum d’Histoire Naturelle de Paris, qui
260 c.
a bien voulu nous déterminer le matériel malacologique
Des contrôles réguliers, faits tous les jours à
que nous avons récolté.
la période ultime de l’incubation, permettent de
286

repérer, à quelques heures près, la date de
I a fréquence de la distomatose dans une contrée
sortie des miracidia.
C)ù les cours d’eau (Casamance et marigots
Pour I’infestation de l’hôte intermédiaire, les
CIffluents) ont des crues longues et importantes
miracidia sont mis en présence des Limnées
(lu cours de l’hivernage.
pendant 2 heures à la température de 290-
En nous basant sur quelques observations
300 C ; on a soin de limiter leur nombre en
Sites pendant notre séjour à Kolda, où nous
fonction de celui des mollusques à infester,
lvons pu assister à deux crues de la Casamance
si l’on veut éviter une trop forte mortalité
lyant fait monter le niveau de l’eau de plusieurs
des Limnées dans les jours qui suivent I’expé-
mètres, nous supposons qu’au point de vue épidé-
rience.
nioIogique, la fréquence de cette affection para-
A partir de ce jour, des dissections régulières
;itaire puisse s’expliquer de la manière sui-
sont faites dans les lots de Limnées pour suivre / vante :
le rythme d’apparition, l’évolution des formes
L’infestation des L. cailloudi doit surtout se
larvaires et l’époque où apparaissent les cer-
produire au moment des basses eaux, durant la
caires mûres prêtes à sortir du mollusque.
saison sèche, quand les bovins vont boire à la
Casamance ou aux marigots permanents.
Résultats de l’expérimentation.
Une forte densité de mollusques, dans une
petite quantité d’eau, avec un courant presque
Au cours de deux essais, l’un fait sur 50, l’autre / nul, sont autant de facteurs pouvant favoriser
sur 130 L. coilloudi, nous avons pu faire les
I’infestation des Limnées par les nombreux mira-
remarques suivantes :
cidia, sortant des œufs de douves évacués avec
A 250-260 C, les pontes de F. gigantico donneni t
les excréments des animaux parasités.
des miracidia en 26 à 30 jours.
Par contre, en périodedecrue, le milieu aqua-
Un seul miracidium est capable d’infester
tique ne présente pas les conditions optima pour
une Limnée, et les deux souches : Kolda e’ t
que l’évolution œuf-miracidium se fasse dans
Thiès-Fandène sont également sensibles.
de bonnes conditions. Le courant très fort dis-
Les premières rédies apparaissent dès le 3e OL I
perse les œufs, et les miracidia qui éclosent
4e jour.
sont emportés par la crue. Les gîtes à hôtes
Au bout de trois semaines d’évolution, IE
intermédiaires sont perturbés et les conditions
nombre des rédies est déjà considérable dan: 1 de repos nécessaires pour une pénétration nor-
I’hépato-pancréas du mollusque.
male du miracidium chez le mollusque ne sont
plus réalisées.
Dès le 25e jour on peut trouver des cercaire: j
différenciées chez quelques rédies.
Au point de vue dissémination des métacer-
En travaillant à 250-260 les premières cercaire!j
caires, pendant l’hivernage, les grandes pluies
sortent des mollusques entre le 35e et le 40e jour
provoquent de très fortes crues qui emportent
En maintenant les Limnéesà200-230,
elles n’émet.
à la dérive un grand nombre de mollusques
tent des cercaires que vers le 50e ou 60e jour
tout au long de la Casamance et de ses affluents,
NOUS avons pu constater qu’à la suite d’une
brusque montée des eaux :
ÉPIDÉM~oL~G~E D E L A D~ST~MAT~SE
BOVINE EN RÉGION DE KOLDA
‘l” Les gîtes à mollusques repérés la veille de
la crue avaient été détruits.
Les résultats trouvés à la dissection des Lym
nées récoltées à Kolda, et dans ses environs, son
20 La densité malacologique par mètre carré
t
en corrélation avec ceux trouvés à l’examen de
avait considérablement diminué.
S
viscères des bovins à l’abattoir de ce centre.
30 Les mollusques étaient emportés à la dérive
La grande dispersion et le haut pourcentage
fixés à des feuilles et des racines de Pist;a L.,
d’infestation de ces mollusques par des forme
OU d’Aeschornio,
ou à des fragments de bois
larvaires de la douve géante, suffisent à explique
pourri.
281

4O Deux jours après la crue alors que les
en assurant leur survie. L. caillaudi en effet, ne
eaux étaient descendues d’environ 1 mètre, (a
résiste pas à une dessiccation prolongée.
densité malacologique avait sensiblement aug-
Les marigots, dont les lits sont très peu encais-
menté. II était alors possible de trouver quelques
sés, contribuent à la dispersion des métacer-
mollusques fixés soit sur les graminées du bord,
caires de F. gigantica dans tous les pacages de la
soit sur des feuilles de Nymphoea Smith, au milieu
région et ne sont que des gîtes temporaires.
du fleuve.
Tout ceci laisse supposer que, dès que la force
et la vitesse du courant diminuent, les mollusques
se réfugient dans les endroits où l’eau est plus
OBSERVATIONS SUR LA RÉPARTITION
tranquille, principalement le long des rives du
GÉOGRAPHIQUE DE L. CAILLAUDI
fleuve. Là, les conditions de chaleur et d’inso-
ET SUR CELLE DE LA DISTOMATOSE BOVINE
lation de l’eau étant favorables, les spécimens
AU SÉNÉGAL
infestés émettent des cercaires qui vont s’enkys-
ter sur les végétaux immergés par l’inondation,
Au cours de quelques prospections malacolo-
En fin d’hivernage, quand les eaux ont baissé
giques que nous avons pu faire dans différentes
et que la Casamance et les marigots affluents
régions du Sénégal nous avons obtenu les résul-
sont réduits à des filets d’eau ou à des mares,
tats suivants :
le bétail s’infeste en avalant les métacercaires
a) Région de Velingara (100 km à l’est de
fixées sur les herbes des rives qui ne sont plus
Kolda).
submergées.
En ce qui concerne l’écologie et la conserva-
L. cai!laudi est absent dans les ruisseaux et
tion des espèces de mollusques dans la Casa-
marigots des environs de ce centre, malgré une
mance au cours de l’hivernage, nous avons
rès forte densité de Biompholaria
pfeifferi gaudi
remarqué que la dispersion des adultes est très
-t Bulinus guernei (Grétillat, 1960 a).
largement compensée par les nombreuses pontes
b) Région de Basse Casamance (Oussouye =
fixées à la face inférieure des feuilles de nénu-
;ud-ouest de Ziguinchor).
phars, très abondants dans le lit de la Casamance.
Ces feuilles représentent un support excellent
Absence totale de faune malacologique dans
puisqu’elles sont toujours en surface et qu’elles
es points d’eau pourtant nombreux de cette
résistent au courant. En effet, submergées par la
-égion.
Les terrains sont pendant une grande
première crue, elles émergent au bout de quel-
lartie de l’année envahis par des eaux plus ou
ques jours. Par un mécanisme d’auto-défense,
noins saumâtres ; cette salinité doit rendre le
les tiges qui les relient aux racines fixées au
nilieu incolonisable par les gastéropodes d’eau
fond du fleuve poussent démesurément (3, 4 et
douce (Grétillat, 1960 a).
5 mètres au niveau du pont de Kolda), jusqu’à
c) Région du Sine-Saloum (Kaffrine, Koun-
ce qu’elles arrivent à la surface de l’eau.
gheul, Birkelane).
Les Nymphoea paraissent donc jouer un rôle
Alors que Bulinus senegolens\\s est trouvé en
important dans l’écologie des mollusques hôtes
rès grand nombre dans les mares non perma-
intermédiaires, et par voie de conséquence, dans
la forte endémicité distomienne existant dans
lentes et les marigots de la région, on ne trouve
cette région de Haute Casamance.
jes L. cailloud, que dans les gros ruisseaux af-
‘luents de la Gambie. Ces limnées sont d’ailleurs
nfestés par des formes larvaires de F. gigantica,
Remarques :
:t il existe des foyers de distomatose bovine
jans les villages proches de la frontière gam-
Les marigots affluents de la Casamance, qui
Jienne (*).
tarissent au cours de la saison sèche, sont enva-
his par les L. cailloudi à l’occasion des crues.
C’est la Casamance qui joue le rôle de gîte
(*) Renseignements recueillis auprès des agents du
permanent ù Limnées en période de basses eaux,
Service de I’Elevage de Birkelane, Keffrine et Koungheul.
288

d) Région du Sénégal oriental (Tambacounda-
érme depuis dix ans, et à l’autopsie de laquelle
Ouest : Malemé-Niani, Koussanar, Koumpem-
on ne récolta que trois douves (avril 1961).
toum) (Grétillat, 1960 b et 1961).
Devant un tel état de chose nous pensons que
pour ces deux régions, il s’agit d’une rupture du
e) Région de Thiès (Cayor).
cycle biologique du parasite au niveau de I’infes-
Beaucoup de marigots permanents sont des
tation du ruminant par la métacercaire.
gîtes de L. caillaudi, 6. pfeifferi goudi, 8. guernei
En effet, dans cette partie du Sénégal, de par la
et B.senegalensis. Nous avons disséqué un grand
nature du terrain et le régime des pluies, les
nombre de 1. coi//Judi provenant d’un marigot
gîtes à mollusques, qui sont en général des mari-
situé à 8 km de Thiès (Fandène). Sur environ
gots s’asséchant partiellement en saison sèche,
300 exemplaires examinés, nous n’en avons
ont des crues très brutales, avec une décrue
trouvé aucun porteur de formes larvaires de
très rapide ramenant le cours d’eau dans son
F. gigontico, et cela malgré la présence de très
lit qui est en général encaissé.
nombreux troupeaux de bovins venant boire
L’émission des cercaires, ne se produisant
à ce point d’eau. Ces contrôles ont été faits à
que dans une eau relativement calme, ne peut
deux époques différentes : mars 1960 et juillet
avoir lieu que lorsque le cours d’eau est rentré
1960, l’un en saison sèche, l’autre au début de
dans son lit. Ces cercaires ne peuvent donc
la saison des pluies.
s’enkyster que sur des végétaux poussant dans
le fond du ruisseau ou du marigot. La distribu-
f) Région du Cap-Vert.
tion des métacercaires fixées sur des plantes
L. caillaudi est nombreux dans les marigots et
qui ne sont pas broutées par le bétail romprait
les mares permanentes des environs de Dakar,
le cycle biologique du parasite.
et notamment à Sangalkam, où il voisine avec
Tout ceci n’a que la valeur d’une hypothèse,
5. pfeifferi gaudi et 6. senegalensis. LARIVIÈRE
mais permettrait d’expliquer la rareté de la dis-
et CHARNIER, en 1957, ont fait les mêmes cons-
tomatose bovine dans des régions où existe en
tatations.
abondance son mollusque hôte intermédiaire.
De toutes les Limnées disséquées, nous n’en
avons trouvé aucune infestée par des formes
larvaires de la douve géante, alors qu’un très
CONCLUSION
fort pourcentage l’était pardes xiphidocercaires.
Comme au Kenya où DINNIK et DINNIK en
Discussion.
1956, ont étudié le cycle évolutif de Fasciola gigan-
tica, c’est lymnaea caillaudi Bourguignat, qui est
Le fait de ne pas trouver de L. coilloudi infes-
au Sénégal l’hôte intermédiaire de ce trématode.
tées par F. gigantica dans ces deux dernières
Au sujet de la durée de l’évolution des formes
régions, nous a fait penser tout d’abord à I’exis-
larvaires chez le mollusque, les résultats que
tente d’une « race » ou plutôt d’une souche de
nous avons trouvés au laboratoire concordent
Limnées réfractaire à I’infestation par des mira-
avec ceux donnés par ces auteurs et par ALI-
cidia de douve géante. Mais, par la suite, nous
CATA en 1938 aux Iles Hawai chez Fossoria
avons réussi à infester expérimentalement des
ollula.
L. cailloudi provenant de Thiès-Fandène, et
La répartition géographique du parasite ne
cette hypothèse n’a pas de valeur.
se superpose pas exactement au Sénégal avec
L’autopsie d’animaux ayant vécu pendant
celle du mollusque vecteur.
plusieurs années à la Ferme de Sangalkam,
Alors qu’en Haute-Casamance (Kolda) règne
(Ferme du Laboratoire national de recherches
une haute endémicité distomienne, la presqu’île
vétérinaires de Dakar), montre l’absence de
du Cap Vert et le Cayor (Thiès) semblent être
douves ou seulement la présence de que!ques
exempts de distomatose bovine malgré la pré-
parasites dans les canaux biliaires de ces bovins.
sence de très nombreux L. caillaudi dans les
(Cas d’une vieille vache n’ayant pas quitté la
points d’eau.
289

D’autres parties du Sénégal restent à prospec-
Santé et de I’Elevage. En effet, l’hôte interme-
ter, en particulier la vallée du fleuve Sénégal
diaire de Sch. haematobium, qui est au Sénégal
et le lac de Guiers où la fasciolose bovine existe
Bulinus guernei,
voisine dans le fleuve Casa-
à l’état endémique.
mance avec Lymnaeo coillaudi, et une même inter-
Au point de vue pratique, l’existence en Haute-
vention molluscocide pourrait détruire ces deux
Casamance d’une très forte endémicité bilhar-
mollusques vecteurs.
zienne à Schistosoma haematobium Bi I harz, 1858,
associée à la fréquence de la distomatose bovine,
Instiful d’élevage ef de médecine vétér/naire
devrait permettre la mise sur pied d’un pro-
des pays tropicaux : Laboratoire natio-
gramme de lutte anti-mollusques par interven-
nal de recherches vétérinaires « Georges
tion concertée et conjuguée des Services de
Curasson », Dakar-Hann (SénégoI).
SUMMARY
Preliminary Note on Bovine Distomatosis in Senegal.
Bovine distomatosis is of high incidence in Senegal. In some regions 30-50 o/O of the animais
slaughtered are infested with Fasciola gigantica (Cobbold, 1885). A survey of the snail factor in the
epidemiology of the disease and experimental infestations have shown that the mollusc vector is
Lymnea caillaudi Bourguignat.
The author has examined and discusses the factors in the life cycle of this trematode, in the dif-
ferent regions of Senegal, which influence infestation.
RESUMEN
Nota preliminar sobre la epidemiologia de la distomatosis bovina en el Senegal.
La distomatosis bovina es frecuente en el Senegal. En ciertas regiones, se encuentra de un 30
a 50 p. 100 de 10s animales sacrificados. El agente de esta afeccibn es fasciola gigantica Cobbold, 1885.
Investigaciones epidemiologicas
han mostrado que el molusco vector es Lymnea cai/loudi Bourgui-
gnat. El autor examina y discute 10s factores que influyen, en diferentes regiones del Senegal, sobre
el ciclo del parasita.
BIBLIOGRAPHIE
ALICATA J. A. (1938). - Observations on the
Generations of Fosciola giganfica Cobbold in
life history of fasciolo gigantica, the com-
aSnail Host. Zsch. Tropenmed. Parasita., 7(4) :
mon liver fluke of cattle in Hawaii, and
397-419.
the intermediate host, fossaria O//U/~. Hawaii
GRETILLAT S. (1960 a). - Rapport d’enquêtes
Agric. exper. Station. Bull., 80 : 1-22.
parasitologiques faites en Casamance. Labo-
DINNIK J. A. and DINNIK N. N. (1956). -
ratoire central de I’Elevage « Georges Curas-
Observations on the Succession of Redial
son » Dakar. Août 1960 (non publié).
290

:
GRETILLAT S. (1960 b). - Rapport sur les
Bulinus guernei et Bulinus senegalensis. Bu//.
résultats d’une enquête malacologique effec-
Org. mond. Santé (sous presse).
tuée dans la région de Tambacounda (Séné-
LARIVIÈRE M. et CHARNIER M. (1957). - Con-
gal Orientai). Laboratoire central de I’Ele-
tribution à l’étude des bilharzioses au Séné-
vage « Georges Curasson » Dakar. Décem-
gal. Recherche des mollusques sur la pres-
bre 1960 (non publié).
qu’île du Cap-Vert. Bull. Mém. Ecole nation,
Méd. Pharm. Dakar, 5 : 336-9.
GRETILLAT S. (1961). - Epidémiologie de la
MOREL P. C. (1959). - Les helminfhes des ani-
bilharziose vésicale au Sénégal Oriental.
maux domestiques de l’Afrique occidentale.
Observations sur l’écologie de deux bulins :
Rev. Elev. Méd. vét. Pays trop., 12 (2) : 153-I 74.
2 9 1