René Tourte Mai 1995 René Tourte ...
René Tourte
Mai 1995

René Tourte
(1917-1984)
Paladin
de la recherche agronomique
au Sénégal et en Afrique
Essai biographique
Mai 1995

Ce document a pu être finalisé
grâce à l’appui financier de la FAO.
0 ISRA 1999
EDITION : UNITÉ D’INFORMATION ET DE VALORISATION (UNIVAL) / ISRA
I M P R E S S I O N : I M P R I M E R I E S A I N T - P A U L . D A K A R



SOMMAIRE
Pages
Préface . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
9
Qui était Louis Sauger ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
1 1
Ses études. La parenthèse militaire. La vocation dessinée
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
1 3
L e s choix définitifs : l a recherche, le mariage . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1 4
L e retour au pays. Cascension professionnelle
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
1 5
L’Indépendance.
7
Louis Sauger vers les cimes professionnelles et administratives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
1 8
L’homme de science, spécialiste de la génétique végétale
. . . . . . . . . . . . . .._.............. 22
L’agronome complet et aux larges vues . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
2 7
Le bâtisseur de la recherche agronomique sénégalaise
(et mauritanienne)
moderne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
2 8
Louis, << l’Africain » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
3 8
L e rôle international
d e Louis Sauger . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51
Louis Sauger, apôtre d e la formation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
5 5
Leçons, reconnaissances
et témoignages . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
6 4
Le film accéléré de la vie de Louis Sauger, 1917-l 984 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
6 8
Quelques écrits d e Louis Sauger . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
7 5

Préface
Premier Directeur Général de l’Institut sénégalais de
recherches agricoles (ISRA), Louis Sauger naquit le 8 mars
1917 dans un Sénégal presque rural, quatre ans seule-
ment avant la création, en 1921, de la Station expérimen-
tale de l’arachide de Bambey qui deviendra le Centre
national de recherche agronomique (CNRA) de Bambey.
C’est comme si le destin avait voulu cette quasi-coïncidence,
car Louis Sauger opta pour l’enseignement supérieur agrono-
mique et devint le premier ingénieur agronome sénégalais avec
option recherche en génétique végétale. Muni de ce solide bagage scientifique, il
rentra dans son pays natal et fut affecté à Bambey et consacra toute sa vie à la
recherche agronomique sénégalaise. Sous son impulsion, les orientations judi-
cieuses de la recherche vont s’accélérer. Les objectifs, les programmes, les implan-
tations, les activités, vont se décentraliser, se régionaliser pour se rapprocher des
problèmes essentiels des producteurs, des paysans. II a été un précurseur et a su
inculquer à ses collaborateurs la nécessité de pénétrer la réalité profonde des
9
situations agricoles, pour y évaluer leurs produits et plus fondamentalement y
m
puiser leurs problématiques. Pendant cette période, Louis Sauger et l’équipe qu’il
dirige vont donner à la recherche agronomique sénégalaise un élan, une dimen-
sion que la communauté scientifique internationale reconnaîtra.
En plus du scientifique mondialement reconnu et de l’administrateur visionnaire de
la recherche, Louis Sauger avait le souci de la durabilité de ses actions et en
particulier de la pérennité de la recherche et la conscience de l’importance des
ressources humaines dans ce domaine. C’est ainsi qu’il a progressivement et
méthodiquement sélectionné des jeunes scientifiques sénégalais qu’il a moulé à
son image pour assurer la relève et perpétuer l’œuvre commencée.
Lorsqu’en 1979, Louis Sauger quitte I’ISRA, il peut à juste titre penser qu’il a réa-
lisé son rêve de jeunesse à savoir, doter son pays d’un outil capable d’assurer à
ses populations rurales le ‘mieux être auquel elles ont si longtemps aspiré.
L’audience de Louis Sauger a rayonné très vite au delà de son Sénégal natal. II a
joué un rôle décisif dans toutes les entreprises de coopération scientifique en
Afrique et au niveau international où son expérience a été constamment sollicitée.
II a- incontestablement et très fortement marqué la nature et le fondement des
recherches agricoles et du développement rural en Afrique. Au niveau international
il a été à l’avant garde de la création des Centres internationaux de recherche agri-
cole (CIRA) du Groupe consultatif pour la recherche agricole internationale
(GCRAI) et a joué un rôle moteur dans l’orientation de leurs programmes.
Brillant scientifique, Louis Sauger a profondément marqué les processus de sa dis-
cipline d’origine - la génétique végétale - mais aussi les finalités et démarches
de la science agronomique tropicale toute entière. II aurait pu embrasser une car-

rière politique comme beaucoup de compatriotes de son âge l’ont fait a
l’Indépendance, mais fondamentalement sa voie était tracée ailleurs. Son influence
sur la politique et les stratégies de la recherche agronomique tropicale, n’en a pas,
pour autant, été moins prépondérante pendant des décennies.
Personne d’autre que René Tourte, le collègue, le collaborateur et surtout l’ami de
toujours, ne pouvait écrire avec autant de sincérité, d’élégance et de justesse cette
biographie et je l’en remercie chaleureusement.
Je remercie également l’Organisation des nations unies pour l’alimentation et
I’agri-
culture (FAO) pour l’aide apportée à I’ISRA pour la publication de cette étude.
Enfin, je souhaite que l’œuvre de Louis Sauger, que cette biographie résume élo-
quemment, serve de modèle aux générations actuelles et futures pour un dévelop-
pement durable de l’agriculture sénégalaise.
Le Président de la République du Sénégal
Abdou DIOUF
1

Qui était Louis Sauger?
Louis, Alfred, Robert, Victor, Pierre Sauger était né le 8 mars 1917 à Dakar.
Son père Lucien Sauger, chef comptable aux Travaux publics, et sa mère
Laurence, secrétaire au Gouvernement général de l’Afrique occidentale française
(AOF), étaient tous deux dakarois.
Leurs racines franco-africaines s’ancraient cependant beaucoup plus profon-
dément dans le cœur de cette région où s’était produit le plus beau mariage de
la France et de l’Afrique.
La branche paternelle de Louis trouvait son origine à Saint-Louis du Sénégal
où son père Lucien était né d’un grand-père blésois, Commissaire de police,
puis Administrateur des colonies, et d’une grand-mère de vieille famille Saint-
Louisienne.
La branche maternelle était issue de Conakry, Guinée française, où le père de
Laurence avait été directeur des Travaux publics’.
1'
A la naissance de Louis Sauger, le Sénégal était colonie francaise. Saint-Louis
m
avec ses 20 000 habitants en était le chef-lieu.
L’une de ses villes principales était Dakar, avec aussi quelques 20 000 habitants.
Mais depuis 1904, Dakar était devenue la capitale de l’Afrique occidentale
française et le siège du Gouvernement général de la fédération.
Ses résidents, comme ceux des trois autres (communes de plein exercice,, du
Sénégal (Saint-Louis, Gorée et Rufisque) étaient, de plein droit, citoyens français.
Lorsque Louis Sauger vient au monde, Dakar est encore une petite ville de
province, qui n’a que soixante ans.
Au charme désuet de ses vieilles rues ombragées, bordées de vénérables im-
meubles à un seul étage, de petites maisons fleuries de style colonial, et qui ré-
sonnent des trots, alertes ou fatigués, de petits chevaux attelés à des calèches
d’antan, Dakar ajoute cependant le pittoresque bigarré et bruyant de ses quartiers
populaires, dont les rues, les marchés, les fêtes s’emplissent de cris et rires joyeux,
de tam-tams assourdissants, jusque tard dans la nuit.
1 Information personnelle d’Annie, fille de Louis Sauger, qui travaille sur la généalogie de ses parents.

Mais la capitale fédérale est aussi une ville en plein essor portuaire et commer-
cial, qui s’ouvre au modernisme, par ses édifices à deux étages, ses automobiles
et ses camions, par ses bateaux et navires de plus en plus importants, par I’électri-
cité.
Dakar est déjà une ville cosmopolite où se côtoient et vivent ensemble des séné-
galais de toutes ethnies, toutes provinces, des européens (surtout ‘des français),
civils, fonctionnaires, militaires, des ressortissants des pays voisins (Mauritanie,
Guinée, Cap-Vert, etc.).
Son site exceptionnel, et de grande beauté, le Finistère Ouest de l’Afrique, sa
rade remarquablement protégée, en font un port très actif et une escale obligée
des lignes maritimes reliant l’Europe à l’Amérique Latine et à toutes les côtes
africaines.
Dakar est d’ailleurs devenu, en pleine première Guerre mondiale, le grand port
d’embarquement des troupes coloniales, dont les fameux tirailleurs <sénégalais)>,
2
partis verser leur sang sur des champs de bataille lointains : l’Argonne, Verdun, les
Dardanelles... Beaucoup ne reviendront pas et paieront ainsi un très lourd tribu
m
à une liberté que leurs enfants ne connaîtront que bien plus tard.
Dès cet après grande guerre, le Sénégal affirme cependant son identité et jette
les bases de son avenir politique.
II envoie des représentants à la Chambre des Députés francaise, la (<mère
patrie)) : Blaise Diagne (qui a été élu en 1914), Galandou Diouf, puis, plus tard,
Lamine Guèye et Léopold Sédar Senghor.
Ces belles années de la paix retrouvée voient aussi le début de la grande
aventure de I’aéropostale qui va relier Toulouse à Saint-Louis et Dakar, dont
Jean Mermoz fera le tremplin pour son grand envol vers l’Amérique du Sud.
Et Louis Sauger grandit dans cette extraordinaire ambiance d’aventure, de
brassage ethnique, d’expansion, d’enthousiasme, de naissance d’une identité
nationale. Sa double culture - française et sénégalaise - va lui permettre d’en
assimiler toute la richesse.
Ainsi, va se forger son attachante et brillante personnalité, toute de tolérance,
d’optimisme, de volonté, de syncrétisme intellectuel et d’esprit.
Louis Sauger a été un homme passionnément attaché à ses racines, aussi ambi-
tieux et courageux pour l’œuvre ou la cause qui lui paraissait juste, que désinté-
ressé et modeste pour sa propre situation.
II a été l’homme de dialogue, d’exceptionnelle ouverture et compréhension, de droi-
ture et fidélité dans l’engagement de la parole donnée, qui l’ont fait respecter et
aimer par tous ceux qui ont eu le privilège de le connaître.

Ses études, la parenthèse militaire
et la vocation dessinée
Louis Sauger fréquente, bien entendu, l’école primaire à Dakar et entame ses
études secondaires au Sénégal. Mais très tôt, ses parents décèlent les grandes
capacités de leur fils Louis. II lui permettent alors, au prix d’un exceptionnel sa-
crifice, de poursuivre ses études en France, au Lycée de Blois, dès 1931.
Le Baccalauréat Mathématiques et le Baccalauréat Philosophie lui sont décernés
en 1935.
A 18 ans, Louis Sauger décide alors définitivement de son orientation et choisit
celle qui lui semble la plus à même de contribuer au développement, à l’avenir de
son pays.
Le Sénégal est essentiellement rural, Louis sera agronome. II prépare les écoles
d’enseignement supérieur agricole, au Lycée Saint-Louis de Paris et, en 1937, à
vingt ans, il entre à l’École nationale supérieure de Grignon, avec la 11 2ème promo-
tion.
1:
II en sort ingénieur agricole en 1939, en même temps qu’il est admis à l’Institut
d’agronomie coloniale de Nogent (le futur ESAAT).
Malheureusement, la deuxième Guerre mondiale est déclarée le 3 septembre 1939
et vient interrompre ce cursus sans faute. Sursitaire de la classe 1937, Louis
Sauger est incorporé le 16 septembre au dépôt de guerre de cavalerie no 21, dans
le groupement spécial motorisé de Rambouillet.
Du 1 er janvier au 20 avril 1940, il est Élève Aspirant de réserve à l’École supérieure
de cavalerie de Saumur. Promu alors au grade d’Aspirant (JORF du 26 avril 1940),
il est affecté le 2 mai 1940, au Centre d’organisation motocycliste et d’auto-
mitrailleuses, et participe ainsi aux douloureux combats de mai et juin 1940.
L’armistice signé, Louis Sauger embarque le 15 octobre 1940 à Marseille, à des-
tination de Dakar où il est affecté à I’Escadron motocycliste autonome de Thiès. II
y est démobilisé le 15 mai 1941.
Sa carrière militaire active s’arrête là, mais, officier de réserve, il sera nommé
sous-lieutenant le ler décembre 1949, lieutenant le ler décembre 1953.
Dès sa démobilisation, Louis Sauger renoue les fils, momentanément distendus,
de sa vocation.
II confirme sa candidature à l’École supérieure d’application d’agriculture tropicale
(ESAAT) créée par décret du 21 juillet 1939, que sa mobilisation avait empêché de
rejoindre le 4 novembre 1940.
En attendant, au Sénégal, il postule pour un emploi auprès de la direction de
la Station de recherche agricole de Bambey ; il y est recruté, le 25 mai 1941, en
qualité d’auxiliaire au laboratoire de Génétique, dont le responsable est François

Bouffil, qui restera pendant plus de quinze années son patron écouté et res-
pecté.
Convoqué par I’ESAAT le 2 juillet 1941, Louis Sauger doit alors interrompre son
travail. II quitte Bambey le 14 août, puis Dakar, pour rejoindre I’ESAAT le 8 sep-
tembre 1941.
II en recevra le diplôme le 31 octobre 1942.
Les choix définitifs : la recherche, le mariage
Nommé ingénieur adjoint stagiaire des Services de l’agriculture aux colonies, le 1 er
novembre 1942, Louis Sauger est cependant maintenu en France par les événe-
ments internationaux : les Alliés débarquent en Afrique du Nord le 8 novembre.
II va mettre à profit ce retard forcé à son retour au pays pour compléter sa formation.
La recherche scientifique, avec sa rigueur et ses considérables possibilités, lui
4
apparaît alors comme la meilleure voie à suivre pour apporter des réponses
rapides et fondamentales aux appels dramatiques des populations africaines, qu’il
m
a percus pendant toute son enfance et son adolescence.
Et, tout naturellement, il se laisse séduire par la recherche agronomique avec
laquelle il a déjà <<flirté)>, et dont l’application des résultats pourrait, sans doute,
améliorer considérablement le devenir des paysanneries et sociétés rurales.
Mais, auparavant, Louis Sauger a succombé à une autre séduction, bien plus
tendre, et sans doute, encore plus irrésistible.
Le 7 août 1942, il a épousé Renée Rutter. Les parents de Renée sont de vieille
souche parisienne. Le papa est un entomologiste amateur (en dehors de ses acti-
vités au ministère des Finances) mais à grande réputation; la maman, fine maî-
tresse de maison, veille à élever les quatre enfants du ménage. Et le dimanche,
toute la famille va en forêt, ramasser les cétoines (coléoptères scarabéidés...).
Puis il y a les vacances, et des amis dans le Val de Loire, près de Blois.
Renée aime à s’y rendre... et Louis à y revenir.
Les campagnes y sont fleuries, l’herbe y est tendre, les chemins y sentent bon et
peuvent se croiser lorsqu’on les parcourt à bicyclette.
Ainsi, va naître une union de plus de quarante années, que seule la mort de Louis
pourra interrompre.
Cinq enfants naîtront de ce mariage d’amour : Alain le 8 mai 1943, Annie le 30
septembre 1945, Lucien le 6 décembre 1946, Jean-Louis le 2 août 1950 et
René-Louis le 17 mai 1959.
Dans le Paris occupé de 1942, et qui le restera encore deux ans, le jeune mé-
nage doit faire face à bien des difficultés et improviser pour survivre.

Louis Sauger va cependant pouvoir suivre un stage à la Section technique d’agri-
culture tropicale de Nogent-sur-Marne, au Laboratoire d’amélioration des plantes,
du ler septembre 1942 au 14 juillet 1944 : il a, en effet, choisi d’être généticien-
sélectionneur des plantes cultivées. Cette discipline-spécialité lui apparaît comme
pouvant induire les progrès les plus considérables, les plus rapides et, peut être,
les plus aisés à manipuler, de la production agricole.
Les spectaculaires avancées des décennies récentes ne peuvent que confir-
mer cette appréciation prémonitoire.
En 1943, Louis Sauger obtient un Certificat d’études supérieures de botanique, à la
faculté des Sciences de Paris (il n’y existe pas encore d’enseignement de
Génétique).
II a été, entre-temps, nommé ingénieur adjoint stagiaire des Services de I’agricul-
ture aux colonies, le 1 er novembre 1942. II est titularisé ingénieur adjoint de 3ème
classe, le 1 er novembre 1943.
15
Puis l’office de la recherche scientifique coloniale (futur ORSTOM) l’accueille,
du 15 juillet 1944 au 31 juillet 1945. II y suit l’enseignement de Génétique et
m
recoit le diplôme de phyto-généticien de l’Office.
Le retour au pays, l’ascension professionnelle
La guerre est enfin terminée et <<la relève » des fonctionnaires français, bloqués
pendant plusieurs années Outre-Mer, commence.
Louis Sauger va être parmi les premiers partants. II débarque à Dakar le 7 sep-
tembre 1945.
Tout naturellement, il est affecté au Sénégal, à la Station de Bambey, où son
épouse et leurs deux premiers enfants le rejoindront quelques mois plus tard
(en février 1946).
Nommé adjoint au chef du service de Génétique à son arrivée à Bambey, il devient
chef de la Section d’amélioration des plantes, le 24 novembre 1945, lorsque son
titulaire, François Bouffil, rejoint la France pour un congé prolongé, après six
années de séjour ininterrompu au Sénégal.
Le 6 avril 1946, Louis Sauger est reclassé ingénieur de 2ème classe des Services
de l’agriculture aux colonies qui vont rapidement devenir les Services techniques et
scientifiques de l’agriculture Outre-Mer, comportant deux cadres, « Production » et
« Laboratoires » (Louis Sauger appartiendra, bien sûr, à ce dernier).
La Station expérimentale de l’arachide (SEA) est alors :

- une déjà ancienne station de recherche du Sénégal. Créée en 1921 pour I’amé-
lioration de la culture de l’arachide, ses travaux ont acquis large renommée.
Outre ses nombreuses recherches sur l’arachide (sélection, protection phytosani-
taire, fertilisation...), elle conduit des travaux sur les principales cultures vivrières
et autres industrielles du Sénégal.
Plus largement, elle s’intéresse aux domaines de la science des sols, de la dé-
fense des cultures, des techniques culturales.
Elle a même, ce qui est novateur à l’époque, élaboré, avec le Service de l’agri-
culture et les Sociétés de prévoyance, un remarquable et opérationnel système de
multiplication, diffusion et contrôle des semences sélectionnées d’arachide.
- le siège d’une jeune organisation fédérale de recherche pour la zone sahélo-
soudanienne d’Afrique occidentale : le Secteur soudanais de recherches agro-
nomiques (S%A).
16
Créé à la veille de la deuxième Guerre mondiale, le SSRA a été retardé, dans son
démarrage, par le conflit.
La structure existe cependant et regroupe plusieurs stations :
- du Sénégal : Bambey, Louga, Nioro du Rip, Sinthiou Malème, Guérina ;
- du Soudan (actuel Mali) : Katibougou, MPesoba ;
- de Haute-Volta (actuel Burkina Faso) : Saria, Banfora ;
- du Niger : Tarna ;
- de Guinée : Kankan ;
- de Côte d’lvoire : Ferkessédougou.
:
En 1946, la direction du SSRA est assurée par Paul Coleno, sous la tutelle de
l’Inspecteur général de l’agriculture de I’AOF, à Dakar, Robert Sagot (ancien direc-
teur de la SEA Bambey).
Les stations locales des différents pays, alors territoires de I’AOF, puis de l’union
française, restent cependant placées sous la tutelle directe des services locaux de
l’Agriculture, l’intervention du SSRA se limitant aux aspects scientifiques d’orienta-
tion, d’appui, de conseil.
La programmation des activités des stations est l’objet d’une concertation an-
nuelle ou pluriannuelle entre recherche et services de production (ou de vulga-
risation).
Cette <(double commande », qui aurait pu être source de frictions, comme à
chaque fois que se partagent des prérogatives, a, en fait, ouvert la voie à une
coopération fructueuse entre recherche et vulgarisation.

Ce n’est peut-être pas par hasard que certaines des plus belles pages de la
recherche-développement ont été écrites, plus tard, en Afrique occidentale et, en
particulier, au Sénégal.
Cet ensemble de recherche fédérale va, en fait, connaître son premier essor véri-
table avec la mise en place, en 1947-48, d’un fonds français d’aide aux territoires
de l’Union française, le FIDES (Fonds d’investissement pour le développement
économique et social).
Le SSRA est remplacé, le 17 juin 1950, par le Centre de recherches agronomiques
de Bambey (CRA), à vocation fédérale sensiblement identique.
Les objectifs, l’organisation en sont toutefois assez notablement différents.
Deux grandes divisions sont identifiées au sein du CRA :
- la division des Laboratoires est, dans une bonne continuité avec les disciplines et
sections de I’ex-SSRA, essentiellement orientée vers la connaissance et I’amé-
lioration des milieux physiques et biologiques, et des plantes cultivées.
17
Elle comprend trois subdivisions : I’Agrologie, la Protection des cultures et la
-
Phytotechnie.
- la division d’agronomie, nouvelle venue dans le dispositif de recherche, se doit
d’être plus concernée par l’approche économique et sociale et l’adaptation des
résultats aux milieux et conditions de l’agriculture sahélo-soudanienne.
Elle est présentée comme le «trait d’union » entre la recherche et la vulgarisation.
Elle va, elle aussi, s’organiser en subdivisions : Techniques culturales, Mécani-
sation, Zootechnie, Économie rurale et Application, au fur et à mesure du renfor-
cement de ses moyens et effectifs.
En 1950, le premier directeur du CRA est Robert Jeannin. François Bouffi1 est
nommé directeur de la Station de Bambey. II succède à Robert Jeannin, à la tête
du CRA, en 1952.
Louis Sauger se voit confier la responsabilité de la subdivision de Phytotechnie, la
plus étoffée du dispositif, avec ses sections d’Amélioration des plantes, de
Botanique, d’Écologie végétale et de Phytochimie.
,Quelques années plus tard, en 1958, Louis Sauger assumera la responsabilité de
l’ensemble de la division des Laboratoires.
II est peut être à noter qu’en cette année 1950, René Tourte se voit chargé de la
division d’agronomie.
L’anecdote veut, en outre, que ce dernier ait été à son arrivée au Sénégal en
1947, et pendant les années 1948 et 1949, le premier adjoint de Louis Sauger au
service de I’Amélioration des plantes.

C’est dès ce moment que naît la profonde amitié qui va unir Louis Sauger et René
Tourte leur vie durant.
Leurs perceptions des problèmes du développement rural ne cesseront de se rap-
procher au fil des années, et leur coopération deviendra de plus en plus étroite et
confiante.
Les finalités, les objectifs, les structures de l’ensemble CRA Bambey changeront
peu de 1950 à 1960. Ses moyens se verront progressivement renforcés et son
action régionale s’organisera et s’aménagera en fonction des besoins, de mieux
en mieux connus, de la zone tropicale sèche de la fédération de l’Afrique de
l’Ouest.
En 1957, le CRA Bambey est confié à I’ORSTOM et ses chercheurs invités à s’y
faire intégrer.
Au cours de cette décennie 50-60, Louis Sauger va profiter d’un de ses congés
pour réussir un Certificat d’études supérieures de Génétique à la faculté des
18
Sciences de Paris (de novembre 1955 à juin 1956).
Au plan professionnel, il connaît un avancement rapide qui vient reconnaître ses
exceptionnelles compétences et qualités.
Dans le cadre des Laboratoires des services techniques et scientifiques de I’agri-
culture de la France d’outre-Mer, il est nommé Maître de recherches le Ier janvier
1950 et directeur de Laboratoire le Ier janvier 1956.
A son intégration à I’ORSTOM, il est reclassé directeur de recherches, 3ème
échelon, au 1 er juillet 1957.
L’Indépendance, Louis Sauger vers les cimes
professionnelles et administratives
En 1958-60, les territoires de l’Union française accèdent à l’Indépendance.
En 1960, les stations et structures de recherche d’Afrique sahélo-soudanienne
dont le CRA Bambey assurait la tutelle scientifique, sont nationalisées dans leurs
États propres.
Au Sénégal, le CRA Bambey devient Centre national de la recherche agronomique
(CNRA) et les stations sénégalaises des stations régionales.
Cependant, le Sénégal et la plupart des.~ pays francophones d’Afrique et Mada-
gascar signent avec la France un accord de coopération en matière de recherche
scientifique et technique.
L’Institut de recherches agronomiques tropicales et des cultures vivrières (IRAT),
nouvellement créé, se voit confier la gestion scientifique et administrative de la

19
LE CRA BAMBEY DANS LES ANNÉES 50.

plupart des structures précédemment gérées par les services de la France d’outre-
Mer et I’ORSTOM.
En 1961, François Bouffil, directeur du CRA Bambey, est admis à faire valoir ses
droits à la retraite, après 33 années de travail à Bambey.
Le gouvernement sénégalais et Francis Bour, directeur général de I’IRAT, confient
alors à Louis Sauger la double direction du CNRA Bambey (et de ses structures
régionales) et des services de I’IRAT au Sénégal (et en Mauritanie).
Louis Sauger assumera cette double responsabilité jusqu’à la création de l’Institut
sénégalais de recherches agricoles (ISRA), en 1974.
Pendant toute cette période, 1960-1974, la recherche agronomique au Sénégal,
et en particulier I’IRATKénégal, connaissent une exceptionnelle expansion scien-
tifique, technique et structurelle.
Le nombre des chercheurs, une vingtaine en 1960, va pratiquement tripler, la pro-
portion des nationaux va croître notablement.
Les objectifs, les programmes, les implantations, les activités, vont se décentra-
liser, se régionaliser, se localiser, pour se rapprocher délibérément des problèmes
essentiels des acteurs fondamentaux du développement rural : les producteurs, les
paysans.
Dans chaque région du jeune État sénégalais est créée une Unité régionale de
recherche (URR).
Les stations régionales sont systématiquement équipées, dotées de moyens forte-
ment accrus en personnel, en matériel, en terrains d’expérimentation.
Un réseau de Points d’appui de prévulgarisation et expérimentation multilocale
(PAPEM) est implanté, dès 1962-63, à raison d’au moins un PAPEM par zone
homogène du Sénégal agricole.
De cet ensemble cohérent, de ce dispositif de recherche ainsi établi et rendu opé-
rationnel, vont émaner des thèmes, stratégies, démarches de recherche dont la
notoriété, la résonance franchiront largement les frontières du Sénégal :
- amélioration foncière des sols, nutrition organique et minérale des plantes, ses
mécanismes édaphiques, physiologiques... ;
- gestion parcellaire et paysagiste des eaux, des sols, des techniques ;
- amélioration et protection des principales productions végétales de l’agriculture
sahélo-soudanienne ;
- études des techniques agronomiques, des systèmes de culture et d’élevage, des
systèmes de production, de la mécanisation attelée et motorisée ;

- introduction, de plus en plus systématique, des composantes économiques et
sociales de la production agricole dans les critères d’évaluation, puis de pro-
grammation, de la recherche agronomique ;
- intégration des produits, puis de la problématique de recherche à des échelles de
paysage de plus en plus globalisantes : bassins-versants expérimentaux, unités
expérimentales, aménagements hydro-agricoles, intégration agriculture-élevage ;
- avancées délibérées vers le développement, le milieu rural : correspondants-
paysans, cellules de recherche-développement, actions de développement expé-
rimental.
Ce remarquable tissu scientifique et technique, cet exceptionnel réseau relation-
nel chercheurs-vulgarisateurs-producteurs (très vite défini comme devant être
triangulaire) vont permettre aux équipes dirigées par Louis Sauger de jouer un rôle
majeur :
- dans la planification du développement au Sénégal, et les perspectives et straté-
gies à moyen et long termes de sa recherche ;
21
- dans les orientations, objectifs et programmations des recherches menées par
m
I’IRAT et, plus largement, par le GERDAT (Groupement d’études et de recherches
pour le développement de l’agriculture tropicale) au bénéfice des pays tropicaux,
notamment en Afrique occidentale et centrale.
En 1974, l’Institut sénégalais de recherches agricoles (ISRA) est créé. II hérite
naturellement de cet ensemble riche en hommes, en idées, en capacités, en
démarches et en produits.
Et le gouvernement en confie la charge à l’un de ses plus émérites scientifiques :
Louis Sauger.
Quelques mois auparavant, le gouvernement du Sénégal avait d’ailleurs souligné
le rôle politique essentiel qu’il entendait faire jouer à la recherche en créant, en
1974, la Délégation générale à la recherche scientifique et technique (DGRST).
Le premier délégué général nommé avait d’ailleurs été l’un des élèves et plus
proches collaborateurs de Louis Sauger : Djibril Sène, qui connaîtra, à partir de ce
moment, une carrière politique brillante : maire, député, plusieurs fois ministre,
membre de nombreuses institutions nationales, étrangères, internationales.
Louis Sauger dirigera I’ISRA, avec beaucoup de clairvoyance et d’autorité, jus-
qu’en 1979.
L’ISRA va, au cours de cette période, rapidement assurer sa crédibilité, son renom,
tant à l’intérieur qu’à l’extérieur des frontières du Sénégal.
II va révéler ou confirmer en son sein des individualités sénégalaises de grande
valeur scientifique, dont beaucoup s’affirmeront être des animateurs et « mana-

gers)’ d’autorité largement reconnue : Gora Bèye, Limamoulaye Cissé, Kader
Diallo, Sitapha Diatta, T. Diaw, Jacques Faye, Mohamadou El Habib Ly,
Ndiaga Mbaye, Mahawa Mbodj, Madické Niang, Jean-Pierre Ndiaye, Mbaye
Ndoye, Papa N. Sall, Aboubacar Sarr, Mamadou Sonko, Abdou Aziz Sy, Papa
Ibrahima Thiongane, Diafara Tour& Saydil Maktar Touré, Moctar Tour& etc.
Nombre d’entre eux connaîtront la notoriété nationale ou internationale.
En 1979, Louis Sauger « atteint par la limite d’âge >>, transmet la direction générale
de I’ISRA au docteur P. 1. Thiongane.
Sa carrière administrative à I’ORSTOM s’achève également au plus haut niveau :
Inspecteur général de recherches depuis le le’ janvier 1965, il est Inspecteur
général hors Échelle C2 depuis le Ier janvier 1970.
Mais avant de quitter complètement la scène agricole sénégalaise, Louis Sauger
va encore, avant sa retraite définitive, accompagner cette recherche nationale qui,
largement grâce à lui, est devenue majeure.
22
Jacques Diouf, alors secrétaire d’État à la recherche scientifique et technique
du Sénégal (et qui, une décennie plus tard, deviendra directeur général de la
FAO), lui confie la Direction des recherches agricoles et agro-industrielles (DRAI),
fonction qu’il assumera jusqu’à son départ définitif du Sénégal, le 27 mars 1981.
L’homme de science,
spécialiste de la génétique végétale
Très tôt, Louis Sauger avait ainsi porté ses espoirs de futur scientifique sur la spé-
cialisation sans doute la plus prisée de la palette agronomique, parce que, peut
être, la plus porteuse de progrès pour la production agricole : la génétique.
Son goût du concret et son souci d’une application large et rapide des résultats en
avaient fait un sélectionneur en productions végétales.
En fait, quand Louis Sauger prend ses fonctions, en 1945, à la Section d’améliora-
tion des plantes de la Station expérimentale de l’arachide à Bambey, les produc-
tions végétales représentent la part largement dominante du secteur primaire de
l’économie sénégalaise et l’essentiel des exportations (grâce à l’arachide).
Louis Sauger succède alors à François BoÛffil dont les travaux, commencés en
1928, ont considérablement fait avancer la connaissance génétique de l’arachide
et la maîtrise de sa sélection. Certaines des obtentions de François Bouffil, comme
la fameuse lignée 28-206, sont connues de tous ceux qui, de près ou de loin, ont
fréquenté l’arachide ; et elles ont franchi bien des frontières, bien des décennies.
Louis Sauger poursuit naturellement ces travaux qui ont, entre autres, sans doute
permis au CRA Bambey de disposer, à une époque, de la plus importante collec-

tion mondiale d’arachide (près de 1500 variétés et lignées en 1955) à laquelle
feront appel des chercheurs du monde entier.
Louis Sauger exploite cet exceptionnel matériel génétique par sélection, hybrida-
tion, mutation. II crée des types nouveaux susceptibles de répondre aux exigences
des utilisateurs : cycle, productivité à différents niveaux de fertilité, rusticité, résis-
tance aux aléas, maladies, prédateurs, adaptation à la culture mécanisée, etc.
Ses avancées les plus remarquables, dans ce domaine de l’amélioration génétique
de l’arachide, sont probablement :
- la création de variétés dressées ou érigées mécanisables. Ce « produit a> est
essentiel, car la culture attelée connaît, dans les décennies 50 et 60, un excep-
tionnel essor au Sénégal et dans d’autres pays africains ;
- l’identification dès 1952 et 1954, avec son collaborateur Maurice Catherinet, d’un
matériel résistant à la rosette chlorotique, maladie virale aux conséquences
économiques, certaines années, dramatiques. Louis Sauger et Maurice
Catherinet mettent au point des méthodes de tests rapides de résistance, grâce
23
à une technique de transmission artificielle de la maladie (par pucerons et par
greffe).
Immédiatement, ils entament un programme d’hybridation permettant d’associer
résistance et productivité.
Le matériel ainsi créé sera à la base de nombreuses autres obtentions, tant du
CRA Bambey que d’autres institutions travaillant hors du Sénégal :
- la création d’un matériel hybride stable, associant la précocité des variétés
hâtives disponibles, mais à germination en terre spontanée (dès maturité appa-
rente), à la «dormante » des variétés tardives ;
- l’obtention de matériels à meilleur rendement au décorticage et à teneur en huile
plus élevée.
Dans ces programmes d’amélioration par hybridation, sont étudiés : le taux d’allo-
garnie naturelle, le déterminisme génétique du port de l’arachide, les techniques de
l’hybridation, etc.
Toutes ces voies seront suivies et développées par les collaborateurs et succes-
seurs de Louis Sauger dont Maurice Catherinet, Michel Jacquet et surtout Jean-
Claude Mauboussin ; leurs produits seront largement diffusés dans l’espace ara-
chidier africain, au cours des décennies 60 et 70.
Ayant ainsi reconnu à l’arachide son rôle économique moteur, Louis Sauger élargit
cependant très tôt le champ des recherches en amélioration des plantes, qui lui
avaient été confiées en 1945.

En fait, dès 1935, Francois Bouffi1 avait engagé son service dans l’amélioration
des principales cultures vivrières et industrielles secondaires de l’écologie sahélo-
soudanienne :
- les céréales : mils (hâtifs et tardifs), sorgho, maïs, éleusine... ;
- les légumineuses : vigna (niébé), phaseolus, dolichos, soja, voandzeia, kerstin-
giella... ;
- les légumes divers : manioc, tomate, pastèque, hibiscus (esculentus, sabdariffa) ;
- les plantes fourragères et de couverture : crotalaire, pois d’angole, pueraria,
canavalia, mucuna... ;
- les cultures industrielles secondaires : sésame, ricin, tournesol...
Dans ce riche jardin botanique qu’il trouve à son arrivée à Bambey, en 1945,
Louis Sauger va, au-delà d’un simple maintien en collection, établir des priorités
sur lesquelles il va asseoir sa politique de diversification.
24
II l’exprime, en 1950, quand il crée, au sein de la subdivision de Phytotechnie,
les sections - arachide, mils et sorghos, cultures diverses, cytogénétique, bota-
nique - dont les programmes vont progressivement s’étendre à l’ensemble de la
zone tropicale sèche de l’Afrique de l’ouest.
Devenu patron incontesté de l’amélioration des plantes cultivées de cette zone,
Louis Sauger va, pendant au moins deux décennies, y accueillir, diriger, former,
conseiller bon nombre de jeunes et moins jeunes généticiens, sélectionneurs, dont
le rôle sera considérable dans les organisations de recherches tropicales.
Plusieurs sont de renom international : Maurice Tardieu, Maurice Catherinet,
Djibril Sène, Marius Bono, Michel Arraudeau, Michel Jacquet, Claude Etasse,
Jean-Claude Mauboussin. etc.
La plupart d’entre eux sortent d’ailleurs de l’école ORSTOM, comme Louis Sauger,
et ont été élèves d’un de ses camarades de Grignon, André Bilquez dont le rôle
pionnier, et éminent, dans la formation de ces spécialistes n’a peut être pas été
assez souligné.
André Bilquez viendra d’ailleurs, dans les années 60, renforcer l’équipe de
Bambey et y conduire un programme de recherche approfondie sur la structure
génétique et les mécanismes physiologiques des mils pénicillaires.
La contribution de Louis Sauger à l’amélioration des plantes cultivées sous les tro-
piques est considérable. Ses nombreuses publications en attestent, ainsi que la
richesse des produits dont ses recherches ont permis la création et la diffusion.
II est cependant, dans ce domaine, un aspect des préoccupations et travaux de
Louis Sauger qui mérite sans doute d’être mieux connu, même si certains peuvent

y voir une recherche moins << pure ». C’est le souci constant, qu’a eu Louis Sauger,
de placer ses obtentions dans les vraies conditions de leur utilisation et de les
voir évaluées selon les critères des producteurs eux-mêmes.
C’est aussi l’obligation qu’il s’est toujours imposée de fournir aux opérateurs du
développement et agents de vulgarisation, des modes d’emploi précis de ses
produits.
Là aussi, Louis Sauger a été précurseur.
Dès 1950, il engage, à la demande du chef de service de l’Agriculture du Sénégal,
Etienne Macari, puis André Marchai, une expérimentation multilocale de variétés
d’arachide, en champs paysans.
Ces (<essais multilocaux=, réalisés sur une quinzaine de sites aux caractéristiques
écologiques bien différenciées et bien caractérisées, apportent, à l’époque, une
triple et très originale innovation :
- ils suivent un protocole rigoureux de préparation, mise en place, exécution, per-
2f
mettant une interprétation statistique des résultats ;
- ils sont réalisés en étroite collaboration entre le service de l’Agriculture (vul-
garisation) et la station de Recherche ;
- ils sont conduits en utilisant les outils et pratiques des paysans.
Ils préfigurent les relations opérationnelles qui vont progressivement s’établir
entre recherche et vulgarisation, dont Louis Sauger percevait ainsi, déjà, toute la
portée :
Extraits
«Les essais multilocaux permettent de définir exactement la zone écologique
convenant le mieux aux différentes lignées, donc de multiplier dans chaque zone la
lignée qui lui convient le mieux.

- tous les cultivateurs peuvent voir, côte à côte, les lignées sélectionnées et I’ara-
chide commune : aux agents... de la vulgarisation... de leur faire toucher du doigt
l’évidence de la supériorité... afin qu’ils sachent que ce n’est pas par hasard que
l’on décide de multiplier une lignée dans une région déterminée ;

- la participation des agents de la vulgarisation à cette «phase expérimentale de la
prévulgarisation » les fait contribuer au choix de la lignée à vulgariser... ;
- ces essais créent donc une collaboration étroite, sur le plan de la prévulgarisa-
tion, entre le service local (de l’Agriculture) et l’organisme de recherche... ;
- cette «prévulgarisation expérimentale » supprime toute solution de continuité
entre la recherche et la prévulgarisation, prolongeant sur le plan pratique l’expé-

rimentation de l’organisme de recherches et préparant l’action de vulgarisation
en lui donnant des bases sûres.

Mais... de tels essais doivent être répétés pendant plusieurs années... et il ne faut
multiplier une lignée que si l’on est sûr qu’elle est la meilleure sur une moyenne de

plusieurs années, ayant subi l’épreuve de différentes conditions climatiques.
2
A partir des résultats de ces essais multilocaux, une carte de diffusion des variétés
sélectionnées d’arachide est ainsi dressée, dès 1950-51, pour l’ensemble du terri-
toire sénégalais, et sera continuellement réactualisée.
Le programme de vulgarisation, entamé dès 1935 par François Bouffil, peut être
ainsi poursuivi et amplifié sur une base expérimentale, cartographiée et évolutive.
II s’accompagne, en outre, d’un suivi rigoureux des différentes étapes de la multi-
plication des semences sélectionnées en milieu rural, mises en place par le service
de l’Agriculture et les Sociétés de prévoyance : paysans multiplicateurs, villages
multiplicateurs, etc.
16
Chaque année, la station de Bambey analyse ainsi des centaines d’échantillons
(pureté, qualité germinative, rendement au décorticage, etc.) provenant de toutes
les régions arachidières du pays.
Un plan de diffusion raisonné des semences d’arachide peut alors être établi au
début de chaque campagne et asseoir ainsi une véritable stratégie semencière au
Sénégal.
En 1951, 30 000 tonnes de semences d’arachides sont ainsi distribuées.
Sans doute, ce tonnage va-t-il tripler dans les décennies suivantes, mais le sys-
tème ainsi mis en place, et repris plus tard par le service semencier, va longtemps
fonctionner, efficacement.
La méthode des ((essais multilocaux 7) va, elle, connaître une exceptionnelle
expansion dans la décennie 1950 (et bien au-delà).
Elle va être étendue, dans le domaine variétal, aux espèces autres que l’arachide :
mil, sorgho, niébé, manioc, riz... Elle va être utilisée, en outre, pour bien d’autres
thèmes : fertilisation, techniques culturales, lutte phytosanitaire... et dans beau-
coup d’autres pays.
Ainsi, grâce à des précurseurs comme Louis Sauger, le chercheur va ajouter à son
image d’homme de laboratoire, peu familier des contingences extérieures (isolé
2 Louis Sauger. Essais multilocaux de variétés d’arachide au Sénégal. Bulletin t-P 1, CRA Bambey, le’
semestre 1951, p. 53-61.

dans sa tour d’ivoire, disait-on à l’époque), celle d’un acteur indispensable et dyna-
mique du développement.
Ainsi, le chercheur va de plus en plus pénétrer la réalité profonde et la diversité des
situations agricoles, y évaluer ses produits et, plus fondamentalement, y puiser ses
problématiques.
On commence alors à parler de <<chercheur engagé >>.
L’agronome complet et aux larges vues
Passionné par sa spécialité, dont il sera toute sa vie l’un des maîtres incontestés et
écoutés, Louis Sauger se préoccupe cependant, très tôt, des relations qu’il doit éta-
blir avec l’ensemble des sciences et arts de l’agriculture.
II est, à ce sujet, particulièrement symbolique et émouvant de retrouver dans les
documents de Louis Sauger pieusement conservés par son épouse Renée, la
reproduction de cette citation de Bernard Palissy (Recepte Véritable, 1564), qui
outre l’émailleur et brûleur de meubles bien connu, fut aussi un ardent et éminent
2;
naturaliste :
m
<<Je te dis qu’il n’est nul art au monde, auquel soit requis une plus grande phi-
losophie qu’à l’agriculture et te dis que si l’agriculture est conduite sans philoso-
phie, que c’est autant que journellement violer la terre et les choses qu’elle produit,
et m’esmerveille que la terre et natures produites en icelle ne crient vengeance
contre certains meurtrisseurs ignorants et ingrats qui journellement ne font que
gaster et dissiper les arbres et la terre, sans aucune considération )>.
C’est au nom de cette philosophie, écologiste et transdisciplinaire, ainsi exprimée
oh! combien avant la lettre moderne, que Louis Sauger va être un des artisans
majeurs de l’exceptionnelle ouverture scientifique que le CRA Bambey, et, plus lar-
gement, la recherche agronomique sénégalaise et tropicale, vont connaître dans
les décennies suivantes.
Dès 1946, Louis Sauger, alors responsable de l’amélioration des plantes, engage
une étroite collaboration avec les autres services de la station de Bambey : agro-
logie, entomologie, service des cultures (multiplication des semences, gestion de la
ferme...).
II réalise, par exemple, avec son collègue agronome Georges Genuyt, en 1948, les
premiers essais combinant variétés d’arachide, formules et doses d’engrais.
Dès 1950, sa collaboration avec Serge Bouyer, alors responsable de l’équipe de la
subdivision d’Agrologie s’intensifie rapidement, en même temps qu’il développe
sa propre subdivision de Phytotechnie, au sein de la division des Laboratoires (du
CRA Bambey nouvellement créé) qui regroupe ces deux subdivisions et celle de
Protection des cultures.

Et lorsqu’en 1958, Louis Sauger prendra la responsabilité de l’ensemble de cette
division des Laboratoires, les trois subdivisions et leurs spécialistes auront déjà
de vieilles habitudes et traditions de travail interdisciplinaire.
Dans ce courant de pensée <(fédérateur)>, assez peu commun à l’époque, vont
s’exprimer d’exceptionnelles compétences dont le renom demeure plusieurs
décennies après : Claude Charreau, agro-pédologue, Jean Appert, entomologiste,
Prosper Vidal et Louis Jacquinot, agro-physiologistes, Henri Merlier, agro-bota-
niste, Marcel Tran Din Hoe (dit Couey), généticien... et, bien entendu, les collabo-
rateurs directs, phytogénéticiens et phytotechniciens, déjà cités, de Louis Sauger.
Et, en même temps, qu’il construit ainsi sa propre division, Louis Sauger suit avec
beaucoup d’attention et d’intérêt, les efforts de son ami René Tourte, lancé, dès
1950, dans l’aventure de la nouvelle division d’Agronomie, l’autre face, plus inso-
lite à l’époque, du CRA Bambey.
II va lui apporter ses conseils, son appui, sa volonté de coopérer avec les disci-
plines et sections qui vont progressivement et rapidement apparaître à l’agronomie :
Expérimentation culturale, Techniques agronomiques, Mécanisation, Zootechnie,
Économie rurale, Prévulgarisation et application de la recherche, etc.
II va constamment encourager, soutenir la division d’Agronomie dans son avancée
vers les problèmes techniques, économiques, sociaux du monde rural, et son
approfondissement des systèmes de production que l’on peut proposer à ce monde
rural, ou, bien mieux, que l’on peut élaborer avec lui.
Tous les agronomes pionniers que René Tourte avait alors pu réunir autour de
lui, doivent beaucoup à Louis Sauger : Jean Pélissier, Philippe Gaudefroy-
Demombynes, Robert Marchand, Jean Fauché, Jean Ginouvès, Roger Klein, etc.
Le bâtisseur de la recherche agronomique
sénégalaise (et mauritanienne) moderne
En 1960, les États de la Communauté francophone accèdent à l’indépendance
politique.
CIRAT se voit confier, par convention entre la France et ces États, la gestion des
stations et centres agricoles non déjà gérés par les instituts de recherche spécia-
lisés dans les grandes filières autres que vivrières.
Louis Sauger prend, le 15 juin 1961, la direction du CNRA Bambey et des services
de I’IRAT au Sénégal et en Mauritanie.
D’entrée de jeu, il confirme son souci de cohérence et de complémentarité opéra-
tionnelle entre les deux anciennes divisions du CRA Bambey.

Avec l’accord de Francis Bour, directeur général de I’IRAT et, bien entendu, de la
tutelle ministérielle sénégalaise, il les regroupe en une direction des recherches
unique, qu’il confie à René Tourte.
Quatre groupes de recherches sont alors identifiés.
Les deux premiers reprennent, en fait, les domaines d’études, objectifs et thèmes
de I’ex-division des Laboratoires :
- Groupe Étude et amélioration du milieu ;
- Groupe Étude et amélioration de la plante ;
Les deux derniers groupes héritent de la division d’agronomie :
- Groupe Étude et amélioration des techniques agronomiques ;
-Groupe Application de la recherche. Ce groupe assumera, en particulier, la
conduite technique et la gestion de la majeure partie des structures régionales et
multilocales du Sénégal (et de Mauritanie), et des interventions en milieu rural.
29
Cette organisation ne sera pratiquement pas modifiée jusqu’à la création de
-
I’ISRA, en 1974.
En 1967, Djibril Sène, responsable du Groupe plante, succède cependant, à la
direction des Recherches, à René Tourte, devenu directeur-adjoint des services de
I’IRAT au Sénégal et en Mauritanie. Djibril Sène cédera la place à Gora Bèye, lors-
qu’il sera nommé Délégué général à la recherche scientifique et technique du
Sénégal en 1974.
Pendant toute cette période, d’une quinzaine d’années, allant de l’Indépendance à
la création de I’ISRA, Louis Sauger et son équipe de I’lRATSénégal-Mauritanie
vont donner à la recherche agronomique de ces deux jeunes États un élan, une
dimension, un renom que la communauté internationale reconnaîtra.
Outre son dynamisme propre, cette équipe a incontestablement bénéficié,
pour réussir une telle gageure, d’une conjonction d’éléments très favorables :
- une politique clairvoyante et délibérément bienveillante à l’égard de la recherche
des gouvernements nationaux et d’homme d’État tels que Léopold Sédar
Senghor, Mamadou Dia, Abdou Diouf, Joseph Mbaye, Karim Gaye, Habib Thiam,
Ben Mady Cissé... ;
- une tutelle scientifique, technique, logistique compétente et dynamique, une
direction perspicace et habile de I’IRAT et de son directeur général Francis Bour
(assisté de Guy Vallaeys), également directeur général de la SATEC (Société
d’aide technique et de coopération) ;
- la mise en place rapide, en renfort des services étatiques de vulgarisation, de
sociétés de développement régionales ou spécialisées, très opérationnelles,

grâce notamment à l’intervention temporaire d’organismes extérieurs, tels que la
Compagnie française pour le développement des textiles (CFDT) et la SATEC ;
- l’injection importante de moyens en personnels, matériels et équipements per-
mise par les efforts conjugués des budgets nationaux et de multiples coopérations
bilatérales et internationales, dont, en premier lieu, la Coopération franqaise ;
- l’émergence de paysannats très réceptifs, résolument acquis à l’innovation et à
la participation, de plus en plus professionnels et organisés ;
- et, élément sans aucun doute déterminant, l’engagement, la foi, la cohésion, la
solidarité de tous les travailleurs de cet ensemble de recherches de quelques
niveaux et spécialités qu’ils soient.
C’est qu’en effet Louis Sauger a su, comme il saura le faire dans toutes ses autres
entreprises, lui donner c< l’esprit de corps » indispensable à la réussite. II l’a su,
déjà par son exemple de rigueur, d’intégrité, de discipline, de travail acharné, mais
aussi par son exceptionnel souci de partager, avec ses proches et tous ses
30
collaborateurs, leurs joies, leurs peines, leurs espoirs, et d’en améliorer le quoti-
dien et le futur.
Il n’est pas de problème professionnel ou personnel, posé par l’un de ses agents,
l’une de ses équipes, que Louis Sauger n’ait tenté de résoudre : vie sociale, édu-
cation des enfants, épanouissement culturel, gestion de carrière, affectations, etc.
Dans cette ambiance de chaude humanité, de saine émulation professionnelle et
d’enthousiasme partagé, toutes les bonnes volontés ont pu s’épanouir. Nombre
de scientifiques et de techniciens ont trouvé ainsi les meilleures conditions
pour exprimer pleinement leurs capacités et acquérir le renom dont ils jouissent
aujourd’hui. Parmi eux :
- des chercheurs expatriés sans doute : Robert Nicou, Jean-Franqois Poulain,
Jean-Claude Mauboussin, Guy Pocthier, Jacques Monnier, Marc Le Moigne,
Jean Birie-Habas, Claude Dancette, Christian Piéri, Pierre Siband, Tran Minh
Duc, Claude Ramond, Francis Ganry, Michel Benoit-Cattin..., qui viendront aider
ou remplacer leurs aînés, partis sous d’autres cieux ;
- mais aussi des chercheurs nationaux, de plus en plus nombreux, qui épauleront
ou relèveront les précédents : Gora Bèye, Mahawa Mbodj, Jacques Faye,
Mamadou Sonko, Sitapha Diatta, Moctar Touré, Moussa Fall...
En 1975, l’ensemble animé par Louis Sauger comprendra une bonne quarantaine
de chercheurs permanents, accueillant de nombreux missionnaires, thésards, sta-
giaires, consultants, etc.
En réalité, l’évolution de la recherche agronomique au Sénégal (et en Mauritanie),
au cours de cette période 1960-75, est bien plus profonde, bien plus qualitative
que le simple <( gonflement » des effectifs et moyens.

UNE VISITE OFFICIELLE AU CRA BAMBEY, LE 16 NOVEMBRE 1967.
l LÉOPOLD SÉDAR SENGHOR, PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE DU SÉNÉGAL,
l HABIB THIAM, MINISTRE DU DÉVELOPPEMENT RURAL ,
l JEAN COLLIN. MINISTRE DES FINANCES.

Trois transformations ou changements essentiels s’y accomplissent :
1 - Les champs de recherches s’élargissent. De nouvelles disciplines biotechni-
tiennes apparaissent ou réapparaissent : bioclimatologie, radio-agronomie, phyto-
pathologie, hydraulique agricole, constructions rurales... et, surtout, les disciplines
d’économie et de sociologie rurales entrent enfin dans la recherche agronomique.
Hypothèse est alors faite que pour que cette dernière puisse aborder de façon
cohérente (on commencera alors à utiliser le terme de « systémique s)) les pro-
blèmes globaux de l’agriculture sensu lato, elle doit réunir, en son sein, les spécia-
listes capables de les traiter, ou, le cas échéant, de les énoncer clairement et
précisément à des institutions extérieures (mieux armées pour les résoudre) puis
d’en évaluer et restituer les produits.
2 - Les problématiques, programmes, actions et structures sont systématiquement
régionalisés, à travers les stations et sous stations régionales, les PAPEM, les
interventions en milieu rural, dont des délégations régionales assurent l’animation
et la coordination.
32
Les critères de redéploiement géographique, scientifique, technique, opérationnel,
logistique, relèvent déjà des priorités, objectifs et nécessités de la recherche, mais
ils intégrent de plus en plus, très délibérément, ceux liés aux stratégies et options
du développement.
Sont, par exemple, considérablement étoffés les effectifs, structures, activités des
régions « périphériques » du Sénégal : régions du Fleuve, de Casamance, du
Sénégal oriental qui voient leurs stations, PAPEM, réseaux de correspondants-
paysans renforcés, au même titre que les régions du Bassin arachidier.
L’objectif est double :
- faire en sorte que tout chercheur, aussi spécialisé soit-il, puisse réaliser ses ex-
périences, en toute rigueur et sécurité, dans les situations agricoles souhaitées,
aussi diversifiées et éloignées soient-elles ;
- permettre aux utilisateurs potentiels (opérateurs du développement, mais aussi
collectivités paysannes, formateurs...) de connaître, évaluer, critiquer les produits
de la recherche in situ (la grande majorité des paysans doivent être à moins de
15 kilomètres d’un PAPEM ou d’une station).
3 - La recherche agronomique affiche ainsi sa volonté délibérée :
- de s’engager dans l’application de ses résultats, d’en évaluer directement les
effets ;
- d’établir un dialogue construit et systématique, en situations réelles, avec les uti-
lisateurs, les producteurs notamment, à des échelles telles que puissent s’en
dégager des priorités, orientations et stratégies de recherche, donc des pro-
grammes.

A la planification du développement, l’équipe de Louis Sauger va ainsi tenter
d’ajouter une planification de la recherche agronomique.
Aux opérations de développement, elle va essayer d’ouvrir la voie ou d’appor-
ter son appui par ses propres expérimentations et enquêtes, ses correspondants-
paysans, ses villages-tests, ses Unités expérimentales, ses interventions <<niveau
village),, etc.
La participation paysanne à la recherche lui apparaît déjà comme indispensable.
Et Louis Sauger est lui-même un homme de terrain, aussi à l’aise avec les vulgari-
sateurs qu’avec les paysans dont il parle la langue.
En 1974, le gouvernement du Sénégal crée I’ISRA (après la DGRST) et décide
d’en confier la direction générale à Louis Sauger.
L’ensemble ex-IRAT est naturellement transféré au nouvel institut national, mais,
en même temps, les autres ensembles de recherches concernant les productions
végétales (ex-IRHO, IRCT, IFAC), forestières et piscicoles (ex-CTFT), animales
33
(ex-IEMVT) et océanographiques.
CISRA, dont le siège est établi à Dakar, va comprendre sept départements :
- Recherches agronomiques et bioclimatologiques (directeur : Gora Bèye)
- Recherches d’économie rurale et socio-économiques (directeur : L. Sauger) ;
- Recherches forestières et hydro-biologiques (directeur : Diakhité, puis 0. Hamel) ;
- Recherches zootechniques et vétérinaires (directeur : Saydil Touré) ;
- Recherches océanographiques (directeur : Serge Garcia, Jacques Chabanne,
puis André Fontana) ;
- Recherches en machinisme et équipements ruraux (directeur : L. Sauger) ;
- Recherches pédologiques et hydrologiques (directeur : G. Bèye).
Les coordinations régionales des programmes et activités des différents dépatte-
ments sont assurées par des chefs de centres.
En quelques petites années, Louis Sauger va donner à cet ensemble une remar-
quable cohésion et efficacité.
Le défi n’est cependant pas facile à relever.
Si les héritages ont permis la constitution, au sein de I’ISRA, de départements aux
acquis et potentialités tous de grande qualité, leurs objectifs, leurs méthodes, leurs
moyens, voire leurs finalités et philosophies, n’en sont pas pour autant homogènes
et aisément compatibles.

I
1
...
l
.
LE DISPOSITIF DE RECHERCHE AGRONOMIQUE QUE LOUIS SAUGER DIRIGEAIT DANS LES ANNÉES 70.
(EXTRAIT DE « RECHERCHE

ET DÉVELOPPEMENT AGRICOLE
». COMPTE RENDU DU SÉMINAIRE TENU AU
CRA BAMBEY DU 16 AU 21 MAI i 977. ISRA / GERDAT)

L’autorité morale et scientifique, l’humanisme, l’intégrité, la disponibilité de Louis
Sauger vont cependant lui faire réussir la mission que lui a confiée le gouverne-
ment du Sénégal : l’édification d’une entreprise de recherche cohérente, efficace,
respectée.
Les organisations extérieures, les agences de coopération, les bailleurs de fonds
ne s’y trompent d’ailleurs pas : elles font très vite de I’ISRA l’un de leurs interlocu-
teurs privilégiés en Afrique.
Dans cette lourde et délicate tâche, Louis Sauger, sait cependant s’entourer de
collaborateurs de grande valeur (directeurs généraux adjoints, de départements,
de services...) : Simon Pereira-Barreto, Gora Bèye, Papa Ibrahima Thiongane,
Kader Diallo, Madické Niang, Moctar Touré, Jacques Faye, Mamadou Sonko,
Moussa Fall, etc., sans oublier bien sûr les expatriés qui, en robustes piliers de la
coopération franco-sénégalaise, à laquelle ils ont voué leur savoir, leur énergie,
une partie notable de leur vie, continuent à apporter à Louis Sauger l’appui qu’il
attend d’ailleurs naturellement deux : Robert Nicou, Guy Pocthier, Christian Piéri,
Jean-Claude Mauboussin, Jean-Pierre Denis, Jacques Monnier, Claude Dancette,
M. Calvet, J. Valenza, Pierre Bourdin, Doutre, Olivier Hamel, etc.
35
Tout au long de son œuvre d’édification d’un institut national de grande valeur,
Louis Sauger va aussi bénéficier de la tutelle et de l’appui bienveillant de l’État et
de ses plus hautes autorités :
- le président Léopold Sédar Senghor, dont les devises inspirent depuis long-
temps la recherche au Sénégal : <( l’homme est au début et à la fin du dévelop-
pement >> ; <<il n’y a pas de progrès dans le développement sans innovation
technique, sans invention et, partant, sans recherche » ;
- le président Abdou Diouf, dont l’exceptionnelle ascension, du gouvernorat du
Sine-Saloum à la présidence de la République, en passant par le ministère
du Plan et de l’économie, et la Primature, lui a fait évaluer l’irremplaçable
capacité de la recherche à contribuer au développement et au rayonnement
nationaux ;
- le Premier ministre Habib Thiam, dont la volonté politique et la perspicacité, déjà
lorsqu’il était ministre du Développement rural, ont été déterminantes dans
l’établissement, au Sénégal, de recherches agricoles délibérément finalisées par
le développement des sociétés rurales et des paysannats ;
- les ministres, Djibril Sène, ancien chercheur, converti à la politique, mais fidèle
aux convictions et enthousiasmes de sa jeunesse, Ben Mady Cissé, dont la foi
a longtemps porté l’animation rurale, la promotion humaine au Sénégal, Louis
Alexandrenne, Robert Sagna, Cheikh Cissokho, Jacques Diouf, fin diplomate
qui a su confirmer la recherche dans ces capacités, grâce notamment à l’appui
de la Banque mondiale, et qui a tenu à retenir Louis Sauger auprès de lui, après
que ce dernier ait quitté la direction générale de I’ISRA.

LE PRÉSIDENT ABDOU DIOUF, ALORS PREMIER MINISTRE DE LA RÉPUBLIQUE DU SÉNÉGAL, ACCOMPAGNÉ
DE M . HABIB THIAM, MINISTRE DU DÉVELOPPEMENT RURAL, EST REçu AU
CNRA BAMBEY PAR LOUIS
SAUGER, DIRECTEUR.

(PHOTO PRISE A L’OCCASION DU CINQUANTENAIRE DE BAMBEY, MAI 1971)

Dans ce contexte favorable, tant politique que scientifique, Louis Sauger va
imprimer à I’ISRA deux impulsions fondamentales :
1 - Lune, vers la haute qualité scientifique et la grande efficacité technique, éco-
nomique et opérationnelle, internationalement reconnues.
CISRA va notamment développer ses relations avec de nombreux organismes ex-
térieurs :
- les organisations de recherche des pays africains voisins et amis : Mali,
Mauritanie, Côte d’lvoire, Nigeria, Burkina Faso, etc. ;
- les institutions françaises et européennes : CIRAD, ORSTOM, GTZ..., CEE...
- les institutions américaines (Universités de Laval, du Michigan, de Californie...,
EMBRAPA du Brésil... , USAID, CRDI...) et asiatiques ;
- les organisations internationales : CGIAR, FAO, Banque mondiale...
L’ISRA va ainsi accueillir beaucoup de missions, beaucoup d’hommes de science,
31
de développement, venus soutenir, certains pendant plusieurs mois, voire plu-
sieurs années, l’effort du Sénégal en faveur de son développement rural et de
l’agriculture de cette région du monde.
2 - L’autre, vers un partenariat de plus en plus étroit avec les acteurs essentiels de
ce développement rural.
Dans cet esprit, Louis Sauger encourage d’abord la coopération de I’ISRA avec
les services et sociétés de vulgarisation et développement.
II entretien, avec leurs principaux responsables, d’étroites relations. Plusieurs
d’entre eux jouent et joueront des rôles essentiels dans la politique agricole séné-
galaise : Médoune Diène, Oumar Khassimou Dia, Cheikh Cissokho, El Hadji Omar
Tour&..
II va aussi demander à tous ses proches collaborateurs, à tous les chercheurs de
I’ISRA, d’établir ou intensifier leur dialogue, engagé il est vrai depuis longtemps au
Sénégal, avec les producteurs et la profession agricole organisée naissante.
Un Département des systèmes agraires, bien pourvu, sera d’ailleurs créé à cet
effet, avec des chercheurs de valeur et fortement engagés depuis longtemps dans
cette voie prometteuse de la participation paysanne : Jacques Faye, Guy Pocthier,
Madické Niang, Philippe Lhoste...
Et lorsqu’en 1979, Louis Sauger transmet au docteur Papa Ibrahima Thiongane les
rênes de I’ISRA, il peut à juste titre penser qu’il a réalisé son rêve de jeunesse :
doter son pays d’un outil capable d’assurer à ses populations rurales le mieux être
et l’espoir qui leur ont été si longtemps refusés.
Là, sans doute, a été sa meilleure récompense.

Louis, (( l’Africain B
Louis Sauger était franco-sénégalais de sang, de cœur, de culture et de langue.
Français, il a joué un rôle essentiel dans l’essor et l’organisation de la recherche
agronomique tropicale francaise.
Sénégalais, il a pris une part majeure à l’édification d’une recherche agricole natio-
nale forte et reconnue.
Mais Louis Sauger était aussi africain. II n’avait pas admis le cloisonnement que
l’histoire et les dominations étrangères avait imposé à son continent.
Très tôt, discrètement, mais avec son obstination et beaucoup de pugnacité, il va
souhaiter transgresser les barrières politiques, économiques, linguistiques ainsi
arbitrairement tracées. Très souvent d’ailleurs, ni la culture, ni l’écologie ne les jus-
tifient, et le vieux dialogue qu’entretiennent l’homme rural et sa nature (qu’ex-
38
priment les paysages ruraux et les systèmes agraires) les rend parfaitement
dérisoires.
Dès le début de sa carrière, Louis Sauger veut franchir les frontières de sa station,
de sa région, de son territoire.
Le statut fédéral du Secteur soudanais de recherches agronomiques, dont relève
la Station expérimentale de l’arachide de Bambey où il fait ses premiers pas de
sélectionneur, en 1945, favorise incontestablement ses idées d’évasion et son
goût des voyages,
Et Saint-Augustin n’avait-il pas dit : (( Le Monde est un livre, et ceux qui ne voya-
gent pas n’en lisent qu’une page? »
Louis Sauger gardera jusqu’à la fin de sa vie cette insatiable curiosité d’ailleurs
et ce besoin de partir pour revenir plus riche des expériences et des idées des
autres.
Dès 1950, à la création du CRA de Bambey, il entame des périples systéma-
tiques, au travers des pays sahélo-soudaniens de la compétence du Centre
fédéral.
En janvier 1951, il accompagne l’Inspecteur général de l’agriculture Robert Jeannin
en Haute Volta (actuel Burkina Faso).
L’objet de la mission est de proposer un programme de production et diffusion de
semences sélectionnées d’arachide.
Cependant, dès cette époque, Louis Sauger va situer son intervention et ses pro-
positions bien au-delà des termes de référence initiaux : «dans un objectif plus

vaste, plus ambitieux ; l’amélioration de l’agriculture indigène, dans sa conception,
dans sa technique et dans ses moyens >j3.
Les programmes et protocoles consécutifs reprendront bien cet esprit.
Dans les mêmes temps, Louis Sauger visite également le Niger et le Dahomey
(actuel Bénin).
En octobre 1954, alors qu’une véritable programmation de la recherche agrono-
mique, à l’échelle de la zone tropicale sèche de l’Afrique occidentale, s’esquisse,
Louis Sauger et René Tourte effectuent une mission conjointe dans plusieurs
«Territoires » de la Fédération et visitent différentes régions du Soudan (actuel
Mali), de Haute Volta (actuel Burkina Faso) et de Côte d’lvoire.
Les propositions qu’ils font alors concernent bien sûr leurs compétences respec-
tives (Amélioration des plantes et Agronomie), mais soulèvent déjà des problèmes
beaucoup plus généraux, tels que l’amélioration foncière des sols, l’équipement
mécanique des agriculteurs et... l’organisation des paysans : « Sans apparition
d’un paysannat organisé, il ne saurait être question d’amélioration durable (sic) en
31
agriculture... Les actions... ne pourront se développer favorablement, n’exister
même dans certains cas, que grâce au groupement des cultivateurs, au remem-
brement des terres, à l’établissement d’un régime foncier adéquat >B~.
Les chemins sont ouverts et la plupart des chercheurs du CRA Bambey vont fré-
quemment les emprunter, au cours des années suivantes.
Dans cette décennie 50, des relations de plus en plus étroites se nouent d’ailleurs
entre les scientifiques de l’Afrique sub-saharienne.
Les agrologues et pédologues organisent plusieurs conférences africaines des
sols. La première s’était tenue à Goma, au Congo Belge (actuel Zaïre) en no-
vembre 1948.
En janvier 1953, une réunion du « West Africain International Secretariat » charge
son secrétaire général, M. Galsworthy d’organiser une série de conférences éco-
nomiques rassemblant anglophones et francophones.
Une première réunion se tient au CRA Bambey du 5 au 13 septembre 1954 sur le
thème « Arachide-Mil ».
3 Extrait d’un compte rendu de réunion à la Chambre de commerce, d’agriculture et d’industrie de Bobo
Dioulasso (alors chef-lieu de la Haute Volta) du 29 janvier 1951 ; in Bulletin n”1, CRA Bambey. Ier
semestre 1951, pp. 35-40.
4 R a p p o r t d e t o u r n é e a u S o u d a n , d u 6 a u 2 5 o c t o b r e 1 9 5 4
- L . S a u g e r , R . T o u r t e , C R A B a m b e y , o c t o b r e
1 9 5 4 .

Louis Sauger contribue fortement à son succès, par ses communications et inter-
ventions.
Cette réunion va avoir d’incontestables répercussions :
-tant par la qualité et le nombre de ses participants. Pratiquement tous les pays
de l’Afrique occidentale et centrale sont représentés par des chercheurs ou per-
sonnalités administratives ou politiques, et de nombreux délégués francais et bri-
tanniques.
Pour l’anecdote, l’agronome Amilcar Cabral, dirigeant du mouvement d’indépen-
dance de la Guinée Bissau et du Cap-Vert (PAIGC) et son épouse y assistent.
- que par son réel souci de dépasser l’approche purement thématique ou discipli-
naire, alors nettement privilégiée dans la recherche et la vulgarisation.
Le gouverneur Jourdain avait ainsi <<donné le ton >>, dans son discours d’ouver-
ture :
~(Arachide et Mil constituent... une association indissoluble et toutes les interven-
tions en faveur de l’un des termes du binôme ont immédiatement leurs réper-
cussions sur le comportement de l’autre.
Du relèvement parallèle de leur productivité dépend en dernière analyse, et la sé-
curité de nos populations et l’affermissement de leur économie ».
Et le gouverneur soulignait « la nécessité d’imaginer et promouvoir une agriculture
moderne... et de discerner dans la masse... des’résultats déjà acquis, (ceux) dont
la diffusion.. . peut servir la cause de nos paysans ,p5.
Invitation était faite, en termes clairs, aux chercheurs et aux responsables poli-
tiques, administratifs et scientifiques, de mieux appréhender les systèmes de
culture et de proposer des résultats et produits adaptes.
D’autres réunions se tiendront les années suivantes sur d’autres thèmes, en
d’autres lieux, notamment sous l’égide de la Commission de coopération tech-
nique en Afrique au Sud du Sahara (CCTA).
Plusieurs chercheurs du CRA Bambey, dont Louis Sauger, y interviendront.
L’Ouganda, par exemple, organisera en juin 1955, une importante conférence sur
la Mécanisation de l’agriculture.
5 Comptes-rendus de la conférence Arachide-Mil, Bambey (Sénégal) 5-l 3 septembre 1954. Bulletin
agronomique n”12, publié par la STAT, 45 bis, avenue de la Belle Gabrielle, Nogent sIMarne
(CAgronomie
Tropicale).

Avec l’Indépendance du Sénégal et des autres pays du sous-continent, en 1958-
60, le rôle africain de Louis Sauger, s’intensifie notablement. Au Sénégal, il est
directeur du CNRA Bambey et directeur des services de I’IRAT au Sénégal, dès
juin 1961.
II va participer, contribuer à de nombreuses manifestations, animer maints col-
loques, rencontres, missions. Quelques exemples suffiront à l’illustrer.
En septembre 1962, il préside, à Dakar, une réunion sur les céréales de savane.
En janvier 1964, il se rend en Nigeria du Nord, en compagnie de Samba Cor Sarr,
directeur du Service de l’élevage du Sénégal et Mansour Sarr de la direction de
l’Agriculture.
La mission doit préparer un voyage officiel du président Léopold Sédar Senghor
au Nigeria, en vue de l’établissement d’une coopération technique et économique,
en matière d’agriculture, entre les deux pays.
Ce voyage officiel, qui a lieu du 7 au 16 avril 1964, est l’occasion pour Louis Sauger,
qui accompagne le Président, de jeter les premières bases d’une coopération
41
Nigeria-Sénégal dans le domaine de la recherche agronomique.
Cette coopération s’établira effectivement et donnera lieu à plusieurs rencontres et
échanges dans les disciplines de l’agronomie, de la mécanisation, de l’amélioration
des plantes, notamment entre les centres de Samaru (près de Zaria, Nigeria du
Nord) et de Bambey.
Cette même année, se tient à Lagos (du 28 juillet au 6 août 1964), sous l’égide de
I’UNESCO, une importante conférence internationale sur l’Organisation de la
recherche et de la formation du personnel en Afrique, sur l’étude, la conservation
et l’utilisation des ressources naturelles.
Les quelques 150 délégués présents (politiques, administratifs, scientifiques...) y
élaborent le « plan de Lagos )>, proposé comme cadre à l’Organisation de l’unité
africaine (OUA) et aux 28 États africains participants, pour l’organisation de leurs
recherches, de leurs enseignements, et pour une programmation et une coopéra-
tion des échanges interafricains et internationaux.
En janvier 1965, Louis Sauger préside et anime, à Dakar, deux réunions techniques
FAO, l’une sur la fertilisation, l’autre sur les légumes et légumineuses à graines.
A l’occasion de la dernière, il fait des propositions, très novatrices à l’époque, sur
la constitution en Afrique de réserves de gènes pour l’arachide cultivée, Arachis
hypogaea
L.
En 1967, Louis Sauger est invité à Accra (Ghana), les 30 et 31 mars, à une consul-
tation d’experts sur l’opportunité d’une conférence sur les priorités à accorder à la
recherche agronomique dans le développement économique de l’Afrique. A cette
occasion est créé un cc Groupe consultatif ad hoc des agronomes de l’Afrique )>.

En 1968, se tient effectivement à Abidjan (Côte d’lvoire), du 5 au 11 avril, le
« Colloque sur les priorités de la recherche agronomique pour le développement
économique de l’Afrique » (on peut cependant remarquer dans l’intitulé de ce
colloque, l’absence de la préoccupation sociale).
Le colloque réunit environ 200 personnalités, représentant 32 pays.
Louis Sauger y participe. II y préside la session « Farming Systems in Africa.
Mechanization and Innovation ».
Le colloque d’Abidjan est, en outre, l’occasion de la création d’une organisation à
laquelle Louis Sauger apportera, pendant quinze années, ses idées, ses compé-
tences, ses convictions, son enthousiasme, sa convivialité et sa diplomatie :
l’Association pour l’avancement en Afrique des sciences de l’agriculture (AAASA),
première association authentiquement africaine dans ce vaste domaine scienti-
fique.
A Abidjan, un comité exécutif intérimaire de I’AAASA est élu.
Le professeur Victor A. Oyenuga, doyen de la faculté d’Agriculture de l’université
d’lbadan (Nigeria) en est nommé président.
Louis Sauger est nommé vice-président.
Le docteur Malak H. Menghesa, doyen du collège d’Agriculture de l’université Haïlé
Sélassié ler, Dire Datwa (Éthiopie) est désigné comme secrétaire trésorier.
Les autres membres du’comité sont des scientifiques africains et malgaches.
Ce comité exécutif intérimaire, chargé de constituer I’AAASA, se réunit, pour la
première fois, à Addis Abéba du 5 au 10 août 1968. D’autres réunions suivent en
1969 et 1970.
L’AAASA, association qui va grouper beaucoup de scientifiques africains et autres,
à titre strictement personnel, va cependant recevoir l’appui de nombreuses organi-
sations et autorités politiques, économiques, scientifiques, financières.
Le président Léopold Sédar Senghor sera bien entendu de celles-ci. Des soutiens
importants viendront de la Commission économique des Nations Unies pour
l’Afrique, de la Fondation Rockfeller, de l’Académie nationale des sciences des
États-Unis, de nombreux gouvernements africains (Éthiopie, Nigeria, Ghana, Sierra
Leone, Sénégal...) et d’institutions du Royaume Uni, des États-Unis, de France,
d’Allemagne, d’Italie, de Suisse, de Belgique, du Mexique...
Les objectifs de I’AAASA sont ainsi définis :
- « favoriser le développement et l’application des sciences de l’agriculture à tra-
vers toute l’Afrique ;

- permettre aux experts des sciences de l’agriculture de confronter leurs expé-
riences dans le domaine de l’agriculture en Afrique notamment au moyen de
congrès et réunions périodiques ainsi que par des échanges de publications ;
- encourager les africains à saisir l’occasion pour se former dans les diverses dis-
ciplines des sciences agricoles ;
- collaborer avec les autres organisations qui se préoccupent du progrès et du
développement réguliers de l’agriculture africaine »6.
En 1971, I’AAASA tient sa première conférence internationale à Addis Abéba, du
29 août au 4 septembre, sous la présidence effective de I’Empereur Haïlé Sélassié,
et en présence des représentants de nombreuses organisations et institutions,
dont l’Organisation de l’unité africaine, la Commission économique pour l’Afrique
de l’Organisation des nations unies (ONU.).
Louis Sauger, dans un exposé très remarqué, y présente ses vues et idées sur la
« Politique de recherche en vue du développement agricole en Afrique I), dont bien
des décideurs pourraient encore s’inspirer, un quart de siècle plus tard’.
Après avoir rappelé sa propre acception du développement, qu’il retrouve bien
dans la formule du RP de Farcy, « croissance de l’avoir, développement de l’être )),
et souligné le rôle capital que peut y jouer la recherche (tant fondamentale qu’ap-
pliquée ou de développement, comme on disait alors), Louis Sauger se livre à un
vibrant plaidoyer pour l’émergence de recherches nationales et régionales fortes et
scientifiquement incontestées.
Extraits
« On pourrait se demander si les pays sous-développés ne pourraient se contenter
d’importer /es résultats des recherches des pays développés ou d’instituts établis
en dehors d’eux. Si cela est imaginable dans l’industrie (quoique dans certaines
limites), cela n’est absolument pas réaliste dans les sciences biologiques et parti-
culièrement en agriculture où, non seulement /es conditions physiques varient pro-

fondément d’un lieu à /‘autre, mais surtout où l’intervention des facteurs sociaux et
humains est essentielle. Les technologies importées des grands instituts interna-
tionaux tels que I’IRRI et le ,ClMMYT n’ont porté leur fruits que là où une solide
recherche a su localement les adapter et les compléter,..
6 Qu’est-ce-que I’AAASA ? Secrétariat de l’Association pour l’avancement en Afrique des sciences de
l ’ a g r i c u l t u r e , A d d i s A b é b a .
7 Les citations de cet exposé, reproduites ci-dessous, assez largement, car elles reflètent quelques
unes des idées et conceptions essentielles de Louis Sauger, sont extraites de : Politique de recherche
e n v u e d u d é v e l o p p e m e n t a g r i c o l e e n A f r i q u e . L . S a u g e r e t R . T o u r t e , c o n f é r e n c e s u r l a R e c h e r c h e e t
la production agricole en Afrique, Addis Abéba, Éthiopie, 29 août - 4 septembre 1971. Compte rendu
publié par le Journal de l’Association
pour l’avancement en Afrique des sciences de l’agriculture.
V o l 1, no 2 , a v r i l 1 9 7 2 , A d d i s A b é b a , E t h i o p i e .

SA MAJESTÉ IMPÉRIALE, HAïLÉ SÉLASSIÉ 1 ER , PREMIER DONATEUR EN DATE DE L’ASSOCIATION POUR
L’AVANCEMENT EN AFRIQUE DES SCIENCES DE L’AGRICULTURE, AU CENTRE, AVEC CERTAINS MEMBRES
DU COMITÉ EXÉCUTIF INTÉRIMAIRE ET QUELQUES SYMPATHISANTS. DE GAUCHE À DROITE : DR. PETER

NDERITO, M.G.R. RAMALANJAONA, DR. MELAK H. MENGESHA, PROF. VICTOR A. OYENUGA,
DR. MCDONALD Dow, M. FRANCK PINDER, M. LOUIS SAUGER, M. GERARD DEKKER, M. JEAN
DUBOIS ET M. ST. GEORGE COOPER.

CONFÉRENCE SUR LA RECHERCHE ET LA PRODUCTION AGRICOLE EN AFRIQUE. ADDIS ABÉBA, 29 AOÛT
- 4 SEPTEMBRE 1971.

(EXTRAIT DU JOURNAL DE L’ASSOCIATION POUR L’AVANCEMENT EN AFRIQUE DES SCIENCES DE L’AGRI-
CULTURE, AAASA, VOL. 1, No 1, AOÛT i 971).


Je dirais même que le risque serait plus grand dans un pays sous-développé qu’en
pays développé de suivre une telle politique de parasitisme scientifique : ce serait

se condamner à un état de dépendance permanente et croissante du fait que la
technologie traditionnelle est très sommaire et que les bases scientifiques y sont
insuffisantes.

L’effort financier des gouvernements pour la recherche devrait donc être relative-
ment plus élevé dans les pays en voie de développement que dans les pays déve-
loppés “.

Louis Sauger tranche, ensuite, dans le dilemme alors à la mode : priorité à I’agri-
culture ou à l’industrie.
Extraits
«Je pense qu’il s’agit là d’un faux problème :
- d’abord toutes les possibilités de développement doivent être mises simultané-
ment en œuvre ;
45
- ensuite l’exemple des pays développés montre que leur développement indus-
m
trie/ a pris sa source dans les progrès de l’agriculture ;
- d’autre part les pays qui ont donné une priorité absolue à l’industrie ont vu leur
développement freiné par le retard de l’agriculture ».
Puis, Louis Sauger traite des problèmes de l’orientation et de la planification de la
recherche en illustrant ses concepts par des exemples pris au Sénégal.
Extraits
« Ces orientations (de la recherche agronomique en vue du développement) sont
évidemment définies au niveau de chaque gouvernement,

- en fonction des potentialités propres du pays. Elles devront même être définies
pour chaque zone du pays en tenant compte des différences de potentialités à
l’intérieur de ce pays ;
- en fonction des objectifs économiques du pays et aussi des options politiques ;
- en fonction également du contexte économique mondial apprécié à long terme...
(Elles doivent être) le fruit d’une concertation triangulaire8 entre :
8 Louis Sauger rappelle ici l’un des concepts fondamentaux retenus par la recherche agronomique au
Sénégal, inspiré par l’une des communications présentées à Bellagio, en 1968 : George A. Dabato,
Natalia Botana : Science et technologie dans le développement futur de l’Amérique latine (Confé-
r e n c e B e l l a g i o , I t a l i e , 25%30/9/68).

- le gouvernement, qui définit les choix politiques et économiques à long terme, à
moyen terme et à court terme en fonction de la conjoncture générale et en fonc-
tion des moyens qu’il peut mettre en œuvre ;
- les producteurs ou les organes qui s’occupent directement de la promotion de
ceux-ci, qui définissent leurs besoins à court terme ;
- et, enfin, les services scientifiques et techniques de recherche qui définissent
les potentialités, apportent des solutions et suggèrent des orientations.
Les liaisons entre gouvernement et services de recherche aboutissent, pour l’un, à
la définition des objectifs économiques, pour l’autre à l’élaboration de ses pro-
grammes.

Les liaisons gouvernement-producteurs assurent l’orientation de la production.
Les liaisons entre producteurs et services de recherche aboutissent pour les uns à
la définition des systèmes de production à appliquer, pour les autres à une
meilleure définition des problèmes à résoudre et à la prise en compte des innova-
tions issues du secteur de production ».

Dépassant le cadre strictement national de la programmation de la Recherche,
Louis Sauger évoque ensuite des perspectives régionales, continentales pour
l’orientation de la recherche africaine, et les nécessaires coopérations inter-Etats.
Extraits
« Comme je l’ai déjà dit, les objectifs de recherche sont directement dépendants
des conditions locales. II peut donc sembler vain de vouloir esquisser un tableau de

ce que pourraient être ces orien ta tions pour l’ensemble de l’Afrique.
Toutefois, quelles que soit les options prises au niveau de chaque gouvernement,
l’on s’aperçoit que les programmes de développement agricole et, en consé-
quence, les programmes de recherche ont, ou pourraient avoir des similitudes sur
une grande partie de leur mise en œuvre...

- au niveau des options économiques générales en vue de développement... ;
- au niveau des productions : il est manifeste qu’un certain nombre de productions,

soit végétales, soit animales, sont d’une importance toute spéciale pour un
grand nombre d’Etats. Donc les améliorations, particulièrement génétiques, à
apporter aux espèces impliquées par ces productions sont d’intérêt commun

pour ces États ;
- au niveau des écologies et de la pédologie : de grandes zones écologiques ont
des caractéristiques climatiques similaires et des sols appartenant aux mêmes
classes. Donc les recherches concernant l’amélioration du milieu et l’adaptation
à ce milieu sont, pour une part importante, également d’intérêt commun pour de
nombreux États ;

- au niveau de la méthodologie scientifique : les techniques d’approche des diffé-
rents problèmes doivent être très similaires d’un État à l’autre ;
- au niveau sociologique, d’une part, et à celui des systèmes de production actuel-
lement pratiqués et des améliorations à y apporter, d’autre part, il est possible, de
même, de définir de grandes zones de similitude.

Bien entendu toutes ces similitudes ne doivent pas cacher la très grande diversité
de conditions qui demandent des solutions particulières, surtout dès que /‘on veut

passer à l’application au niveau de l’exploitation familiale et du groupe d’exploita-
tion..., mais elles militent en faveur d’une organisation régionale de la recherche
permettant de résoudre les grands problèmes sur cette base et de stimuler, au
niveau de chaque État, les recherches nécessaires pour aboutir à l’application chez
le paysan.. .

Trois points me semblent importants.. .
- d’abord, il faut voir loin quelle peut être l’évolution de l’agriculture à très long
terme.. .
47
A partir de cette vue d’avenir lointain il faut fixer les stades intermédiaires, par les-
-
quels l’on voudrait passer, donc de fixer les objectifs de recherche intermédiaires.
II faut les fixer de telle sorte que ces stades intermédiaires préparent le passage à
l’objectif final et éviter au contraire de les situer dans des culs-de-sac sans issue ;

- d’autre part, il faut que la recherche se situe très vite au niveau de l’exploitation
paysanne au lieu de rester dans ses stations, afin de pouvoir proposer, à ce
niveau, non pas des techniques présentées séparément, mais des systèmes de
productions éprouvés au contact des contraintes humaines, sociales et écono-
miques du monde paysan. C’est là une notion assez récente, mais d’une impor-
tance extrême.. .

- enfin, et ceci complète le point précédent, une opération de diffusion des résul-
tats de la recherche en monde paysan devrait toujours être prévue en prolonge-
ment des opérations de recherche. Je suis toujours étonné de voir le grand
nombre de résultats de recherche déjà obtenus, souvent à grands frais, sans que
les autorités responsables, bien qu’informées, ne cherchent à les mettre en
œuvre.. .

De ce que j’ai dit plus haut, on peut retenir :
- d’une part, que le gouvernement doit assurer une organisation garantissant la
concertation triangulaire que j’ai précédemment évoquée comme essentielle ;
- d’autre par que, dans un but d’économie, nos gouvernements ont intérêt à
s’organiser sur une base régionale pour résoudre leurs problèmes de recherche
agronomique.. .

Dans cette organisation, toutefois, le pire serait que les États se déchargent totale-

ment sur d’autres de la responsabilité de leur recherche même de base. C’est pour-
quoi je serais partisan d’un système où même sans contribuer financièrement à la
recherche la plus élaborée, chaque État soit intéressé à sa programmation et à son
exécution.. , Comme je l’ai dit plus haut, l’extraordinaire contribution à la science

agronomique apportée par les grands instituts internationaux n’a pu profiter qu’aux
États qui ont fait un effort de recherche pour l’adaptation de leurs résultats ».
Et Louis Sauger termine en soulignant, à nouveau, qu’il lui semble indispensable
que cette adaptation se fasse au niveau des paysans et des terroirs, ce qui implique
que la recherche y soit présente, engagée et responsable à
part entière :
Extraits
« Un autre point me semble important dans l’organisation de la recherche. Dans de
nombreux pays les services de recherche sont placés en subordination des ser-
vices de vulgarisation. Si cela est acceptable lors des premiers pas des travaux de
recherche, lorsque l’on travaille à très court terme, très vite cela devient une erreur.

48
D’une part, les services de vulgarisation n’ont que des soucis à court terme, de réa-
lisation d’objectifs de production, et sont, de ce fait incapables d’orienter la
recherche qui doit travailler à plus long terme et avoir de larges vues sur l’avenir.
D’autre part, ces services ont
a priori des vues sur les techniques que peut ou ne
peut pas accepter le paysan et sont de ce fait stérilisants quant aux recherches de
voies nouvelles de production.
Ceci milite d’ailleurs pour l’adjonction à tout service de recherche agronomique
d’un département socio-économique chargé des études, chez les paysans, de sys-
tèmes de production acceptables et, en retour, de demander aux chercheurs les

améliorations nécessaires aux techniques proposées ou même de nouvelles
r e c h e r c h e s .
C’est principalement, d’ailleurs, à ce niveau que s’effectuera la concertation trian-
gulaire indispensable.

L’organisation de la recherche nécessite la mise en place de centres importants où
des équipes complètes de chercheurs puissent aborder les problèmes à résoudre
sous tous les aspects, de façon multidisciplinaire, et pour que des échanges intel-
lectuels fructueux puissent s’effectuer.

Mais aussi il faut éviter que ces centres soient trop coupés des problèmes élé-
mentaires qui se situent au niveau des terroirs et il ne serait pas souhaitable qu’il

y ait, du fait d’une double organisation régionale et nationale, une discontinuité
dans l’action de recherche, depuis la recherche de base jusqu’à la recherche de
développement et jusqu’à l’application.

L’Afrique possède un certain nombre de centres de recherche dont l’apport scien-
tifique est respectable et qui ont l’avantage d’être très proches des problèmes de
chaque État. Leur renforcement, d’une part pour aborder plus à fond certains pro-


b/&nes de base, d’autre part pour qu’ils puissent prolonger leur action jUSqU’aUX
problèmes posés par l’application, est probablement à rechercher plutôt que la

création de centres nouveaux. »
A-t-on suffisamment entendu, écouté et compris Louis Sauger, cet homme de
grande expérience, de grand bon sens et si clairvoyant pour le présent et l’avenir ?
La contribution de Louis Sauger à l’émergence d’une recherche africaine de
<( plein exercice », ne se limite cependant pas à son rôle éminent dans l’essor de
I’AAASA.
II est, en particulier, associé à plusieurs « revues » et évaluations des résultats,
capacités, besoins et perspectives de différents pays africains dans le domaine des
recherches agricoles.
De janvier 1970 à juillet 1971, il participe par exemple, à une série de douze sémi-
naires organisés à l’initiative de la Fondation Ford, de VIRAT, de I’IITA (nouvelle-
ment créé à Ibadan).
Chacun de ces séminaires porte sur l’un des grands thèmes d’amélioration pos-
sible de l’agriculture des savanes et forêts tropicales africaines.
États et perspectives des recherches y sont longuement et précisément débattus
entre chercheurs et responsables de recherchesg.
Parallèlement, un Comité international sur les possibilités de la recherche agrono-
mique en Afrique se constitue en 1970, avec l’appui des Fondations internatio-
nales, du CGIAR, mais aussi d’organisations africaines telles que I’AAASA, de
coopérations bilatérales et d’institutions comme VIRAT (auquel appartient toujours
Louis Sauger).
Ce Comité va travailler plusieurs années sur le Bilan et les perspectives de la
recherche agronomique en Afrique.
II tient, en particulier, une réunion à Dakar et Bambey, en mars 1973. Louis Sauger
l’y accueille en sa double qualité de directeur du CRA Bambey et vice-président
de I’AAASA.
Et, lorsqu’en 1974 la National Academy of Sciences de Washington publie le rap-
port sur les travaux du Comité, son Président, Jbhn McKelvey et ses membres
vont « remercier tout particulièrement Louis Sauger... qui a fourni une masse d’in-
formations sur les progrès accomplis par la recherche agronomique en Afrique de
g L’essentiel de ces séminaires a fait l’objet d’une publication : « Food Crops of the Lowland Tropic a>.
Edité par le C. L. A. Leakey, J. B. Wills. Oxford University Press, 1977, 345 pages.

l’Ouest francophone et a aidé de ses critiques constructives l’établissement de ce
rapport )>l”.
II est vrai que, dans les mêmes temps, Louis Sauger s’était familiarisé avec la
langue de Shakespeare et, ainsi, était devenu audible par les sphères les plus
influentes de la décision internationale.
En 1975, I’AAASA organise sa deuxième conférence générale, du 24 au 28 mars,
à Dakar, grâce à l’appui du président L. S. Senghor et du gouvernement du Sé-
négal.
Louis Sauger et ses collègues du Sénégal jouent naturellement un rôle détermi-
nant dans la préparation de la réunion et dans la conduite et le déroulement des
débats.
Le thème général de la conférence correspond d’ailleurs à l’un des sujets pour
lesquels la recherche sénégalaise est la mieux à même de faire bénéficier la
communauté scientifique de son expérience et ses acquis :
«Comment faire profiter les agriculteurs des résultats de la recherche agro-
nomique » (Marketing agricultural research more meaningful, beneficial, to the
farmers).
Les débats et conclusions de cette conférence influeront sur les stratégies de la
recherche agronomique des années suivantes, en faveur d’une association plus
intime des paysans aux recherches liées à leur développement.
Parallèlement, au sein de I’AAASA, le mandat du président V. A Oyenuga arrive à
expiration, et, en 1975, Louis Sauger est choisi pour le remplacer à la tête du
comité exécutif de l’Association, qui compte alors des ressortissants et cher-
cheurs de 32 pays africains et d’une vingtaine de pays hors Afrique.
De 1975 à 1978, le président Sauger va ainsi animer I’AAASA, à laquelle ses
convictions d’africaniste, ses qualités de cœur et de diplomatie et son dynamisme
toujours juvénile vont donner un nouvel élan.
En 1978, le professeur Abdel Akher lui succède à la présidence de l’Association,
mais Louis Sauger demeure membre du comité exécutif, à la demande duquel il
crée d’ailleurs, avec l’appui du gouvernement du Sénégal, un bureau régional de
I’AAASA à Dakar (accord du 21 septembre 1978, signé entre le gouvernement du
Sénégal et l’Association).
ID African Agricultural Research Capabilities. National Academy of Sciences. Washington DC 1974. 221
pages. Traduction de Frédéric Fournier : Perspectives de la recherche agronomique en Afrique ;
même éditeur, 1976 (F. Fournier était consultant du Committee on African Agricultural Research
C a p a b i l i t i e s ) .

Louis Sauger assumera la présidence de ce bureau jusqu’à son départ du Sénégal,
en 1981, avec l’appui du professeur Amadou Lamine Ndiaye, du docteur Papa
Ibrahima Thiongane, de Gora Bèye et de bien d’autres amis.
Le rôle international de Louis Sauger
Louis Sauger a incontestablement et très fortement marqué, par ses réflexions, ses
idées novatrices, ses actions de chercheur, d’administrateur, ses décisions de stra-
tège et de fin politique, la nature et le fondement des recherches agricoles et du
développement rural dans l’espace africain.
Mais son goût de l’universel, son besoin de savoir, sa double culture, lui ont très tôt
fait souhaiter, avec sa discrétion, sa délicatesse, mais aussi sa pugnacité et son
discernement naturels, connaître, échanger, construire hors de son espace eurafri-
tain.
Le renom qu’il a rapidement acquis au Sénégal, en Europe, en Afrique, lui a ouvert
de nombreuses portes, permis bien des relations, que son humanisme et sa convi-
vialité chaleureuse ont transformées en autant d’ouvertures à la compréhension,
51
au dialogue, et d’amitiés sincères et durables.
Les jalons de ce parcours qui a fait de Louis Sauger, jeune chercheur franco-séné-
galais, un sage écouté, respecté de la communauté scientifique et politique inter-
nationale, sont, sans doute, nombreux.
II n’est cependant que d’en rappeler quelques uns, pour accompagner Louis
Sauger dans sa découverte des autres régions, des autres continents, des autres
hommes et sa quête des différences.
C’est d’ailleurs surtout après l’indépendance des pays africains que sa démarche
va s’accélérer.
En juillet 1961, il participe à une réunion sur la Prospection et l’introduction des
plantes, organisée par la FAO à Rome.
En avril 1966, il se rend à New Delhi, invité par les autorités indiennes, à une
réunion sur la coopération entre l’Afrique et l’Asie pour le développement de la
science et de la technologie.
En 1967, Louis Sauger effectue, avec Michel Braud (de I’IRCT), une mission à
Ceylan (actuel Sri Lanka) pour le compte de la Coopération française en vue d’un
Projet d’irrigation sur les cultures vivrières et le cotonnier. II revisite l’Inde, à cette
occasion.
En 1968, du 11 au 15 novembre, il participe, à Rome, en qualité de chef de la délé-
gation sénégalaise, à une conférence régionale FAO pour l’établissement d’un
programme de recherches agronomiques sur des bases écologiques en Afrique
(zone soudanienne).

LOUIS SAUGER EN RÉUNION À LA FAO ROME, JULLET 1961.
L’INSCRIPTION CI-DESSUS EST DE SA MAIN. ELLE FIGURE AU DOS DE LA PHOTOGRAPHIE ENVOYÉE À
RENÉ TOURTE.

LOUIS SAUGER AVAIT DE L’HUMOUR ET.. . UNE BELLE ÉCRITURE.

II est appelé à en assurer la présidence.
En 1970, du 18 au 23 avril, il participe au Symposium sur les problèmes alimen-
taires d’lbadan.
Et, en 1971, Louis Sauger est désigné comme membre du Comité technique
consultatif (TAC), auprès du Groupe consultatif pour la recherche agricole interna-
tionale (CGIAR), constitué sous l’égide de la BIRD, de la FAO, du PNUD et de plu-
sieurs agences d’aide au développement.
II devient, par ailleurs, membre du Board of Governors de I’ICIPE, International
Center of Insect Physiology and Ecology, établi au Kenya.
Sa participation au TAC, de 1971 à 1976, va permettre à Louis Sauger d’apporter
à ce comité pilote de la recherche agronomique internationale, un éclairage afri-
cain d’une exceptionnelle qualité et de grande pertinence.
En particulier, les interventions en Afrique des Centres internationaux (CIRA) rele-
vant du CGIAR et d’autres organismes associés vont être mieux guidées, par
exemple :
5:
- les orientations et programmes de I’IITA ; ses liaisons avec le SAFGRAD
- les implantations africaines de I’ICRISAT (Sénégal, Burkina Faso, Niger...) ;
- les projets du CRDI : intensification de la recherche sur les cultures alimentaires
au Sénégal, formation d’agronomes chercheurs et vulgarisateurs en Afrique de
l’ouest, etc.
Après qu’il ait quitté le TAC, en 1976, Louis Sauger continue, cependant, à jouer un
rôle important dans les orientations politiques et stratégiques des recherches agri-
coles internationales et nationales.
II participe, par exemple, en 1977, à une très importante réunion, qui rassemble, à
Bellagio, du 17 au 21 octobre, des directeurs de Systèmes nationaux de recherche
agricole sur le thème essentiel : Potentials for Cooperation among National
Agricultural Research Systems.
Le président de cette conférence internationale, le docteur Joseph C. Madamba,
alors directeur général du Conseil philippin pour les recherches agricoles, tient à
remercier personnellement Louis Sauger, dont la « contribution, tout au long de la
conférence, a beaucoup fait pour son plein succès » (extrait dune lettre de Joseph
C. Madamba au docteur Louis A. Sauger, directeur général de I’ISRA, en date du
28 décembre 1977).
Les recommandations de la conférence de Bellagio vont longtemps inspirer la poli-
tique et les stratégies internationales des recherches agricoles, notamment quant
aux indispensables relations entre les systèmes internationaux et régionaux et les
systèmes nationaux de recherche.

LOUIS SAUGER À LA CONFÉRENCE INTERNATIONALE DE BELLAGIO, ITALIE, 17-21 OCTOBRE 1977.
« POTENTIELS DE COOPÉRATION ENTRE SYSTÈMES NATIONAUX DE RECHERCHES AGRICOLES »


En particulier, la conférence souligne fortement la nécessité de systèmes nationaux
forts et dynamiques, capables, notamment, d’élaborer des technologies spécifiques
aux lieux et situations des différents pays, et de privilégier « les approches globales
finalisées par des problèmes (de développement) plutôt que par des objectifs dis-
ciplinaires ».
<< La recherche agronomique est à considérer dans un cadre général de dévelop-
pement, incluant non seulement les recherches de base et appliquées, mais I’en-
semble du processus d’élaboration des technologies appropriées et de leur diffu-
sion...
Nous espérons que les responsables éclairés des pays en développement accor-
deront la priorité et le soutien dont la recherche et le développement agricoles ont
besoin pour préparer le jour où plus aucun enfant, plus aucune femme, plus aucun
homme, n’iront se coucher avec la faim >).
Pour le philosophe romain Sénèque, «on ne peut attendre ni respect .de la loi, ni
raison de ceux qui ont faim )>Ii.
55
On ne manquera pas de remarquer la solennité et le pathétisme qu’ont voulu
donner à leur déclaration finale, les participants à la conférence. Parmi eux, aux
-
côtés de Louis Sauger, figurent de grands noms de la recherche internationale :
Joseph C. Madamba, le président, Almiro Blumenschein (EMBRAPA, Brésil), S. W.
Sadikin (Indonésie), M. S. Swaminathan (Inde), J. D. Drilon (Philippines), Jacques
Diouf (WARDA, ADRAO), Philippe J. Mahler (TACKGIAR), etc.
Louis Sauger, apôtre de la formation
A ce portrait bien imparfait de ce grand scientifique et administrateur (ou mana-
ger) de la recherche que fut Louis Sauger, il manque cependant une touche, qui
pourrait etre la plus belle si le narrateur en avait le talent (mais hélas !).
Toute sa vie, Louis Sauger a souhaité partager ses idées, ses espoirs, ses réus-
sites, son savoir, et aussi sa joie de vivre, afin d’éviter à tous ceux qui l’ont
approché, tous ceux qu’il a côtoyés, les difficultés, les peines, les échecs, les frus-
trations, qu’il avait lui-même rencontrés.
Homme de bonne volonté et d’optimisme, de générosité, il a su communiquer aux
autres, à beaucoup d’autres, son enthousiasme, sa foi en des avenirs plus heureux
pour les pays d’Afrique et du Tiers Monde.
Ii Extrait du rapport de la Conférence de Bellagio (17-21 ociobre 1977) : « International Conference on
Potentials for Cooperation among National Agricultural Research Systems ».

II a été un exceptionnel avocat de la solidarité des peuples et du rapprochement,
de la symbiose de leurs savoirs, leurs cultures, leurs volontés.
Pour remplir sa mission, Louis Sauger avait choisi la voie de la recherche.
Mais il aurait pu tout aussi bien, opter pour celle de l’enseignement.
A son savoir, ses compétences, sa large culture, Louis Sauger ajoutait, en effet,
une exceptionnelle rigueur dans la préparation de ses sujets, de remarquables
capacités pédagogiques et un constant souci d’accompagner la théorie de la pra-
tique, le discours de l’action et du suivi.
Son autorité naturelle et son aisance didactique en auraient fait un excellent pro-
fesseur.
Combien de réunions, conférences, colloques ne lui a-t-on pas demandé d’animer,
de présider au nom de ces dispositions ?
56
Dommage pour l’enseignement! mais la recherche l’avait séduit, et Louis Sauger
était, en tout, fidèle.
Son œuvre en faveur d’une formation de haute qualité, pour ses proches, ses
collaborateurs, ses agents, ses cadets n’en a, cependant, pas moins été consi-
dérable.
Déjà dans le monde de la recherche agronomique du Sénégal et d’Afrique, parmi
les chercheurs, les techniciens, les employés, les ouvriers qui ont eu le privilège de
travailler avec Louis Sauger, bien peu ne souhaitent pas se référer à son exemple,
son charisme, sa droiture.
Bien peu, parmi ces milliers de travailleurs de la recherche, du plus humble au
plus éminent, ne le considèrent pas comme leur guide, leur maître, ou leur patron.
La volonté de Louis Sauger de faire savoir est allée cependant bien au delà.
.De façon plus formelle et classique, lorsque, dès l’indépendance, le jeune gouver-
nement du Sénégal envisage la création d’un établissement d’enseignement
agricole supérieur, Louis Sauger et ses collègues du CNRA Bambey militent en
faveur d’une implantation proche du Centre national de recherche.
Joseph Mbaye, alors ministre de l’Économie rurale et de la coopération dans le
gouvernement de Mamadou Dia, se convainc aisément des avantages, pour les
étudiants et les professeurs, d’une telle proximité.
II plaide donc, auprès du gouvernement et du chef de l’État, pour une implantation
de l’École nationale des cadres ruraux (ENCR) à Bambey qu’il désigne, avec
quelque malice, comme le « nombril de l’agriculture sénégalaise » (d’autres ne par-
ieront-ils pas, plus tard, de la Mecque de la recherche agronomique ?).

CENCR, creée. en octobre 1960, s’installe ainsi définitivement à Bambey en 1963,
après quelques temps de fonctionnement à Dakar.
Elle va former des milliers de cadres des professions et activités rurales du Sé-
négal et des pays voisins.
Quelques dix ans plus tard pourtant, malgré de nombreux efforts des institutions
nationales, bilatérales, internationales, l’Afrique manque encore cruellement de
cadres supérieurs pour la recherche et le développement agricoles.
Sans doute, de nombreuses possibilités de formations supérieures sont-elles
offertes à l’étranger, à ses jeunes étudiants, dans des institutions au demeurant
prestigieuses.
Elles vont permettre de combler, progressivement, un dramatique retard. De nom-
breux africains accèdent ainsi aux plus hauts degrés universitaires!
Cependant, si les formations reçues sont de la meilleure qualité, leurs orientations,
leurs contenus, leurs types d’évaluation n’en sont pas, pour autant, toujours com-
patibles avec les objectifs, les attentes, les moyens des pays en développement.
5:
Les recherches agricoles, en particulier, y réclament une connaissance appro-
fondie des conditions réelles de la production, et une prise en compte systéma-
tique et délibérée de leurs atouts, contraintes et possibilités d’évolution.
Ce n’est que grâce à cette finalisation des recherches par les besoins du dévelop-
pement que pourra être obtenue l’indispensable cohérence entre les produits de la
recherche et la demande sociale, économique et technique des sociétés paysannes.
Une formation purement cognitive et académique des chercheurs et développeurs
ne suffit sans doute pas à y atteindre.
Une formation alternative : institution d’enseignement supérieur (Université, Grande
École)-terrain, peut s’avérer beaucoup plus efficace, par exemple grâce à la réali-
sation des stages et travaux de fin d’étude sur les terrains mêmes de la future vie
active.
L’idée est maintenant assez largement admise, mais alors, Louis Sauger souhaitait
s’en convaincre et surtout en convaincre les décideurs et responsables.
L’occasion lui en est donnée en 1972.
Le doyen Lavoie, de l’université de Laval, Québec, propose.au gouvernement du
Sénégal d’installer une base d’accueil, où des étudiants africains en formation
théorique au Québec pourraient effectuer leurs stages et préparer leurs mémoires
de fin d’études sur des sujets africains. Les sujets seraient choisis en concer-
tation avec les organismes d’hôtes.
A l’initiative de Louis Sauger, le CNRA Bambey est désigné comme site d’une telle

expérience. Ses chercheurs apparaissent, en effet, comme d’excellents maîtres de
stages ou tuteurs des travaux de terrains en puissance.
Grâce à l’aide du CRDF, le projet démarre dès 1973. II va fonctionner, avec succès
pendant plusieurs années, permettant ainsi une formation complète de dizaines
de chercheurs et développeurs africains. L’expérience est concluante.
Parvenu au fait de sa carrière, directeur général de I’ISRA en 1975, président de
I’AAASA, membre du TAC... Louis Sauger n’en perd cependant pas son intérêt
pour la formation des jeunes élites africaines et son prosélytisme en faveur de la
recherche agricole demeure.
Devenu doyen de l’Association sénégalaise des ingénieurs d’agriculture, il continue
à vouloir éveiller des vocations.
Jusqu’au terme d’une carrière exceptionnelle, il aura un message à transmettre.
Le 9 mars 1979, par exemple, devant les étudiants de la faculté des sciences de
Dakar, il rappelle les espoirs qu’il a toujours placés dans la recherche agricole et
le rôle qu’il a voulu lui assigner.
Extraits
«La Recherche agricole est une recherche appliquée à la solution des problèmes
posés en milieu rural par l’amélioration quantitative et qualitative des produits agri-
coles, au profit de /‘homme rural, dans une perspective de développement écono-
mique et social de la nation.. .

Et l’objectif n’est plus seulement la croissance économique, mais la qualité de la vie
et la qualité de la société.. .

Encore faut-il que les homtries se fixent leurs objectifs... Quel déyeloppement vou-
lons-nous ?

(A l’instar) des pays développés, devons-nous attendre d’être arrivés à la satura-
tion en biens de consommation, pour commencer à penser à la qualité de la vie et

à la qualité de la société comme objectifs de développement ?
N’y a-t-il pas un chemin plus court pour que les hommes soient hommes et se sen-
tent libérés dans leurs rapports ? »

Louis Sauger rappelle ensuite comment sont définies, au Sénégal, les orientations
des recherches agricoles, retraçant les démarches et méthodes qu’il a présentées
dans plusieurs conférences internationales (par exemple, à la conférence d’Addis
Abéba de 1971, cf. supra).
II termine par un vibrant plaidoyer en faveur des carrières de la recherche agricole,
au Sénégal, offertes en particulier par I’ISRA (dont il est encore directeur général) :

Extraits
« La création de I’ISRA a constitué un facteur important... d’intégration des activités
de recherche orientées vers le développement rural.
En effet, jusqu’à cette création les programmes étaient scindés entre les secteurs
production végétale, forestière, animale et piscicole. Or l’unité de base du dévelop-
pement agricole est I’exploitation agricole et tous les raisonnements en la matière

doivent prendre en considération l’évolution de cette entreprise.
II faut bien constater que bien rares sont les exploitations qui ne fassent que de
l’élevage à l’exclusion de toute culture ou inversement, toutes exploitent (et même
surexploitent) les arbres et les forêts et il est peu de pêcheurs qui ne fassent leur
mil et leur petit élevage.

C’est donc un atout de HSRA de s’être vu conférer les activités de recherche dans
ces différents secteurs car cette organisation lui facilite l’approche par systèmes
des conditions du progrès des exploitations rurales.

Le domaine à couvrir est évidemment immense qu’il s’agisse des secteurs écono-
miques à couvrir ou qu’il s’agisse des types de recherche à développer puisqu’ils
vont de la recherche de base au développement expérimental...

C’est de ce double caractère de scientifique et d’application à I’humain que vient
tout l’intérêt et toute la difficulté de la tâche du chercheur agricole. II doit, sans
cesse, être à la pointe des techniques scientifiques et être concerné essentielle-
ment par les problèmes qui se posent au niveau du paysan.

II faut, pour s’engager dans de telles carrières, avoir une vocation confirmée, sans
cesse remise à l’épreuve, et des grandes qualités d’humilité, de rigueur et de
méthode., .

La recherche agricole a besoin de spécialistes dans toutes les sciences de l’agri-
culture.. .

Les besoins sont immenses... »
Cette formation de jeunes chercheurs et développeurs, tant indispensable qu’elle
soit, ne suffit cependant pas à Louis Sauger.
Homme de science, il n’en a pas moins été, aussi, pendant trois décennies, un
organisateur, un administrateur, un décideur.
Réunir les hommes, les moyens, fixer de bons objectifs, choisir les bonnes dé-
marches, évaluer ses produits avec pertinence et réalisme, sont sans doute des
conditions nécessaires pour réussir une bonne recherche.
Elles ne seront cependant suffisantes que si les moyens disponibles sont cohé-
rents avec les objectifs, et si leur gestion est indiscutablement rigoureuse et trans-
parente, conforme aux intérêts de l’État, des mandataires et des utilisateurs.

Les stratégies et programmes de recherche se doivent donc d’être assortis de pro-
grammations budgétaires et gestions financières, simultanément et précisément
établies et conduites.
Or, la gestion et le management’* sont un métier.
Et Louis Sauger s’est aussi préoccupé de faire de ses responsables de recherche,
et leurs adjoints, de bons gestionnaires, constatant d’ailleurs que de telles compé-
tences sont rares dans les pays en développement... et même dans les pays déve-
loppés, au sein des institutions les plus réputées.
Déjà au CNRA Bambey, il avait, avec René Tourte, élaboré un système de gestion
de l’ensemble de recherche agronomique qu’il animait au Sénégal (divisions,
régions, stations, projets, . ..).
Une budgétisation pluriannuelle, souple, évolutive (actualisée tous les ans) des
programmes, services et activités, permettait de prendre en compte les priorités, à
court et long termes, par régions, par thèmes, par opérations et d’ajuster les calen-
driers et moyens aux objectifs et échéanciers.
Ce système avait été une excellente école de gestion pour tous les personnels de
l’organisme.
A I’ISRA, grâce à l’appui des organisations bilatérales et internationales (notam-
ment de la Banque mondiale), Louis Sauger avait poursuivi ses efforts en faveur
d’une bonne gestion de la recherche ; et facilité la formation, restée indispensable,
de bons gestionnaires de cette recherche.
Et, en 1983, deux ans après qu’il ait quitté le Sénégal, Louis Sauger, toujours pré-
occupé par ce problème (qui, pour lui, restait essentiel et non résolu) accepte la
demande d’Hervé Bichat, administrateur du GERDAT, de représenter ce groupe-
ment (qui deviendra le CIRAD en 1984) à une réunion traitant du sujet.
II s’agit, en fait, d’une consultation d’experts sur les stratégies de Formation à la
gestion de la recherche en Afrique, organisée par la FAO au CIPEA (ILCA) d’Addis
Abéba, du 12 au 16 décembre 1983.
Les représentants du Centre de développement de la recherche, de la FAO (J. H.
Monyo et Gora Bèye) y soulignent l’intérêt particulier que porte l’organisation à ce
type de formation et son intention d’encourager les initiatives dans ce domaine.
lp Mot que nos amis anglophones ont construit à partir de notre vieux «mesnages>
(Théatre
d’Agriculture
et Mesnage
des champs. Olivier de Serres, 1600).

Dans son compte rendu, Louis Sauger, résume ainsi les conclusions essentielles
de la consultation :
Extraits
- «priorité à la formation de personnels à bonne expérience de la recherche ;
- formation localisée dès que possible dans les pays en voie de développement ;
- équilibre entre formation théorique et participative ;
- formation à plusieurs niveaux ;
- accent particulier à mettre sur les finalités de la recherche, son rôle dans le dé-
veloppement, et sur l’articulation recherche - vulgarisation ».
II ajoute ses impressions personnelles, en insistant sur :
Extraits
- « /a participation active des pays intéressés par une contribution des services de
61
recherche concernés ;
- la nécessité de rester aussi près que possible des problèmes qui se posent
concrètement dans chaque pays ;
- l’adéquation nécessaire aux différents niveaux des actions de gestion néces-
saires » .
Puis, Louis Sauger développe quelques conceptions personnelles sur les étapes et
le contenu à donner à ce type de formation (ses suggestions s’adressent plus par-
ticulièrement, mais non exclusivement, aux responsables du GERDAT-CIRAD) :
Extraits
« 1 - Un tronc commun, qui pourrait se situer soit en France, soit dans l’un des
pays coopé[ants, selon avantages et inconvénients de l’une ou de /‘autre formule,
réservé aux chercheurs destinés aux hauts niveaux de direction.
II s’agirait de développer :
- notions essentielles de gestion d’une entreprise, les tâches à assumer et moda-
lités. II s’agit de développer une bonne connaissance du sujet sans vouloir former
des « experts ». Comment y faire face : savoir déléguer certaines fonctions ; choix
des collaborateurs ou des systèmes de contrôle, comment réaliser un contrôle

pour éviter que le délégué dépasse les volontés du directeur, recoupements
nécessaires pour découvrir les débordements, en particulier frauduleux. Cela est
très important au niveau financier, comptable, gestion du personnel et des maté-
riels (recrutements ou achats, promotion du personnel, politique tendant à atta-
cher le personnel à l’entreprise, etc.). Établissement de critères de recrutement ;


- élaboration des plans de développement ;
- élaboration et suivi des programmes de recherche, objectifs, processus-planning
de réalisation, définition des étapes-tests auxquelles l’évaluation doit se faire, en
vue d’une décision d’arrêt ou de poursuite selon les méthodes nouvelles ou
confirmées, etc ;

- collecte de cas concrets de gestion présentés par les stagiaires pour servir de
matériel d’étude dans la formation ;
- valorisation des résultats ;
- apprendre au directeur à valoriser son temps de travail.
2 - Des sessions éclatées dans les différents pays coopérants incluant différents
nivaux de chercheurs et même d’administratifs, au cours desquelles les stagiaires
rechercheraient et proposeraient leurs meilleures solutions aux cas concrets
définis, Elles se termineraient par un court séminaire dune à deux semaines, au
cours duquel les représentants nationaux des organismes intéressés dans le pays
appotteraien t leurs con tribu tions.

Ces sessions permettraient de recueillir des sujets pour des études de cas pour
servir de matériel d’enseignement pour les promotions de stagiaires des années

suivan tes.
Elles pourraient comporter une partie «stages>> dans les établissements les mieux
adaptés à la poursuite de leur formation (1 à 2 mois) et se conclure par un sémi-
naire dans chacun des pays concernés pour présentation et étude des cas traités

par les stagiaires du pays et par l’appréciation de ces travaux de stage et annota-
tion.
II serait souhaitable que ces stages soient organisés dans le pays même des sta-
giaires, mais certains pourraient être accueillis dans les pays voisins sur accord de
ceux-ci.
L’un des pays pourrait accueillir le séminaire de conclusion si l’accord pouvait être
obtenu (durée 1 à 2 semaines).

Ce séminaire de conclusion peut être l’occasion d’une participation commune des
différents types de personnels en formation, tels que ces types ont été énumérés.
Le travail des différents participants de haut niveau serait présenté sous forme de
mémoire et noté en fin de cycle et sanctionné comme jugé souhaitable lors dune
semaine de synthèse tenue dans le pays où a été réalisé le tronc commurwi3.

l3 Extraits de : «Un peu d’histoire : A la mémoire de Louis Sauger » par R. Tourte. In : La gestion des
entreprises de recherche agronomique. Dossier R. Tourte. Notes et documents no 3 - CIRAD,
D i r e c t i o n , 1 9 8 9 .

Au vu du compte rendu et des suggestions de Louis Sauger, le GERDAT décide de
s’engager résolument dans la voie proposée par la FAO.
En fait, depuis quelques années, au travers de I’IFARC (Institut pour la formation
agronomique et rurale en régions chaudes), dont le secrétaire général est Jacques
Lefort, il conduit un cycle de formation proche, dans son esprit, sinon dans son
public.
A l’initiative de la Caisse centrale de coopération économique (CCCE, devenue
depuis la Caisse francaise de développement, CFD), se déroule chaque année,
animé par Augusto Moreno, un cycle de 8 à 9 mois de Formation à la gestion de
projets agricoles (FGPA).
Ce cycle s’adresse à des responsables, généralement de haut niveau, de projets
agricoles et de développement rural conduits dans les pays où intervient la CCCE.
Fin 1983, au moment de la consultation FAO d’Addis Abéba, Hervé Bichat et René
Billaz préparent, en France, la mutation du GERDAT en CIRAD, établissement
public devant réunir les anciens instituts de recherche et de formation du GERDAT.
63
René Tourte y a recu pour mission de bâtir un Département des systèmes agraires
m
(DSA), à partir de la Division des systèmes agraires de I’IRAT, d’une part, et de
I’IFARC, d’autre part.
L’une des tâches du futur DSA, qui sera officiellement créé en juillet 1984, sera de
« monter » une formation des gestionnaires de la recherche dans l’esprit des re-
commandations de la consultation FAO.
Et, tout naturellement, R. Tourte, J. Lefort, A. Moreno qui s’attellent à la préparation
d’un tel projet, sollicitent les conseils de Louis Sauger.
Au cours de l’hiver 1983-84, il accepte de distraire quelques jours de son heu-
reuse retraite parisienne, puis périgourdine, pour participer à la mise en œuvre
d’une de ses belles idées.
Souhaitant, en particulier, rencontrer quelques uns des animateurs pressentis et
quelques chercheurs africains et latino-américains, alors en stage au CIRAD à
Montpellier, Louis Sauger quitte, le 5 juin 1984, son épouse et sa maison du
Périgord où ils ont choisi de retrouver la campagne qu’ils aiment, à l’automne de
leur vie.
II ne les reverra jamais.
Le 7 juin au matin, Louis Sauger anime une rencontre dans une salie du DSA, au
CIRAD à Montpellier.
C’est là que la mort vient le frapper, brutalement, alors qu’il construit encore pour
l’avenir, et pour les autres.

Comme Molière, Louis Sauger nous a quitté sur la scène que ses enthousiasmes
et passions de jeunesse lui avaient fait choisir, un demi-siècle plus tôt, pour prendre
sa part du rude combat contre la misère et la souffrance.
Le destin n’a pas permis qu’il soit assez remercié, sur cette terre, de son infati-
gable dévouement et de son insigne contribution.
Après le décès de Louis Sauger, ses amis vont cependant avoir à cœur de mener
jusqu’au bout l’entreprise commencée par lui.
En 1985, la FAO organise, au Cameroun, une première session en Afrique franco-
phone de formation à la gestion de la recherche.
Gora Bèye, du Centre de développement de la recherche de la FAO, et ancien
adjoint de Louis Sauger à I’ISRA, au Sénégal, en est l’animateur.
II fait appel à l’équipe DSA pour en assurer le support pédagogique.
Et, en 1986, après le succès de cette première expérience, s’ouvre, en France, le
premier cycle de Formation à la gestion des centres de recherche (FGCR), en hom-
mage à Louis Sauger.
Ce cycle, de deux mois, organisé conjointement par la FAO et le CIRAD-DSA, va
former, dans les années suivantes, des dizaines de responsables de recherche
des pays du Sud.
Leçons, reconnaissances et témoignages
Brillant scientifique, Louis Sauger a profondément marqué les orientations, les pro-
cessus de sa discipline d’origine, la génétique végétale, mais aussi les finalités et
démarches de la science agronomique tropicale, tout entière.
II a été un bâtisseur infatigable, un architecte visionnaire d’une recherche rigou-
reuse, incontestée, mais aussi engagée, dynamique, au service,d’un développe-
ment rural voulu et attendu par les sociétés africaines, dans la diversité de leurs
valeurs, de leurs cultures, de leurs espoirs, dans la réalité de leurs milieux et de
leurs moyens.
II a été l’artisan de tous les dialogues, de tous les rapprochements, de toutes les
symbioses entre les hommes, les courants de pensée, les sphères d’influente, les
institutions.
Tout au long de sa vie, il a combattu ce qui oppose, et méprisé ce qui exclut, I’os-
tracisme, l’intolérance, le racisme.
Ses hautes valeurs morales, son intégrité, sa pugnacité tranquille, son exceptionnel
bon sens ont donné à Louis Sauger une grande autorité, un charisme qui le fai-
saient, partout, écouter et respecter.

Son parfait désintéressement, sa générosité, sa délicatesse, mais aussi sa joie de
vivre et sa convivialité, car Louis Sauger était tout autre qu’austère et chagrin, en
faisait un homme attachant, dont on souhaitait la présence et l’amitié.
Fin psychologue, très curieux et attentif aux qualités et apports des autres, mais
plein de pudeur à l’égard de leurs faiblesses, Louis Sauger était aussi, grâce à sa
dialectique chaleureuse, un discret et habile diplomate.
II aurait pu embrasser la carrière politique. Sans doute y a-t-il songé à quelques
tournants majeurs de sa vie. II y aurait excellé, mais, fondamentalement, sa voie
était tracée ailleurs.
Son influence sur la politique et les stratégies de la recherche agronomique tropi-
cale n’en a pas, pour autant, été moins prépondérante, pendant plusieurs décen-
nies.
Les témoignages de reconnaissance de l’œuvre considérable de Louis Sauger sont
très nombreux.
II faudra les faire réunir un jour par une plume moins malhabile, pour rendre tout
65
l’hommage dû à cet homme exceptionnel.
Quelques uns peuvent cependant être évoqués à la fin de cet Essai.
La France avait trouvé en Louis Sauger un brillant avocat de sa culture, de son
rayonnement scientifique.
Elle en avait fait un haut fonctionnaire (il était Inspecteur général de I’ORSTOM) et
un des principaux responsables de sa recherche agronomique tropicale (il avait
été, en particulier, directeur des services de I’IRAT au Sénégal et en Mauritanie).
Francis Bour, directeur général de I’IRAT, dont Louis Sauger a été, ainsi, pendant
plus de quinze années, le fidèle et bouillant collaborateur direct, a su, en maintes
occasions, rendre hommage à <(son intelligence, son dévouement, son autorité...
qui ont permis à Louis Sauger de... pleinement donner à ses collaborateurs la foi
dans leurs travaux et l’esprit de cohésion indispensable... (II) a donné à la
recherche agronomique du Sénégal une orientation et un rayonnement particuliè-
rement remarquables... Par sa renommée internationale (il a) grandement servi le
prestige de la coopération technique franoaise )pi4.
L’État francais avait fait Louis Sauger Officier du mérite agricole, Chevalier de
l’ordre du mérite, Chevalier de la légion d’honneur.
l4 Extrait d’une notation de Louis Sauger Etablie par Francis Bour pour I’ORSTOM.

La communauté internationale avait également reconnu la valeur de Louis
Sauger.
A plusieurs reprises, elle lui avait confié des missions délicates et de grande
ampleur.
II a animé et présidé de nombreuses rencontres, contribué à maintes décisions
majeures, en matière de politique et stratégies de recherche en pays du Tiers
monde.
Sa présidence de I’AAASA, sa participation au TAWCGIAR (pendant cinq années)
témoignent de cette reconnaissance et confiance internationale.
C’est cependant au Sénégal, son pays natal, que les plus beaux et émouvants
hommages ont été rendus à Louis Sauger.
Le Sénégal en a fait, bien sûr, l’un des plus hauts responsables de ses recherches
agricoles, en lui confiant par exemple, la tâche exaltante de création puis de di-
rection de l’Institut sénégalais de recherches agricoles et, plus tard, la Direction des
recherches agricoles et industrielles du ministère de la Recherche scientifique et
technique.
II lui a naturellement demandé de le représenter, d’être son ambassadeur, dans de
nombreuses et capitales négociations et rencontres, tant nationales, que régio-
nales et internationales.
Tous les hommes politiques et scientifiques du Sénégal ont témoigné à Louis
Sauger leur grande estime et leur amitié.
L’État sénégalais lui a décerné la haute distinction de Commandeur de son Ordre
national et lui a rendu le plus vibrant hommage à son départ de la vie active.
Et, moins d’un an après le décès de Louis Sauger, le Sénégal s’est souvenu.
II a exprimé sa gratitude et sa reconnaissance à son cher disparu par un geste
de grande élégance et délicatesse.
Un magnifique bateau, offert par la coopération japonaise, et destiné aux
recherches océanographiques et halieutiques, a été baptisé « Louis Sauger a>.
Madame Abdou Diouf, épouse de M. Le président de la République a présidé la
cérémonie de baptême du navire, dans le port de Dakar, le 15 mars 1985, en pré-
sence de Renée Sauger, officiellement invitée et accompagnée de ses enfants.
Le ministre de la Recherche, M. Balla Moussa Daffé y a rendu un chaleureux hom-
mage à Louis Sauger, devant de nombreux membres du gouvernement, de très
nombreuses hautes personnalités sénégalaises et étrangères, et au milieu de la
foule émue et respectueuse de tous les amis, humbles ou importants, de Louis
Sauger.

Ainsi, grâce à ce beau bâtiment, se perpétue, tout au long des rivages et horizons
sénégalais et africains, qu’il a tant aimés et pour lesquels il a tant fait, le grand nom
de Louis Sauger.
Merci, amis sénégalais, de ce si juste et émouvant témoignage.
Montpellier, mai 1995
67
« LOUIS SAUGER », NAVIRE DE RECHERCHES OCÉANOGRAPHIQUES ET HALIEUTIQUES DU CENTRE DE
RECHERCHES OCÉANOGRAPHIQUES DE DAKAR-THIAROYE (CRODT / I~RA).

Le film accéléré de la vie de Louis Sauger
1917 - 1984
,8 mars 1917
Naissance de Louis Sauger à Dakar (Sénégal), de Lucien et
Laurence Sauger.
*1914-18
La « grande Guerre ». Le Sénégal participe à l’effort de guerre
de la <c mère patrie )>. Biaise Diagne, député du Sénégal et
maire de Dakar est, depuis 1916, commissaire de la Répu-
blique pour l’Afrique de l’ouest, chargé du recrutement des
troupes coloniales.
*Il nov. 1918
Armistice.
“1921
Création de la Station expérimentale de l’arachide à Bambey,
à partir d’une ancienne « ferme ».
“1924
Début de la sélection de l’arachide à Bambey.
10 ans
*1927
Première liaison aérienne Toulouse - Casablanca - Dakar.
*1935
Début de la diffusion de semences sélectionnées d’arachide
et de la vente des semoirs, charrues et houes par les Sociétés
de prévoyance, au Sénégal.
1935
Louis Sauger réussit ses Baccalauréats Mathématiques et
Philosophie à la fin de ses études secondaires au Lycée de
Blois.
1935-37
Préparation de I’Agro au Lycée Saint-Louis à Paris.
20 ans
1937-39
École nationale supérieure d’agronomie de Grignon (11
2ème
Promotion).
*1938
Création du Secteur soudanais de recherches agronomiques
(SSRA), organisme fédéral (AOF), avec son siège à Bambey.
*3 sept. 1939
Début de la seconde Guerre mondiale.
15 sept. 1939
Louis Sauger est mobilisé, Élève Aspirant de Cavalerie. Cam-
pagne de France, Aspirant le 26 avril 1940.
*22 juin 1940
.
Armistice franco-allemand.
*23 sept. 1940
Echec du général de Gaulle devant Dakar. L’AOF reste fidèle
à Vichy.
15 octobre 1940
Louis Sauger s’embarque pour Dakar. II est démobilisé le 15
mai 1941.

25 mai-14 août 1941 Louis Sauger auxiliaire de Recherche à la station de Bambey
(Laboratoire de génétique).
Fin août 1941
Nouveau départ pour la France.
8 sept. 41-mi 42
École supérieure d’application d’agriculture tropicale,
(ESAAT).
7 août 1942
Mariage de Louis Sauger et Renée Rutter.
1 er nov. 1942
Louis Sauger est nommé ingénieur adjoint stagiaire des ser-
vices de l’Agriculture aux colonies.
*9 nov. 1942
Débarquement allié en Afrique du Nord. L’AOF se rallie à la
France libre.
Sept. 42-juil. 44
Stage de Louis Sauger à la Station technique d’agriculture
tropicale, STAT, de Nogent-sur-Marne (Laboratoire d’amélio-
ration des plantes).
8 mai 1943
Naissance d’Alain.
69
1943
Certificat d’études supérieures de botanique. Faculté des
sciences de Paris.
1 er nov. 1943
Ingénieur adjoint de 3ème classe des services de l’Agriculture
aux Colonies.
*30 janv.-8 fév. 44
Conférence de Brazzaville.
*6 juin 1944
Débarquement allié en Normandie.
Juillet 44-juillet 45
Louis Sauger suit l’enseignement de phytogénétique de
I’ORSTOM.
*8 mai 1945
Fin de la seconde Guerre mondiale (en Europe).
7 sept. 1945
Retour de Louis Sauger au Sénégal.
30 sept. 1945
Naissance d’Annie.
24 nov. 1945
Louis Sauger est nommé chef de la Section d’amélioration
des plantes de la Station expérimentale de l’arachide de
Bambey.
*1946
Constitution de l’Union française. La «loi Lamine Guèye »
(député sénégalais) du 7 mai 1946 accorde la citoyenneté
française à tous les africains de l’union.
6 avril 1946
Louis Sauger est nommé ingénieur de 2ème classe des ser-
vices de l’Agriculture.
6 déc. 1946
Naissance de Lucien.

30 ans
*1947-48
Mise en place du Fonds d’investissement pour le développe-
ment économique et social (FIDE,S) des territoires de l’Union
française.
Y949
Organisation des recherches agronomiques en Afrique occi-
dentale française. Création d’un Comité de coordination.
1 er janvier 1950
Louis Sauger est nommé Maître de recherches des Services
techniques et scientifiques de la France d’outre Mer (Cadre
des Laboratoires).
*17 juin 1950
Le Centre de recherches agronomiques de Bambey (CRA
Bambey) remplace le SSRA dans sa vocation fédérale pour la
zone tropicale sèche de I’AOF.
Louis Sauger est nommé responsable de la subdivision de
Phytotechnie (division des Laboratoires).
2 août 1950
Naissance de Jean-Louis.
1950
Début des <( essais multilocaux » au Sénégal, dans le cadre
d’une collaboration institutionnalisée entre Service de I’agri-
culture et CRA Bambey.
Janvier 1951
Première mission dans l’Ouest africain, en Haute Volta (actuel
Burkina Faso).
5-13 sept. 1954
Conférence CC Arachide - Mil », anglo - francophone au CRA
Bambey.
Octobre 1954
Mission au Soudan (actuel Mali), en Haute Volta (actuel
Burkina Faso), en Côte d’lvoire, avec René Tourte.
1 er janvier 1956
Louis Sauger est nommé directeur de Laboratoires, de 2ème
classe, des Services techniques et scientifiques de I’agricul-
ture de la France d’outre Mer.
Nov. 55-juin 56
Certificat d’études supérieures de génétique à la faculté des
Sciences de Paris.
1956
Chevalier du Mérite agricole français.
40 ans
*12 avril 1957
Vote de la Loi cadre instituant des exécutifs locaux dans
chaque territoire de l’Union francaise, présidés par les gou-
verneurs. Au Sénégal le vice-président est Mamadou DIA.
“1 er juillet 1957
Les structures de recherches des Services techniques et
scientifiques de l’agriculture de la France d’outre Mer (dont le
CRA Bambey et son réseau) sont confiées à I’ORSTOM.

1 er juillet 1957
Louis Sauger est reclassé directeur de Recherche ORSTOM,
3ème échelon.
3 juin 1958
Chef de la division des Laboratoires du CRA Bambey.
*juin 1958
Retour de Charles de Gaulle à la tête de I’Etat français.
*28 sept. 1958
Nouvelle Constitution en France : 5ème République.
*4 octobre 1958
Constitution de la Communauté franco-africaine et malgache.
*25 nov. 1958
Proclamation de la République du Sénégal.
*17 janvier 1959
Proclamation de la fédération du Mali (Sénégal et Soudan) à
Dakar. Léopold Sédar Senghor en est élu président en avril.
17 mai 1959
Naissance de René-Louis.
30 mai 1959
Louis Sauger est nommé directeur de Recherches, 4ème
échelon.
*4 avril 1960
Indépendance de la République du Sénégal et de la Répu-
71
blique soudanaise.
*20 août 1960
Séparation du Sénégal et du Soudan. Léopold Sédar Senghor
reste président de la République du Sénégal.
1960
Louis Sauger acquiert la nationalité sénégalaise de droit. II
conserve cependant la nationalité française.
*1960
Création de I’IRAT, Institut des recherches agronomiques tro-
picales et des cultures vivrières. Institut de la coopération
française, auquel le gouvernement du Sénégal confie les
structures de recherches relevant de I’ex-CRA Bambey, qui
devient Centre national de la recherche agronomique, CNRA,
du Sénégal.
15 juin 1961
Louis Sauger est nommé directeur du CNRA Bambey et direc-
teur des services de I’IRAT au Sénégal et en Mauritanie.
Juillet 1961
Participation à la réunion internationale de la FAO, à Rome,
sur la Prospection et l’introduction des plantes.
1961
Officier de l’ordre national du Sénégal.
1962-l 963
Régionalisation systématique de la recherche agronomique
au Sénégal (et en Mauritanie) : renforcement des stations,
création des Unités régionales de recherche, des PAPEM,
établissement d’un réseau de correspondants-paysans, etc.
* février 1963
Réélection de Léopold Sédar Senghor à la présidence de la
République du Sénégal.

1963
Louis Sauger Officier du mérite agricole francais.
Janvier 1964
Mission au Nigeria du Nord.
7-16 avril 1964
Le président Léopold Sédar Senghor se rend en visite offi-
cielle au Nigeria, Louis Sauger l’accompagne.
Ier janvier 1965
Inspecteur général de recherches de I’ORSTOM.
Avril 1966
Voyage en Inde à l’invitation des autorités de ce pays, en vue
d’une coopération scientifique Asie-Afrique.
50 ans
30-31 mars 1967
Consultation d’experts à Accra, en vue d’une conférence sur
les priorités à accorder à la recherche agronomique dans le
développement économique de l’Afrique.
Création d’un groupe consultatif ad hoc des agronomes de
l’Afrique.
1967
Chevalier de l’ordre national du mérite français.
5-11 avril 1968
Colloque d’Abidjan sur les priorités de la recherche. Création
de l’Association pour l’avancement en Afrique des sciences
et de l’agriculture, AAASA : Louis Sauger est nommé vice-
président du Comité exécutif intérimaire.
5-l 0 août 1968
Première réunion officielle du Comité exécutif de I’AAASA à
Addis Abéba.
il-15 nov. 68
Chef de la délégation sénégalaise à la conférence FAO, à
Rome, sur un programme régional de recherche agronomique
en Afrique.
1 er janvier 1970
Inspecteur général Hors Echelle C2 de I’ORSTOM (plafond de
la hiérarchie de I’ORSTOM).
* Février 1970
La primature est créée au Sénégal. Abdou Diouf devient
Premier ministre.
8-23 avril 1970
Symposium sur les problèmes alimentaires à Ibadan.
Janvier 70-juil. 71
Séminaires Fondation FORD-IRAT-IITA sur l’état et les pers-
pectives de recherches agricoles des savanes et forêts tropi-
cales africaines (à Bambey, Ibadan, etc.).
29 août-4 sept. 71
Première conférence internationale de I’AAASA à Addis
Abéba.
1971
Louis Sauger devient membre, pour cinq ans, du Comité tech-
nique consultatif (Technical Advisory Committee : TAC) du
Groupe consultatif pour la recherche agricole internationale
(CGIAR).

1972
Commandeur de l’ordre national du Sénégal.
Mai 1973
Réunion, à Dakar et Bambey, du Comité international sur les
possibilités de la recherche agronomique en Afrique.
Louis Sauger l’y reçoit et apporte une contribution remarquée
à ses travaux
*1974
Création de la Délégation générale de la recherche scienti-
fique et technique (DGRST) au Sénégal. Djibril Sène, proche
collaborateur de Louis Sauger en devient le premier respon-
sable.
Nov. 1974
Création de l’Institut sénégalais de recherches agricoles,
ISRA. Louis Sauger est nommé directeur général.
24-28 mars 1975
Deuxième conférence générale de I’AAASA à Dakar. Louis
Sauger devient président de I’AAASA.
30 mars 1975
Chevalier de la légion d’honneur.
60 ans
17-21 oct. 1977
Conférence de Bellagio sur les possibilités de coopération
entre Systèmes nationaux de recherches agricoles.
21 sept. 1978
Louis Sauger achève son mandat présidentiel à I’AAASA. II
devient président du bureau de l’Association, créé à Dakar, et
reste membre du Comité exécutif de I’AAASA.
Fin 1979
Louis Sauger quitte la direction générale de I’ISRA pour la
Direction des recherches agricoles et agro-industrielles du
secrétariat d’État à la recherche scientifique et technique du
Sénégal (Jacques Diouf, ministre).
*Déc. 1980
Léopold Sédar Senghor met fin à son mandat présidentiel.
Abdou Diouf devient président de la République du Sénégal.
27 mars 1981
Louis Sauger prend sa retraite, quitte le Sénégal pour la
région parisienne et le Périgord.
12-16 déc. 83
Consultation FAO d’experts sur les stratégies de Formation à
la gestion de la recherche en Afrique, à Addis Abéba.
Hiver 83-84
Louis Sauger apporte ses conseils à l’équipe GERDAT-CIRAD
chargé du « montage » d’un cycle de Formation de gestion-
naires de centres de recherches, FG,CR.
7 juin 1984
La mort frappe brutalement Louis Sauger, au CIRAD
Montpellier, en pleine séance de réflexion et de préparation
du futur FGCR, au milieu de ses amis.
Son épouse, restée en Périgord, arrive quelques heures plus

tard, avec ses enfants. Louis Sauger avait 67 ans. II était plein
d’espoir, d’optimisme, de projets.
*15 mars 1985
Madame Abdou Diouf, épouse de Monsieur le président de la
République du Sénégal, baptise à Dakar, en présence de
Renée Sauger, le « Louis Sauger », magnifique navire de
recherches océanographiques et halieutiques du Sénégal.
*Octobre 1986
Le FGCR, cycle de formation préparé avec Louis Sauger par
ses amis René Tourte et Jacques Lefort, ouvre sa première
session en France.
Gora Bèye, de la FAO, ancien adjoint de Louis Sauger, I’inau-
gure en hommage au patron disparu.
* Les dates marquées d’un astbrisque correspondent à des événements extérieurs à la vi” personnelle
et professionnelle de Louis Sauger, qu’ils ont cependant pu fortement influencer, ou dqnt ils ont pu
découler.

Quelques écrits de Louis Sauger
Les publications, communications, exposés de Louis Sauger sont nombreux et très
variés. Ils jalonnent les différentes étapes d’une très riche et longue carrière.
Quelques titres suffisent cependant à illustrer les multiples facettes d’une person-
nalité exceptionnelle, à l’écrit et la parole éloquents, qui a été, à la fois scientifique
de renom international, bâtisseur opiniâtre d’une recherche africaine de rigueur et
qualité, militant infatigable du développement du Tiers monde, homme de dialogue
et de consensus, humaniste convaincu :
Sauger L. - Les améliorations obtenues à la station de M’Bambey par la sélection
de l’arachide. L’Agro. Trop. (Nogent s/M) 1949, vol. /Y no 9-10, p. 503-507.
Sauger L. - L’hybridation de l’arachide à M’Bambey. L’Agro. Trop. (Nogent s/M)
1949, vol. Iv no 11-12, p. 618-624, tabl.
Sauger L. ; Genuyt G. - Essai de fumure de l’arachide (formule et dose d’un engrais
NPK). L’Agro. Trop. (Nogent s/M) 1949, vol. Iv no 5-6, p. 301-310.
Bouffi1 F. ; Sauger L. - Première classification des variétés d’arachides de la collec-
tion de M’Bambey. L’Agro. Trop. (Nogent s/M) 1949, vol. IY no 9-10, p. 493-502,
Sauger L. - A propos d’une nouvelle méthode de sélection de l’arachide.
Oléagineux 1950, vol. V; no 10, p. 574-578.
Sauger L. ; Tourte R. - Contribution à la technique des essais culturaux au Sénégal.
Forme et dimensions des parcelles. Nombre de répétitions. L’Agro. Trop. (Nogent
s/M), 1951, vol. VI, no 1-2, p. 29-37.

Sauger L. ; Bono M. - Sélection rapide des plantes allogames. Un essai de sélec-
tion généalogique sans autopollinisation artificielle sur mil pennisetum. L’Agro.
Trop. (Nogent s/M), 1955, vol. VIII, no 6, p. 614-638.
Sauger L. ; Tardieu M. - La collection des ricins de Bambey. Ann. du CffA Bambey
au Sénégal, 1953. Bull. agro. STAT (Nogent s/M), 1954, no 11, p.lOl-110.
Sauger L. - Marche suivie à Bambey pour l’amélioration de l’arachide par hybrida-
tion. Bull. du CRA Bambey, 1954, no 10-11, p. 104-114.
Sauger L. - Méthode de délimitation des zones d’adaptation des lignées sélection-
nées d’arachides au Sénégal. L’Agro. Trop. (Nogent s/M), 1954, vol. VII no 1, p.
21-27.

Sauger L. ; Catherinet M. ; Durand Y. - Contribution à l’étude de la rosette chloro-
tique de l’arachide. Ann. du CRA Bambey, 1954. Bull. agro. STAT (Nogent s/M),
1956, no 13, p. 163-180.
.Catherinet M. ; Sauger L. ; Tardieu M. - Perspectives nouvelles pour la lutte contre
la rosette de l’arachide. Ann. du CRA Bambey no 12, 1954, p. 99-104. Bull. du
CRA Bambey, n”l2, 1954, p. 79-87.

Sauger L. - Un problème d’amélioration des variétés d’arachide : la richesse en
huile. Bull. agro.STAT (Nogent s/M), 1955, no 12, p. 137-144.
Sauger L. - Les introductions de plantes dans la république du Sénégal. G&&ica
Agraria (Pavia) 7963, vol, XVII, fasc. 4, p, 227-229. Communication présentée à
la réunion technique sur la prospection et l’introduction des plantes, Rome, 1 O-20
juillet 1961.
Sauger L. - Propositions pour la constitution en Afrique de réserves de gènes pour
l’arachide cultivée (Arachis hypogaea L.). Bambey, IRAT/CNRA, 1965, 3+(5) p.
Communication présentée à la lère réunion technique FAO sur l’amélioration de
la production des légumes et des légumineuses à grains en Afrique. Dakar, 18
24 janvier 1965.
Sauger L. - Compte rendu de la réunion du Groupe consultatif ad hoc des agricul-
teurs d’Afrique : a/s projet de conférence sur les priorités à accorder à la
recherche agronomique en Afrique occidentale. Université du Ghana. Faculté’
d’agriculture. Accra, 30-31 mars 1967.
76
Braud M. ; Sauger L. - Rapport de mission à Ceylan (8 février-6 mars 1967). Paris,
IRCT, 1967, 113 p.
Braud M. ; Sauger L. - Rapport de mission en Inde (8-19 mars 1967). Paris, IRCT,
1967, 15 p.
Sauger L. - Conclusions du colloque sur les priorités de la recherche agronomique
sur le développement économique de l’Afrique. Abidjan, 5-11 avril 1968. Bambey,
IRATENRA, 1968, 61 p.
Sauger L. - Stratégie de recherches nationales pour le développement des cultures
vivrières au Sénégal. Bambey, IRATENRA, 1969,8 p. Communication présentée
à : Seminar on national policies and strategies for the development of trop pro-
duction in West Africa. Ford Foundation. IITA, Ibadan, 20-30 janvier 1970.
Sauger L. ; Tourte R. - Politique de recherches en vue du développement
agricole en Afrique. J. of the Association for the advancement of agric. SC. in
Africa.
1972, vol. /, no 2, p. 82-90. In : Conference on agricultural research and
production in Africa. Addis Abeba, 29 août - 4 septembre 1971.
Sauger L. ; Tourte R. - Propositions de I’IRAT sur les grandes orientations de
recherche agronomique au cours du IV ème plan de développement du Sénégal.
Bambey, IRATENRA, 1973, p. 255-260. Journées d’études sur la recherche et la
vulgarisation, 8-13 janvier 1973, Rufisque (Sénégal).
Sauger L. - Quelques bases technologiques de l’agriculture pluviale dans l’Afrique
tropicale sèche de l’Ouest. Communication à International expert consultation
on the uses of improved technnology for food production in rainfed areas of
tropical Asia. Hyderabad Khon Kaen Kuala Lumpur, 24 novembre - 13 décembre
1974.

Aubin J. P. ; Sauger L. - Conditions governing rice culture in the Senegal river valley.
In : Expert consultation on the mechanization of
rice production. Ibadan, FAO-
UTA, 10-14 juin 1975. Bambey, IRATKNRA, 1975.
Sauger L. - Sorgho, mil, maïs : situation de la recherche en Afrique de l’Ouest fran-
cophone. Bambey, CNRA, 1976,13 p. Conférence sur la Recherche et le Déve-
loppement dans le domaine des céréales vivrières cultivées en milieu aride.
Ouagadougou (Burkina Faso), 8-9 janvier 1976.
Sauger L. - Rapport sur la consultation d’experts sur les stratégies de Formation à
la gestion de la recherche en Afrique.
FAOKIEPA-ILCA, Addis Abeba, 12-16
décembre 1983. GERDAT, décembre 1983.

A c h e v é d ’ i m p r i m e r
sur les presses de l’imprimerie Saint-Paul
Angle rues El Hadj Mbaye GuBye (ex Sandiniéry) / Dr Thèze
D A K A R
Octobre 1999