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Soc. r. belge Ent. 3.5 (1992): 471-475
Observations sur le développement de
Tribolium castaneum Herbst. sur mil
(Pennisetum typhoïdes L.), en fonction
du taux de brisure dans le substrat
par D. SECK 1,2 , B . SIDIBÉ~ & A . FALL]
’ Institut Sénégalais de Recherches Agricoles, Laboratoire d’Entotnologie B.P.17, Nioro du Rip,
Sénégal.
2 Unité de Zoologie géoérale et appliquée, Faculté des Sciences agronomiques, B-5030 Gernbloux,
Belgique.
Résumé
Le développement de Tribolium castaneum HERBST. a été étudié en conditions
contrôlées, sur graines de mil entières ou brisées à 25 et 50%. L’augmentation du
taux de brisure dans le substrat réduit la mortalité larvaire ainsi que la durée du
cycle de développement de 1 ‘insecte et entraîne une plus grande production de larves
et d’adultes par kilogramme de substrat. Ces résultats permettent d’expliquer pourquoi
I’infestation de T. castaneum est plus souvent notée sur le mil battu, conservé en
sacs, que sur les épis entiers stockés dans les greniers traditionnels.
Introduction
Tribolium castarzeutn HERBST. est un ravageur des denrées stockées, surtout con-
nu dans les régions tropicales et subtropicales. Sa biologie a été étudiée par plu-
sieurs auteurs: HOWE (1956, 1965) SOKOLOF (1972, 1974, 1977).
L’insecte est considéré comme un ravageur secondaire strict (GAHUKAR, 1976),
causant d’importants dégâts sur les stocks de mil battu dans toute la zone sahé-
lienne (ROORDA et al., 1982). Cette préférence du déprédateur pour le mil battu a
aussi été notée au Sénégal, où son incidence est pratiquement nulle sur les épis
entiers de P. typhoides stockés en greniers traditionnels (SECK, 1983).
Pour les besoins de la commercialisation de la céréale dans les marchés lo-
caux, le battage mécanique jadis rare dans les campagnes, devient aujourd’hui de
plus en plus répandu. Il est assuré par un matériel itinérant appartenant à de
riches commerçants ou à des marabouts mais tenu par des agents souvent mal
formés. Le mauvais réglage des machines peut ainsi entraîner un taux de brisure
du grain de l’ordre de 10% (M’BENGUE, 1986).
Le but de ce travail est d’évaluer expérimentalement l’incidence d’un taux de
brisure croissant dans le substrat, sur le développement et les dégâts de T. casta-
neum sur mil.

1.
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Matériel et méthode
Assainissement
500g de mil (variété Souna-3) ont été d’abord gardés au congélateur pendant 72 heures.
près un
&quilihcage à la tempSrature
4
ambiante du laboratoire pendant 12 heures, les graines ont été séchées
au soleil pendant X heures.
Préparation des substrats
Avec des quantités de 300g de mil assaini légèrement broyé au moulin électrique, 3 types de subs-
trats sont ptipatis: un substrat à base de grains entiers (type I), un avec 25% (type II) et le1 dernier
avec 50% (type III) de grains baisés en poids respectivement.
!
Méthode expérimentale
!
20g de chaque substrat placés en 4 IGpétitions dans des boîtes de Pétri stériles de diamètte 9 cm
et de hauteur 1 cm, sont infestés avec 10 adultes de T. castaneum âgés de 2 à 4 jours.
qix jours
plus tard, les insectes sont reti& et les boîtes plaoées en salle d’élevage, dans les conditions! moyen-
nes de température 30,6”C et d’humidité relative de 65.4%. Les adultes utilisés proviennefit d’une
souche de l’insecte, maintenue au laboratoire pendant plusieurs générations sur un substrat à /base de
mil de la même variété testée.
I
Paramètres observés
!
Cinq paramètres ont été considétis: 1) la densiti larvaire (dl): nombre
trat; évaluée au moment du retrait des adultes, soit 10 jours après
sité des adultes (da): nombre d’adultes Fl par kg de substrat; 3) le
cette Fl; 4) la dutie du cycle de développement de l’insecte comptée de I’infestation à
50% de la Fl; 5) le pourcentage de perte en poids, calculé par rapport au poids initial.
I
Résultats et discussions
I
/

Les résultats des tableaux 1 et 2 montrent que l’infestation et dans une1 moin-
dre mesure la perte de poids, sont plus élevées sur les substrats avec des’ grains
brisés que sur celui à base de grains entiers; ceci d’autant plus que la pro ortion
de graines brisées dans le substrat augmente. En effet, de 4150 sur le
ubstrat
de type 1, la dl est de 9255 sur le substrat de type 2 et 14100 sur celui
e type
3. Dans le même temps, la da passe de 3290 sur le substrat de type 1
7625
et 12850 respectivement sur les substrats de types 2 et 3.
i
A l’inverse, on note que la durée moyenne du cycle de développem $nt (35
jours pour le substrat de type 1) est de 7 jours plus courte pour les substbats de
types 2 et 3.
l
Tableau 1. Développement de Tribolium castaneum HERBST. sur 3 substrats à base de mil BPennise-
tum tvnhoïdes L.)
Taux de brisure
Nbre de larves
Nbre
Dl&
dans le substr.
/kg de substrat
d’aclultes/kg
du cycl
(J)
(X)
(dl)
substr. (da)
Moyenne ariat.
i
0
4150
3290
25
9265
1625
50
14100
12850

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Tableau 2. Pourcentage de perte en poids et pourcentage de mortalité larvaire de Tribolium casta-
neum HERBST. sur substrats à base de mil.
Taux de brisure
Perte en poids
mortalité*
dans le substrat
après 45 jours
larvaire
46
x
0
5,1
2 0
25
9 s
17,l
50
9,3
9
* dl da
__________
dl
.N
i
eB 5(;if

4(
31
-0% brisure
c---.0 25 ‘1.
A....A 50 ‘1.
Fig. 1. Relation entre le taux de brisure dans le Substrat et l’échelonnement de l’émergence de Tribo-
lium castaneum HERBST sur mil.
_-...
-
---

. .
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/
Les courbes d’émergence (Fig. l), montrent que les maxima de sortie ~ notés
sur les substrats de types 2 et 3, coïncident dans le temps mais que l’a n9 plitude
du second est environ double de celle du premier. Cependant, tous de* sont
plus précoces et surtout, plus importants que celui enregistré chez le substrat de
type 1.
Il résulte également du tableau 2, que la mortalité larvaire évolue en sens in-
verse de la proportion de brisure dans le substrat. Elle passe de 9 % isur le
substrat de type 3, à 17 % sur le substrat de type 2 et 20 % sur celui de type
1. Ceci confirme le statut écologique de T. castaneum, déjà signalé comme un
ravageur de type secondaire (GAHUKAR,
1976).
Cependant les niveaux d’infestation larvaire et adulte notés sur le substrat de
type 1 (Tab. 1) sont suffisants pour nuancer l’idée de BIRCH (1947), ~ANIELS
(1956), ROORDA et ai. (1982) selon laquelle, l’insecte est incapable d’attaquer les
grains entiers. En effet, l’évolution des densités larvaire et imaginale en fbnction
du taux de brisure, montre une croissance des populations avec un facteur de
multiplication d’environ 2, quand on passe du substrat de type 1 à celui de type
2, alors que ce facteur n’est que de 1,5 entre le substrat de type 2 et celui de
type 3.
Cette stagnation du pourcentage de perte en poids entre les substrats de iypes 2
et 3, malgré leurs niveaux d’infestation très différents, peut être expliquée i par la
méthode, adoptée ici, d’évaluer de la perte de poids par rapport au substrat de
départ, laquelle ne tient pas compte des éventuelles variations de la teneur en eau
de la denrée.
En effet, la da étant de 1.7 fois plus forte sur le substrat de type 3 que sur
celui de type 2, on peut supposer que la respiration accrue de la populatio
d’in-
secte, plus importante dans le premier cas, augmente d’autant la teneur
n e a u
du substrat 3 au point de masquer la perte de la matière consommée
ar les
,L
insectes qui se développent au détriment de ce substrat. Ce phénomène Ipermet
d’ailleurs de montrer que les pertes indiquées dans le tableau 2, ne sont que des
sous-estimations des pertes réelles résultant du développement de T. caîtaneum
dans les conditions étudiées.
Conclusions
~
Ces résultats montrent l’incidence favorable de la présence de grains brisés sur
le développement et I’infestation de T. castaneum sur mil et permettent de tirer
deux conclusions pratiques: 1) L’incidence faible du ravageur sur les épis ‘de mil
stockés dans les greniers traditionnels, est liée à la faible proportion voire ’ l’ab-
sence de grains brisés dans ces conditions; 2) Le substrat de type 3, campe tenu
de son faible taux de mortalité larvaire, de la courte durée du cycle de 1 #insecte
:
et de la da de 12850 qu’il a permis d’obtenir, peut être retenu comme 4ne ex-
cellente possibilité de milieu d’élevage en laboratoire pour Tribolium castan#zm en
zone sahélienne.
Références
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DANIEL& N. E., lRS6. - Damage and reproduction by the fleur beetles, Tribolium confusu~
and L
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GAHUKAR, R. T., 1976. Incidence économique <des principaux insectes ravageurs des denTes stoc-
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M’BENGUE, H. M., 1986. - Les équipements et matériels de traitement post-kolte des cémales au
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ROORDA, F. A., 1982. - Laboratory observations on the development of Tribolium castaneum
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en milieu paysan au Sénégal. Mém. fin d’études, Fac. Sciences Agronomiques, Gembloux (Belgi-
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SOKOLOF, A., 1972, 1974, 1977. The bioloav of Tribolium col. 1.111. Clarendon Press, Oxford.